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Les neutrinos ne s’arrêtent pas au Japon!

La construction du projet Hyper-Kamiokande commencera en 2020. 

Nous apprenons par un communiqué officiel présenté par le Professeur Takaaki Kajita, prix Nobel 2015 « pour la découverte des oscillations de neutrinos qui prouvent que les neutrinos ont une masse », que l’Université de Tokyo s’engage à commencer les travaux de construction de l’expérience Hyper-Kamiokande (HyperK) en 2020.  


HyperK est un immense tank souterrain de 300'000 tonnes, dont le volume sensible est environ dix fois plus grand que son prédécesseur, le fameux détecteur neutrino souterrain de 50'000 tonnes d'eau 'Super-Kamiokande' (SuperK) situé à Kamioka sur la côte ouest du Japon. HyperK, comme SuperK, est situé sur un faisceau de neutrinos produits sur la côte est du Japon, à 300km de distance dans le village de Tokai, et un des objets de ce détecteur est d’étudier les transformations des neutrinos lors de ce voyage, effet purement quantique qui se produit sur une distance peu commune. Un détecteur proche situé à Tokai permet de contrôler les propriétés des neutrinos avant leur voyage.  C’est sur SuperK que Takaaki Kajita avait fait la découverte qui lui valut le prix Nobel en 2015.

La décision de l’Université de Tokyo est soutenue par le Ministère de l'Education, des Sciences et de la Technologie (MEXT) qui a accordé un subside préparatoire pour 2019, permettant d’avancer dans les travaux précédant la construction, et surtout d’établir une collaboration internationale avec les agences de financement des pays dans lesquels les physiciens ont exprimé un intérêt.  Un intérêt, c'est bien sur le cas de l'université de Genève qui a participé à ce programme neutrino Japonais depuis 2002, ce qui nous a valu deux prix scientifiques et beaucoup de plaisir. Nous nous réjouissons de cette décision qui assure la continuation du programme Japonais de  physique du neutrino.

 Ces bonnes nouvelles tombent à point pour encourager le Professeur Federico Sanchez qui vient de prendre la chaire de physique des neutrinos au Département de Physique Nucléaire et Corpusculaire (DPNC) succédant au Prof. Alain Blondel qui prend sa retraite.  

Le programme Japonais a progressé par étapes successives sans arrêt depuis la découverte de 1998, établissant successivement un nouveau type de transformations entre neutrinos et plus récemment en observant une forte indication de la violation de la symétrie entre matière et antimatière, les neutrinos se transformant à un taux différent que les antineutrinos.  
S'agissant de particules fondamentales cette asymétrie est un élément important d'explication du fait que, aussi loin que l'on puisse l'observer, l'univers semble constitué de matière. Toute l'antimatière, qui, selon les lois observées en laboratoire, aurait dû être créée en quantité égale à la matière lors du Big Bang, semble avoir disparu.  

Le nouveau détecteur permettra de confirmer de façon définitive ces premières indications mais aura aussi la capacité de détecter les neutrinos de supernovæ de façon spectaculaire dans toute notre galaxie et jusque dans la nébuleuse  d'Andromède;  il permettra aussi d'explorer la désintégration du proton, un phénomène jamais observé à ce jour, mais  qui devrait découler des théories invoquées pour expliquer la neutralité de la matière -- c'est à dire pourquoi le proton et l'électron ont des charges rigoureusement égales et opposées (faute de quoi l'univers exploserait avec une vitesse bien plus grande que l'expansion gravitationnelle qui est observée). 

Le DPNC a fortement contribué à ces expériences, et est maintenant  impliqué dans les programmes d'amélioration du dispositif expérimental, et dans l'analyse des données. L’équipe du DPNC est engagée dans la compréhension des propriétés des neutrinos et antineutrinos, ce qui a permis la préparation de nombreuses thèses de masters et Doctorat en Physique des particules (Photo 2) . Récemment l’équipe du DPNC a conçu, fabriqué et installé, en collaboration avec le CERN, un détecteur de 75 tonnes (le Baby-MIND) destiné à améliorer la performance du détecteur proche (Photo3). Alesssandro Bravar (MER) est, lui, fortement impliqué déjà dans HyperK où il supervise le groupe en charge de l’électronique du détecteur, un élément pivot pour à la fois saisir les événements du faisceau de neutrinos toutes les secondes,  une explosion de SuperNova  une fois tous les 20 ans, ou une hypothétique désintégration d’un des quelque 1035protons de la cuve (qui sait quand?).

 

Contact : Federico Sanchez Nieto, professeur ordinaire au Département de Physique Nucléaire et Corpusculaire de l'UNIGE.

Lien vers le communiqué de presse officiel: http://nnso.jp/news/20180912-e.html

12 septembre 2018
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