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Les écrans nuisent au sommeil des adolescents

Au travers d’une étude portant sur plusieurs centaines d’adolescents, des chercheurs de l’UNIGE et des HUG préconisent l’arrêt des écrans au plus tard à 21h.

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Aujourd’hui, séries télévisées, réseaux sociaux ou encore jeux vidéo envahissent nos soirées et nos nuits. Le temps passé devant des écrans au détriment du sommeil, en particulier par les adolescents, semble ainsi excessif. Or, chez l’enfant et l’adolescent, un sommeil en qualité et quantité suffisantes est crucial pour le bon développement du cerveau et des fonctions cognitives ainsi que pour leur santé mentale. De plus, passer ses soirées sur un écran réduit forcément le temps de sommeil, ce qui augmente à long terme les risques d’obésité, d’hypertension et de troubles de l’humeur. C’est pour mieux connaître les effets directs et indirects des écrans sur les jeunes que des chercheurs de l’Université de Genève (Faculté de Médecine, Faculté de Psychologie et Sciences de l’Education, Bioscope) et des HUG (Centre de Médecine du Sommeil, et Service Santé Jeunes) ont mené une large étude auprès de près de 600 élèves en Suisse romande et en France, âgés de 12 à 19 ans. Les résultats de cette étude, publiés dans la revue Sleep, évalue pour la première fois l’importance de ce phénomène. Les mesures du sommeil, des habitudes d’utilisation des écrans, et des performances cognitives recueillies sur plusieurs semaines révèlent en effet que les conséquences délétères du manque de sommeil disparaissent si l’on réduit l’exposition aux écrans après 21h.

Les résultats publiés aujourd’hui par les chercheurs genevois sont sans appel: le temps d’exposition aux écrans après 21h corrèle négativement le temps total de sommeil. Ainsi, plus les adolescents passent du temps sur les écrans, plus l’heure d’endormissement est retardée et la durée de sommeil réduite. « Ceci n’est pas seulement dû au remplacement du temps de sommeil par le temps à regarder les écrans, car d’autres activités, telle que la lecture, n’entraînent pas de telles perturbations de sommeil, » explique Aurore Perrault, première auteure de l’article et chercheuse au Département des neurosciences fondamentales de la Faculté de médecine de l’UNIGE. En effet, le type d’activités effectuées sur les écrans implique un niveau d’excitation et de stress susceptible de retarder l’endormissement. De plus, l’exposition à la lumière des écrans, et surtout aux longueurs d’onde des lumières bleues, perturbe le cycle veille sommeil. Une telle exposition lumineuse le soir va retarder la production de mélatonine et donc la propension à s’endormir.

« Le temps d’exposition aux écrans après 21h affecte également le comportement à l’éveil. Les performances scolaires sont moins bonnes, la fatigue diurne est augmentée, et les signes de détresse psychologique sont plus importants, » souligne Virginie Sterpenich, collaboratrice scientifique au Département des neurosciences fondamentales, qui a coordonné ces travaux.

Dans un deuxième temps, 183 élèves ont accepté de restreindre leur utilisation des écrans après 21h pendant 15 jours. Cette mesure a entrainé une nette augmentation du temps de sommeil, ainsi qu’une amélioration de l’attention et des performances pendant la journée.

Les écrans : nouvelle priorité de santé publique

Cette étude représente une étape indispensable pour développer des stratégies visant à lutter contre le manque de sommeil lié à l’usage des nouvelles technologies, et en particulier des activités sur écrans. Il s’agit d’une problématique de santé publique devenue centrale pour la santé. « Il est cependant possible de contrer les effets néfastes des écrans en diminuant leur utilisation le soir avant le coucher », indique Sophie Schwartz, professeure à la Faculté de médecine de l’UNIGE. « Il faudrait peut-être aussi décaler les horaires scolaires pour mieux tenir compte du biorythme des adolescents qui vivent en perpétuel jetlag. » En effet, repousser d’une heure ou deux le début de l’école le matin permettrait non seulement de tenir compte de cette évolution sociétale mais également du décalage naturel – physiologique - du cycle veille-sommeil qui caractérise l’adolescence. Parce que le manque de sommeil affecte la santé et les capacités d’apprentissage, un changement d’horaire scolaire est à considérer avec grand sérieux et fait actuellement l’objet d’une enquête sociologique pour en déterminer la faisabilité et l’acceptabilité.

Une brochure d’information maintenant disponible

Ce travail a aussi débouché sur la rédaction d’une brochure d’information à l’attention du grand public et des professionnels de la santé scolaire, et la création de matériel pédagogique et un programme formation pour les enseignants, disponible sur le site du Bioscope de l’UNIGE .

21 juin 2019

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