Expositions de l'UNIGE

Être réfugié-e LGBTIQ+

Une insécurité qui ne prend pas fin avec l’exil

En 2018, le quotidien des personnes LGBTIQ+ dans le monde est marqué par les discriminations et les violences physiques, psychiques, socio-économiques, légales ou médicales. De plus en plus de personnes LGBTIQ+ fuient les persécutions qu’elles vivent dans leur pays pour chercher une protection ailleurs. L’ONG ORAM (Organization for Refuge, Asylum & Migration) estime qu’environ 5% des demandes d’asile(1) sont liées à l’orientation sexuelle, l’identité et expression de genre ou les caractéristiques sexuées. Mais à quelle protection ces personnes ont-elles vraiment accès dans nos sociétés d’accueil?
Contrairement aux personnes qui fuient un conflit armé, l’insécurité vécue par les personnes LGBTIQ+ ne prend pas fin en quittant leur pays. Elles restent exposées à des risques de violence, de discrimination et d’exclusion aussi bien sociale que légale dans le pays d’arrivée. Les conditions d’accueil réservées aux personnes réfugiées, et en particulier les conditions d’hébergement dans des logements collectifs avec des personnes provenant parfois du même pays où elles ont été persécutées, perpétuent un climat de danger. Les personnes LGBTIQ+ préfèrent donc souvent se couper de leur communauté nationale d’origine, qui est pourtant une ressource sociale et affective très importante pour toute personne arrivant dans un nouveau pays. De manière générale, comme déjà dans leur pays d’origine, elles sont contraintes à l’invisibilité pour assurer leur protection.

Des discriminations quotidiennes

Le fait d’être réfugié-e limite également les contacts avec la société suisse. Perçues comme étrangères, les personnes sont exposées à un nouveau type de stigmatisation et de discrimination, à caractère raciste. Dans ce cadre, l’accès à la communauté LGBTIQ+ locale peut aussi être rendu difficile. De plus, les inégalités légales et sociales envers les personnes LGBTIQ+ en Suisse favorisent leur exposition à des stigmatisations et à des discriminations au quotidien, aussi bien dans la rue que dans leur parcours d’asile. Ainsi, les professionnel-le-s responsables de leur accueil; et du traitement de leur demande ne perçoivent souvent pas la spécificité de leurs expériences de persécution, et leurs besoins pour faire valoir leur droit à la protection ne sont souvent pas correctement pris en compte, par exemple un cadre d’audition sécurisé permettant l’expression de motifs d’asile liés à l’intimité, motifs souvent jugés tabous ou honteux.

Cumul des vulnérabilités

Si les personnes LGBTIQ+ ne sont pas vulnérables en soi, elles le deviennent en fonction du contexte. Les réfugié-e-s LGBTIQ+ cumulent ainsi des facteurs de vulnérabilité qui ne s’additionnent pas simplement, mais qui se conjuguent pour créer des situations spécifiques de vulnérabilité, auxquelles il convient de répondre de manière adaptée. Mis en place en 2016, le projet Asile LGBT Genève vise à la fois à la production de connaissances sur les conditions d’existence des réfugié-e-s LGBTIQ+ et leurs besoins, à l’amélioration de celles-ci (et en particulier de leur prise en charge par les professionnel-le-s responsables de leur accueil et accompagnement) et à la participation des personnes réfugiées LGBTIQ+ elles-mêmes aux processus de réalisation des changements sociaux qui les concernent.

(1) Estimations de l’ORAM, 2012


ANNE ARVY, chargée de projet Asile LGBT Genève

4 oct. 2018

Savoirs LGBTIQ+