Méthodes et problèmes

Le journal intime

Dominique Kunz Westerhoff, © 2005
Dpt de Français moderne – Université de Genève

III.2. Journal, mémoires et chronique: la règles des genres

Le journal se laïcise progressivement au cours de la Renaissance. En se sécularisant, le cadre diariste se met alors au service d'une observation historique et sociale, qui le rapproche de genres littéraires voisins: les mémoires, constituant le récit rétrospectif d'une existence envisagée sous son angle historique, c'est-à-dire non personnel; et la chronique, journal extérieur, impersonnel, ou compte-rendu journalier d'une époque. Les premiers journaux apparus dès la Renaissance ne sont pas attachés à la personnalité intime, même s'ils notent des faits au jour le jour. Ainsi, le Journal d'un bourgeois de Paris, anonyme du XVème s., le Journal de Pierre de l'Estoile au XVIème s., ou encore le Journal de Samuel Pepys au XVIIème s., œuvre d'un bourgeois anglais, constituent certes des journaux, représentatifs d'un état social et d'une époque. Ils peuvent figurer l'existence quotidienne d'un individu, même insignifiant comme l'est un simple bourgeois, et même dans ses aspects les plus triviaux, mais ils ne portent pas sur son intériorité. Ils présentent une forme journalière, sans l'intimité d'un sujet. Ce n'est qu'à la fin du XVIIIème s. que ces deux aspects vont converger, pour donner naissance au journal intime.

Edition: Ambroise Barras, 2005