Expositions de l'UNIGE

Deux cases ne suffisent pas

Au niveau de leur sexe anatomique, on considère habituellement que les humains sont «dimorphiques», c’est-à-dire qu’ils sont dotés d’organes génitaux soit femelles, soit mâles. En réalité, cette classification binaire ne rend pas bien compte de la diversité des formes observées, car certaines personnes naissent avec des organes génitaux de forme intermédiaire, entre les formes femelles et mâles. On parle alors de variations du développement sexuel ou d’intersexuation, dont il existe de multiples variantes. Certaines sont apparentes à la naissance, d’autres ne deviennent visibles qu’à l’adolescence ou à l’âge adulte, ou restent invisibles.

Le sexe ne se résume pas à l’apparence des organes génitaux

Le sexe est constitué de plusieurs niveaux, dont la plupart ne sont pas visibles sur le corps nu, comme les organes génitaux internes, les gonades (ovaires ou testicules), les hormones sexuelles, les chromosomes ou encore les gènes. Dans la population humaine, chacun de ces éléments comporte plus de deux variantes. À chacun des niveaux – gènes, chromosomes, hormones, etc. –, ces diverses variantes peuvent se combiner de multiples façons. Par exemple, une personne qui possède un chromosome Y, habituellement présent chez le mâle, peut avoir des organes génitaux externes femelles.

Les variations du développement sexuel

Les variations du développement sexuel ne mettent que très rarement la santé des personnes en péril, même si elles ont souvent un impact sur la santé sexuelle. Ce qui est préjudiciable aux personnes intersexes (près de 2% de la population), c’est surtout le fait qu’elles ne trouvent pas leur place dans une classification binaire du sexe. En effet, à la naissance, le sexe mâle ou femelle est assigné sur la seule base de l’apparence des organes génitaux externes. Parfois une intervention chirurgicale est pratiquée sur les organes génitaux des nouveau-nés intersexes afin de les faire correspondre à l’un ou l’autre sexe, avec de lourdes conséquences sur leur sexualité et leur identité.

Une identité de genre sous influences multiples

À ces multiples variations du sexe biologique s’ajoute celle de l’identité de genre, ou le sentiment d’(in)adéquation au sexe assigné à la naissance. L’identité de genre dépend en partie de facteurs biologiques, comme les hormones, pendant le développement embryonnaire, juste après la naissance et à la puberté, mais aussi de facteurs non biologiques, relationnels, sociaux, culturels, et de parcours de vie uniques. Vu la complexité du sexe et des liens qui le relient à la vie sociale, il n’est pas étonnant que l’identité de genre puisse se développer sur des années, avant de se stabiliser, souvent avant l’adolescence, mais qu’elle puisse aussi fluctuer tout au long de la vie. C’est ce qu’on appelle la «fluidité de genre», une conception qui laisse plus de place aux individus pour penser leur identité que les deux cases femelle ou mâle.


CÉLINE BROCKMANN, biologiste
ARIANE GIACOBINO, médecin
SERGE NEF, biologiste
BRUNO J. STRASSER, biologiste et historien des sciences

4 oct. 2018

Savoirs LGBTIQ+