11 mars 2021 - Jacques Erard

 

Recherche

L’UNIGE obtient un important financement pour la recherche sur les rayonnements à très hautes énergies

Un groupe de chercheurs et chercheuses dirigé par la professeure Teresa Montaruli obtient un financement de 8,4 millions de francs de la Confédération, qui mise ainsi sur la capacité des scientifiques suisses à jouer un rôle de premier plan dans un domaine crucial pour l’avenir des connaissances en astrophysique, en cosmologie et en physique des particules.

 

 

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Vue d'artiste des grands télescopes de l’Observatoire du Nord de CTAO. Image: Akihiro Ikeshita

 

L’exploration de la matière et de ses interactions à très hautes énergies, proches des conditions primordiales de l’Univers, n’est pas réservée aux accélérateurs géants comme celui du CERN. Elle passe aussi par l’observation des rayonnements cosmiques, qui constituent à eux seuls des accélérateurs extrêmement puissants et dotés de champs magnétiques d’une intensité impossible à reproduire sur Terre. Les radiations et les particules à très hautes énergies produites par ces rayonnements agissent comme des signaux qui, une fois analysés par les scientifiques, apportent une masse énorme de nouvelles connaissances sur l’Univers et ses composantes mystérieuses: la matière noire et les états de matière extrêmes, tels les trous noirs et les étoiles à neutrons qui subsistent après la mort des étoiles.

 

Le Cherenkov Telescope Array Observatory (CTAO), un projet international réunissant deux réseaux de télescopes à rayons gamma, l’un dans l’hémisphère Nord à La Palma aux Canaries et l’autre dans l’hémisphère Sud à Paranal au Chili, a pour mission de capter ces signaux. Il permettra de recueillir des données qui vont s’avérer cruciales pour les chercheuses et chercheurs aussi bien en astrophysique, qu’en cosmologie et en physique des particules. Il est prévu qu’il fonctionne pendant au moins vingt ans.

Avec les Écoles polytechniques de Lausanne (EPFL) et de Zurich (EPFZ), et une participation de l’Université de Zurich, l’UNIGE est le principal partenaire de ce projet pour la Suisse.

Un groupe de chercheurs et chercheuses dirigé par la professeure Teresa Montaruli vient d’obtenir un financement de 8,4 millions de francs sur quatre ans du Secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation (Sefri). Ce financement sera prolongé pour entrer dans la phase de prise de données après cinq années, pour autant que la Suisse décide de poursuivre sa participation à ce grand projet.

 

Télescopes agiles

Cette somme couvrira la participation du groupe à la construction et à la mise en œuvre de trois télescopes de type Large Size Telescope (LST), dans le cadre du projet CTAO. Le LST est équipé d’une surface réfléchissante de 23 mètres de diamètre, arrimée à une structure légère en fibre de carbone et en aluminium, ce qui lui permet de se repositionner en l’espace de quelques dizaines de secondes pour capter les signaux de rayons gamma.

 

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Détail du de la caméra du premier grand télescope de CTA, LST-1, de dimension lineare de 2 m. Photo: Daniel Lopez/IAC

L’expertise des chercheurs/euses de l’UNIGE, en particulier le Dr Domenico Della Volpe et le Dr Matthieu Heller, se concentre sur l’ingénierie du système principal du LST et sur le développement, avec les deux EPF, de caméras de deuxième génération. Cette caméra utilise des photo-senseurs au silicium, introduits dans le domaine de l’astronomie des rayons gammas par l’EPFZ et le professeur Adrian Biland, qui a développé le télescope FACT. Elle sera capable de capter, grâce à la micro-électronique au silicium développée en collaboration avec le professeur Edoardo Charbon de l’AQUA Lab de l’EPFL, des événements survenant en quelques nanosecondes (10-9 s). En effet, lorsque les particules des rayons gamma à haute énergie se désintègrent en entrant dans l’atmosphère terrestre, des gerbes de particules se forment en quelques nanosecondes pour produire une lumière Cherenkov captée par les télescopes au sol.

 

Des pétabytes de données à traiter

Les scientifiques suisses ont également déposé une demande afin d’héberger un centre de traitement des données de CTAO, en connexion avec le Science Data Management Centre de CTAO au DESY-de Zeuthen, en Allemagne. Fort de l'expertise des scientifiques du Département d'astronomie de l'UNIGE, sous la coordination du Dr Roland Walter et du professeur Stéphane Paltani, ainsi que du professeur Jean-Paul Kneib de l’EPFL, ce centre de données pourrait faire basculer le niveau de données en astronomie en Suisse dans le domaine du Big Data. Une fois tous les télescopes de CTAO en fonction, ils seront en effet capables de produire des dizaines de petabytes de données, un ordre de grandeur proche de l’ensemble des données circulant actuellement sur internet chaque jour. Un centre de calcul à haute performance sera nécessaire au traitement de telles volumes.

Un projet d'importance nationale

Le programme de recherche CTAO-CH vise à contribuer à la construction internationale de l'observatoire Cherenkov Telescope Array (CTAO) dans le domaine de l'astronomie des rayons gamma. Depuis 2019, soutenue financièrement par le Secrétariat d’État suisse à la formation, la recherche et à l’innovation (Sefri), l’Université de Genève a repris la responsabilité de représenter la Suisse au sein de cette instance, responsabilité scientifique assumée par la Prof. Teresa Montaruli (Faculté des sciences). En effet, la mise en œuvre de l'observatoire du réseau de télescopes de Tcherenkov est un projet d'importance nationale dans le cadre de la feuille de route suisse définie par le Sefri. Fin 2020, un accord de collaboration scientifique et technologique a été établi entre l’UNIGE et l’EPFL afin que des chercheurs et chercheuses des deux institutions actif-ves dans le domaine de l'astroparticule, de l'astrophysique, de la technologie informatique, de la photodétection et de l'électronique associée puissent s’engager ensemble dans la recherche future dans le domaine de l'astronomie gamma. Le premier colloque réunissant les scientifiques impliqués dans le projet CTAO-CH a eu lieu le 24 novembre 2020 lors du Swiss CTA Day, afin de préparer le positionnement de la Suisse dans le projet européen CTAO. En effet, les pays participants sont actuellement en train de créer le Consortium pour les infrastructures européennes de recherche CTAO (CTAO ERIC) qui construira, mettra en service et exploitera le CTA pendant une période de trente ans.

 

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