Méthodes et problèmes

Versification

Laurent Jenny, © 2003
Dpt de Français moderne – Université de Genève

II.3.2. Affaiblissement de la césure

La césure peut se trouver affaiblie chaque fois que la netteté de la reconnaissance du nombre est atteinte.

Ce peut être le cas si un premier hémistiche finit par un e caduc interconsonantique (e6// = césure lyrique) ou si un un second hémistiche commence par un e caduc interconsonantique (//e7 = césure enjambante). Ces types de césure étaient possibles jusqu'à la Renaissance parce que le e caduc était prononcé même en fin de mot. Depuis l'amuissement du e caduc à la Renaissance, la diction peine à prononcer des e caduc en fin d'hémistiche lorsqu'ils sont suivis par une césure, laquelle implique un certain arrêt de la voix, ou lorsqu'ils sont rejetés dans l'hémistiche suivant. C'est pourquoi depuis la Renaissance, ces césures sont proscrites. Elles ont été néanmoins réintroduites à la fin du 19e siècle comme transgressions métriques préparant la ruine du vers compté.

Périssez! puissance, // justic(e), histoire, à bas! (e6// = césure lyrique)

Rimbaud

Bonté, respect! Car qu'est-//ce qui nous accompagne (//e7 = césure enjambante)

Verlaine

Lorsque la césure tombe fréquemment entre des termes étroitement liés syntagmatiquement, il y a aussi contradiction entre la netteté du décompte métrique des syllabes et la diction anti-grammaticale du vers. La multiplication de ces atteintes finit par entraîner le dérèglement du jeu du vers (à partir de Rimbaud).

Mon Esprit! Tournons dans // la Morsure : Ah! passez
Républiques de ce // monde! Des empereurs (proclitiques + césure)

Rimbaud

Lorsque la position de césure se trouve à l'intérieur d'un mot, l'identification du mètre est rendue impossible. Le vers est non césurable. On peut le considérer comme pseudo-métrique.

Nous la voulons! Indus//triels, princes, sénats

Rimbaud

Edition: Ambroise Barras, 2003-2004