Méthodes et problèmes

La perspective narrative

Jean Kaempfer & Filippo Zanghi, © 2003
Section de Français – Université de Lausanne

II. La focalisation interne

II.1. Genette: une approche intuitive

II.1.1. Le point de vue du personnage

Nous envisagerons en premier lieu la focalisation interne parce que c'est par rapport à elle que l'on pourra le plus clairement définir et comprendre les deux autres types de focalisation. Pour Genette, déterminer comment un segment de texte est focalisé revient à savoir où est le foyer de perception (Genette 1983, 43). La réponse est la plus claire en focalisation interne dans la mesure où ce foyer coïncide alors avec le champ de conscience d'un personnage. Autrement dit, il y a focalisation interne lorsque le point de vue est celui du personnage.

(1) [Le palais était] couvert d'une terrasse que fermait une balustrade en bois de sycomore, où des mâts étaient disposés pour tendre un vélarium.
Un matin, avant le jour, le Tétrarque Hérode Antipas vint s'y accouder et regarda. Les montagnes, immédiatement sous lui, commençaient à découvrir leurs crêtes, pendant que leur masse, jusqu'au fond des abîmes, était encore dans l'ombre. Un brouillard flottait, il se déchira, et les contours de la mer Morte apparurent. L'aube, qui se levait derrière Machaerous, épandait une rougeur.

Flaubert, Hérodias

Dans les premières lignes de cet extrait, le narrateur décrit le lieu où va apparaître le protagoniste. Il n'y a pas de point de vue particulier. À partir de Les montagnes..., en revanche, toute l'information qui nous est donnée est déterminée par le regard d'Hérode. C'est par rapport à lui que s'organisent les premiers plans et les arrière-fonds; de même, la progression temporelle est orientée à partir de son arrivée sur la terrasse, avant le jour.

Edition: Ambroise Barras, 2003-2004