
[992] WOMEN_HUMANITARI@NS l’équipe de recherche examine les questions suivantes:
- Où sont les femmes dans l’histoire de l’aide humanitaire ?
- Quel type de savoir ont produit ces femmes, en assistant les victimes qu’étaient les soldats blessés et malades, les prisonniers et les réfugiés ?
- Les pratiques humanitaires étaient-elles déterminées en lien avec des différences de genre, de classe et de race ? Peut-on retracer les soins dans la longue histoire de l’humanitaire ?
- Comment se sentait-on en tant que femme humanitaire au milieu de la guerre ? Quel fut le regard que portaient sur elles leurs collègues masculins ? Les expériences des hommes et des femmes humanitaires peuvent-elles nous aider à mieux comprendre l’action humanitaire contemporaine ?
- Jusqu’à quel point l’histoire des femmes humanitaires peut-elle contribuer à reconstruire la mémoire de la Suisse et, en particulier, de la Ville de Genève ?
- Comment l’histoire peut-elle contribuer à sensibiliser le public aux aspects politiques, sociaux et économiques des crises humanitaires ?
- Quel rôle jouent les récits et les images humanitaires dans la formation de l’opinion publique et la constitution de réseaux transnationaux de solidarité ? La douleur d’autrui, doit-elle être considérée au travers d’un « regard civique » spécifique ?
Objectifs, méthodologie et collaborations :
Le but de ce projet FNS Professeur boursier est de stimuler un dialogue critique entre des historien.ne.s et des professionnel.le.s de la médecine et de la santé, ainsi qu’avec des practicien.ne.s et des répresentant.e.s des ONG sur les dilemmes éthiques, sociaux, culturels et politiques de l’aide humanitaire. En regardant d’une manière critique des opérations humanitaires qui ont eu lieu dans le passé, nous visons à fournir de meilleures stratégies pour résoudre les crises présentes et futures.
Basée à l’Institut Éthique Histoire Humanités, notre équipe de recherche est composée de chercheuses provenant de domaines de recherche comme l’histoire de la médecine, l’histoire des femmes et l’histoire du genre, l’histoire des émotions, les études littéraires et la culture visuelle. En outre, des spécialistes de l’histoire de l’architecture examinent des questions spatiales en rapport avec le travail humanitaire et ses environnements matériels. Cette approche multidisciplinaire nous permet de saisir l’expérience humanitaire telle qu’elle a été vécue par les travailleur.e.s humanitaires et leurs bénéficiaires, ainsi que d’analyser sa réception par les pouvoirs politiques et la société civile. Nous collaborons avec des chercheur.e.s au niveau national et international provenant de l’Institut des Études Genre, le Centre des Sciences Affectives, le Centre des études en Action Humanitaire, l’Humanitarian and Conflict Response Institute, l’University of Queensland et la New York University. Nous travaillons également en étroite collaboration avec les HUG et des organisations internationales comme le CICR, MSF, ainsi qu’avec des institutions comme le Musée International de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
Travail en cours
Lancement du projet FNS Agora “Beyond Compassion : Gender and Humanitarian Action”
L’histoire de l’humanitaire a été dominée par une vision masculine où les femmes ont été fréquemment représentées en tant que figures maternelles. Ce projet mobilise des catégories comme le genre, la classe et l’ethnie afin de déconstruire ces stéréotypes, ainsi que de comprendre l’action des femmes humanitaires au travers des rapports de pouvoir qu’elles ont établis avec leurs collègues masculins et les bénéficiaires de leur aide.
Afin de partager nos recherches et ouvrir un espace de débat avec un public élargi, nous mettons en œuvre trois modes de participation désignés respectivement pour encourager l’éducation, la délibération et la recherche participative : a) l’organisation d’une exposition en collaboration avec le Musée International de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, b) la création d’un Humanitari@n_Lab, une plateforme où des spécialistes et des passioné.es de sciences pourront débattre, et c) la création d’un site web où seront publiés des entrées, des podcasts et des vidéos enregistrés lors des activités organisées.
Vous pouvez visiter le site web sur ce lien https://beyondcompassion.ch/en/home/
Et également nous suivre sur twitter https://twitter.com/GenderHuman
Une perspective féministe à l’histoire de l’aide humanitaire
Grace à l’organisation de la conférence internationale “Gendering Humanitarian Knowledge: Global Histories of Compassion from the Mid-Nineteenth Century to the Present”, nous avons pu identifier des moments clés dans l’histoire de l’aide humanitaire lors desquels les femmes ont été des actrices principales. Les recherches présentées dans cette conférence mobilisaient différentes perspectives issues de l’histoire des femmes, l’histoire du genre et les études postcoloniales, qui se sont avérées très utiles pour contextualiser et évaluer l’action des femmes humanitaires, ainsi que leurs savoirs situés. Entre complicité et résistance avec les principaux Empires occidentaux, les femmes humanitaires ont dirigé des opérations de secours d’urgence du milieu du dix-neuvième siècle jusqu’au présent. Une sélection des contributions a été publiée dans un numéro spécial de la revue Medicine, Conflict and Survival en 2020.
La compassion humanitaire pendant la Première Guerre mondiale à la lumière du genre
Cette recherche examine les activités des infirmières et des marraines de guerre sur le front de l'Yser du point de vue de l'histoire du genre et de l'histoire des émotions. À la fois proches et éloignées des tranchées, tant sur le plan physique qu'émotionnel, ce sont des femmes qui ont participé activement au conflit en tant qu'agents humanitaires. Alors que les infirmières sur le terrain étaient directement confrontées aux horreurs du combat, les correspondantes volontaires, ou "marraines de guerre", étaient présentes sur le front à travers les lettres et les colis qu'elles envoyaient aux soldats. En analysant leurs documents personnels, tels que des lettres, journaux intimes et photographies, et d'autres souvenirs provenant d'un large éventail d'individus, cette recherche vise à exposer les dimensions expérientielles du travail humanitaire féminin pendant la Première Guerre mondiale. À l'issue de cette recherche, une thèse de doctorat sera soutenue en collaboration avec l'Institut des études genre de l'Université de Genève.
Journal de Rivesaltes de Jacqueline Veuve, 1997 : Le cinéma comme archive de l’expérience des femmes humanitaires pendant la Seconde Guerre mondiale.
Cette recherche examine les figures de femmes humanitaires dans le cinéma de Jacqueline Veuve (1930-2013), anthropologue et cinéaste suisse. Formée au cinéma anthropologique par Jean Rouche et militante féministe, Veuve réalise plusieurs documentaires sur les expériences des femmes humanitaires suisses pendant la Seconde Guerre mondiale, recueillant ainsi de précieux témoignages de ces femmes alors peu connues de l’histoire, ainsi que ceux des survivants des camps d’internement où elles ont travaillé. Nous examinerons notamment le documentaire Journal de Rivesaltes 1941-1942, basé sur le livre éponyme issu du journal de Friedel Bohny-Reiter tenu pendant l’année qu’elle travaille au camp d’internement de Rivesaltes comme infirmière pour le Secours suisse aux enfants. Une recherche dans les archives de Jacqueline Veuve vise à mettre au jour la contribution à l’histoire des femmes humanitaires par la cinéaste, dont les films constituent de véritables sources historiques qui révèlent la complexité des expériences et des souvenirs de ces femmes pendant la Seconde Guerre mondiale. Cette recherche fera aussi partie de l’exposition Beyond Compassion qui aura lieu au Musée International de la Croix-Rouge à Genève en 2022.