17 mars 2022 - AC

 

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Un nouveau choc pétrolier dans un monde déjà fragilisé

 

 

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Michalis Nikiforos


La spectaculaire augmentation des prix des matières premières depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, en particulier l’explosion des prix du pétrole, faisait l’objet d’une analyse par le quotidien Le Temps le 13 mars dernier. Le choc économique, d’une ampleur comparable à celui observé dans les années 1970, pourrait faire basculer l’économie mondiale dans une récession.

Professeur au Département d’histoire, économie et société (Faculté des sciences de la société), Michalis Nikiforos rappelle cependant que le niveau actuel de ces prix «a déjà été observé entre 2008 et 2014, et si on les ajuste pour tenir compte de l’inflation, ils étaient supérieurs à l’époque». Le chercheur relève également que, contrairement à une idée reçue, l’inflation due au choc pétrolier n’avait pas tué la croissance économique dans les années 1970. «L’expansion économique au niveau mondial avait déjà ralenti avant le premier choc pétrolier, à cause d’une série de facteurs incluant le recul de la productivité, l’effondrement du système monétaire international issu des accords de Bretton Woods, la diminution du dynamisme de certaines économies importantes et la disparition de l’accord social qui prévalait dans les premières décennies de l’après-guerre, analyse Michalis Nikiforos. Ces éléments ont provoqué la fin des Trente Glorieuses, l’inflation n’a joué qu’un rôle secondaire. Dans une large mesure, l’inflation de l’époque était le résultat de la crise et non sa cause.»

Ce qui fait la différence entre la situation actuelle et celle des années 1970, c’est que certains mécanismes de propagation de l’inflation alors à l’œuvre ne sont plus visibles aujourd’hui. «Dans les années 1970, les syndicats étaient suffisamment puissants pour obtenir des augmentations de salaires suite à la hausse des prix, poursuit le chercheur. Ce n’est plus le cas.» Michalis Nikiforos estime également que l’économie mondiale se trouvait encore en situation précaire lorsque la crise russe a éclaté: «Même si on observe actuellement une reprise, l’économie mondiale se trouve toujours en situation de pandémie», relève le chercheur. «Elle était déjà fragile avant le covid, à cause du niveau de dette élevé des États-Unis et des tensions déflationnistes dans l’Union européenne.»

Pour atténuer le choc, Michalis Nikiforos se dit favorable à des mesures de nature budgétaire, qui diminueraient l’impact de la hausse du prix du brut sur la consommation et la croissance. Il relève que «la situation actuelle peut donner un élan politique supplémentaire en faveur de la transition écologique, que l’Union européenne a prévu de financer en émettant des obligations».

 

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