Journal n°125

Le point de vue du futur directeur de la SSR

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Récemment nommé pour succéder à Roger de Weck à la tête de la SSR, au 1er octobre 2017, Gilles Marchand a contribué à l’ouvrage «Médias publics et société numérique». Il livre son point de vue sur le rôle des médias de service public face à la déferlante numérique

Quelle est la stratégie de la SSR pour fidéliser un public qui délaisse de plus en plus les supports traditionnels TV et journaux pour se tourner vers les médias numériques?

Gilles Marchand: Précisément celle de proposer des contenus intéressants sur ces nouvelles distributions. Et d’investir dans l’innovation. Il y a un double enjeu: l’écriture, la narration, la construction des sujets. Puis ensuite l’utilisation des bons canaux de distribution, pour toucher les différents publics, en flux ou à la carte. En fait, les contenus de la SSR n’ont sans doute jamais été autant consultés qu’aujourd’hui. Mais la difficulté est qu’il est presque impossible de consolider toutes ces audiences multiples.

Une télévision de service public peut-elle rester généraliste, et continuer à s’adresser à tous ses publics, dans un environnement numérique qui a pour effet de segmenter les publics?

Oui certainement. C’est même essentiel pour qu’elle garantisse sa différence avec les offres commerciales, et donc sa légitimité. Le service public ne doit pas «choisir» son public. Il s’adresse à tous, dans tous les domaines. On observe toujours de fortes audiences qui rassemblent le public, en direct. Comme par exemple le 19:30, les rendez-vous sportifs et les magazines de prime time. Le service public doit toutefois être aussi en mesure de proposer une consultation de ses programmes, à la carte, et toucher ainsi des populations spécifiques, avec des intérêts sectoriels.

De plus en plus de voix s’élèvent pour dénoncer le rôle des médias sociaux et d’Internet comme propagateurs de contre-vérités. La campagne électorale américaine vient d’en donner un exemple retentissant. Les médias de service public n’ont-ils pas un rôle citoyen à jouer afin de dénoncer ces contre-vérités?

Oui. Les médias de service public jouent pleinement leur rôle lorsqu’ils permettent aux citoyens d’élaborer leurs propres opinions. Pour cela, ils doivent proposer une information équilibrée, vérifiée, fiable. Ne mener aucun combat partisan et corriger les erreurs le cas échéant. C’est une contribution décisive au bon fonctionnement de la société, particulièrement dans des systèmes de démocratie directe comme le nôtre. —

Quels médias de service public pour le XXIe siècle?
Une contribution au débat