Les discours

Discours du recteur
M. Jacques Weber >>>

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Laudatio pour le Prix
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Allocution du recteur, M. Jacques Weber

Mesdames, Messieurs,

Afin d’assurer une certaine continuité, mon message débutera par la conclusion de celui de mon prédécesseur, l’ancien Recteur André Hurst, lors de la cérémonie du Dies de l’an dernier, le 6 juin 2006:

«Enfin, il faut avoir le courage de le dire : la confiance doit renaître au-delà des événements qui ternissent en ce moment l’image de l’Université de Genève. Il y faudra de l’endurance. Nous avons une pente à remonter, ce n’est pas le moment de baisser les bras. Il s’agit bien plutôt d’instaurer dans la durée et dans l’ouverture la plus totale un dialogue avec toutes celles et tous ceux qui voudront apporter leur pierre à l’édifice.»

Depuis exactement une année, et le moment où ces paroles pleines de sens ont été prononcées, beaucoup d’eau s’est écoulée sous les ponts. De l’eau trouble tout d’abord, mais qui s’est éclaircie au cours des mois. L’édifice a été consolidé, l’image de l’Université améliorée, la pente remontée. Je pense pouvoir dire que les objectifs qu’avait fixés le Conseil d’Etat à notre Rectorat transitoire 2006-2007 ont été atteints.

En effet, la continuité des projets engagés a été assurée, l’efficacité de la gestion renforcée par une rigueur améliorée, la confiance entre l’Université et la Cité grandement restaurée. Le bilan est donc positif et je n’insisterai pas plus sur ce point.

N’oublions pas en effet que l’Université est une composante indispensable et inaliénable du patrimoine de la République et Canton de Genève. Le savoir qu’elle crée et transmet est un élément essentiel de la culture de notre Cité, les connaissances auxquelles elle conduit ont entre autres pour but de rendre chaque citoyen plus libre et plus responsable, ainsi que de permettre l’organisation d’une vie commune plus juste et harmonieuse.

Peut-être que ce message vous paraîtra légèrement pompeux, mais j’ai cru bon de le rappeler au moment où notre société est à la recherche de nouvelles valeurs et de nouveaux repères. Réjouissons-nous donc en ce jour de Fête de retrouver une institution ne figurant plus à la une des médias pour des faits condamnables, dans une sorte de feuilleton digne de Dynasty, mais qui peut regarder fièrement devant elle et préparer dans la sérénité la célébration en 2009 du 450ème anniversaire de sa fondation.

A l’heure du bilan de l’année écoulée, auquel on ne peut échapper, relevons que c’est dans un climat particulièrement difficile que notre Rectorat est entré en fonction en septembre dernier. A cette situation défavorable, sont venus rapidement s’ajouter d’autres vents contraires, tels une coupure de plus de 11 millions de francs à effectuer dans le budget 2007, la double décision de fermeture de l’Institut d’architecture et de la création d’une structure redimensionnée consacrée à l’étude de l’environnement, énième tentative du genre, et j’en passe. En outre, nous avons dû très vite nous atteler à la mise sur pied d’un institut universitaire de formation des maîtres des niveaux primaire et secondaire, tâche d’une ampleur certaine.

Autre projet d’importance commun à toute la maison : le rapprochement Académie-Administration, permettant in fine de supprimer une double hiérarchie pernicieuse à plus d’un titre. Le Rectorat a ainsi pris la décision au début 2007 de placer toute l’administration centrale sous son autorité, ce qui ne va pas sans lui occasionner un travail supplémentaire considérable, mais dont les premiers fruits sont clairement visibles.

Les défis ont ainsi été et sont toujours nombreux. L’occasion était belle de mettre en pratique la fameuse exclamation de d’Alembert « allez de l’avant et la foi suivra » ! Il s’agissait aussi, comme disent les philosophes, de distinguer l’accessoire de l’essentiel. Mais comment procéder lorsque l’accessoire devient rapidement lui-même essentiel, ce qui est souvent le cas dans notre institution. Quoi qu’il en soit, nous allions être rapidement fixés car, selon Camus, «la seule vérité de l’homme est le défi».

Arrêtons-nous donc un instant sur ce qui faisait partie de l’essentiel pour notre équipe rectorale.

Premièrement, comme toutes ses consoeurs, l’Université de Genève vit dans un environnement où la concurrence, locale et internationale, est extrêmement vive ; partout c’est la chasse, même en dehors des périodes d’ouverture, aux meilleurs chercheurs, aux meilleurs enseignants, aux meilleurs étudiants. Pas question de s’y soustraire, même si les règles ne sont à l’évidence pas les mêmes pour tous. Plutarque affirmait que le déséquilibre entre les riches et les pauvres est la plus ancienne et la plus fatale des maladies des républiques. Remplacez républiques par Hautes Ecoles et vous ne serez pas très loin de la réalité. Il faut toutefois concilier cette situation de concurrence avec celle d’une Université que nous voulons largement ouverte, en particulier tous les étudiants doivent y trouver leur place. La nouvelle Loi sur l’Université, sur laquelle je reviendrai, permettra de faire face à cette nouvelle donne en matière de compétitivité.

Deuxièmement, notre institution est confrontée à l’économie du savoir, de l’innovation et de la valorisation scientifique à tout prix. Pourquoi pas ? C’est un défi que nous pouvons relever à condition que les règles de l’éthique soient respectées et que les différents acteurs soient bien conscients de leurs responsabilités vis-à-vis de la société et du citoyen. Beaumarchais disait que « pour gagner du bien, le savoir-faire vaut mieux que le savoir ». Je me permettrai de le paraphraser en disant « pour gagner du bien, le savoir est indispensable au savoir-faire », et je suis sûr qu’il me pardonnera cette adaptation due au passage aux conditions du 21ème siècle. La démarche de notre Rectorat en faveur du maintien, voire du renforcement de la qualité et du rayonnement international de notre Université, s’inscrit dans ce contexte. Il a également fallu mettre en place à cette occasion des outils d’évaluation efficaces et n’entraînant pas de bureaucratisation effrénée.

Troisièmement, le message 2008-2011 aux Chambres Fédérales prévoit, dans sa version actuelle, une augmentation des crédits de 6% par an, avec une priorité délibérée placée sur les fonds alloués en mode compétitif, c’est à dire en particulier ceux du Fonds National de la Recherche Scientifique, au détriment de l’enveloppe accordée aux subventions de base des Universités cantonales. Le problème de l’encadrement des étudiants, spécialement en sciences sociales et humaines, restera donc entier, ce que nous ne pouvons que déplorer. Parmi les autres points forts de ce Message fédéral, qui a au moins le mérite de poser les principes du futur paysage universitaire suisse, citons l’attribution de ressources supplémentaires destinées à l’assainissement de l’offre de prestation des Hautes Ecoles (ce que nos amis d’Outre- Sarine appellent joliment Portfolio Bereinigung), et la mise sur pied de collaborations bilatérales nouvelles entre la Suisse et des pays de l’Est ou d’Asie. C’est dans ce contexte que notre Université a obtenu de haute lutte le statut de Leading House pour les relations avec la Russie, ce que nous pourrions appeler notre datcha russe, et qui ne manquera pas de renforcer notre visibilité et notre crédibilité. A n’en pas douter, notre très bon classement dans tous les rankings des Universités mondiales, qui reflète notre excellence en matière de recherche et d’enseignement n’y est pas étranger.

Enfin, quatrième et dernier point sur lequel nous avons porté nos efforts, la nouvelle loi sur l’Université telle que préparée par la Commission présidée par Madame Ruth Dreifuss et dans laquelle figurait le Vice-recteur Jean Kellerhals. A n’en pas douter, cette loi qui devrait accorder une autonomie accrue à l’Université est sans nul doute un gage d’espoir pour cette dernière : simplification des procédures, nouvelle gouvernance favorisant la prise de décision, l’adaptation au contexte universitaire actuel, la participation, tout en maintenant les contrôles nécessaires de la part de l’Etat. Il y a là de réelles promesses pour que l’Université de Genève puisse maintenir son rang, sa réputation, sa citoyenneté et son niveau d’excellence reconnu.

Mesdames et Messieurs, nous disposons avec l’Université de Genève d’une institution dont nous pouvons être fiers. Le travail d’équipe, et j’insiste sur cette expression, accompli par notre Rectorat s’est inscrit dans ce souci constant. Puisse notre bref passage à la tête de l’institution avoir contribué à ce qu’elle atteigne les objectifs ambitieux que ses nombreuses qualités lui permettent de viser.

Jacques Weber