2007

A l’affût de la main anarchique...

anarchique
Des neurologues et des chercheurs de l’UNIGE et des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) ont pour la première fois observé ce qui se passe dans le cerveau d’un patient atteint du syndrome de la main anarchique.

Ce trouble neurologique rare a été diagnostiqué en consultation aux HUG. Grâce à la neuroimagerie fonctionnelle de l’UNIGE, les scientifiques sont ensuite parvenus à identifier l’activation isolée du cortex moteur primaire. Les résultats de cette exploration ouvrent de nouvelles perspectives de compréhension d’autres affections neurologiques. Ainsi des «membres fantômes» ou de certains symptômes de la schizophrénie, comme ceux où les patients ont l’impression d’être guidés par autrui.

Quand, dans le cadre de sa consultation aux HUG, le docteur Frédéric Assal repère quelqu'un porteur de ce syndrome rare - la «main anarchique» - il contacte le prof. Patrik Vuilleumier et Sophie Schwartz au Centre de neuroscience de l’UNIGE. Ensemble, ils cherchent à en savoir davantage sur le mécanisme de cette manifestation étrange, presque toujours associée à des lésions cérébrales.

Jeux de mains 

Dénommé aussi «syndrome de la main étrangère» ou encore de la «main capricieuse», ce dérangement fait partie de ceux que les neurologues répertorient comme «mouvements involontaires complexes». Il consiste en des gestes des doigts et de la main, parfois accompagnés de saisie d’objets, d’agrippement des habits voire de conflit avec l’autre main qui est alors repoussée. Ceux-ci sont effectués avec une précision troublante pour l’entourage, parce qu’ils donnent l’impression d’intentionnalité. Leurs auteurs prennent plus souvent conscience des conséquences de ces mouvements que des gestes eux-mêmes.

Dans la tête de la main

Dans ce cas précis, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) a permis de mesurer l’activité de certaines zones cérébrales chez un patient dont la main persistait à refuser d’obéir. Différentes conditions ont alors été examinées : le mouvement volontaire, le repos et le mouvement anarchique. Les neurologues ont comparé ces trois états et ont particulièrement identifié une activation isolée du cortex moteur primaire survenant lors des mouvements involontaires.

Hypothèse et perspectives

Cette collaboration entre l’UNIGE et les HUG débouche sur une nouvelle hypothèse. Puisque la zone du cortex moteur primaire s’active normalement en cas d’activité motrice volontaire, il est logique qu’elle s’active aussi lors de mouvements involontaires. Il est beaucoup plus surprenant, par contre, que cette zone s’active isolément, sans que la conscience en soit avertie. Au cours d’un mouvement voulu et conscient, d’autres régions cérébrales sont activées, et ceci dans les deux hémisphères.

Ce phénomène d’activation motrice isolée à l’origine de la main étrangère découlerait d’une lésion cérébrale située sur le lobe pariétal, ce dernier jouant un rôle primordial dans l’intention et la conscience du mouvement. Ce serait donc en quelque sorte un manque d’«inhibition» du lobe pariétal sur le cortex moteur primaire qui causerait la crise spontanée de main capricieuse.

Si, d’une manière générale, les territoires de la motricité inconsciente restent peu explorés même à l’ère de l’IRM, les scientifiques ont mené là une incursion fertile pour la connaissance d’un syndrome particulier et pour celle d’autres manifestations encore méconnues, comme les «membres fantômes» ou les gestes effectués «sous influence» accompagnant certaines formes de schizophrénie.

> communiqué de presse

16 octobre 2007
  2007