28 octobre 2021 - Alexandra Charvet

 

Vie de l'UNIGE

«Ma génération ne connaît pas ce passé honteux»

Étudiante en relations internationales, Daniela Wildi est l’une des lauréates du Concours national 2021 de la Fondation science et jeunesse, avec son film documentaire «J’étais un enfant qu’on ne voyait pas». Portrait.

 

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Daniela Wildi. Image: DR

 

Elle n’a même pas 21 ans et déjà un joli palmarès. Le documentaire qu’elle a réalisé sur les placements extra-familiaux en Suisse durant le XXe siècle a en effet été récompensé à de multiples reprises: premier prix au Festival ciné jeunesse suisse 2020 et au Prix Jeunesse de Lucerne 2020, sélection au Festival du film ethnographique Regard bleu 2020, prix 2020 de la Fondation Peter-Dolder pour la démocratie… 

Sportive – elle a couru son premier marathon en 2019 à Berlin –, amatrice de culture asiatique – elle a passé un an en Chine pour apprendre le mandarin – et passionnée par les études – elle entame sa 2e année du Bachelor en relations internationales (BARI) –, Daniela Wildi s’intéresse aux gens et à leur histoire, en particulier aux personnes stigmatisées par la société.

 

Pour son travail de maturité en 2019, elle a voulu être créative. Elle s’est tournée vers le cinéma en réalisant un documentaire de vingt-cinq minutes sur les placements abusifs d’enfants en Suisse. «C’est mon professeur qui m’a parlé de ce triste chapitre de l’histoire suisse, raconte la jeune femme. J’ai été très choquée quand j’ai appris que certain-es de ces enfants avaient subi des stérilisations forcées et servi de cobayes pour des essais de médicaments. Ma génération ne connaît pas ce passé honteux, alors que cela aurait pu concerner nos parents ou nos grands-parents.»

wildi_J_2.pngAprès avoir choisi son sujet, le plus difficile pour Daniela Wildi a été de trouver les protagonistes de son film, des enfants placé-es qui voulaient bien raconter leur histoire. En effet, les institutions ne communiquent pas leurs noms. C’est le président de Verein FremdPlatziert, une association d’aide aux victimes de placements, qui, sentant le potentiel du film, a contacté ses membres. «Par ce biais, j’ai pu recruter trois des protagonistes. Puis, lors d’un événement pour les victimes de placements abusifs, je regardais une peinture quand une femme m’a approchée en disant: "C’est l’ombre qui est toujours avec moi, parce que j’étais un enfant qu’on ne voyait pas." Cette rencontre m’a donné l’idée du titre de mon film.» Par la suite, elle la contactera pour participer au projet. Résultat: un documentaire authentique et poignant, compilant des sources historiques, et qui donne la parole aux victimes. En français et en suisse-allemand, sous-titré en anglais, il devrait être diffusé dès l’an prochain, mais est déjà disponible sur demande.

Grâce au prix remporté au Concours national de la Fondation science et jeunesse, la jeune étudiante a été reçue début octobre par la secrétaire d’État à la Formation, à la Recherche et à l’Innovation, Martina Hirayama. «Nous avons discuté avec elle et elle a pris le temps de nous écouter, raconte Daniela Wildi. C’est très motivant pour la suite: si l’un de nos projets rencontre du succès, alors beaucoup de portes s’ouvrent à nous.» De plus, un prix spécial de la Fondation permettra à Daniela Wildi d’effectuer un stage dans une ambassade de Suisse à l’étranger. Une vraie opportunité pour elle: «Cela n’aurait jamais été possible d'effectuer un tel stage en tant qu’étudiante de bachelor et, maintenant, je vais pouvoir rencontrer des diplomates et étoffer mon réseau.»

Son avenir après le BARI, Daniela Wildi l’imagine sous la forme d’un stage au Département fédéral des affaires étrangères ou peut-être d’un Master in International Affairs and Governance, qu’elle effectuerait entre l’Université de Saint-Gall et la Yonsei University en Corée du Sud. Quand on lui demande si un autre film trotte déjà dans sa tête, elle répond sincèrement: «Pour cela, il me faut une idée que je n’ai pas encore trouvée.»

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