23 septembre 2021 - Jacques Erard

 

Vie de l'UNIGE

L’UNIGE s’engage en faveur des étudiant-es avec un trouble du spectre autistique

Une convention de collaboration lie désormais l’Université, la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation et la Fondation Pôle Autisme. Cet accord permettra de faciliter l’intégration des étudiant-es ayant reçu un diagnostic d’autisme en leur proposant des aménagements et des mesures d’accompagnement.

 

 

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Photo: DR


L’UNIGE a pris, ces dernières années, un certain nombre de mesures visant à mieux inclure les personnes ayant des besoins spécifiques dans leur parcours universitaire. La convention de collaboration signée le 17 août dernier par le Pôle Santé de l’Université, le Pôle Cité de la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (FPSE) et la Fondation Pôle Autisme (lire ci-dessous) représente un nouveau et important développement dans ce sens, puisqu’elle porte sur les  étudiant-es ayant reçu un diagnostic de trouble du spectre autistique (TSA).

 

Comme son nom l’indique, le TSA recouvre un assez large éventail de symptômes. «Les personnes concernées atteignant le seuil universitaire ne souffrent pas de déficiences intellectuelles, indique Arnaud Pictet, psychologue au Pôle Santé de l’UNIGE. Certaines d’entre elles possèdent même des capacités intellectuelles supérieures à la moyenne. En revanche, elles présentent souvent des déficits de planification qui vont se traduire par des difficultés au moment de faire les démarches administratives. Les étudiant-es avec TSA ont par ailleurs du mal à interpréter leur environnement social, à saisir l’implicite et les expressions émotionnelles, ce qui peut occasionner de l’anxiété sociale et les pénaliser dans les situations où un travail en groupe ou une présentation orale est exigé. Et ces symptômes sont souvent cumulés.»

L’inscription à l’Université, avec son lot de démarches administratives, constitue un premier obstacle de taille pour ces étudiant-es. «Il leur arrive de renoncer à l’inscription pour cette raison, alors qu’elles ou ils auraient les capacités de faire des études», explique Pierre Moiroud, responsable du Pôle Santé de l’UNIGE. Les examens représentent une autre source de stress et d’anxiété particulièrement éprouvante, raison pour laquelle des aménagements existent déjà dans les facultés.

La convention de collaboration permettra d’abord aux étudiant-es avec TSA ou n’ayant pas encore reçu de diagnostic de bénéficier d’une évaluation approfondie et de faire reconnaître leurs besoins spécifiques. Cette évaluation sera menée soit par la Consultation pour les personnes avec TSA du Pôle Cité de la FPSE soit par la Fondation Pôle Autisme, qui proposera des aménagements individualisés soumis à la validation d’une Commission des besoins particuliers. Afin de mieux connaître les difficultés rencontrées par ces étudiant-es lors de leur parcours académique, une recherche qualitative va par ailleurs être menée au sein de la FPSE. «Cette étude nous permettra de prévoir des mesures adaptées, relève la professeure Maude Schneider, responsable de la Consultation TSA du Pôle Cité de la FPSE. Il s’agira ensuite de faciliter l’accès à l’information sur ces différentes mesures par le biais d’une plateforme dédiée sur le web.»

À court terme, l’objectif serait de proposer aux étudiant-es avec TSA un accompagnement tout au long du semestre, sous la forme de coaching ou de pairing avec d’autres étudiant-es. «L’encadrement aux seuls moments charnières du cursus comme les examens ou l’orientation n’est pas suffisant, le parcours académique étant jalonné d’échéances et exigeant une planification régulière, souligne Maude Schneider. Nous envisageons aussi de nous appuyer dans ces démarches sur l’association Autisme Genève qui est en première ligne dans l’accompagnement des personnes avec TSA et leur famille».

L’Université envisage également une campagne de sensibilisation auprès de la communauté universitaire afin de compléter ce dispositif. Elle s’adresserait en particulier aux collaborateurs/trices ayant des contacts réguliers avec les étudiant-es, comme les conseillers/ères académiques, pour qu’elles et ils disposent de clés de compréhension sur les principales difficultés rencontrées par les personnes avec TSA.

«L’autisme concerne tout le monde»

metin-arditi.jpgIl y a sept ans, Metin Arditi commence l’écriture d’un roman intitulé L’enfant qui mesurait le monde. Dans ce récit, les habitant-es d’une île grecque sont en proie à un conflit interne. L’écrivain choisit de confier à un enfant la tâche de ramener la paix. Au fil de l’écriture, son personnage prend une consistance particulière. Il en parle à Stephan Eliez, professeur de la Faculté de médecine, qui lui dit que son enfant est autiste. «Je ne savais rien à ce sujet, raconte Metin Arditi. Je me suis donc documenté, j’ai écouté des interviews d’enfants autistes. J’étais bouleversé par ces témoignages. Nous sommes tous et toutes, à un moment ou à un autre de nos vies, confronté-es à des situations où nous éprouvons de la difficulté à nous exprimer et où nous ressentons un sentiment de grande solitude et d’abandon. Les personnes atteintes de TSA ont le même ressenti, à un degré 1000 fois plus élevé. L’autisme est un drame qui ne peut pas nous laisser indifférents et qui concerne tout le monde.» En novembre 2015, alors qu’il vient d’envoyer son roman à son éditeur, l’écrivain reçoit la visite de Stephan Eliez qui lui propose d’assumer, à sa suite, la présidence de la Fondation Pôle Autisme, créée deux ans auparavant avec pour objectif d’améliorer la prise en charge des personnes avec TSA à Genève et en Suisse romande.

À l’heure où de nombreuses universités en Europe et aux États-Unis succombent aux appels du wokisme – un mouvement qui revendique la non-mixité dans les réunions de personnes appartenant à des minorités – Metin Arditi estime que la démarche conjointe de la Fondation et de l’UNIGE va dans la bonne direction: «Les mesures prises par l’Université visent l’intégration en permettant aux étudiant-es avec autisme de vivre leur trajectoire universitaire en harmonie avec les autres étudiant-es et avec la société. Elles sont à ce titre exemplaires. La position de Genève comme pôle d’excellence dans la prise en charge de l’autisme s’en trouve également renforcée.»

 

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