2018

Pourquoi une division cellulaire précoce favorise les cancers

Des chercheurs de l’UNIGE ont découvert comment des gènes responsables de la division cellulaire, une fois mutés, dérèglent le processus de réplication du génome et favorisent l’apparition de tumeurs.

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Les machineries de réplication (en vert) et de transcription (en brun) sont actives simultanément sur les gènes porteurs d’une origine de réplication, ce qui engendre des collisions et des cassures de l’ADN. © UNIGE

 

L’accumulation de mutations dans le génome humain est à l’origine des cancers et de l’apparition de résistances aux traitements. Les gènes Cyclin E et Myc sont actifs dans le contrôle de la division cellulaire. Lorsqu’ils sont amenés à muter, sous l’action d’un agent cancérigène par exemple, ces gènes poussent les cellules à débuter la réplication de leur ADN de manière précoce. Cette division anormale des cellules provoque dès lors la survenue d’une tumeur. Pourquoi ? Des biologistes de l’Université de Genève (UNIGE) montrent que l’entrée en réplication précoce du génome engendre des collisions moléculaires sur l’ADN et provoque de nouvelles mutations. Ces résultats, à lire dans la revue Nature, pourraient être exploités dans la recherche de nouvelles méthodes thérapeutiques.

 

Lorsqu’une cellule se divise en deux cellules filles, elle doit répliquer l’ensemble de son génome et en transcrire une partie pour fabriquer de nouvelles protéines. La division cellulaire est notamment régulée par des gènes spécifiques, dont les proto-oncogènes Cyclin E et Myc. Leur surexpression ou mutation en oncogènes, suite à l’exposition des cellules à un agent cancérigène par exemple, entraîne une prolifération incontrôlée des cellules et favorise l’apparition de cancers. «Nous voulions comprendre comment surviennent les nombreuses mutations qui s’accumulent dans les cellules activées par les oncogènes Cyclin E ou Myc, qui sont très fréquemment impliqués dans les cancers humains», explique Thanos Halazonetis, professeur au Département de biologie moléculaire de la Faculté des sciences de l’UNIGE.


La réplication doit s’amorcer entre deux gènes


Afin de répliquer tout son ADN, soit près de 6,4 milliards de paires de nucléotides en quelques heures seulement, la cellule organise la préparation de ce processus à des milliers de sites sur chaque chromosome en même temps. La position et l’espacement de ces sites, appelés ‘origines de réplication’, doivent être contrôlés afin que la réplication se déroule de façon harmonieuse et efficace.


Les chercheurs de l’UNIGE ont développé une méthode permettant d’identifier les origines de réplication sur l’ensemble des chromosomes. Elle consiste à isoler l’ADN nouvellement synthétisé par les cellules qui viennent d’entrer en phase de réplication et de le séquencer, afin d’identifier sur les chromosomes les sites où la réplication a débuté. Cette méthode, spécifiquement développée pour les cellules humaines, offre des degrés de sensibilité et de résolution élevés.


«Dans un premier temps, la cellule repère toutes les origines de réplication potentielles avec un marqueur moléculaire. Nous avons découvert que dans les cellules normales, les origines de réplication  qui présentent un danger sont éliminées par la suite. C’est le cas de celles qui sont situées à l’intérieur d’un gène, alors qu’elles devraient se trouver hors des gènes pour que le message intégral de chaque gène soit conservé», détaille Morgane Macheret, chercheuse au Département de biologie moléculaire de l’UNIGE et première auteure de l’article.


Quand les cellules sautent des étapes


L’activation des oncogènes Cyclin E ou Myc, quant à elle, pousse les cellules à débuter la réplication de leur ADN de manière précoce, sans avoir eu le temps d’éliminer toutes les origines de réplication présentes au cœur des gènes. «Les machineries de réplication et celles de transcription sont donc actives simultanément sur les gènes porteurs d’une origine de réplication, ce qui engendre des conflits. Nos analyses démontrent que ces conflits provoquent des cassures de l’ADN, des réarrangements chromosomiques, et donc des mutations», révèle Thanos Halazonetis.


Ces résultats expliquent-ils l’instabilité génomique présente dans différents types de cancers? Afin de répondre à cette question, les biologistes ont étudié une liste de plus de 500’000 réarrangements chromosomiques déjà caractérisés dans un large éventail de tumeurs. «Nous avons observé que ces défauts chromosomiques sont particulièrement fréquents dans les zones de conflits que nous avons décrites. Nous espérons que la découverte du mécanisme expliquant, en partie ou totalement, la genèse de cette instabilité génomique permettra à terme de développer de nouvelles stratégies thérapeutiques», conclut Morgane Macheret.

Une vidéo montrant la réplication de l’ADN est disponible ici.

21 févr. 2018

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