Source et copyright à la fin du texte
In Gille, B. (dir.) Le pilotage pédagogique : exercice partagé. Poitiers : Ministère de l'Education Nationale, pp. 80-104

 

 

 

Piloter les pratiques pédagogiques ?

Philippe Perrenoud

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation
Université de Genève
2001

 

Sommaire

La régulation non autoritaire des pratiques

Stratégie prescriptive ou stratégie professionnalisante ?

Du pilotage à l’intervention en face à face

Pour conclure : dilemme

Pour continuer la réflexion


La notion de " pilotage pédagogique " n’est pas sans ambiguïté. On saisit bien qu’elle s’oppose à un pilotage purement gestionnaire ou administratif. Mais où commence au juste le pédagogique ? Disons qu’il s’agit d’exercer une influence sur les pratiques des enseignants " en classe ".

La formule n’est cependant pas très heureuse, puisque les murs de la classe, sans tomber, deviennent poreux. Les enseignants d’aujourd’hui travaillent en cycles, en modules, dans divers dispositifs et groupes d’enseignement-apprentissage qui ne sont plus à proprement parler des " classes ", avec ce que cela suppose de stabilité et de relative fermeture.

Disons plutôt que le pilotage pédagogique s’intéresse aux pratiques des enseignants en tant qu’elles concernent leurs interactions avec des élèves et ce qui les rend possibles ou les prolonge : conception, planification, préparation, analyse, évaluation, suivi, rencontres avec les parents, coopération professionnelle, etc.

Le pilotage pédagogique porterait donc sur ce que les enseignants font dans le cadre des interactions didactiques, en amont, en aval et en marge. La délimitation se veut modérément restrictive, pour ne pas décomposer ce qui, dans la réalité du travail enseignant, forme un système. Dans tous les cas, on se trouve au cœur du métier d’instructeur, d’éducateur, de professeur. Ces mots n’évoquent pas exactement la même fonction, mais tous désignent une pratique qui consiste à faire apprendre en aménageant un contrat, des conditions, des dispositifs et des situations didactiques, à la faveur d’un rapport pédagogique avec des " apprenants " potentiels et en général dans le cadre d’une ou plusieurs communautés éducatives.

Défini de la sorte, le pilotage pédagogique pose immédiatement trois questions :

1. A-t-on le droit d’infléchir les pratiques des enseignants ?

2. Est-ce nécessaire ?

3. Est-ce possible ?

Ces questions ne sont pas simples. Si les enseignants étaient des professionnels indépendants, leurs pratiques seraient censées observer la loi, le code d’éthique et " l’état de l’art ", autrement dit une raison pratique et théorique jugée établie, souvent implicite, mais qui se révèlerait par exemple au moment de déterminer en justice si une faute professionnelle a été commise. Le pilotage des pratiques passerait donc, d’une part, par l’énoncé d’objectifs de formation, l’adoption d’un code d’éthique et l’établissement d’une jurisprudence, d’autre part par la référence commune à des savoirs, des savoir-faire, des modes de raisonnement et d’intervention, voire des technologies, avec la formation correspondante. Mais en contrepartie de cette relative autonomie, des enseignants indépendants rendraient des comptes à leurs clients et devraient s’imposer sur un marché concurrentiel.

Si, à l’inverse, les enseignants étaient des travailleurs salariés non qualifiés, leurs pratiques seraient, dans une très large mesure, prescrites par l’organisation du travail et la définition de leur poste. Leurs gestes professionnels et leur rythme de travail seraient soumis à un contrôle plus ou moins constant par leur hiérarchie et les écarts au travail prescrit seraient susceptibles d’être sanctionnés.

Les enseignants d’aujourd’hui ne sont ni des professionnels indépendants, ni des salariés non qualifiés. Ils forment une " semi-profession ". Si bien que leur travail fait l’objet de prescriptions qui vont au-delà des objectifs, sans définir dans le détail leurs gestes professionnels.

Les Écoles Normales voulaient normaliser les pratiques et l’inspection portait jadis sur le strict respect de procédures, à partir de traces (registre, journal de classe, travaux des élèves). On a renoncé à ce degré de prescription et de contrôle, au gré de l’évolution des rapports sociaux, du travail enseignant, des programmes, des conceptions pédagogiques et didactiques.

Les systèmes éducatifs n’ont pas abandonné tout espoir d’avoir prise sur les pratiques des enseignants, même s’ils fixent moins clairement les modalités, la nature et l’étendue de l’influence à exercer. On parle de pilotage davantage que de contrôle. Euphémisme ou réelle évolution ?

Par quels moyens le système éducatif entend-il aujourd’hui " piloter " les pratiques des enseignants ? Il espère y parvenir, notamment :

Ces moyens sont loin d’être entièrement efficaces. Ainsi, le système espère piloter les pratiques pédagogiques en spécifiant les contenus et les objectifs de l’enseignement. Il déchante lorsqu’il comprend qu’une bonne partie des enseignants ne connaissent pas bien les programmes, les lisent superficiellement au moment où il paraissent, ne les utilisent pas au quotidien. La culture professionnelle, les traditions, les coutumes, les attentes des collègues et des parents, les réactions des élèves pèsent plus que les programmes sur les pratiques effectives.

La formation est un autre outil potentiel de régulation des pratiques. On forme les enseignants d’une certaine manière, à ce qui paraît la bonne didactique. On sait cependant que la formation continue n’atteint qu’une fraction minoritaire des enseignants, sauf si elle est décrétée obligatoire, auquel cas il faut s’attendre à des résistances passives, à des absences mentales. Quant à la formation initiale, on surestime son influence et on sous-estime en miroir le poids de la contre-socialisation par le milieu professionnel aussi bien que le caractère incroyablement tenace des croyances personnelles sur l’éducabilité, l’intelligence, la motivation, le savoir, l’apprentissage. Elles préexistent à la formation professionnelle et y résistent.

Le contrôle du travail enseignant est tout aussi décevant. Il éradique les pratiques aberrantes, mais reste sans grande influence sur les pratiques médiocres. On sait que l’obligation de résultats n’est pas tenable. On n’est pas encore parvenu à définir une obligation de moyens qui ne sombre pas dans une doxa ou une obligation de compétences qui soit davantage qu’un vœu pie.

Bref, le pilotage des pratiques ne va pas de soi, les enseignants y résistent, activement et passivement, pour de bonnes et de moins bonnes raisons. Il n’est pas absurde d’envisager que les manuels, d’une part, les coutumes, d’autre part, soient les sources d’influence les plus fortes. Or, les manuels sont en partie des produits commerciaux, certes conformes aux programmes, mais dont l’inspiration pédagogique dépend du choix des auteurs. Quant aux coutumes, elles ne sont pas facilement " gouvernables ".

On comprend donc que le pilotage pédagogique, entendu comme pilotage des pratiques, soit à la fois un sujet de préoccupation et de désespoir des cadres et des formateurs qui sont censés orienter le travail des enseignants, mais constatent, année après année, qu’ils ont peu de prise. Plutôt que de multiplier les variantes de dispositifs faiblement efficaces, mieux vaudrait donc prendre le problème à la racine. La problématique du pilotage partagé en fournit l’occasion.

Faut-il s’acharner ? Pourquoi devrait-on à tout prix influencer les pratiques ? Parce que les enseignants ne sont pas à leur compte. Ils tiennent leur emploi d’un système éducatif qui doit relever un défi très important : permettre à tous les jeunes de construire des connaissances et des compétences à la mesure de la société et de l’avenir qui les attendent. Tel est l’enjeu du pilotage pédagogique. Ce ne devrait pas être de faire fonctionner la bureaucratie scolaire comme une horloge, ni d’orienter les pratiques pour satisfaire le goût du contrôle ou du pouvoir de l’encadrement. Le but est de faire de l’école une école efficace, au sens où elle remplit sa mission.

De ce point de vue, l’orientation et la régulation des pratiques des enseignants devrait être un souci commun des formateurs et des cadres, notamment, en France, du corps d’inspection et des chefs d’établissements. C’est dans cet esprit du moins que je vois l’intérêt de réfléchir sur un pilotage pédagogique partagé. S’il devait servir une normalisation (politique, bureaucratique ou didactique) des pratiques sans lien avec l’efficacité de l’enseignement, il conviendrait de le combattre.

De même, si le souci de piloter les pratiques devait passer par une déprofessionnalisation du métier d’enseignant, je ne pourrais que m’en distancer. Non pas parce que les enseignants auraient un droit inaliénable à faire ce qu’ils veulent. Ils y renoncent en signant un contrat de travail. La question n’est pas idéologique, elle est pragmatique : on ne peut à mon sens espérer améliorer la qualité de l’enseignement qu’en pariant sur une pratique réflexive et une plus forte professionnalisation du métier d’enseignant. Sa complexité voue à l’échec tout pilotage autoritaire, qui se ferait contre les praticiens ou sans eux.

Dans cette perspective, c’est au niveau des orientations, des inspirations, des incitations qu’il faut travailler, plutôt que d’une inflation prescriptive.

 

La régulation non autoritaire des pratiques

Souvent, le débat sur le pilotage pédagogique se limite à envisager de renforcer l’inspection et l’encadrement, donc l’exercice de l’autorité et l’évaluation des enseignants. Implicitement, on postule alors que les seuls pilotes sont ceux qui ont un pouvoir institutionnel et que la meilleure façon de piloter est de prendre des décisions.

Même si l’on reste dans ce schéma, il est temps de comprendre que nul ne prend de décisions en toute indépendance. Tous ceux qui participent à la construction d’une décision, comme tous ceux qui vont devoir la relayer, la justifier, l’expliquer sur le terrain, limitent l’autonomie de celui qui a le pouvoir formel de décider. Une décision ouvertement négociée n’est rien d’autre qu’une mise en forme de cette interdépendance. Celui qui consulte s’engage à tenir compte des avis entendus : sans être tenu de les suivre jusqu’au bout, il ne peut davantage les ignorer intégralement. Si l’on ouvre le jeu de la concertation à des gens qui n’ont pas formellement de pouvoir de décision, ils se sentent invités à exercer de facto une partie de ce pouvoir. Il est dangereux de les décevoir. En échange, on pourra leur demander d’être co-responsables ou en tout cas solidaires de la décision, actifs dans sa mise en œuvre.

L’autorité négociée n’est pas une pratique simple. Elle passe par la recherche d’un moyen terme, toujours bricolé et instable, entre l’organisation formelle des pouvoirs et l’élargissement de fait des processus de décision. Mais là n’est pas le cœur du problème. Piloter ne se limite pas à décider, même de façon concertée et négociée. Piloter, c’est orienter les pratiques. Certaines décisions institutionnelles y contribuent, et il n’y a aucune raison de se priver de ce moyen. Mais l’enjeu majeur est d’influencer la part des pratiques pédagogiques qui échappe dans une large mesure à toute décision, même participative. On le voit bien lorsqu’une fraction non négligeable des enseignants souscrivent à une réforme et s’impliquent dans son adoption : leurs collègues réticents se sentent aussi peu engagés que par une décision autoritaire tombée du sommet. Il convient donc d’élargir le champ de la réflexion : piloter est une stratégie systémique, qui englobe aussi bien ce qui se gouverne formellement que les influences plus subtiles.

Quiconque n’a pas un goût immodéré du pouvoir pour le pouvoir serait satisfait de voir les pratiques évoluer dans le sens de ses vœux sans avoir rien à imposer le changement. Cette régulation non autoritaire et non répressive se heurte cependant à nombre d’obstacles, qui constituent souvent un système. Du coup, si l’on ne s’attaque pas à tous les obstacles en même temps, rien ne se passe.

Examinons quelques-uns de ces obstacles, comme autant de questions difficiles.

 

Qu’est-ce qu’une pratique pédagogique efficace et équitable ?

Même si chacun sait ou croit savoir ce qu’est une pratique pédagogique à la fois efficace et équitable, il fait chaque jour l’expérience que d’autres (élèves, parents, collègues, cadres) la voient autrement.

La représentation d’une pratique acceptable ne fait l’unanimité que sur des aspects superficiels - arriver à l’heure - ou qui relèvent davantage des mœurs - ne pas battre les élèves - que d’une professionnalité enseignante pointue.

Les désaccords viennent en partie du fait que les finalités de l’éducation ne sont pas perçues de la même façon, malgré les textes ou plus exactement parce que les textes laissent une large marge d’interprétation, même aux lecteurs de bonne foi. Souvent, dans les démocraties, les textes ne peuvent être adoptés qu’à condition de rester ambigus, seule façon de créer une alliance majoritaire. Si bien qu’il y a mille façons honnêtes de comprendre les finalités, les objectifs, les exigences des programmes, et plus encore leur sens.

De plus, ces objectifs sont écrits pour des élèves abstraits. Tout le monde est censés apprendre la même chose. On sait bien que ce ne sera pas le cas, mais le seuil attendu n’est pas un objectif institutionnel. Le système se garde bien de s’avancer sur ce terrain miné. Les établissements, les équipes et les enseignants doivent donc déterminer un niveau d’ambition qui n’est fixé par aucun texte dans l’atteinte effective des objectifs. Pour les uns, les plus militants, l’objectif doit être atteint pour tous. Pour d’autres, il y a une part d’échec incompressible, à l’impossible nul n’est tenu. Il arrive même qu’un excès de réussite nourrisse un soupçon de laxisme. L’excellence de certains établissements et de certains enseignants se mesure à la proportion d’élèves qu’ils laissent sur le carreau. Selon la vision qu’ils adoptent du souhaitable et du possible, les établissements et les professeurs ne liront pas de la même manière les objectifs de formation et se sentiront très inégalement tenus d’y amener chaque élève.

Enfin, coexistent et se font concurrence toutes sortes de visions d’une pédagogie prometteuse, qu’il soit question des vertus de l’enseignement ex cathedra, du pouvoir et de la place à accorder aux élèves, de la planification, de la différenciation, des sanctions, de l’évaluation, des méthodes, etc.

Bref, même si l’on convient dans l’abstrait que l’efficacité et l’équité sont les critères d’une " bonne " pratique pédagogique, leur définition précise ne fait l’objet d’aucun consensus. Du coup, se réintroduisent par ce biais toutes les différences idéologiques relatives à l’éducabilité, aux finalités, au fatalisme de l’échec et des inégalités, à l’élitisme, à la démocratisation, aux savoirs et à la didactique.

 

Où s’arrête la liberté pédagogique ?

Du fait de son histoire, de sa nature, de ses liens avec le politique et le religieux, l’enseignement est une pratique dont le degré d’autonomie est un point sensible, dans l’école publique mais aussi dans les grands réseaux confessionnels. On observe sur cette question des positions très diverses :

Si, au sein d’un système, on donnait une réponse unique à la question de savoir qui décide des pratiques équitables et efficace, une conception cohérente du pilotage pédagogique s’ensuivrait. Elle serait différente selon qu’on affirme que l’arbitre des pratiques recevables est l’enseignant pris individuellement, la corporation professionnelle, l’autorité scolaire, des experts ou encore une communauté éducative se référant à une raison pédagogique et à des savoirs partagés. Mais on saurait à quoi s’en tenir.

En réalité, ces diverses conceptions s’affrontent dans chaque système, à tous les niveaux et, pour une part, dans l’esprit de chacun. Ce qui ne facilite par la construction d’une stratégie cohérente de pilotage, chaque " pilote " raisonnant en fonction de sa propre vision du métier d’enseignant.

 

Quels sont les processus d’influence disponibles ?

Il est facile de dire qu’il faut orienter les pratiques sans les contraindre. Mais comment faire ?

Est-ce à travers un discours que l’on adresserait directement aux enseignants en espérant les persuader ? Doit-il miser sur le charisme de celui qui le tient, sur la culpabilisation, sur une forme d’incantation ou d’argumentation ? La persuasion passe-t-elle par l’idéologie, par la raison, par le savoir, par l’autorité " morale " ? Sur quelles valeurs communes peut-on s’appuyer ? Et quels savoirs ?

D’une certaine manière c’est tout le problème de l’influence sociale qui est posé là, qui n’est pas propre à l’éducation. Comment faire pour que les gens changent et adhèrent à d’autres pratiques, alors qu’ils ont en général d’excellentes raisons de continuer à faire ce qu’ils font ?

Bien entendu, la rhétorique a des limites. On raisonnera donc aussi sur des dispositifs, sur la façon de favoriser l’adhésion aux orientations en offrant des formations, en mettant en valeur des pratiques innovantes, en soutenant pratiquement et symboliquement ceux qui se mettent en chemin, en affaiblissant ceux qui se mettent " en travers du chemin ".

 

A quel niveau faut-il penser la régulation
et l’orientation des pratiques ?

À supposer qu’on sache comment influencer, il reste à dire à quel niveau du système éducatif il est préférable de piloter les pratiques pédagogiques, du niveau national à celui de l’établissement, en passant par les niveaux intermédiaires de la discipline, de l’académie, du bassin, de la circonscription et autres zones.

Le ministère a toujours l’impression que s’il ne donne pas une très forte impulsion, rien ne changera. Les recteurs pensent sans doute qu’il serait plus efficace de laisser libre cours à des politiques académiques originales. Les inspecteurs de circonscription et leurs conseillers pédagogiques la voient comme l’échelle idéale pour impulser des changements. Les chefs d’établissements parient plutôt sur des projets d’établissements répondant aux préoccupations de leurs enseignants et aux caractéristiques de leur public. Les inspecteurs responsables d’une discipline plaident pour sa plus large autonomie.

Chacun sait en même temps que, même s’il parvient à influencer les pratiques dans son académie, sa circonscription, son établissement ou sa discipline, cela n’aura aucune influence sur l’évolution du reste du système. S’il s’agit, comme le charbonnier de la fable, d’être maître chez soi, l’autonomie est la priorité. Mais si l’on se soucie de l’évolution du système éducatif dans son ensemble, qui pourrait se contenter d’introduire la pédagogie différenciée dans UN établissement, sachant que c’est une goutte d’eau égalitariste dans un océan de pratiques faiblement différenciées ?

D’où la recherche d’un système de poupées russes qui concilierait le national et le local, en passant par les niveaux intermédiaires, chaque niveau cadrant de façon optimale les orientations du niveau inférieur, en lui laissant la plus grande autonomie compatible avec la cohérence de l’ensemble. Le rêve est d’orienter le changement à large échelle en laissant des politiques académiques et des dynamiques locales lui donner forme. La quête de dispositifs adéquats est à peine amorcée.

 

La régulation des pratiques, de qui est-ce l’affaire ?

Sur le terrain, qui est censé contribuer à la régulation des pratiques dans le sens des orientations nationales ou académiques ? Sûrement les cadres, les inspecteurs, les chefs d’établissement. Mais ne faut-il pas compter aussi avec les conseillers pédagogiques, les formateurs, les coordonnateurs et tous ceux qui, sans avoir d’autorité formelle, peuvent influencer les pratiques des enseignants ?

De ce point de vue, réfléchir au partage du pilotage pédagogique entre chefs d’établissements et inspecteurs seulement serait indéfendable. Dans les systèmes éducatifs contemporains, la noosphère s’est fortement élargie à des experts de la formation, de l’accompagnement, du soutien, de la coordination, du conseil, du suivi, de l’animation pédagogique. N’ayant pas autant de tâches de gestion, ni d’autorité formelle, ils entrent en relation avec les enseignants sur d’autres bases, dans un rapport moins asymétrique et plus professionnel. Il importe donc de prendre en compte l’ensemble des forces qui, selon qu’elles sont mises en synergie ou jouent les unes contre les autres, auront ou non une influence sur les pratiques pédagogiques.

L’un des enjeux majeurs est d’imposer un minimum de cohérence à l’ensemble des intervenants et de limiter les guerres de religions et les querelles de territoires.

 

Comment favoriser l’autorégulation et la pratique réflexive ?

L’autoévaluation et la pratique réflexive d’un professionnel sont les premières sources de régulation. Tout le reste, en dernière instance, ne fait que les stimuler. Ni injonctions, ni incitations, ni formations n’auront d’effets sur un acteur qui ne veut pas se mettre en question, ni changer. Il importe donc de rendre cette forme de professionnalité plus probable, par un travail de fond et de longue haleine sur l’identité, les compétences, les outils, le rapport au métier, au savoir, à la recherche, etc.

Au quotidien, adopter une posture réflexive ne va pas de soi, car chacun a besoin de toute sa tête pour animer la classe, gérer le temps qui passe, contenir l’indiscipline des uns ou des autres, réguler le travail. Il est difficile de " se regarder marcher en marchant ", du moins lorsque la marche demande toute la concentration du marcheur. Certains enseignants sont capables d’être constamment dans les deux registres, mais on peut l’exiger d’un débutant, ni même l’attendre de n’importe quel enseignant après dix ans de carrière.

Nul n’est cependant condamné à réfléchir seul. Il peut le faire en équipe, en réseau, au sein de son établissement, dans des groupes de travail au sein de l’académie, dans une zone ou un réseau d’éducation prioritaire, ou par le biais d’une supervision ou d’un dispositif d’analyse des pratiques.

On ne peut cependant fonder des espoirs démesurés sur l’autorégulation spontanée, qu’elle soit collective ou individuelle. Il s’agit donc de la favoriser par diverses mesures incitatives. Il s’agit donc de trouver un équilibre difficile et fragile entre une inscription autoritaire de la pratique réflexive dans le cahier des charges et une incitation si molle qu’elle ne convainc que les convaincus. L’essentiel passera par des dispositifs novateurs et diversifiés de réflexion plutôt que par une simple mise en valeur de la figure du praticien réflexif.

 

Comment identifier les points d’application de la régulation ?

Ce sont les pratiques de demain qui intéressent l’institution, pas celles d’aujourd’hui, ni d’hier. Or, les pratiques de demain surgiront demain, de la confrontation du praticien à son environnement de travail. Influencer les pratiques, c’est donc agir sur ce qui les engendre, les personnes, leurs relations, l’organisation du travail, les ressources, l’environnement.

Quand on cherche à influencer les pratiques, on peut recourir à deux stratégies, qui ne sont pas exclusives :

Examinons de plus près ces deux méthodes.

 

Peut-on modifier les pratiques en changeant l’environnement ?

En Europe, on parie beaucoup plus sur la modification des personnes que sur la modification de leur environnement, alors qu’aux États-Unis ou au Canada, la culture autorise à agir sur des " incentives ", autrement dit des paramètres extérieurs qui ne prétendent pas changer les gens directement, mais modifient les conséquences de leurs choix. Si l’on abrège de cinq ans, sans perte de revenu, la carrière des enseignants qui ont fait réussir une forte proportion de leurs élèves, il n’est pas exclu que progresse la lutte contre l’échec. Mais peut-être au prix d’un simple bachotage, d’une pression morale ou par la simple manipulation des " signes extérieurs de réussite ".

L’aménagement des conditions et ressources pose des problèmes éthiques et menace d’effets pervers. Mais les avantages financiers ne sont pas les seuls paramètres. En Europe, l’enseignant est affecté sans tenir compte de ses compétences. Dans les postes difficiles, il n’a pas plus de vacances, pas plus de pouvoir, pas plus d’autonomie et ne peut pas prendre plus de risques que dans les postes les plus tranquilles. Les ZEP et les REP ont amorcé un timide mouvement vers la prise en compte non pas du " mérite ", mais des risques et des défis liés à certaines situations, en les assortissant d’une forme de reconnaissance matérielle ou symbolique. Il n’est nullement absurde de chercher à transformer les pratiques en modifiant les données dont tiennent compte les acteurs. En effet, les investissements professionnels, en classe, mais aussi dans l’établissement et en formation, sont en partie sous le contrôle d’un calcul coûts-bénéfices plus ou moins intuitif.

Aménager l’environnement ne consiste pas exclusivement à moduler des récompenses institutionnelles ou économiques. Il est à mon avis plus important de faire exister les pratiques dans un espace professionnel, de les reconnaître. Avant d’évaluer, l’institution pourrait s’attacher à valoriser - c’est le sens du dispositif d’innovation-valorisation -, à créer des lieux de parole et de partage des expériences, des réseaux de circulation des récits et des savoirs.

Partout où l’on institue des cercles de qualité, des groupes d’analyse de problèmes professionnels, des moments d’échange ou de travail en commun, l’on modifie favorablement l’environnement professionnel et l’on accroît les chances d’une reconnaissance sociale du travail enseignant, donc de son sens. Aujourd’hui, l’expertise manifestée en classe est invisible, donc peu valorisée. À qui adresse-t-on son travail dans l’enseignement ? Le vrai seul public, ce sont les élèves. Mais le regard des pairs compte davantage. Sans lever entièrement la solitude des enseignants, et donc sans limiter leur autonomie, la possibilité de pouvoir adresser son travail à quelqu’un modifie l’image de soi et le rapport au métier.

Cessons donc d’opposer mercantilisme et laisser-faire. L’argent est un moteur, le pouvoir aussi, mais les professionnels ont également besoin d’estime, de confiance, de soutien. La protestation vertueuse contre les mécanismes du marché dispense trop souvent de se demander si les professionnels trouvent leur compte dans ce métier difficile et ce qu’on pourrait faire pour qu’ils soient moins solitaires et mieux reconnus.

Même s’il appartient à une équipe, le praticien est généralement seul face à " ses " élèves. L’enseignement restera un métier très solitaire dans l’interaction avec les apprenants, même si la coopération professionnelle se développe dans le domaine de la conception, de la planification, de la construction de dispositifs ou d’outils, de l’évaluation des progressions et des acquis. On ne peut donc fonder d’immenses espoirs sur des interdépendances très serrées. Pourquoi néanmoins ne pas réfléchir aux effets d’un partage plus explicite de la responsabilité formelle d’un ensemble d’élèves et de la gestion collégiale de leurs parcours ? Passe de " Moi et mes élèves " à " Nous et nos élèves " ne peut que modifier les pratiques de chacun.

 

 

Peut-on agir directement sur le praticien lui-même ?

Faire changer un praticien est une entreprise très difficile, car il s’agit de modifier les dispositions stables qui l’amèneront, en toute autonomie, à réagir ou à agir d’une autre façon demain, dans une semaine ou l’année prochaine. Comment ?

Parfois, une simple conversation peut avoir plus d’effet qu’une longue session de formation. La simple prise de conscience de certaines habitudes, de certains fonctionnements peut suffire à amorcer un changement. Mais c’est loin d’être un mécanisme universel.

Sur quoi agit-on ? Comment induire des changements significatifs des pratiques pédagogiques autrement que par voie autoritaire et inefficace ? A quel niveau de la personne s’adresse-t-on ? Dans quelle vision de la professionnalité enseignante s’inscrit-on ? Le choix n’est pas seulement théorique et méthodologique, mais aussi philosophique et éthique.

 

Stratégie prescriptive ou stratégie professionnalisante ?

Quel est le statut de la prescription dans le pilotage des pratiques pédagogiques ? Peut-être est-ce la question nodale.

Si, s’appuyant sur les travaux des didacticiens des sciences, l’institution enjoignait aux enseignants de travailler à partir des représentations préalables des élèves, elle formulerait une règle nouvelle et s’efforcerait de la traduire dans les méthodes pédagogiques proposées aux enseignants, dans les manuels scolaires subventionnés ou homologués ou encore dans les critères d’inspection des professeurs de sciences. Cette stratégie prescriptive se heurterait bien entendu au scepticisme des enseignants et ne garantirait aucun changement des pratiques.

À l’inverse, une stratégie professionnalisante consisterait à élever le niveau de formation didactique des professeurs de sciences au point où chacun comprendrait que l’élève n’est pas une table rase, qu’il faut construire à partir de ce qu’il croit ou sait déjà, donc partir de ses représentations et lui donner l’occasion de les exprimer sans craindre d’être désavoué ou ridiculisé.

Les bibliothèques de didactique et de sciences d’éducation sont remplies de conseils et de prescriptions, plus ou moins élégamment présentées : de la directive plus ou moins impérative, jusqu’à l’argumentation subtile qui suggère que si vous ne tenez aucun compte de l’orientation proposée, c’est que vous n’avez rien compris à rien.

Les livres ne pilotent pas les pratiques en direct. La question du pilotage pédagogique institutionnel ne se pose que lorsque des thèses issues de ces livres sont adoptées par l’administration scolaire, qui en fait une norme adressée aux enseignants ou du moins une doxa véhiculée par les circulaires et autres déclarations officielles.

À l’avenir, la régulation des pratiques passera-t-elle par plus de prescriptions ou est-ce une impasse ? Toutes les organisations sont confrontées aux limites et aux effets pervers du travail prescrit, en particulier dans les métiers qualifiés.

 

Travail prescrit, travail réel

Qu’est-ce que le niveau de qualification d’un métier, sinon la dose de prescriptions qui définissent le travail ? Dans certains métiers, il existe des centaines, voire des milliers de pages de prescriptions. Elles sont censées résoudre les problèmes à l’avance, elles constituent un réservoir de solutions. Tout a été prévu par le bureau des méthodes, ingénieurs et experts ont pensé à tout. On attend de chaque salarié qu’il sache comprendre et exécuter les prescriptions. La tâche semble simple : identifier la procédure pertinente et l’appliquer à la lettre.

En réalité, les prescriptions sont constamment mises en défaut ou insuffisantes. Il survient des cas exceptionnels, des incidents critiques non prévus, des usagers exigent des dérogations à la règle, certains collègues ne font pas leur travail ou empiètent sur celui des autres, les matériaux ne sont pas conformes, les machines tombent en panne, il y a des retards à rattraper à tout prix, il manque certaines ressources ou informations, ce qui oblige à se débrouiller autrement. Bref, un travailleur est sans cesse en train de gérer ce que les ergonomes ont appelé l’écart entre le travail prescrit et le travail réel.

Cet écart ne signe pas forcément une déviance dommageable, il ne manifeste pas nécessairement un manque de professionnalisme, d’assiduité, de compétence ou de discipline. Les sociologues du travail montrent que si les gens ne trichaient pas avec le prescrit, la production ne sortirait pas à temps ou coûterait nettement plus cher. Pour produire efficacement, il faut prendre des risques, jouer avec les prescriptions. Même le travailleur le moins qualifié doit savoir jouer avec les règles. La grève du zèle chez les policiers ou les douaniers nous montre que si les salariés font tout ce qui est prescrit et rien que ce qui est prescrit, tout est paralysé.

Chez les enseignants, c’est pareil, l’écart au travail prescrit naît à la fois d’un refus de respecter les procédures et d’un choix délibéré de s’y soustraire pour assurer des résultats. Certains renoncent à une partie du programme qui pénalise les élèves lents sans profit particulier pour les autres. D’autres, pour mieux atteindre les objectifs, renoncent à donner des devoirs à certains élèves ou cessent provisoirement de les évaluer. D’autres trichent avec le prescrit pour des raisons moins défendables : parce qu’ils ne savent ou n’aiment pas faire certaines choses, parce qu’ils ont perdu du temps en début d’année et doivent mettre les bouchées doubles, parce que certains thèmes les mettent en difficulté face aux élèves, parce que… L’écart au prescrit n’est jamais simple à interpréter.

Le désir de piloter les pratiques pourrait conduire à ramener à la norme et au respect obsessionnel du prescrit. Seulement, plus on va vers des métiers qualifiés, moins le problème se pose en ces termes, dans la mesure où la part du prescrit est censée diminuer, le professionnel sachant ce qu’il y a à faire et comment le faire. À la limite, on ne prescrit à un professionnel que des objectifs et une posture éthique, parce que multiplier les prescriptions n’aurait pas de sens : le professionnel est le mieux placé pour analyser une situation et concevoir une stratégie adéquate.

Peut-on en dire autant d’un enseignant ?

 

Faire confiance aux compétences

Nul ne pense que les professionnels vont faire " n’importe quoi " sous prétexte qu’ils ne sont pas enserrés dans un réseau serré de prescriptions. On leur fait confiance sur la base de leurs compétences et de leurs connaissances, on leur prête une forte capacité de résoudre les problèmes, grâce à un jugement professionnel, mariant l’intuition et la raison. Et on les tient pour civilement et pénalement responsables de leurs gestes et décisions.

La conscience professionnelle est aussi une forme de garantie, de même que le contrôle par les pairs. Au Québec on discute de la création éventuelle d’un " ordre des enseignants ", comme il existe un ordre des médecins en France. Comme l’histoire l’associe aux heures sombres de Vichy, l’idée n’est pas particulièrement sympathique. Il reste que, sans être forcément très progressiste, un ordre professionnel est une instance de régulation interne à la profession. La faute professionnelle peut priver du droit d’exercer, sur décision d’un conseil de l’ordre qui exerce un pouvoir plus ou moins clairement délégué par l’État.

Les savoirs universitaires des professionnels constituent un autre type de garantie, de même que tous ceux qu’ils construisent au gré de leur expérience, individuellement ou collectivement. Il n’y a pas que des savoirs scientifiques, il y a des savoirs experts et des savoir professionnels.

Le métier d’enseignant est-il une profession, au sens nord-américain ? Suffirait-il de dire aux enseignants quels sont les objectifs de formation, d’instituer un code d’éthique et de fixer des contraintes, pour les laisser construire des stratégies pédagogiques ? Ou faut-il multiplier les prescriptions ?

Pour l’instant, le métier d’enseignant est une " semi-profession ", avec certains traits des professions à part entière et d’autres qui le rapprochent des métiers d’exécution. C’est ainsi que la responsabilité pénale des enseignants est extrêmement faible. Ils ne sont pas plus responsables d’un défaut d’apprentissage que l’ouvrier qui a mal monté une roue et provoque un accident au sortir de la chaîne. C’est l’entreprise qui est responsable, à elle de prendre d’éventuelles sanctions internes.

Le paradoxe est que les enseignants, sans être véritablement responsables de leurs actions, jouissent en réalité d’une assez large liberté, liée à l’opacité de leur travail et à la réserve de leurs pairs. Si un enseignant empêche tous les élèves de prendre leur récréation trois jours sur quatre, leur donne des devoirs insensés, à hauteur de quatre heures par jour, pratique une ironie féroce et blessante, ses collègues le désapprouvent, mais aucun ne le dénoncera aussi longtemps que les pratiques récusées restent dans la sphère du pédagogique.

On fait confiance aux enseignants parce que, de toute manière, nul n’a les moyens d’aller voir en détail ce qu’ils font. Reste à savoir si cette confiance est basée sur la compétence ou tout simplement sur l’impuissance à contrôler le respect des prescriptions.

Compte tenu de ces réalités et des ambitions du système éducatif, il est temps de prendre une option ferme : dans quel sens voulons-nous faire évoluer le métier d’enseignant ? Vers une autonomie professionnelle accrue et reconnue, avec en contrepartie une plus forte responsabilité ? Ou vers la multiplication de prescriptions et de contrôles ?

Ce débat me paraît un enjeu majeur du dialogue entre chefs d’établissements et corps d’inspection. Une " prolétarisation " moderne guette le métier d’enseignant dans tous les pays où l’explosion de services experts en didactique, en évaluation, en technologie, permet une production prescriptive de plus en plus riche et pointue. Les outils sont à portée de main, la tentation est forte de multiplier les grilles, les séquences, les schémas. Rien ne dit que tous les pays vont résister à cette tentation et cheminer vers la professionnalisation du métier d’enseignant.

Il n’est pas sûr d’ailleurs que tout le monde y ait intérêt : la professionnalisation accroît les responsabilités, mais aussi l’autonomie des enseignants ; elle peut donc affaiblir le pouvoir que prétendent exercer sur eux tant les cadres que les membres de la noosphère, les uns au nom des textes officiels, les autres des savoirs savants. Ce pouvoir, on l’a vu, est largement illusoire, mais l’illusion suffit à quelques-uns et il est pour tous plus facile et habituel de prescrire que de mettre en chemin et de susciter la réflexion. Compte tenu de la prolifération des experts, la tendance dominante pourrait être d’augmenter les prescriptions, les contrôles, la régulation et de bureaucratiser un peu plus le système.

Pour lutter contre cette tendance, il faut donner la priorité à l’évolution progressive et globale du métier. On fera d’autant plus volontiers le deuil d’une hypertrophie des prescriptions que l’on se rendra compte qu’on n’a pas les moyens de les assortir d’un véritable contrôle ou qu’on n’a pas le courage d’affronter les tensions qu’il susciterait.

Parier sur le développement de savoirs partagés, la construction de compétences professionnelles plus pointues, la pratique réflexive, le travail sur l’éthique et les finalités, c’est aussi se mettre en cohérence avec les paradigmes qui prétendent orienter le développement de l’éducation scolaire : socioconstructivisme, éducation à la citoyenneté, prise en compte du rapport au savoir, formation de compétences, autonomisation du sujet, etc.

Il faut cependant se rendre compte que la professionnalisation n’aura d’effets qu’à moyen terme, que rien de décisif ne se fera en un an, voire en cinq. Placer la question du pilotage dans cette perspective à moyen terme conduit à cesser de faire le forcing pour imposer des idées ou des dispositifs isolés - modules, parcours diversifiés, aide méthodologique, projet personnel de l’élève - pour donner la priorité à la formation continue des personnels, aux projets d’établissements, aux processus d’innovation endogènes, aux dispositions qui facilitent la coopération et la pratique réflexive.

C’est évidemment une stratégie fondée sur un pari et des valeurs. Chacun a le droit de développer une vision du pilotage par l’accumulation de prescriptions. Si on va dans ce sens-là, toutefois, la moindre des choses serait de le faire sérieusement, de veiller à ce que les prescriptions soient réalistes, non contradictoires, intelligibles, crédibles, soutenues par les différents acteurs. Et de mettre en place un appareil de contrôle efficace.

Développer la professionnalisation ou piloter les pratiques en accroissant la part prescrite du travail enseignant ? La plupart des systèmes tiennent ces deux fers au feu et se gardent de choisir. Si bien que, de décennie en décennie, ils organisent des colloques pour se lamenter sur l’impossibilité de piloter véritablement les pratiques pédagogiques…

Pour ma part, j’ai choisi mon camp et je n’ai donc aucune intention de contribuer à une ingénierie de la prescription et du contrôle. Cela ne signifie pas que, comme chercheur, je suis prêt à défendre n’importe quelle pratique pédagogique. Mais je ne souhaite pas que les pratiques les plus prometteuses soient imposées par un pilotage bureaucratique. Elles ne garderont leur sens et leur efficacité que si elles sont librement choisies, sur la base d’un raisonnement professionnel et d’une réflexion éthique que nul ne peut décréter. Mais aussi de savoirs partagés.

 

La professionnalisation et les savoirs

La pratique réflexive ne suffit pas, chacun ne peut réinventer la poudre, il importe donc que tous les acteurs aient accès aux savoirs issus de la recherche en éducation et puisse se les approprier et dialoguer avec eux sans les avoir toujours construits eux mêmes. Aujourd’hui, une bonne partie des enseignants de français, à tous les degrés, ne savent même pas que les didacticiens étudient la ponctuation, la conjugaison ou la production de textes, aussi bien du point de vue des opérations en jeu chez l’expert que de leur genèse. Les professeurs de français ont-ils une vague idée des travaux de Fayol sur la ponctuation ? Ce savoir leur serait plus utile que d’être condamnés à répéter pendant vingt ans " Fais des phrases, ponctue, va à la ligne, mets des points et des virgules ", sans avoir la moindre idée de ce qui empêche les apprenants de comprendre des choses aussi simples…

L’état des savoirs en sciences de l’éducation, didactiques comprises, n’a pas réponse à tout. Il y a des savoirs controversés, ou encore trop limités pour aider l’action. Et il ne suffit pas de mettre les savoirs les plus solides à la disposition des enseignants, même dans des publications accessibles et lisibles. Si les enseignants ne sont pas à la base mieux formés en sciences humaines et sociales, ils les ignoreront durant toute leur carrière ou y chercheront de simples recettes.

Influencer les pratiques par le biais des savoirs, c’est informer et former, de toutes les façons possibles : de la plus classique transmission de savoirs constitués jusqu’à l’analyse de pratiques professionnelles et de situations éducatives complexes, qui reconstruit du savoir sans en avoir l’air, en passant par le conseil, la supervision, l’accompagnement de projets et toutes les démarches d’autoévaluation, de réflexion, de confrontation qui contribuent à faire évoluer les représentations et les savoirs.

Du coup, le pilotage partagé des pratiques n’a plus pour premier enjeu d’obtenir le respect de nouvelles normes, mais de favoriser la construction de savoirs dont découleront " naturellement " de nouvelles façons de penser, donc d’enseigner et d’évaluer. Il s’agit donc de réfléchir sur l’ensemble des influences culturelles qui empêchent les enseignants de pratiquer, d’année en année, à peu près de la même façon.

 

Évoluer au-delà de l’inconfort

Le moment décisif, dans le cycle de vie des enseignants, c’est l’atteinte d’une vitesse de croisière. Jusque là, chacun évolue pour réduire son angoisse, sa fatigue ou son inconfort. Une part de régulation se fait spontanément quand les débutants souffrent, quand ils ont peur, quand enseigner leur pose problème au quotidien.

Un enseignant débutant évolue donc jusqu’à ce qu’il ait trouvé ses marques et une vitesse de croisière. Il peut alors s’enfermer dans la routine. Il s’ensuit que l’inconfort ne saurait être le moteur unique de la pratique réflexive, qu’elle doit à terme dépendre en priorité de l’écart aux objectifs et de l’intérêt des élèves.

Que se passe-t-il le jour où un enseignant se dit régulièrement " La journée ne s’est pas mal passée ", alors qu’un tiers de ses élèves n’ont aucun plaisir à venir à l’école et n’apprennent pas grand-chose ? S’il reste aveugle à ce décalage ou persuadé que l’échec est une fatalité, aucun aiguillon ne le poussera à se poser de nouvelles questions. On saisit l’importance de construire, en formation initiale, une identité et une posture réflexives qui stimulent le changement au-delà de la recherche d’un régime de croisière.

Si cette identité et cette posture sont absentes, ni offres de formation continue, ni dispositifs d’accompagnement, ni projets d’établissement n’auront d’effets. Il ne suffit pas de multiplier les ressources et les occasions de formation. On sait bien que ceux dont les élèves en tireraient le plus grand bénéfice ne s’inscrivent pas aux formations continues. Le paradoxe est connu : ceux qui devraient changer sont aussi ceux dont les mécanismes de défense sont les plus efficaces. Ils laissent faire ou raillent les boulimiques qui vont sans cesse en formation continue, travaillent dans une équipe, fréquentent un groupe d’analyse de pratiques, sont au cœur du projet d’établissement ou choisissent d’enseigner dans les zones les plus défavorisées.

Une partie des enseignants sont des forteresses bien défendues. Certaines cachent des pratiques tous à fait équitables et efficaces, forgées par un cheminement solitaire. Que faire lorsque les pratiques d’un enseignant enfermé dans sa forteresse sont au contraire indéfendables dans de nombreux registres ? Il est inutile de fonder de grands espoirs sur la répression, mais illusoire aussi de se contenter de multiplier les ressources de formation. Il faudra, d’une manière ou d’une autre, trouver un cheval de Troie.

 

Du pilotage à l’intervention en face à face

Sauf à rester angélique, il faut bien affronter la question de l’intervention en face à face ou de l’intervention en petits groupes, non pas comme mécanisme de notation ou de répression, mais comme incitation forte et personnalisée à adopter une autre posture professionnelle, celle qui conduira à se former, mais avant cela à se mettre en question, à réfléchir sur ses pratiques, à se rendre sensible à la souffrance ou à l’échec d’une partie des élèves.

S’agit-il de pilotage pédagogique ? Je distinguerai l’intervention elle-même, qui relève d’une pratique d’encadrement, d’accompagnement, voire d’évaluation, de la conception d’un dispositif capable d’atteindre les enseignants qui se protègent de la formation et de la mise en question. Si la réflexion sur le pilotage pédagogique s’arrête au seuil de tels dispositifs, elle ne traite que la partie la plus facile du problème.

On peut se demander : qui doit intervenir auprès des enseignants qui n’évoluent pas spontanément ? Est-ce l’affaire des chefs d’établissement, de l’inspection ou faut-il inventer de nouveaux rôles, inscrits dans de nouvelles structures ?

On retrouve le conflit possible entre contrôle et régulation. Peut-on être dans les deux postures à la fois ? Cela serait plus économique, mais le paradoxe de l’évaluation formative est bien connu : pourquoi dévoilerait-on ses failles à quelqu’un qui, par ailleurs, doit faire le bilan de vos compétences et peut infléchir votre carrière ? Il faudrait être fou pour faire entièrement confiance à un inspecteur chargé de vous noter ou à un chef d’établissement qui est votre supérieur direct.

Les chefs d’établissements et les inspecteurs n’apparaissent donc pas les mieux placés pour contribuer en face à face à la professionnalisation des enseignants dont les pratiques sont défaillantes. Ils peuvent intervenir en urgence, pour sauvegarder les intérêts des élèves. Pour inciter au changement, il faut passer par une relation plus égalitaire, fondée sur une analyse partagée du travail et des obstacles auxquels il se heurte.

 

 

Analyse du travail et feed-back

Comment fais-tu ? Comment raisonnes-tu ? Comment parviens-tu à captiver leur attention ? À gagner leur confiance ? Mais aussi : Pourquoi ne vois-tu pas que cet élève est bloqué ? Pourquoi ne t’intéresse pas cet autre qui semble ailleurs ? Pourquoi, si tu as l’impression qu’ils s’ennuient, ne poses-tu pas la question aux intéressés ? Pourquoi ne téléphones-tu pas aux parents pour comprendre pourquoi leur enfant est aussi perturbé ? Pourquoi ne vérifies-tu pas ton hypothèse sur tel mécanisme de ségrégation en parlant ouvertement avec les élèves ? À ton avis, pourquoi sont-ils aussi agités ? Penses-tu que cette épreuve te renseigne sur leurs acquis ? Ne penses-tu pas que cette tâche marginalise les élèves faibles ?

Ces questions ne sont faciles ni à poser, ni à entendre. Ce sont pourtant les seules qui, s'il n’y a pas d’enjeu de notation, peuvent ébranler une pratique. On ne peut mettre les gens en chemin sans savoir comment ils pensent, comment ils posent les problèmes, quel est leur champ de vision, comment ils construisent des hypothèses, réagissent quand cela ne marche pas, régulent les situations problématiques.

Ce questionnement est plus clinique que normatif. C’est celui d’un moniteur qui forme un pilote et pour cela tente de saisir son raisonnement, de comprendre pourquoi il est aveugle à certains indices, obsédé par certains risques et indifférents à d’autres, trop prompt ou trop lent à réagir à certaines situations.

Il faut une sorte de curiosité, de capacité de s’étonner, de formuler des questions sans complaisance, mais sans jugement de valeur sur la personne et dont les réponses peuvent être relativement sincères, parce qu’elles n’auront d’autres effets que ceux que l’intéressé voudra bien leur donner. On peut faire l’hypothèse que c’est à ce prix qu’on peut réamorcer un travail réflexif mis en sommeil à un certain moment du cycle de vie professionnel, s’il a jamais commencé.

L’entretien d’explicitation, qui fait fureur en éducation, peut être un outil, même si ce n’est pas au départ un outil d’intervention, mais de recherche. On peut s’inspirer de méthodes développées dans le champ de l’analyse du travail par exemple l’autoconfrontation. Ici, ce ne sont pas tant les méthodes particulières qui m’intéressent. On en trouve ou on en construit. Au préalable, il faut développer une posture et une relation réflexives et coopératives, basées sur la confiance et le projet de faire avancer la pratique, hors de toute notation ou incidence institutionnelle.

Peut-on infléchir les rôles du chef d’établissement ou de l’inspecteur dans ce sens ? Cela semble difficile. D’où l’idée de confier le rôle d’interlocuteurs à de nouvelles personnes-ressources. Certains systèmes ont tenté l’expérience. Des enseignants rendent visite à des collègues, les observent, les interrogent, dialoguent avec eux, leur donnent un feed-back. Cela se fait indépendamment de l’inspection, qui peut continuer à évaluer. noter, faire progresser la carrière, mais ne prétend pas réguler les pratiques, ou seulement sur les aspects les plus formels. On peut aussi envisager des interventions en équipes mixtes rencontrant des enseignants individuellement ou en groupe.

 

Ne pas se cacher la tête dans le sable

Il n’y a pas de système d’intervention entièrement convaincant qui soit en même temps facilement réalisable à large échelle, ne serait-ce qu’en raison de son coût et, au moins au départ, du manque d’intervenants qualifiés pour un tel travail.

Sans prétendre résoudre le problème, je voulais simplement le poser et insister sur le fait que l’ensemble des dispositifs nationaux, académiques et locaux qui environnent les gens de stimulations, d’incitations, de projets ne sont pas à la hauteur du défi, parce qu’ils s’adressent aux favorisés, à ceux qui sont déjà en route. Ceux qui maîtrisent tous les codes, ont acquis les bonnes dispositions, font preuve du rapport idoine au savoir, à l’institution et au changement, bénéficient de toutes ces ressources et ne passent à côté d’aucune occasion de se former.

Tant mieux ! Mais comment atteindre les gens qui, à la limite, se retirent de la conversation dès qu’on parle de pédagogie ou dès qu’un désaccord surgit, ou dès qu’ils se sentent un peu mal à l’aise dès qu’ils ne peuvent justifier tout ce qu’ils font.

Peut-on, dans le système éducatif français, imaginer des dispositifs capables de mettre en mouvement les pratiques pédagogiques qui n’évoluent pas spontanément ? C’est loin d’être évident. Les enseignants ont conquis une semi-liberté pédagogique, garantie juridiquement et institutionnellement, défendue par les syndicats. Ce qui veut dire que dès lors qu’un enseignant ne franchit pas la ligne jaune - absentéisme, atteinte aux mœurs, violence ou mépris du programme - on lui laisse une très large autonomie dans son travail. Comment faire évoluer des gens qui demeurent inaccessibles aussi longtemps qu’ils n’ont pas grossièrement violé leurs obligations professionnelles ?

Ce qu’il faut donc négocier d’abord avec les associations d’enseignants, c’est la légitimité et la nécessité de trouver les moyens d’aller chercher les gens là où ils sont, parfois à des années-lumière d’une pratique réflexive. Si la réflexion sur le pilotage n’affronte pas ce problème, elle passe à côté de l’essentiel. On ne peut plus se cacher derrière des dispositifs généraux pendant des décennies, il faudra bien que quelqu’un approche les enseignants autrement que pour les noter, s’intéresse à ce qu’ils font, rompe une forme de solitude protectrice mais aussi conservatrice. Cela ne peut se faire contre la profession et doit donc tenir compte de toutes les craintes d’abus de pouvoir, de mise en concurrence, de salaire au mérite, etc. Contrairement à ce qu’on imagine, la culture de l’évaluation qui tient le haut du pavé ne peut que nourrir des fantasmes et bloquer l’évolution vers des dispositifs coopératifs. L’obsession des indicateurs et du contrôle des résultats est en train de compromettre la conception et la mise en place de systèmes subtils et coopératifs de suivi des personnes !

Il existe une grande complicité dans les systèmes éducatifs pour éviter ce problème. Une bonne partie des inspecteurs soit ne vont presque plus dans les classes, soit y vont pour des raisons bureaucratiques, non pour aider les professionnels à analyser leur travail et à construire de nouvelles compétences. Il y a fuite devant la confrontation. La notation peut n’être elle aussi qu’une fuite, qui arrange tout le monde.

L’analyse, source de régulation, passe par le dialogue plutôt que par la note. Elle demande un temps d’observation pointue, d’entretien, puis le courage de pointer des pratiques discutables, de poser des questions dérangeantes, de suggérer des hypothèses que le praticien n’a pas envie d’entendre, tout cela pour amorcer un processus réflexif qui devrait se poursuivre au-delà de la rencontre.

Aujourd’hui, une partie des enseignants passe entre les gouttes, même s’ils sont formellement " inspectés ". Il arrive qu’en vingt ou quarante ans, personne n’ait jamais dit à Monsieur X ou à Madame Y que cela n’allait pas, qu’il est inéquitable ou inefficace de traiter les élèves ou les programmes de la sorte. Ce n’est pas simplement une question de courage individuel. Le courage de dire ce qui ne va pas doit être, dans une organisation, soutenu par des dispositifs, par des mandats. Au bout du compte, cependant, un visiteur se trouve confronté à un enseignant et doit choisir entre ne rien dire d’utile ou trouver le courage personnel de dire des choses qui peuvent être ressenties comme désagréables, injustes, blessantes.

 

Pour conclure : dilemme

La question du pilotage pédagogique, de sa légitimité, de ses limites est au cœur du débat sur la professionnalisation du métier d’enseignant.

Il ne serait pas heureux qu’en réfléchissant sur leurs stratégies de pilotage, les chefs d’établissements, les inspecteurs, les formateurs et les experts s’apprêtent à se partager le pouvoir pédagogique, sans s’interroger sur la place des enseignants dans le débat ni sur l’orientation que prend ou doit prendre leur métier.

Le dilemme est connu : soit avancer en circuit fermé et inventer de nouveaux dispositifs institutionnels, en mettant entre parenthèses les contradictions du système éducatif et les autres acteurs, en sachant qu’ils finiront bien par se rappeler à notre bon souvenir. Soit les intégrer d’emblée à la réflexion et courir le risque de ployer sous la complexité et l’étendue des divergences…

 

Pour continuer la réflexion

Il n’est pas possible de faire des références aux très nombreuses thématiques touchées ici à propos du pilotage pédagogique. Je me borne donc à indiquer quelques textes dans lesquels les thèses défendues ici sont développées plus substantiellement. Une bonne partie sont disponibles sur Internet :

http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/

Perrenoud, Ph. (1996) Le métier d’enseignant entre prolétarisation et professionnalisation : deux modèles du changement, Perspectives, vol XXVI, n° 3, septembre, pp. 543-562.

Perrenoud, Ph. (1996) Enseigner : agir dans l’urgence, décider dans l’incertitude. Savoirs et compétences dans un métier complexe, Paris, ESF (2e éd. 1999).

Perrenoud, Ph. (1997) Formation continue et obligation de compétences dans le métier d’enseignant, Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation.

Perrenoud, Ph. (1998) Savoir réfléchir sur sa pratique, objectif central de la formation des enseignants ?, Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation.

Perrenoud, Ph. (1998) Évaluer les réformes scolaires, est-ce bien raisonnable ?, in Pelletier, G. (dir.) L’évaluation institutionnelle de l’éducation, Montréal, Éditions de l’AFIDES, pp. 11-47.

Perrenoud, Ph. (1999) Le pilotage négocié du changement dans les systèmes éducatifs, in Lurin, J. et Nidegger, C. (dir.) Expertise et décisions dans les politiques de l’enseignement, Genève, Service de la recherche en éducation, Cahier n° 3, pp. 88-103.

Perrenoud, Ph. (1999) L’innovation toujours recommencée… ou peut-on apprendre de l’expérience des autres ?, in Ministère de l’Éducation nationale, de la recherche et de la technologie, Transfert de l’innovation, Paris, pp. 19-27.

Perrenoud, Ph. (1999) L’établissement, principal garant du renouveau pédagogique, Le Point en administration scolaire (Québec), Vol. 2, n° 1, Cahier central " Le point de réflexion ", pp. 1-16.

Perrenoud, Ph. (2000) L’autonomie au travail : déviance déloyale, initiative vertueuse ou nouvelle norme ?, Cahiers Pédagogiques, n° 384, mai, pp.14-19.

Perrenoud, Ph. (2000) Du curriculum aux pratiques : question d’adhésion, d’énergie ou de compétence ?, Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation.

Perrenoud, Ph. (2001) Mettre la pratique réflexive au centre du projet de formation ?, Cahiers Pédagogiques, janvier, n° 390, pp. 42-45.

Perrenoud, Ph. (2001) Préparer les enseignants au changement, Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation.

Perrenoud, Ph. (2001) Les sciences de l’éducation proposent-elles des savoirs mobilisables dans l’action ?, Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation.

Perrenoud, Ph. (2001) Obligation de compétence et analyse du travail : rendre compte dans le métier d’enseignant, in Lessard, C. et Meirieu, Ph. (dir.) L’obligation de résultats en éducation, Paris, ESF, à paraître.

  

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