B. Expertiser la transgression et la souffrance. Savoir et pouvoir de la psychiatrie légale (1940 à nos jours)

  • FNS (407640_177360), 2018-2022. Requérante: Prof. Cristina Ferreira (HESAV); co-requérant: Prof. Jacques Gasser (Unil, CHUV). Collaborateurs: Mirjana Farkas (HESAV), Dr. Ludovic Maugué (Unige, HESAV), Sandrine Maulini (HESAV, Unige), Mikhaël Moreau (HESAV). Site internet du projet: Expertiser la transgression et la souffrance

L’expert psychiatre produit des savoirs sur les moyens susceptibles de guérir les malades, accroître leur autonomie, réduire les risques de récidive, protéger la société. Son influence sur les mutations historiques des mesures civiles et pénales de coercition à des fins d’assistance est pourtant mal discernée.

Des années 1940 à nos jours, nous investiguons les pratiques d’expertise psychiatrique quant aux mesures civiles (tutelles et curatelles, internements administratifs, privations de liberté à des fins d’assistance) et pénales (mesures thérapeutiques). Comment l’expert qualifie-t-il les comportements sur le plan médical et moral ? Quels traitements et établissements préconise-t-il ? En réaction, quelle voix les personnes expertisées cherchent-elles à faire entendre quant aux mesures qui les frappent ? Ce sont ces questions que ce projet ambitionne de traiter au moyen d’une analyse de 600 rapports d’expertises et d’un corpus de dossiers personnels où différentes mesures se succèdent voire se superposent. Nous allons comparer trois cantons (VD, GE, VS) distincts sur le plan institutionnel, législatif, politique et culturel.

Internés administratifs placés en prison, détenus soignés dans les hôpitaux psychiatriques, établissements où se déroulent simultanément les placements aux fins d’assistance et les mesures thérapeutiques pénales, sont autant d’indices d’une indétermination entre le civil et le pénal. Centrale dans notre projet, cette problématique met en tension les réponses sociales et/ou répressives de l’État aux transgressions commises par une population vouée aux marges des circuits économiques.

Objet de débats publics à l’occasion d’affaires retentissantes survenues en Suisse romande entre la fin du 20e et le début du 21e siècles, l’expertise engage incontestablement la responsabilité du psychiatre. L’un des apports escomptés de notre projet consiste à mettre en lumière le rôle et les usages institutionnels de l’expertise dans des dossiers moins exposés à la médiatisation et où se jouent pourtant les destins de nombreux individus concernés par les mesures de coercition aux fins d’assistance.

Projet A: Enfermer pour soigner ? Genèse de la psychiatrie médico-légale (Genève et Vaud, 1760-1910)