2019

Quel rôle pour les ménages dans la transition énergétique ?

Des chercheurs de l’UNIGE, en collaboration avec un consortium européen, ont mis en place le projet ENERGISE qui aide les ménages à diminuer leur consommation énergétique sans nuire à leur confort.

page_garde_Sahakian.jpg

© DR

Quel est le rôle des ménages dans la transition énergétique ? Un simple geste peut-il faire la différence ? Le projet européen ENERGISE, dirigé par l’Université de Genève (UNIGE) pour la Suisse, a expérimenté une réduction de la consommation énergétique sur 300 ménages de 8 pays différents. L’objectif ? Baisser la température ambiante du logement à 18°C et réduire de moitié le nombre de lessives durant quatre semaines. Les résultats démontrent que ces actions n’ont pas d’impact sur le confort des habitants, mais permettent une baisse de la consommation d’énergie de 6%, une économie de 13 millions de m3 d’eau et un gain de temps hebdomadaire d’une heure.

Dans le contexte actuel de la crise climatique, la transition énergétique à l’échelle des ménages joue un rôle central. C’est pourquoi les initiatives qui visent une consommation énergétique plus durable au quotidien se sont multipliées dans les dernières années. Toutefois, 75% d’entre elles invitent à des changements techniques (comme remplacer les ampoules incandescentes par des LED) ou individuels (comme éteindre la lumière). «Mais cela n’est pas suffisant, relève Marlyne Sahakian, professeure à la Faculté des sciences de la société (SDS) de l’UNIGE. Pour obtenir un réel changement, il faut aborder la consommation énergétique en lien avec la vie quotidienne dans toute sa complexité, c’est-à-dire en tenant compte des normes sociales autour du confort et de l’hygiène.»


Le chauffage et la lessive comme chevaux de bataille

Le projet ENERGISE a suivi 300 ménages de 8 pays européens, dont 36 pour la Suisse, dans une approche «living lab». «Il ne s’agissait pas d’imposer un comportement aux gens, mais d’imaginer avec eux la manière dont ils pouvaient réduire au mieux leur consommation énergétique», continue la chercheuse genevoise. Deux domaines significatifs ont été ciblés par le projet: le chauffage et la lessive.

Deux challenges ont ainsi été mis en place par ENERGISE: baisser la température ambiante des logements à 18°C et réduire de moitié les cycles de lessive, durant quatre semaines pour chaque challenge. «Afin de soutenir les ménages, nous leur avons distribué des boîtes qui contenaient des éléments liés au chauffage (chaussettes, chocolats chauds, etc.) et à la lessive (brosse, tablier, terre de sommière, etc.)», explique Marlyne Sahakian.


Une réduction de la consommation énergétique d’au moins 6% et 13 millions de m3 d’eau économisés sur une année

Durant ces quatre semaines, les ménages sont parvenus à modifier significativement leurs pratiques. Les chercheurs ont constaté que la diminution de 1°C de la température ambiante du logement n’impactait nullement le confort habituel des habitants, tout en permettant une économie d’énergie de 6%, soit près du double de l’énergie nécessaire à toutes les lessives et le séchage. Même si peu de ménages ont réussi à atteindre les 18°C, les habitants qui ont réduit de 1 à 3°C doivent, certes, s’habiller plus chaudement chez eux en hiver et ne plus être en t-shirt et pieds nus, mais ils ressentent un impact positif sur leur santé, surtout dans la chambre à coucher.

Du côté du lavage du linge, une lessive de moins par semaine et par ménage durant un an représente une économie d’environ 13 millions de m3 d’eau, soit plus de 5000 piscines olympiques, 10 millions de litres de produit lessive et l’équivalent de la consommation d’électricité annuelle de 90’000 ménages. «Et cela sans compter le gain de temps passé à trier le linge, le repasser et le ranger, soit environ une heure de travail domestique hebdomadaire de gagné et un soulagement de la charge mentale», souligne Marlyne Sahakian.


Changer les pratiques sociales

De nombreux comportements reflètent simplement nos représentations des normes sociales et n’ont pas vraiment de raison d’être en pratique, comme changer d’habits tous les jours et les laver alors qu’ils sont encore propres. «Parfois, il suffit simplement de les aérer ou d’enlever une petite tâche, sans pour autant faire une lessive», constate la chercheuse. En un siècle, la température ambiante des logements est par ailleurs passée de 15°C à 22°C grâce à des changements techniques, qui ont contribué à transformer les standards de confort vers des températures plus élevées. Mais chacun n’est pas à son aise à 22°C, certains préfèrent la fraicheur, d’autres la chaleur. Ainsi, les standards de confort intérieur demeurent assez variés. Les personnes à mobilité réduite ont besoin de plus de chauffage, par exemple. Dans tous les cas, prendre conscience du caractère relatif de nos standards et de nos attentes permet de remettre en question des normes et des représentations qui sous-tendent nos pratiques.

La majorité des ménages d’ENERGISE ont intégré les pratiques développées pendant les challenges à leur mode de fonctionnement ordinaire. Mais il s’agit à présent de généraliser ces habitudes à l’ensemble de la société. «Le concept d’économie d’énergie est abstrait, c’est pourquoi il faut le lier au confort. Cela permet de constater que dans les foyers qui ne vivent pas d’insécurité énergétique, il n’y a pas de changement lorsque l’on diminue simplement de 1°C la température ambiante, mais que les économies, elles, sont bel et bien là», s’enthousiasme Marlyne Sahakian. Cette simple modification des pratiques permet à elle seule d’économiser 6% de l’énergie dédiée au chauffage, alors que les objectifs de la Stratégie énergétique 2050, acceptée par le parlement en 2017, tablent sur une diminution de 13% de la consommation énergétique par personne en 2035, par rapport à celle de l’an 2000.

19 juin 2019

2019

Nos expert-es

Parler aux spécialistes de toutes disciplines

La photothèque

Découvrir et télécharger les images de l’UNIGE

Les archives

Tous nos communiqués depuis 1996

S'abonner aux communiqués de presse
media(at)unige.ch

Université de Genève

24 rue Général-Dufour

CH-1211 Genève 4

T. +41 22 379 77 96

F. +41 22 379 77 29