2005

La réforme de Bologne vue par les entreprises

Quel regard portent les milieux économiques et les entreprises sur la réforme de Bologne? La plupart attendent l'arrivée, sur le marché du travail, des premiers étudiants formés sous ce nouveau système(1) pour s'en faire une idée précise. Une rencontre organisée récemment à ce sujet par le Centre Uni Emploi a toutefois donné l'occasion à plusieurs représentants d'entreprises et responsables des ressources humaines d'exprimer leurs sentiments.

Selon le groupe de réflexion Economie suisse, la réforme de Bologne devrait apporter satisfaction aux entreprises sur au moins trois points, qui constituent les principales critiques adressées au système actuel:

- Les études sont trop longues et les personnes ayant achevé leurs études sont trop âgées lorsqu'elles entrent dans la vie active.
- Le système actuel ne favorise pas assez la mobilité des étudiants.
- La qualité des formations est difficilement comparable au niveau international.

Racourcir la durée des études?
Toujours selon Economie suisse, le fait de scinder les études en deux cycles, baccalauréat universitaire (bachelor) pendant trois ans et maîtrise (master) universitaire pendant deux ans, apporte une réponse satisfaisante à la question de la durée des études. "La réforme de Bologne n'a de sens que si le bachelor est une porte de sortie convaincante sur le monde du travail", relève ainsi le rapport d'Economie suisse sur la réforme de Bologne.

Ce jugement est certes à nuancer en fonction des secteurs d'activités. Clairement, pour les secteurs orientés vers la recherche, comme l'industrie chimique ou pharmaceutique, c'est la maîtrise qui s'imposera. Economie suisse se réjouit toutefois que, "selon les informations disponibles, 40% environ des titulaires d'un bachelor opteront pour la vie professionnelle", soit après trois ans d'études universitaires.

Fabrice Guelat, responsable formation à la Banque Pictet, qui s'exprime ici à titre personnel et non pas au nom de la banque, émet toutefois une réserve: "On peut craindre que les personnes qui arrêtent la filière universitaire en cours de route, après ou avant le bachelor, ne soient attirées vers des apprentissages dans les entreprises. On assisterait alors à un nivellement par le haut, au détriment des jeunes en quête de places d'apprentissage."

Stages en entreprise
Cela dit, les entreprises voient d'un bon œil le fait que la réforme de Bologne prévoie de laisser plus de mobilité aux étudiants pour effectuer, en cours d'études, des stages en entreprises, créant ainsi des passerelles entre le monde académique et celui du travail. Pour Fabrice Guelat, les étudiants doivent savoir que la formation ne s'arrête pas au baccalauréat ou à la maîtrise. "L''employabilité' doit être gérée tout au long d'une carrière professionnelle", précise le spécialiste en ressources humaines.

L'introduction de cursus accordant plus de place à l'interdisciplinarité (surtout au niveau de la maîtrise) est également bien perçue, quand bien même de nombreux métiers requièrent des profils très spécialisés: "Nous préférons des gens souples d'esprit, avec une bonne culture générale, quitte à leur fournir nous-même une formation spécialisée", observe Fabrice Guelat.

A cet égard, Economie suisse relève que les entreprises auront aussi leur rôle à jouer dans le succès de la réforme en "offrant aux titulaires d'un bachelor et d'un master des possibilités attrayantes de démarrer dans la vie professionnelle."

Enfin, la décision d'attacher un supplément à la remise des diplômes est saluée, surtout par les grandes entreprises ayant des filières internationales. Traduit en deux langues, ce supplément rendra possible la comparabilité des diplômes à l'échelle européenne. Il favorisera ainsi la reconnaissance des titres et fournira aux entreprises une grille de lecture plus aisée de la valeur des diplômes dans les CV des candidats à l'emploi.

(1) à partir de l'été-automne 2005 à l'UniGe, pour les facultés des sciences et de théologie, ainsi que pour l'Institut européen de l'Université.

9 mars 2005
  2005