2021

Une application pour suivre les personnes à risque de psychose

Une équipe de l’UNIGE a développé une application qui permet de suivre quotidiennement la fréquence et l’intensité des symptômes de personnes  à risque de psychose, afin de pouvoir adapter leur suivi médical et déterminer la cause de l’apparition des symptômes.

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Correspondance entre les résultats d’un entretien semi-structuré évaluant les symptômes psychotiques (SIPS) et les mesures collectées dans la vie quotidienne au moyen d’une application mobile. © UNIGE - Clémence Feller

3% de la population souffre de troubles psychotiques, qui représentent une cause importante d’invalidité chez les adolescent-es et jeunes adultes. Afin d’adapter le suivi médical et éviter une aggravation du trouble, il est capital de suivre de près l’évolution des symptômes psychotiques, tant au niveau de leur fréquence que de leur intensité. Aujourd’hui, ce suivi est assuré par des tests de contrôle menés tous les trois mois. Toutefois, ceux-ci doivent être réalisés par des professionnel-les formé-es, durent deux heures et ne sont pas forcément accessibles à toutes et tous. C’est pourquoi une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) a mis au point une application qui permet de suivre au jour le jour l’évolution des symptômes d’une personne à risque de psychose. Ce suivi «à distance» permettrait d’espacer les séances en présentiel et de ne les rendre nécessaires que lorsque la personne traverse une phase de crise ou d’exacerbation des symptômes. De plus, il sera possible aux psychologues de déterminer ce qui provoque, dans le quotidien de la personne, l’apparition de ses symptômes. Des résultats à lire dans la revue Schizophrenia Research.

L’adolescence est une période charnière pour l’apparition de troubles psychotiques. L’un des enjeux principaux de la recherche en psychologie est de pouvoir détecter le plus tôt possible les personnes susceptibles de développer ces troubles, notamment durant cette phase dite «à haut risque» de psychose, afin d’éviter leur aggravation et d’assurer un suivi adapté. Pour comprendre ces mécanismes, les scientifiques suivent des patient-es souffrant d’une microdélétion du chromosome 22q11.2, faisant d’eux une population particulièrement à risque de développer une maladie psychotique telle que la schizophrénie.

Aujourd’hui, les personnes à risque de psychose sont évaluées grâce à un entretien semi-standardisé nommé SIPS (Structured Interview for Psychosis-Risk Syndromes). «Ces questionnaires sont très fiables, mais ils nécessitent d’être réalisés durant deux heures par des professionnel-les formé-es, tous les trois mois environ, afin de pouvoir suivre l’évolution des symptômes», précise Maude Schneider, professeure à la Section de psychologie de la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (FPSE) de l’UNIGE et dernière auteure de l’étude. «Nous nous sommes alors demandé-es si nous pourrions mettre au point une application qui permettrait de suivre la personne de manière plus régulière et dans son environnement quotidien», poursuit-elle.


Une application qui détermine la fréquence et l’intensité des symptômes

L’objectif est de comprendre le fonctionnement d’une personne à risque de psychose dans son contexte familier grâce à l’évaluation quotidienne de ces symptômes. «Nous avons mis au point une application qui pose durant six jours d’affilé dix questions à la personne sur ses affects positifs (Êtes-vous heureux-euse? relaxé-e?), ses affects négatifs (Êtes-vous triste? anxieux-euse? en colère?) et sur la présence de symptômes psychotiques (Est-ce que votre imagination se mélange à la réalité? Est-ce que vous entendez des choses que les autres ne perçoivent pas? Est-ce que vous devez être sur vos gardes?)», explique Clémence Feller, chercheuse à la Section de psychologie de la FPSE de l’UNIGE et première auteure de l’étude. Huit fois par jour, les personnes suivies devaient répondre à ces questions et évaluer leur état sur une échelle allant de 1 (pas du tout) à 7 (extrêmement).

Afin de pouvoir déterminer si l’application fournissaient des informations consistantes avec des méthodes d’évaluation ‘classiques’, les participant-es ont également été évalués au moyen de l’entretien SIPS. «Nous avons fait le suivi avec l’application auprès de 86 personnes entre 11 et 27 ans, dont 37 avec un diagnostic de microdélétion du chromosome 22q11.2», poursuit Clémence Feller.


Adapter le suivi des patient-es grâce à l’application

«Notre premier constat est que les personnes ayant des symptômes psychotiques sont tout à fait aptes à répondre quotidiennement aux questions de l’application, ce qui permet une évaluation complète de l’évolution de leurs symptômes au cours d’une journée, se réjouit Maude Schneider. De plus, les résultats obtenus sont très concordants avec les informations récoltées au moyen de l’entretien SIPS, attestant du bon fonctionnement de l’application.»

Sachant que ce système d’évaluation est efficace, l’équipe genevoise souhaite pouvoir monitorer les symptômes via l’application lors de pointages réguliers, afin de pouvoir espacer les entretiens SIPS. «Notre idée est de faire venir une personne en présentiel lorsque l’application détecte une phase de crise, afin de lui éviter des trajets et des pertes de temps inutiles lorsqu’un tel suivi n’est pas nécessaire», explique Clémence Feller. De plus, cette application permet un suivi de proximité avec des personnes n’ayant pas forcément accès à un suivi professionnel, bien qu’un entretien initial avec un-e professionnel-le soit indispensable pour évaluer la sévérité des symptômes. L’application permettrait aussi d’évaluer l’efficacité d’une intervention (psychologique, médicamenteuse, etc…), en observant une diminution – ou non – des symptômes psychotiques au quotidien. «Enfin, cette méthode nous permettra d’identifier les éléments déclencheurs de l’apparition des symptômes chez la personne dans son environnement afin de pouvoir les contrer dans une perspective à long terme», conclut Maude Schneider.

28 oct. 2021

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