UNIVERSITÉ DE GENÈVE

FACULTÉ DES LETTRES

Les sept passions de prudence :

(Peristephanon 2. 5. 9. 11-14)
Introduction générale et commentaire

Thèse
présentée à la Faculté des Lettres de l'Université de Genève
pour obtenir le grade de Docteur ès-Lettres

par

Pierre-Yves FUX

sous la direction du
Pr Philippe Mudry

Thèse n° L. 517

Genève, 2003


Veritas coram potestates liberos reddit et uim dat martyrii.

      Mieux faire connaître une 'Légende dorée' écrite durant l'Antiquité tardive dans les mètres lyriques d'Horace : tel est l'objectif premier de ce Commentaire de sept poèmes du Peristephanon de Prudence, précédé d'une Introduction qui considère d'une part le contexte dans lequel fut produit ce recueil (chapitre 1), d'autre part, sa transmission et sa réception, jusqu'à nos jours (chap. 3). Pourquoi sept pièces sur les quatorze que comprennent les éditions modernes, et pourquoi les poèmes 2, 5, 9 et 11 à 14 ? Là intervient la 'thèse' nouvelle de cet ouvrage, celle de l'existence primitive d'un noyau de sept Passions, constituant un canon de martyrs (chap. 2).

      Deux éléments m'ont amené à élaborer cette théorie : d'une part, l'examen détaillé des divers poèmes du Peristephanon actuel, avec leurs datations respectives et leurs rapports mutuels ; d'autre part, le fait étonnant d'un désordre au sein du recueil (et dans la tradition manuscrite), alors que le premier recueil lyrique de Prudence (le Cathemerinon) et même l'ensemble de son oeuvre présentent un ordonnancement remarquable des pièces qui les composent. Or, sept poèmes, les plus anciens, portent systématiquement le titre Passio, alors que les pièces plus récentes ont celui d'Hymnus - sans raison apparente. L'examen de ces titres (lexique, syntaxe) et de leur transmission dans une trentaine de manuscrits permet de conclure à leur très probable authenticité. Il n'y aurait là que fantaisie ou changement d'avis de l'auteur, si ces sept poèmes n'avaient pas certains traits communs autres que leur ancienneté : des caractères propres les faisant ranger en deux voire trois 'sous-groupes' bien identifiables, et surtout, le fait que les martyrs célébrés sont pour la plupart illustres et célébrés universellement (contrairement à ceux des Hymni). Les Passiones forment un ensemble comprenant des 'types' de martyrs, un 'canon' non seulement thématique mais aussi formel - rien de tel n'apparaît dans les Hymni. Cette thèse aboutit à proposer une reconstitution de ce qu'a pu ou dû être ce recueil primitif.

      Paru en 2003 en tant que volume 46 de la collection PARADOSIS, Études de littérature et de théologie anciennes, ce texte correspond à la thèse présentée à la Faculté des Lettres de l'Université de Genève pour l'obtention du grade de Docteur, et soutenue le 12 avril 1997 (mention très honorable). Pour la clarté de la consultation, une traduction des poèmes commentés a été ajoutée ; consécutivement, le commentaire a pu être abrégé. Quelques autres aménagement ont été opérés, y compris des compléments, partiels, destinés à actualiser la bibliographie. La pagination de la présente version est identique à celle de la version imprimée, dont les originaux prêts à la reproduction avaient été établis par l'auteur.

      L'essentiel de la théorie des 'sept Passions' avait été élaboré durant une nuit de février 1992, mais les pages qui suivent sont le produit de recherches, en partie interdisciplinaires, faites essentiellement entre 1990 et 1995. Ces pages ont été rédigées surtout à l'occasion de voyages et séjours à l'étranger : Scuola Normale Superiore de Pise (bourse d'échange de l'Université de Genève) ; Paris, École Pratique des Hautes Études, ainsi qu'École Normale Supérieure (rue d'Ulm) et Université Paris IV-Sorbonne (bourse de la Société académique) ; Institut suisse de Rome, avec études à la Scuola Vaticana di Paleografia ainsi qu'au Pontificio Istituto di Archeologia Cristiana (bourse du Fonds national de la recherche scientifique, qui a également appuyé l'impression de cet ouvrage). Il sied de remercier ces institutions et qui m'ont plus brièvement accueilli, qu'il s'agisse des collèges Wadham et Christ Church d'Oxford, de l'Institut de Recherche sur l'Histoire des Textes (Paris) ou de l'Institut des Études Augustiniennes (Paris, avec des remerciements au P. Georges Folliet). L'expression de ma gratitude va également aux conservateurs des collections dont j'ai pu consulter des manuscrits 1 .

      Heureux qui, comme Ulysse a fait un beau voyage... Cette thèse qui m'a mené dans les plus belles bibliothèques d'Europe et jusque dans certaines catacombes romaines difficilement accessibles fut un beau voyage, mais la gratitude qu'il inspire ne va pas qu'à des ports d'attache ou de passage, mais surtout à des personnes qui furent et sont des amis, des maîtres, parfois l'un et l'autre. Je tiens à adresser de vifs remerciements aux membres du jury de thèse : au prof. Mudry, directeur, pour sa confiance, ses encouragements et son engagement ; au prof. Tilliette, président, qui a apporté un soutien bienveillant et permanent ; au prof. Callu, auprès duquel la 'thèse' des sept Passions a vu le jour et connu sa première mise à l'épreuve, dans un mémoire de D.E.A. de l'École Pratique des Hautes Études ('Méthodes de l'histoire et de l'archéo-logie') ; au prof. Tränkle, enfin, dont plus d'un commentaire a été repris dans les pages qui suivent. L'Université de Fribourg, au sein de laquelle j'ai pu pour la première fois présenter ce travail (Groupe suisse d'études patristiques) et tout particulièrement le prof. Wermelinger m'ont apporté un appui précieux pour la publication de cet ouvrage. Bien auparavant, l'enseignement reçu au sein de la Faculté des Lettres de l'Université de Genève, au-delà de la seule unité de latin 2 , a beaucoup apporté à ce travail, à bien des égards : qu'un hommage soit rendu ici à MM. Hurst, Borgeaud, de Muralt, de Pury et Leukart, qui furent plus que des 'professeurs', à l'instar de M. Callu et aussi de M. Petitmengin, alors responsable de la bibliothèque de l'École Normale Supérieure, qui m'a initié à la paléographie latine. Je tiens également à adresser un hommage posthume au prof. Reverdin, dont le soutien fut indéfectible. Merci aussi à Florence Bourgne, qui m'a introduit au monde d'Oxford et de Cambridge, et mes remerciements très sincères aux familles Fusco, Kolde, Andrist, Solari, et bien sûr à ma propre famille.

      Sur ce, encore deux voeux : celui d'avoir contribué par ce Commentaire à ce que Prudence, l''Horace chrétien', soit davantage étudié dans les lycées ou les universités - et celui de prolonger ou de voir prolongé un jour, par le commentaire ou la traduction, ce travail au reste du Peristephanon voire aussi au Cathemerinon.

      Tokyo, octobre 2002 et octobre 2003


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