Méthodes et problèmes

La mise en scène du discours

Jean-Pierre van Elslande, © 2003
Dpt de Français moderne – Université de Neuchâtel

I.4. La mauvaise réputation de la rhétorique

Aujourd'hui, un tel empire peut paraître lointain. Il a en tout cas perdu de sa superbe. La rhétorique a mauvaise réputation. L'expression "c'est de la rhétorique", appliquée à un discours qu'on entend discréditer, en témoigne. Pour beaucoup de gens, la rhétorique n'est pas une discipline; elle ne fait que renvoyer à une forme creuse, à une coquille vide.

Au mieux, la rhétorique désigne dans le langage courant un répertoire de figures de style aux noms compliqués. Au pire, elle est synonyme de manipulation, d'hypocrisie, de mauvaise foi.

En réalité, le soupçon de mauvaise foi et d'artificialité qui pèse sur la rhétorique est fort ancien, puisqu'il remonte aux origines mêmes de la rhétorique. Ainsi, dans le Gorgias, Platon définit déjà la rhétorique comme un art élaboré du mensonge. Pour Aristote, la rhétorique n'est pas immorale, mais amorale. Autrement dit, elle constitue un outil qui peut être utilisé à bon ou à mauvais escient.

De leur côté, Cicéron et Quintilien éprouvent tous deux le besoin de préciser que le véritable orateur doit nécessairement être homme de bien et que la véritable éloquence doit aller de pair avec la conscience morale.

En quoi la culture de l'Antiquité classique diffère-t-elle alors de la nôtre?

Edition: Ambroise Barras, 2003-2004