11 novembre 2021 - UNIGE

 

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Les rivières fossiles d’Égypte racontent la menace du réchauffement climatique

Une équipe dirigée par l’UNIGE a étudié les rivières fossiles du Sahara égyptien, afin de reconstruire les taux de précipitations de la région qui ont conduit à une forte migration de la population des rives du Nil il y a 10'000 ans.

 

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Une image satellite montre les morphologies des rivières fossiles du sud de l’Égypte. Cette étude démontre que ces rivières étaient intensément actives pendant la période humide africaine.
Image: Esri World Imagery

Il y a 10'000 ans, lorsque le Sahara égyptien était encore vert, les populations des rives du Nil ont dû subitement migrer. La cause? les changements climatiques. Comme elle l’explique dans un article paru dans la revue Quaternary Science Reviews, une équipe de géologues dirigés par Sébastien Castelltort, professeur associé au Département des sciences de la Terre (Faculté des sciences) a en effet constaté qu’à la suite d’une rapide augmentation de la température d’environ 7 °C, la fréquence des événements de fortes pluies a été multipliée par quatre, augmentant les crues des rivières et forçant les riverains à se déplacer vers le centre du pays.

L’Afrique a connu une période humide, entre 14'800 et 5500 ans avant notre ère, caractérisée par un Sahara encore vert. La région du nord du lac Nasser en Égypte, aujourd’hui aride, ne garde de traces de ce passé verdoyant que des rivières fossilisées. Ce sont elles qui ont permis de déterminer quelles étaient les quantités d’eau en circulation, ainsi que les quantités et les fréquences des pluies.
 
Premier indice: les galets. Les gros, par exemple, sont les témoins d’un important débit d’eau, capable de les transporter. La profondeur et la largeur de la rivière, elles,  permettent de retracer le débit d’eau en mètres cubes par seconde. Associées à l’estimation de la surface du bassin de drainage, soit la zone qui connecte les eaux en amont de la rivière, ces données fournissent le taux de précipitation responsable du transport des sédiments étudiés.
Quant à la datation des rivières, elle a été réalisée à partir de l’analyse du carbone 14 contenu dans la matière organique piégée dans le lit fossilisé ainsi que de la mesure de la luminescence des quartz présents dans les sédiments.
 
Effectuées sur six rivières de la région, ces mesures ont confirmé que les rivières étaient actives entre 13'000 et 5000 ans avant notre ère avec des précipitations très intenses, de 55 à 80 millimètres par heure, et, surtout, 3 à 4 fois plus fréquentes qu’avant la période Africaine humide. Résultat: les crues violentes se sont multipliées, rendant les berges inhospitalières et poussant les riverains à déménager. Ce déchaînement des éléments coïncide également avec une augmentation de l’ordre de 7°C des températures de cette région. De quoi réfléchir aux conséquences du réchauffement climatique actuel.

 

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