Méthodes et problèmes

L'autoportrait

Natacha Allet, © 2005
Dpt de Français moderne – Université de Genève

I.2.2. Les limites de la métaphore picturale

Les limites heuristiques de la métaphore picturale (se peindre soi-même) sont cependant vite atteintes. L'autoportraitiste ne se décrit pas comme le peintre représente le visage et le corps qu'il perçoit dans son miroir – pour les raisons suivantes: d'une part, et cela va de soi, la linéarité de l'écriture alphabétique ne permet pas d'embrasser une figure d'un seul regard; d'autre part, l'appréhension physique ne nécessite pas les mêmes médiations que l'appréhension morale, le corps est d'un abord plus immédiat que l'âme, il est offert à la vue, il se laisse cerner dans les limites d'un cadre, à la différence de l'âme qui n'a pas d'existence objective et qui se dérobe inévitablement à toute circonscription. En d'autres termes, à la question Qui suis-je?, l'autoportraitiste ne peut pas se contenter de répondre en se décrivant physiquement, ni même en énumérant simplement ses qualités et ses défauts. Au moment de prendre la plume, il commence très probablement par faire l'expérience du vide, de l'absence à soi.

Edition: Ambroise Barras, 2005