Les dieux: L'homme racinien est agi par des forces qui le dépassent. Premier agent de la fatalité: les dieux (ou Dieu, dans Athalie), mystérieux, redoutables et vengeurs.
L'ascendance: Autre aspect du déterminisme: l'hérédité; les enfants paient pour les fautes d'un ancêtre ou d'un parent. Exemple La Thébaïde.
Le passé: Le temps racinien est dominé par le passé; tout est joué à l'avance; on n'a pas la liberté de construire un présent ni un futur indépendants. Exemple: Andromaque.
La passion: Il existe aussi une fatalité intérieure: puissance destructrice de passions comme la haine, la jalousie et surtout l'amour ― un amour absolu, pulsionnel, qui se manifeste par la violence. La relation amoureuse est souvent celle d'un bourreau et d'une victime, l'un souffrant autant que l'autre.
Illusion d'affranchissement: Quelques personnages, comme Pyrrhus, Titus, se croient plus forts que le destin et tentent de se libérer. Mais leur volonté d'émancipation est vouée à l'échec.
Pessimisme et jansénisme: Le passage du héros admirable de Corneille au héros pitoyable de Racine témoigne d'une mutation idéologique. Emprise de la pensée janséniste: défiance envers l'homme, coupable et impuissant. Dieu caché et prédestination.
L'opacité des êtres: En dépit de la clarté de la langue, le discours se heurte souvent à l'impénétrabilité du monde et la duplicité des signes. Les autres cachent leurs sentiments. Le moi a même du mal à voir clair dans sa propre conscience. Il ne découvre en soi que ténèbres ou désordre.
Le lieu de l'action: Espace abstrait et replié sur lui-même, symbolisant la prison et la solitude du héros tragique, mais aussi l'imminence de la mort. Contraste avec le monde extérieur, où règnent la vie, la liberté; seuls les personnages non tragiques y accèdent.
Abstraction: Peu d'événements, rien de spectaculaire. L'action est d'ordre psychologique. Le personnage racinien est trop absorbé par ses émotions pour agir sur le monde: rôle réduit du politique. Matière du mythe, qui donne à l'action une valeur universelle.
Roman psychologique: Comme la tragédie, le roman connaît aussi, autour de 1660, une profonde mutation. Aux grandes aventures héroïques, on préfère désormais les récits courts, qui approfondissent l'analyse du sentiment et scrutent les tourments de la vie intérieure. Nombreux parallèles possibles entre La Princesse de Clèves (1678) et Racine: ravages de la passion; misère de la destinée humaine; image pessimiste des mécanismes sociaux; opacité des consciences; la vraie vie est intérieure; sobriété et rigueur de la langue.