Source et copyright à la fin du texte

 

Paru in Mesure et évaluation en éducation, 1993, vol. 16, nos 1-2, pp. 107-132.
Repris dans Perrenoud, Ph., L’évaluation des élèves. De la fabrication de l’excellence à la régulation des apprentissages, Bruxelles, De Boeck, 1998, chapitre 9, pp. 169-186.

 

 

 

Touche pas à mon évaluation !
Pour une approche systémique
du changement pédagogique

Philippe Perrenoud

Faculté de psychologie et de sciences de l'éducation
Université de Genève
1993

Sommaire

a. Relations entre les familles et l'école

b. Organisation des classes et possibilités d’individualisation

c. Didactique et méthodes d'enseignement

d. Contrat didactique, relation pédagogique et métier d'élève

e. Concertation, contrôle, politique d'établissement

f. Programmes, objectifs, exigences

g. Système de sélection et orientation

h. Satisfactions personnelles et professionnelles

Démobilisatrice, l’approche systémique ?

Bibliographie


Changer l'évaluation, c'est vite dit ! Tous les changements ne se valent pas. On peut assez aisément modifier les échelles de notation, la construction des barèmes, le régime des moyennes, l'espacement des épreuves. Tout cela n'affecte pas de façon radicale le fonctionnement didactique ou le système d'enseignement. Les changements dont il est question ici vont plus loin. Pour changer les pratiques dans le sens d'une évaluation plus formative, moins sélective, peut-être faut-il changer l'école. Car l'évaluation est au coeur du système didactique et du système d'enseignement. La transformer radicalement, c'est mettre en question un ensemble d'équilibres fragiles. Les acteurs le pressentent, et devinent qu’en leur proposant de modifier leur façon d’évaluer, on peut déstabiliser leurs pratiques et le fonctionnement de l'école. Comprenant qu’il suffit de tirer le fil de l’évaluation pour que tout l’écheveau pédagogique se dévide, ils crient Touche pas à mon évaluation !

Face aux implications systémiques du changement, on peut renoncer, se replier frileusement sur le statu quo, après tout " pas si mal que ça ". Ou choisir la fuite en avant, s’engager dans de nouvelles pratiques d'évaluation sans tenter d’anticiper les blocages, en se disant " On verra bien ". On peut aussi tenter d’identifier les interdépendances et de concevoir des stratégies de changement qui en tiennent compte. C'est la voie que je propose ici, sachant qu'elle ralentit le passage à l'acte et peut amener à baisser les bras devant la complexité, mais que c'est sans doute la seule qui soit efficace à moyen terme.

Je me place ici dans la perspective d'une évolution des pratiques dans le sens d’évaluation formative, d'une évaluation qui aide l'élève à apprendre, le maître à enseigner. L'idée de base est assez simple : l'apprentissage n'est jamais linéaire, il procède par tâtonnements, essais et erreurs, hypothèses, retours en arrière, anticipations ; un individu apprendra d'autant mieux que son environnement lui propose des feed-back, des régulations sous diverses formes : identification des erreurs, suggestions et contre suggestions, explications complémentaires, reprise de notions de base, travail sur le sens de la tâche ou la confiance en soi. J'ai proposé (Perrenoud, 1991b) une approche pragmatique de l'évaluation formative, ce qui suppose une conception large de l'observation, de l'intervention, de la régulation (Allal, 1988), mais aussi des latitudes qu'on ne se donne pas dans une conception orthodoxe : jouer de l'intuition ou de l'instrumentation, selon les situations, les urgences, les moyens disponibles (Allal, 1983) ; réhabiliter la subjectivité (Weiss 1986, 1992a) et surtout s'accorder le droit de proportionner l'évaluation formative aux besoins des élèves, de rompre avec la norme d'équité formelle qui régit l'évaluation certificative.

L'évaluation au centre d'un octogone de forces
Figure 1

 

L'évaluation formative s'inscrit dans une logique de résolution de problèmes : pourquoi investir dans l'observation intensive et le diagnostic instrumenté si l'intuition suffit à dire que tel élève progresse normalement ? Je ne puis ici entrer dans le détail. J'insiste seulement sur un point crucial, la nécessaire articulation entre évaluation formative et différenciation de l'enseignement. L'évaluation formative n’est en fin de compte qu’une des composantes d'un dispositif d'individualisation des apprentissages et de différenciation des interventions et des encadrements pédagogiques (Allal, Cardinet et Perrenoud, 1979). Si la différenciation est impossible, l’évaluation formative n’est plus qu’une régulation globale et somme toute classique de la progression d’un enseignement frontal dans le " texte du savoir " (Chevallard, 1985).

On perçoit dès lors pourquoi aller vers l'évaluation formative, c'est changer l'école. Mais la relation entre évaluation formative et différenciation de l’enseignement n’est pas la seule à considérer. Pour ne pas s'engager naïvement dans la transformation des pratiques d'évaluation, sans se soucier de ce qui la rend possible ou la limite, une approche systémique globale est indispensable. Les fonctionnements didactiques et les organisations scolaires sont trop complexes pour qu’aucun schéma puisse en rendre compte. Cependant, pour mettre un peu d'ordre dans l’écheveau des interdépendances, je placerai l'évaluation au centre d'un octogone de forces, en définissant donc neuf pôles en interrelations (voir figure 1). Pourquoi mettre l’évaluation au centre ? Simplement parce qu’elle fait ici figure de point de départ. Quiconque voudrait changer d’abord les programmes ou les méthodes d'enseignement les placerait au centre, mais retrouverait en gros les mêmes liaisons systémiques. Ne nous laissons donc pas enfermer dans la représentation graphique, elle n’offre qu’un aide-mémoire.

Reprenons plutôt ces liaisons une à une, en partant - pourquoi pas ? - des relations entre les familles et l'école.


a. Relations entre les familles et l'école

Lorsqu'on demande à des enfants de cinq ans de jouer à l'école, ils mettent les tables en rangs et présentent la figure d'un maître sévère, qui gronde les enfants et les menace de mauvaises notes. Lorsqu'un élève raconte sa journée, il ne dit pas grand chose de précis sur les contenus, mais les parents savent presque toujours si leur enfant a subi une épreuve ou reçu les résultats d'une épreuve antérieure. Dans l'image que se font les parents de l'école, les leçons et les épreuves sont des valeurs sûres : chacun peut comprendre comment fonctionne une telle classe, parce qu'il y a passé dix à quinze ans de sa propre vie.

Les pratiques d'évaluation sont familières aussi à tous ceux qui, dans leur travail, sont habitués à être régulièrement évalués ou à dresser un bilan des pertes et profits au terme d'un exercice comptable. Le système de notation et ses succédanés qualitatifs sont donc des procédures familières, intelligibles ; elles participent d'une image d’Épinal, d’une représentation commune de l'école, ce qui est fort rassurant : un point fixe permet aux parents de s'orienter, en particulier lorsque leur propre expérience scolaire est leur principal repère. Les programmes et les méthodes de l'école d'aujourd'hui déconcertent ceux qui ne comprennent rien à la mathématique ensembliste ou aux contenus rénovés de l'enseignement de la langue maternelle, des langues étrangères, de l'histoire, de la géographie ou des sciences. En revanche, lorsqu'on parle du système d'évaluation, l'école paraît très proche de ce les parents ont expérimenté " de leur temps ", même lorsqu'ils ont arrêté leur scolarité à quatorze ou seize ans.

Hormis quelques circulaires et d'épisodiques réunions de parents, l'évaluation est le lien le plus constant entre l'école et la famille. Les parents doivent régulièrement signer les travaux écrits et surtout les carnets, prenant de la sorte acte du niveau et de la progression de leur enfant, de ses difficultés. L’évaluation les rassure sur les chances de réussite de leur enfant ou les habitue au contraire à l’idée d’un échec possible, voire probable. Soucieuses de la " carrière " de leurs enfants, les familles de classes moyennes ou supérieures ont appris le bon usage des informations données par l’école sur leur travail, leurs attitudes et leurs acquisitions. Elle savent contester certains barèmes ou certaines corrections, prendre contact avec le professeur pour mieux comprendre les raisons d’éventuelles difficultés et intervenir auprès de l'enfant, et surtout utiliser les notes ou les appréciations qualitatives pour moduler la pression qu’elles exercent sur les devoirs et plus généralement le sommeil, les sorties, le temps libre, les attitudes de leur enfant.

On peut discuter du bien-fondé d'un système de communication aussi pauvre, qui réduit les parents à agir en fonction de quelques indications chiffrées ne fondant aucune représentation précise de ce que l'élève maîtrise vraiment. Il reste que ce système présente plusieurs vertus majeures, même si elles reposent en partie sur des fictions :

Changer le système d'évaluation conduit nécessairement à priver une bonne partie des parents de leurs points de repère habituels, créant du même coup incertitudes et angoisses. C'est un obstacle important à l'innovation pédagogique : si les enfants jouent, c'est qu'ils ne travaillent pas et se préparent mal à la prochaine épreuve ; s'ils travaillent en groupe, c'est qu'on ne pourra pas évaluer individuellement leurs mérites ; s'ils s'engagent dans des enquêtes, la préparation d’un spectacle, l'écriture d'un roman ou le montage d'une exposition, les parents ne voient guère comment ces activités collectives et peu codifiées pourraient donner lieu à une note individuelle dans le carnet. Tout ce qui s’éloigne d’une préparation à l'évaluation scolaire classique (interrogation orale ou un test papier-crayon) semble un peu exotique, anecdotique, pas très sérieux et en fin de compte étranger au travail scolaire tel que l'évaluation traditionnelle l'a figé dans l'imaginaire pédagogique des adultes : des exercices, des problèmes, des dictées, des compositions, autant de tâches qui se prêtent à une évaluation classique.

Cet obstacle n'est pas insurmontable, mais le changement des pratiques d'évaluation dans un sens plus formatif, qualitatif et interactif (Weiss, 1992b) passe nécessairement par une explication patiente, par un changement des représentations, par une reconstruction du contrat tacite entre la famille et l'école. S'il existe des rapports de confiance, les explications peuvent passer, les parents peuvent comprendre qu'une évaluation sans notes, plus formative, est en définitive dans l'intérêt de leurs enfants. Si le dialogue est rompu entre l'école et la famille (Montandon et Perrenoud, 1987), il y a tout lieu de craindre qu'un changement du système d'évaluation ne focalise les craintes et les oppositions des parents. Le changement peut être bloqué pour cette seule et unique raison.


b. Organisation des classes et
possibilités d’individualisation

Une évaluation n'est formative que si elle débouche sur une forme ou une autre de régulation de l'action pédagogique ou des apprentissages. Dans le cas le plus élémentaire, on aura au moins une modification du rythme, du niveau global ou de la méthode d'enseignement pour l'ensemble d'une classe. Le professeur qui constate qu'une notion n'a pas passé, que ses consignes ne sont pas comprises ou que les méthodes de travail et les attitudes qu'il exige font défaut reprendra le problème à la base, renoncera à certains objectifs de développement pour travailler des fondements, modifiera sa planification didactique, etc.

Une évaluation formative au plein sens du terme, cependant, ne va pas sans régulation individualisée des apprentissages (Perrenoud, 1993 d). Ce qui veut dire que le changement des pratiques d'évaluation doit s'accompagner d'une transformation de l'enseignement, de la gestion de classe, de la prise en charge des élèves en difficulté. Entre des moments de soutien interne ou externe et de véritables pédagogies de maîtrise, il y a toutes sortes d'organisations intermédiaires, plus ou moins ambitieuses. Il n'est donc pas nécessaire, pour aller dans le sens de l'évaluation formative, de bouleverser de fond en comble l'organisation du travail. En revanche, là où il semble impossible de rompre, au moins partiellement, avec une pédagogie frontale, à quoi servirait-il d'envisager une transformation des pratiques d'évaluation dans un sens plus formatif ?

Parfois, des effectifs trop chargés empêchent tout changement. Mais souvent, les vrais obstacles viennent plutôt de rigidités dans l'horaire scolaire, dans le programme, dans les règlements, dans les valeurs et les représentations des acteurs. Plus que le nombre d’apprenants, ce sont les normes de l’organisation qui obligent à offrir constamment la même chose à tous, même lorsque c'est inutile. Ainsi, aussi longtemps qu'un enseignant est tenu d'administrer un nombre important d'épreuves à tous les élèves, de façon synchrone et standardisée, il passe beaucoup de temps à honorer cette partie du contrat, et il lui en reste d'autant moins pour pratiquer une évaluation formative. Si l'on attend de lui qu'il surveille constamment l'ensemble du groupe ou soit également disponible pour tous les élèves, quelles que soient leurs difficultés et leurs besoins, ce sera nécessairement au détriment de la différenciation (Meirieu, 1990).

Une évaluation formative met à la disposition de l'enseignant des informations plus précises, plus qualitatives sur les processus d'apprentissage, les attitudes et les acquis des élèves. Mais s'il ne peut rien en faire, il ne verra pas pourquoi dépenser de l'énergie et créer inutilement des frustrations. Il importe donc que tout changement de l'évaluation dans un sens plus formatif accroisse les degrés de liberté de l'enseignement et donc le décharge de la partie la moins prioritaire de ses obligations habituelles.

On se heurte ici aux structures. Non pas seulement au système de sélection et d'orientation, au réseau des filières, options, mais à l'organisation des classes : les espaces, les horaires, les modes de groupements des élèves. Lorsqu'il est question de différenciation de l'enseignement, on incrimine souvent les effectifs des classes. Ils ne sont pas sans importance, mais ne penser qu'en terme de nombre d'élèves, c'est négliger bien d'autres paramètres.

Ainsi, dans l'enseignement secondaire, on cumule d'autres handicaps majeurs : fragmentation extrême du temps scolaire, tant pour les maîtres que pour les élèves ; renvoi de l'appui à des structures spécialisées (lorsqu'elles existent), faute de pouvoir pratiquer du soutien intégré dans le cadre d'un horaire éclaté ; division du travail entre spécialistes dont aucun ne perçoit globalement les fonctionnements et le niveau de l'élève ; difficultés du travail en équipe pédagogique, compte tenu de l'attribution des heures et du nombre de professeurs par classe ; horaires très lourds, toutes les activités de soutien ou de développement s'ajoutant à une semaine très chargée ; répartition de toutes les heures entre les disciplines, qui ne laisse rien pour des projets ou la réponse à des besoins ou des occasions non planifiés ; organisation fixe du temps tout au long de l'année ; locaux utilisés par plusieurs classes, dans lesquels il est impossible de laisser du matériel et très difficile de réaménager l'espace pour une ou deux périodes de quarante-cinq minutes (Perrenoud, 1991e).

L'école primaire dispose à cet égard de nombreux atouts, qui rendent au moins possible une différenciation intégrée de l'enseignement (Perrenoud, 1991c, 1991d). Pour aller vers une individualisation des parcours de formation (Perrenoud, 1993a), il faut cependant changer l'organisation des classes, même dans le primaire, et casser la structuration du cursus en degrés (Perrenoud, 1985).


c. Didactique et méthodes d'enseignement

L'idée d'évaluation formative s'est développée dans le cadre de la pédagogie de maîtrise ou d'autres formes de pédagogie différenciée relativement peu soucieuses des contenus spécifiques des enseignements et des apprentissages. L'accent était mis sur les remédiations, autrement dit sur une organisation plus individualisée des itinéraires d'apprentissage, fondée sur des objectifs plus explicites, des prises d'information plus qualitatives et régulières et des interventions plus diversifiées. Aujourd'hui encore, ce modèle cybernétique garde toute sa validité, à un niveau relativement élevé d'abstraction, dans n'importe quel ordre d'enseignement, pour n'importe quelle discipline scolaire et n'importe quel apprentissage. Il est toujours utile, si l'on peut prétendre à une pédagogie efficace, de savoir vers quelles maîtrises on entend conduire les élèves, par quels cheminements ; de préciser quels moyens on se donne d'observer les maîtrises atteintes ou en voie d'acquisition, les méthodes de travail, les attitudes, les fonctionnements mentaux et comment on entend intervenir auprès des élèves, par des régulations proactives, interactives ou rétroactives (Allal, 1988).

Cependant, une fois ce schéma général acquis, il reste à le mettre en œuvre dans différents champs de connaissance. Et là, on se rend compte que l'identification des erreurs et des fonctionnements de l'élève, et la nature des remédiations, dépendent de la structure et du contenu des connaissances et des savoir-faire à acquérir. Ainsi, s'agissant de l'acquisition de la langue maternelle, par exemple la lecture ou la rédaction de textes, il devient de moins en moins soutenable de superposer aux didactiques traditionnelles un modèle transdisciplinaire d'évaluation formative. Il semble au contraire nécessaire, comme Bain (1988a, 1988b) l'a proposé très fermement, de reconstruire l'évaluation formative dans le champ de la didactique du français, de sorte à intégrer les régulations à une approche précise et fondée d'une part des savoirs et savoir-faire à faire acquérir, d'autre part des fonctionnements de l'élève. Autrement dit, pour faire de l'évaluation formative en français écrit, il faut que le maître dispose d'une bonne théorie de l'acte de lecture ou de rédaction, donc du fonctionnement des discours et des opérations et cheminements par lesquels les élèves passent pour s'approprier ces savoir-faire. A partir de ces modèles, il pourra construire des séquences didactiques permettant des régulations collectives et individualisées spécifiques.

Au cours des dernières années, au plan théorique, on assiste, notamment dans le champ du français (Allal, Bain et Perrenoud, 1993), mais cela s'étendra aux autres disciplines, à une réintégration de l'évaluation formative à la didactique, à la faveur sans doute d'un renouveau de cette dernière sous l'impulsion des didacticiens new look, qui ne prétendent plus dire aux enseignants comment il faut enseigner, mais tentent plutôt d'analyser les fonctionnements didactiques et d'en dégager les lois, ou du moins certaines contraintes, certaines conditions, certaines régularités.

Sur le terrain, cependant, cette réintégration prendra du temps. D'autant plus que, comme c'est souvent le cas dans le secondaire, les enseignants se perçoivent comme leurs propres méthodologues ou travaillent avec des formateurs centrés sur une discipline et qui se préoccupent fort peu d'évaluation.

Mentionnons encore un frein essentiel : les moyens d'enseignement ne sont pas, pour la plupart, conçus pour une pédagogie différenciée assortie d'une évaluation formative (Bélair, 1991). Pour aller dans ce sens, il faut donc accepter un fort investissement dans la création ou l'adaptation d'outils didactiques.


d. Contrat didactique, relation pédagogique
et métier d'élève

Aller vers une évaluation plus formative, c'est transformer considérablement les règles du jeu à l'intérieur de la salle de classe. Dans une évaluation traditionnelle, l'intérêt de l'élève est de faire illusion, de masquer ses failles et de mettre en valeur ses points forts. Le métier d'élève (Perrenoud, 1984, 1986, 1988a, 1991a, 1993b) consiste notamment à déjouer les pièges que pose l'enseignant, à décoder ses attentes, à faire des choix économiques au stade de la préparation et de la passation des épreuves, à savoir négocier de l'aide, des corrections plus favorables ou l'annulation d'une épreuve mal réussie. Dans un système scolaire ordinaire, l'élève a en toute bonne foi de bonnes raisons de viser avant tout à recevoir des notes suffisantes. Pour cela, il doit ruser, feindre d'avoir compris et de maîtriser par tous les moyens du bord, y compris le bachotage et la tricherie, la séduction et le pieux mensonge.

Toute évaluation formative se fonde sur le pari très optimiste que l'élève veut apprendre et a envie qu'on l'y aide, autrement dit qu’il est prêt à dévoiler ses doutes, ses lacunes, ses difficultés de compréhension de la tâche. Un médecin peut attendre de son patient qu'il ne lui complique pas la tâche et lui donne toutes les informations nécessaires pour poser un diagnostic correct, au mépris de la pudeur, de la honte, de l'estime de soi, du bon goût. En contrepartie, le patient a droit à une relation privilégiée, protégée par le secret médical, qu'il peut rompre en tout temps et qu'il contrôle, en fin de compte, puisqu'il est le client. A l'école, une évaluation formative demande une coopération aussi grande, sans pouvoir toutefois offrir les mêmes garanties. Dévoiler ses failles et ses incertitudes à l'enseignant, c'est souvent s'exposer à la risée ou à la pitié des camarades. C'est risquer de voir certaines informations consignées dans un carnet, un registre, des rapports que liront d'autres enseignants, les psychologues, le directeur de l'école ou l'inspecteur. C'est donner des informations à l'enseignant dans une relation à laquelle l'élève ne peut mettre fin unilatéralement, même au-delà de la scolarité obligatoire.

Plus on va vers l'enseignement secondaire, plus l'évaluation formative se trouve en rupture avec les stratégies habituelles des élèves et exige une sorte de révolution culturelle, fondée sur une confiance réciproque et une culture commune qui rendent la transparence possible (Perrenoud, 1986, 1988 a).

Si l'enseignant qui tente de faire de l'évaluation formative doit aussi décider, pratiquement dans le même temps, du destin scolaire de l'élève, ce dernier, surtout dans un système très sélectif, aura toute les raisons de conserver ses stratégies habituelles, de mobiliser son énergie pour faire illusion. Et le maître se trouvera renforcé dans l’usage de l’évaluation comme instrument de contrôle du travail et des attitudes (Chevallard, 1986) et de sélection. Aller vers l'évaluation formative, ce serait renoncer à faire de la sélection l'enjeu permanent du rapport pédagogique, ne pas faire vivre les élèves sous la menace du redoublement ou de la relégation vers des filières moins exigeantes. Mais cela ne suffit pas : il faut envisager un changement considérable du contrat didactique (Schubauer-Leoni, 1986, 1988), la substitution d'une relation coopérative à une relation qui, sans être agressive, est aujourd’hui de nature fondamentalement conflictuelle dans les système traditionnels.


e. Concertation, contrôle, politique d'établissement

On ne fait pas de l'évaluation formative tout seul, parce qu’on ne peut aller dans ce sens qu'en modifiant assez profondément la culture de l'organisation scolaire, à l'échelle de la salle de classe, mais aussi de l'établissement. Un maître qui ne garde ses élèves qu'une année ne peut espérer, en quelques semaines, modifier radicalement leurs attitudes et leurs représentations pour qu'ils entrent dans le jeu de l'évaluation formative, sachant que quelques mois plus tard ils passeront dans une autre classe et devront revenir à leurs stratégies antérieures. De la même façon, aller vers un enseignement plus individualisé exige des habitudes de travail différentes, davantage de temps passé en équipe ou en travail individuel, le maître fonctionnant comme personne-ressource. Il faut donc une tolérance considérable à la diversité des emplois du temps, voire des horaires, des tâches, des ressources disponibles pour faire son travail. Une classe qui pratique une évaluation formative se présente plutôt comme un atelier où chacun vaque à ses occupations, avec quelqu'un qui intervient en cas de besoin, plutôt que comme un orchestre sous la baguette d'un chef omniprésent. Ces modes de fonctionnement exigent une nouvelle conception de l'équité et de l'égalité devant le système, une certaine tolérance au désordre et à la différence, des capacités d'autorégulation et d'autoévaluation des uns et des autres. Ces fonctionnements ne sauraient se mettre efficacement en place pour une seule année, ils doivent bénéficier d'une certaine continuité tout au long du cursus, ou du moins durant un cycle d'études.

Il est donc indispensable, pour aller dans cette direction, de franchir un obstacle de taille : l'individualisme des enseignants, la volonté jalouse de faire comme on l'entend, une fois refermée la porte de sa classe. Il est probable aussi qu'une évaluation formative amène, sans que ce soit une nécessité absolue, à une division du travail différente entre les enseignants, parce que l'explicitation des objectifs, l'élaboration des tests critériés ou la construction de séquences didactiques ou de stratégies de remédiation dépassent les forces de chacun pris isolément. Il faut donc s'orienter vers un partage des tâches, un décloisonnement des degrés, une collaboration des maîtres enseignant dans des classes parallèles ou dans la même discipline.

L'évaluation traditionnelle ne permet pas d'exercer un contrôle très serré sur la pédagogie des enseignants. Elle normalise plutôt, dans une certaine mesure, leur niveau d'exigence. On imagine difficilement un établissement où on tolérerait durablement des maîtres qui ne mettraient que de très mauvaises ou et d’autres que de très bonnes notes, des maîtres qui ne feraient doubler ou échouer aucun élève, et d'autres qui produiraient des échecs extrêmement nombreux. Rappelons-nous toutefois que ces signes extérieurs de " normalité " recouvrent une grande diversité d'exigences réelles : on ne sait pas très bien ce que recouvre la notation des enseignants en termes de connaissances effectives, donc de respect du programme. Pour le savoir, il faudrait administrer régulièrement des épreuves standardisées et critériées à l'ensemble des classes astreintes à suivre le même programme, ce qui ne se fait pas partout et suscite souvent de vives oppositions.

Paradoxalement, une évaluation formative pourrait donner à l'administration scolaire davantage de prise sur la qualité et la conformité de l'enseignement des uns et des autres. Certes, elle limiterait la part des informations chiffrées, mais elle conduirait à des représentations plus précises de ce que les élèves savent et savent faire réellement. Plutôt que de comparer des taux d'échecs ou des moyennes de classes, on pourrait comparer les acquis réels et donc distinguer plus clairement les enseignants efficaces et ceux qui le sont moins.

Cette préoccupation n'est pas illégitime et nul ne saurait soutenir que l'efficacité d'un enseignant ne concerne pas la collectivité qui le paie, l'administration scolaire qui l'emploie. Cependant, à vouloir se servir trop vite ou trop fortement de l'évaluation formative dans ce sens, on risque fort d'en compromettre définitivement le développement. Peut-être serait-il plus raisonnable de poser comme principe que l'évaluation formative donne des informations qui restent la propriété du maître et de ses élèves. A eux de décider de ce qu'ils veulent transmettre aux parents et à l'administration scolaire. Si cette dernière veut se faire une idée précise de ce que savent les élèves et donc de l'efficacité des enseignants, qu’elle se donne ses propres instruments, plutôt que de détourner à cette fin une évaluation formative qui devrait rester une affaire entre le maître et ses élèves, pour que le contrat de confiance ne soit pas rompu. Il semble toutefois que les épreuves standardisées aient de nombreux effets pervers et induisent des didactiques conservatrices (Davaud, 1992). L'idéal serait d'aller vers une pratique réfléchie (Gather Thurler, 1992) et vers une professionnalisation du métier (Perrenoud, 1993 c) telles que le contrôle sur la qualité de l'enseignement soit exercé chaque maître et par ses pairs, au sein de l'équipe pédagogique et que l'établissement fonctionne sur le mode de l'autoévaluation (Gather Thurler, 1993, 1994).


f. Programmes, objectifs, exigences

L'introduction d’une pédagogie différenciée et d’une évaluation formative amène tôt ou tard à toucher aux programmes. D'abord pour les alléger, pour en dégager l'essentiel : on ne peut couvrir un programme trop chargé que si l'on fait son deuil de la réussite d'une importante fraction des élèves. C'est hélas, aujourd'hui encore, la logique à l'œuvre dans nombre d'écoles secondaires : on avance à travers le programme à un rythme suffisant pour le couvrir entièrement, en laissant à chaque chapitre des élèves sur le bord du chemin. Il importe que le programme ait été enseigné, non qu'il ait été acquis par une majorité des élèves. Ceux qui ne l'ont pas suffisamment assimilés seront relégués dans d'autres filières ou contraints au redoublement ; ou alors, ils seront autorisés à poursuivre leur progression dans le cursus dans l’espoir que leurs lacunes et leurs difficultés disparaîtront ou passeront inaperçues. Aller vers l'évaluation formative, c'est ne plus tolérer autant d'inégalités, c'est se donner les moyens de remédier aux difficultés des élèves les plus lents, les plus faibles. Or on ne peut courir tous les lièvres à la fois : il est indispensable, pour lutter contre l'échec scolaire, de s'en tenir à l'essentiel, au noyau des programmes, en renonçant à toutes sortes de notions et de savoirs qui ne sont pas indispensables, du moins pas pour tous les élèves. Les mouvements de modernisation des programmes vont dans ce sens (Perret et Perrenoud, 1990). Mais ne sous-estimons pas l'ampleur de la tâche.

La différenciation introduit, en effet, dans les pratiques didactiques, un surcroît de complexité et celle-ci n'est tolérable que si elle s'appuie sur un travail de " simplification " préalable. Il faut donc, sans aucun doute, repenser nos programmes d'enseignement… Mais cela n'a rien à voir avec l'abandon facile d'une partie de ceux-ci, ni même avec un examen superficiel de leur contenu pour séparer ce qui est encore actuel de ce qui serait devenu périmé. L'identification des objectifs-noyaux requiert un travail didactique en profondeur dans chaque discipline, l'identification précise des tâches qui seront demandées aux élèves à chaque niveau d'enseignement et des problèmes qu'ils auront à résoudre pour les mener à bien (Meirieu, 1990, pp. 181-182).

Il y a une seconde raison pour que l'évaluation formative induise une transformation des programmes : ces derniers ne sont, en général, pas rédigés en termes d'objectifs de maîtrise ; ils se présentent plutôt comme des listes de " contenus à enseigner ". Une telle façon d'écrire les plans d'étude oblige les enseignants qui s'orientent vers l'évaluation formative et la pédagogie différenciée à un important travail d'explicitation des objectifs, qui dépasse souvent leurs forces. Aucune réécriture institutionnelle des programmes en termes d'objectifs ne dispensera les maîtres d'un travail personnel d'élaboration et d'appropriation du curriculum, mais il pourrait être ébauché et soutenu par les auteurs des programmes.

Enfin, une évaluation formative, mise au service de la régulation individualisée des apprentissages, mettra le doigt, plus vite qu'un enseignement frontal, sur les incohérences et les ambitions démesurées de certains plans d'études. Lorsque beaucoup d’élèves d'un certain âge commettent les mêmes erreurs et qu'on ne peut y remédier aisément parce qu'elles dépassent leur stade de développement intellectuel, lorsque certains types de savoir marginalisent systématiquement une majorité d'élèves parce qu'ils sont trop distants de leur expérience et de leurs acquis antérieurs, il n'est plus temps de remédier, il faut tout bonnement réviser le plan d'études à la baisse ou le rendre plus proche de la vie, ou plus réaliste par rapport aux acquis antérieurs et aux attitudes des élèves. Toute pédagogie différenciée fonctionne comme un filtre critique des plans d'études.


g. Système de sélection et orientation

La vocation de l'évaluation formative est de contribuer aux apprentissages. On se trouve donc dans une logique d'action : il n'est pas temps encore de prendre son parti des inégalités et des difficultés. Mais la réalité résiste, le temps passe, le miracle ne se produit pas et il arrive des échéances obligeant à dresser le bilan des acquis ; il n'est alors plus temps de remédier, il faut prendre des décisions de sélection ou d'orientation. En soi, l'évaluation formative ne tourne pas le dos à cette perspective.

Dans une interprétation maximaliste de la pédagogie de maîtrise, on pourrait s'efforcer de redonner constamment de nouvelles chances, en considérant qu'un apprentissage n'est jamais impossible, qu'on n'a pas encore tout essayé encore pour le faire aboutir. Sans être défaitiste, on peut tenir compte non seulement des contraintes économiques, qui limitent les ressources et le temps disponibles, mais aussi de la bonne volonté décroissante des apprenants. De même que certains patients résistent à l'acharnement thérapeutique, certains élèves résistent à l'acharnement pédagogique ; pour de bonnes ou de mauvaises raisons, ils préfèrent rompre la relation pédagogique plutôt que d'être confrontés, des mois ou des années durant, aux mêmes échecs. Dans cet esprit, il n'y a pas d'incompatibilité de principe entre évaluation formative et sélection. Reste que leur articulation est délicate.

L'évaluation formative donne la priorité à la maîtrise des connaissances et des savoir-faire, considérant que la sélection est au mieux un mal nécessaire, jamais une fin en soi ou un bienfait. Dans un système qui s'enorgueillit de limiter l'accès aux savoirs, de préparer d'abord une élite, l'évaluation formative n'a pas sa place, car elle participe d'une volonté de démocratisation de l'enseignement, volonté non seulement affirmée in abstracto, mais concrétisée dans l'adoption d'une structure scolaire favorisant une sélection aussi peu sévère, précoce et irréversible que possible. Dans les systèmes scolaires où l'on pratique une sélection drastique à moins de douze ans, où l'on semble satisfait de n'avoir que peu d'élèves dans les filières les plus exigeantes, où l'on assume un nombre important de redoublements et d'échecs, on voit mal qui pourrait, à part quelques idéalistes, plaider pour l'évaluation formative sans militer en même temps pour une transformation globale du système de sélection et d'orientation.

Même dans les systèmes scolaires moins sélectifs, l'articulation de l'évaluation formative et de la sélection ne va pas de soi. Car à un moment donné, ne serait-ce qu'à la fin d'une année scolaire ou d'un cycle d'études pluriannuel, l'évaluation change de logique : alors qu'elle voulait aider l'élève à apprendre, elle fonde soudain un bilan qui, sans être définitif, commande des décisions à court terme, parfois difficilement réversibles. La question est alors de savoir si les enseignants peuvent jouer ce double rôle, les élèves et leurs familles sachant parfaitement que les informations données dans une perspective formative peuvent à un certain moment se retourner contre eux dans une perspective certificative ou sélective.

On se trouve là devant un paradoxe : l'évaluation formative devrait être entièrement du côté de l'élève, et donc lui donner des ressources pour affronter la sélection, de la même façon que l'avocat de la défense se trouve aux côtés du prévenu dans un procès, ou le médecin aux côtés de son patient contre la maladie. Il vaudrait mieux que la sélection soit incarnée par d'autres acteurs, qui n'auraient pas alors pour charge d'enseigner, mais de dire qui a atteint une maîtrise suffisante pour obtenir un diplôme ou accéder à un cycle de formation. L'ennui, c'est qu'une telle division du travail condamnerait à une évaluation ponctuelle, autrement dit à l'un des avatars de l'examen. Or on sait la fragilité de ce mode d'évaluation sur le plan docimologique. Dissocier l'évaluation formative de l'évaluation sélective, ce serait renoncer à fonder cette dernière sur une évaluation continue, donc accroître son arbitraire et aussi l'inégalité sociale devant la sélection. Grave dilemme.

Pour chercher une solution, peut-être faudrait-il insister sur une sélection négociée avec les élèves et leurs familles. Aussi longtemps que les décisions de sélection sont prises unilatéralement par l'école, parfois contre la volonté et la demande expresse de l'élève ou de ses parents, comme la sentence d'un tribunal s'impose au prévenu, il y a toutes les raisons que les intéressés se défendent becs et ongles contre un jugement défavorable.

Si le système de sélection et d'orientation laisse les familles et les élèves assumer leurs responsabilités, prendre les risques d'une orientation trop ambitieuse, et donc d'un échec quelques temps plus tard, on retrouve au moment de la sélection, une relation d'aide. Le rôle de l'école n'est plus alors d'empêcher autoritairement d'entrer dans telle filière difficile ou de progresser dans le cursus, c'est de donner des conseils, des informations, des indications à partir desquelles les élèves et leurs familles décideront en connaissance de cause. Dans ce cas, plutôt que de s'opposer à l'évaluation formative, l'évaluation sélective la prolonge, dans la même logique coopérative : lorsqu'il n'est plus temps d'apprendre, qu'il faut faire un bilan et prendre des décisions, il reste des conseils à donner, des régulations à opérer. L'école pourrait assister parents et enfants dans leur négociation de l'orientation (Bain, 1979 ; Richiardi, 1988) plutôt que d'en décider à leur place.


h. Satisfactions personnelles et professionnelles

L'évaluation formelle actuelle est une source d'angoisse pour les élèves en difficulté, et même pour les autres, qui n'ont pas grand chose à craindre, mais ne le savent pas… C'est aussi une source de stress et d'inconfort pour une partie des enseignants, qui n'aiment pas mettre des notes. Même pour eux, et a fortiori pour les autres, le système d'évaluation est une sorte de glissière de sécurité, bienvenue face aux multiples incertitudes qui touchent aux objectifs et aux programmes, à la démarche pédagogique, à la discipline, à la place des parents dans l'école, etc. Le système traditionnel d'évaluation offre un rail, un garde-fou, un fil conducteur ; il structure le temps scolaire, scande l'année, donne des points de repère, permet de savoir si l'on avance dans sa tâche, donc si l'on s'acquitte de son rôle.

Toute innovation pédagogique qui obligerait à s'écarter de ce rail, soit en prenant ouvertement des distances par rapport aux procédures officielles, soit en les interprétant dans un autre esprit, est une source d'inquiétude pour les maîtres. Ainsi, on peut, sans le contester explicitement, interpréter le système traditionnel d'évaluation dans un sens plus formatif, en donnant une signification " déviante " à l'échelle des notes (acquis, en voie d'acquisition, etc. par opposition à excellent, moyen, etc.). Mais cette interprétation met en porte-à-faux par rapport à la pratique courante et introduit une tension difficile à vivre. Il n'est pas confortable de prendre, de fait ou de droit, de grandes libertés par rapport au système traditionnel, car on se sent personnellement responsable de ses erreurs et comptable de son évaluation face aux parents et aux élèves, alors qu'aussi longtemps qu'on suit le rail, on peut se retrancher derrière le " système ", le règlement, etc. L'administration scolaire trouve son compte dans ce fonctionnement : faute de savoir exactement ce que les maîtres enseignent et comment, elle a au moins l'impression que l'évaluation se fait selon des standards formels garants à la fois de l'équité et de la régularité qui importent aux bureaucraties scolaires, parfois davantage que l'efficacité didactique.

Cependant, on ne peut mettre toutes les résistances sur le compte de la peur du changement. Beaucoup d’enseignants savent ou devinent que, sans évolution, ils sont condamnés à la routine et à l'ennui (Huberman, 1989). En définitive, le changement n'est qu'un moment difficile, parfois stimulant, s’il aboutit à un renouvellement et crée de plus féconds équilibres. La situation est plus grave lorsque les enseignants pressentent qu'ils ne retrouveront pas, dans un nouveau système d'évaluation, les satisfactions, avouables et inavouables, que leur apporte l'évaluation traditionnelle.

Les enseignants savent que les notes ne sont pas fiables, qu'ils ne mettraient pas la même note à la même copie si on la leur représentait quelques semaines plus tard et que leurs collègues mettraient tous des notes différentes à cette copie. Ils savent qu'ils sont incapables de préciser, même pour eux seuls, leurs objectifs et leurs critères de notation. Ils savent qu'ils ne savent pas en quoi consiste le "niveau" qui permet de "passer". Ils savent que couper à la moyenne est absurde. Ils connaissent les effets de stéréotypie et de halo. Ils savent mais ils ne veulent pas savoir qu'ils savent. Ils savent inconsciemment. Et c'est pour cela qu'ils peuvent en toute bonne foi mettre en avant leur conscience professionnelle. Elle est innocente, en effet : c'est d'inconscient qu'il s'agit !

Mais pourquoi ? Que défendent-ils par cette résistance ? ( Ranjard, 1984, p. 93).

L’auteur répond :

Ils défendent un plaisir. Un plaisir de mauvaise qualité mais sûr, garanti, quotidien. Un plaisir qui doit se déguiser pour être vécu sans culpabilité. (...)

Ce plaisir, c'est le plaisir du Pouvoir avec un grand P. L'enseignant est le maître absolu de ses notes. Personne au monde, ni son directeur, ni son inspecteur, pas même son ministre, ne peut rien sur les notes qu'il a mises. Car c'est en son âme et conscience qu'il les a mises. Avec son diplôme, on lui a reconnu la compétence de noter (ce qui ne manque pas de sel !). Sa conscience professionnelle est inattaquable. Dans sa tâche de notateur, il est tout puissant. Et cette maîtrise, c'est du pouvoir sur les élèves (ibid, p. 94).

Si Ranjard a vu juste, au-delà de la peur du changement, il y a des raisons d'adhérer, fût-ce pour des raisons inavouables, et donc dissimulées sous des prétextes plus présentables, à un mode d'évaluation qui garantit un tel pouvoir. Il est sûr qu'une évaluation formative ne peut être que coopérative, négociée, nuancée, centrée sur la tâche et les processus d'apprentissage plutôt que sur la personne. Elle prive définitivement du pouvoir de classer, de distinguer, de condamner globalement quelqu'un en fonction de ses performances intellectuelles. J'ai tenté ailleurs (Perrenoud, 1991a) de montrer que l'évaluation formative peut étendre le contrôle social et mental sur les élèves, créant de la sorte de nouveaux plaisirs. Elle oblige cependant à renoncer à " la toute-puissance de noter, un plaisir qui vient des enfers et qu'on ne peut regarder en face " (Ranjard, 1984, p. 94).

Plus généralement, j'insisterai sur les deuils qu'un changement des modes d'évaluation imposerait aux enseignants (Perrenoud, 1992a), deuils qu'ils pressentent et qui leur font peur (Perrenoud, 1993). Je ne crois pas que les enseignants aient, au sens fort, " besoin " de noter, de classer. Ils ont besoin de trouver certaines satisfactions personnelles, y compris narcissiques et relationnelles, dans l'exercice de leur métier. Or il se trouve, selon une expression de Pierre Marc, que le système d'action et la culture ambiante activent ou désactivent certaines " couches " du fonctionnement inconscient de la personne. Sans doute le plaisir d'évaluer l'autre et donc d'avoir prise sur lui s'enracine-t-il dans les premières années de l'expérience humaine et constitue-t-il une revanche sur toutes les humiliations et les frustrations subies durant l'enfance et même la vie adulte. Rien n'autorise cependant à généraliser, l'économie psychique des enseignants est diverse et tous ne s'accrochent pas au pouvoir, parce que leurs satisfactions sont d'un autre ordre. Par ailleurs, ils ne sont ni plus ni moins désintéressés que les autres professionnels. Mon propos n’est pas de leur jeter la pierre, mais de souligner que tout changement, dans n’importe quelle organisation, peut mettre en danger l’économie psychique des acteurs, l’équilibre parfois fragile qu’ils ont construit entre les plaisirs et les frustrations, les libertés et les devoirs que leur charge permet ou impose. Le nier conduit à une analyse ignorant une dimension essentielle des systèmes vivants et de leur complexité.


Démobilisatrice, l’approche systémique ?

L’approche systémique reprise ici n’a rien d’original, elle s’impose dans toutes les sciences sociales qui ont pour tâche de rendre compte des organisations et des pratiques humaines (voir par exemple Crozier et Friedberg, 1977 ; Friedberg, 1993). Et plus globalement dans toute analyse des systèmes ouverts, en particulier des systèmes vivants.

S’il faut sans cesse y revenir en éducation, c’est en raison de la tentation constante d’oublier la complexité pour croire à un changement rapide et limité de l’école. Tentation compréhensible : il est vrai que si l’on accepte l’approche systémique, on mesure l’impossibilité de changer radicalement les pratiques d’évaluation dans un sens plus formatif sans faire évoluer l’ensemble du métier d’enseignant et de l’organisation scolaire. Ce qui diffère d’autant la mise en œuvre d’idées et de modèles séduisants.

Cela peut décourager ceux qui proposent des outils novateurs aux praticiens et ne comprennent pas qu’il faille, pour les faire adopter, entreprendre une aussi longue marche à travers les institutions. Pourquoi se heurter à tant d'obstacles ? Le jeu en vaut-il la chandelle ? Pourquoi ne pas conserver une évaluation qui a fait ses preuves et investir ailleurs ? Parce qu’on retrouvera les mêmes interdépendance quelque soit l’entrée dans le système. Et parce que l'évaluation traditionnelle, qui fait partie de ce système, empêche le renouveau radical des pratiques et des contrats pédagogiques, selon sept mécanismes complémentaires :

  1. L'évaluation absorbe souvent la meilleure part de l'énergie des élèves et des enseignants ; il ne reste pas grand chose pour innover.
  2. Le système d'évaluation classique favorise un rapport utilitariste au savoir. Les élèves travaillent " pour la note ". Toutes les tentatives de pédagogie nouvelle se heurtent à ce minimalisme.
  3. Le système d'évaluation traditionnel participe d'une sorte de chantage, d'un rapport de force plus ou moins explicite, qui place maîtres et élèves, et plus généralement jeunes et adultes dans des camps opposés, empêchant leur coopération.
  4. La nécessité de mettre régulièrement des notes ou des appréciations qualitatives sur la base d'une évaluation standardisée favorise une transposition didactique conservatrice.
  5. Le travail scolaire tend à privilégier des activités fermées, structurées, bien rodées, qui peuvent être reprises dans le cadre d'une évaluation classique.
  6. Le système d'évaluation classique force les enseignants à préférer les compétences isolables et chiffrables aux compétences de haut niveau (raisonnement, communication), difficiles à enfermer dans une épreuve papier-crayon et des tâches individuelles.
  7. Sous des dehors d'exactitude, l'évaluation traditionnelle cache un grand arbitraire, difficile à concerter dans une équipe pédagogique : comment s'entendre quand on ne sait pas ce qu'on évalue vraiment ? (Perrenoud, 1992b)

Il est donc plus que jamais nécessaire de changer l’évaluation. Il reste à intégrer le caractère systémique des pratiques dans nos stratégies de changement. Pour s'attaquer simultanément à l'évaluation, à la didactique, au rapport entre maîtres et élèves, aux programmes, à l’organisation des classes et du cursus, à la sélection, il n’y a pas de méthode toute faite. On peut cependant indiquer trois pistes complémentaires, qui toutes impliquent fortement les premiers acteurs concernés :

  1. faire évoluer le fonctionnement des établissements vers une autorité négociée, de vrais projets, une autonomie substantielle assortie d’une réelle responsabilité ;
  2. favoriser la coopération entre enseignants, en équipes pédagogiques ou en réseaux ;
  3. agir sur tous les paramètres (statut des maîtres, formation, gestion) qui accroissent le degré de professionnalisation du métier d’enseignant et des métiers connexes.

Ce qui devrait amener les tenants de l’évaluation formative et de la différenciation, comme les didacticiens des disciplines, les partisans de l’école active, les défenseurs des technologies nouvelles ou de toute autre modernisation des contenus ou des méthodes à travailler en plus étroite collaboration avec ceux qui réfléchissent sur l’organisation scolaire comme système complexe (par exemple Demailly, 1990 ; Derouet, 1992 ; Henriot-Van Zanten, Plaisance et Sirota, 1993 ; Hutmacher, 1990 ; Perrenoud, 1993e, 1993f) et sur les stratégies de changement (par exemple Gather Thurler, 1992, 1993, 1994 ; Gather Thurler et Perrenoud, 1990 ; Hargreaves and Fullan, 1992 ; Huberman, 1986, 1990 ; Perrenoud, 1993g).

Je ne plaide pas ici pour un renoncement à toute division du travail. Mais il est évident que si la perspective systémique ne fait pas partie de la culture commune de tous les chercheurs en éducation, aussi spécialisés soient-ils, ils sont voués à se demander durant des décennies encore pourquoi l’école n’adopte pas les belles idées issues de leurs travaux ou de la réflexion des mouvements pédagogiques…


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