Méthodes et problèmes

L'autobiographie mythique

Dominique Kunz Westerhoff, © 2005
Dpt de Français moderne – Université de Genève

III. Le mythe romantique

Il faut néanmoins remonter à l'époque romantique (début du règne bourgeois, dit méchamment Barthes) pour voir s'établir le lien intrinsèque et délibéré du mythe et de la littérature moderne. Les romantiques cherchent à réagir à une longue désacralisation des récits mythiques. En effet, au XVIIe siècle, la querelle des Anciens et des Modernes a vu lesdits Modernes (Perrault, Fontenelle) contester l'usage des mythes, leur vraisemblance, leur bienséance. Cette laïcisation s'est poursuivie à l'âge des Lumières, où le même Fontenelle, puis les Encyclopédistes, adoptent une perspective scientifique et critique sur ce qu'ils appellent les fables. Les traitant comme des superstitions, fondées sur l'ignorance et l'erreur, ils cherchent à établir les conditions de leur apparition et leur nécessité pour l'esprit de l'homme. Ils leur dénient donc toute valeur de connaissance, autre que de ceux qui les ont inventés: ils fondent l'histoire des religions sur l'étude des chimères mythiques.

Le romantisme, au contraire, vise à reconstruire le mythe, et à retrouver à travers lui un nouveau rapport de l'homme avec le monde. Il veut inverser ce processus de réduction qui a conduit des récits fondateurs à des allégories ornementales. Le philosophe Friedrich Schlegel propose ainsi, dans son Entretien sur la poésie en 1800, de transformer les symboles en mythe, et de ne plus faire dire aux mythes autre chose que ce qu'ils racontent: le mythe sera tautologique, tautégorique.

Edition: Ambroise Barras, 2005