Unité de russe

Journée d'étude "De la chose au fait : les cultures matérielles de l'avant-garde"

 Le 10 mai 2019, l'unité de russe organise une journée d'étude intitulée

"De la chose au fait : les cultures matérielles de l'avant-garde"

 

Présentation :

Si le XXe siècle s'est déroulé sous l'égide d'un intérêt pour le rapport entre les mots et les choses, nous aimerions quant à nous concentrer notre attention sur le rapport entre les choses (вещи) et les faits (факты). Et il ne s’agit pas seulement ici de rendre son dû à l’apport théorique de l’avant-garde russe, qui s’est efforcée de donner au mot le statut de chose et à la littérature celui de fait.

Ce sont probablement les choses « sonores », ainsi que les « taches de couleur » qui, les premières, ont affirmé leur autonomie vis-à-vis du monde des significations, glissant peu à peu dans le domaine du fait. Elles furent suivies de près par les choses photographiques, cinématographiques, puis littéraires, envisagées à leur tour comme objets facturés et comme fait artistique. Les choses se révélèrent non seulement « faites », mais liées à un milieu matériel et à une infrastructure technologique, sans lesquelles elles n’existent pas « en tant que telles ». La culture matérielle permet de lier des faits d’ordres divers, en montrant comment des productions langagières sont tributaires de la matérialité quotidienne, elle permet aussi d’expliquer « le cours des idées par le cours des choses ».   

Si la théorie littéraire a depuis longtemps appris à prendre en considération le « contexte social », souvent elle ne sait que faire du contexte technologique. Pourtant, le formalisme russe d’abord, puis la factographie du LEF ont dessiné de nombreuses trajectoires de pensées concernant les liens entre faits littéraires et faits techniques. Viktor Chklovski fut l’un des premiers à évoquer la nécessité de réintégrer les choses dans la théorie et dans la littérature, Sergueï Tretiakov parlera plus explicitement de « chose, enseignant à la participation », tandis que Rodtchenko parlera même de « chose-camarade ». Les faits procèdent des choses, voire, en un sens, se confondent avec elles : lorsqu’on commence à parler des choses, on ne peut éluder la question de leur production, de ce qui est fait par la main de l’homme. Mais là où les choses révèlent leur « facture », les questions techniques (« Comment est fait Le Manteau de Gogol ? ») se doublent de questionnements institutionnels (« Comment être écrivain ? ») et interrogent les diverses façons d’être un homme.    

En analysant les cultures matérielles de l'avant-garde russe à travers le prisme des méthodes, dont l'apparition même est débitrice de leur élaboration conceptuelle, nous comptons nous concentrer sur les facteurs de production littéraire, tels que la matérialité technique, les instruments d’écriture et les répertoires gestuels.

 

17 avr. 2019

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