17 décembre 2020 - Alexandra Charvet

 

Vie de l'UNIGE

Quand les universités parlent d’une même voix

Les hautes écoles du pays prennent rarement position dans le débat démocratique. Enclines à favoriser l’échange des idées plutôt qu’à livrer des consignes de vote, ces institutions se sont toutefois mobilisées de manière concertée ces dernières années sur des sujets d’importance capitale pour elles.

 

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Illustration: R. Crameri

 

Le 9 février 2014, la Suisse acceptait l’initiative populaire «Contre l’immigration de masse». Le lendemain, les hautes écoles se retrouvaient prises de court par une décision inattendue provoquant l’exclusion de la Suisse des programmes de l’Union européenne (UE). Ce manque d’engagement vis-à-vis d’une votation qui impactait directement les milieux académiques les a incités à accorder une plus grande importance à leur communication politique. En septembre dernier, les hautes écoles romandes et leurs étudiant-es se sont ainsi mobilisé-es ensemble contre l’initiative de «limitation», dans un message au peuple suisse (lire l’opinion publiée dans Le Temps). Dans la même veine, swissuniversities publiait une recommandation de vote.

«C’est la première fois qu’une initiative mobilisait ainsi conjointement les milieux académiques, relève Anne Laufer, responsable de la Cellule des affaires publiques de l’UNIGE créée en 2016. Grâce à leur faîtière swissuniversities, les hautes écoles ont pu faire entendre leur voix avec plus de cohérence et plus de force.» Le travail des public affairs reste toutefois différent de celui des lobbyistes. «La démarche de nos institutions est d’expliquer aux citoyennes et citoyens le plus clairement possible, avec intégrité, des dynamiques ou des sujets complexes comme la relation de la place scientifique suisse avec l’Union européenne ou comme l’expérimentation animale, précise Anne Laufer. Nous visons la transparence, avec des informations factuelles, des chiffres et des histoires concrètes permettant d’illustrer les enjeux dans ces domaines. Dans une démocratie, il est important de donner accès à une information honnête et complète pour que chacun-e puisse voter au plus près de ses convictions.»

Bien qu’elles partagent nombre de problématiques communes, les hautes écoles n’étaient guère habituées jusqu’ici à coordonner leurs efforts en matière de communication politique. «Mieux expliquer nos pratiques prend du temps, d’où la nécessité d’opérer davantage ensemble», constate Anne Laufer. Joignant le geste à la parole, en octobre 2019, l’UNIGE se mobilisait ainsi pour la première fois de concert avec les HUG afin de recommander le rejet de l’initiative «Pour un meilleur contrôle de l’expérimentation animale». «Nos institutions n’ont pas attendu ces initiatives pour empoigner ces questions, nuance Anne Laufer. Elles ont notamment mené une politique active visant à limiter le recours aux animaux dans la recherche et à développer des méthodes alternatives. Elles œuvrent aussi pour améliorer l’information sur l’utilisation des animaux dans la recherche. Les universités doivent s’exprimer sur la question, afin de mieux faire comprendre pourquoi et comment cette recherche est menée.»

Si parler d’une seule voix rend plus fort, ce travail de concertation permet également d’estimer la pertinence d’une prise de position. Les répercussions d’une votation sur le milieu académique sont rigoureusement évaluées. «Contribuer à une campagne peut aussi se révéler contre-productif, avertit Anne Laufer. Les citoyen-nes, parfois déconnecté-es des universités, peuvent avoir l’impression qu’il s’agit de combats réservés aux élites et sans conséquences pour la population. Pourtant, si la Suisse dispose de bons hôpitaux, c’est grâce à la recherche de pointe menée dans ce domaine dans le pays. Notre capacité à attirer des cerveaux européens a un impact direct sur le bien-être et la qualité de vie au niveau local.»

 

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