Source et copyright à la fin du texte

 

in Triquet, E, et Fabre-Col, C. (dir.) Recherche (s) et formation des enseignants, Grenoble, IUFM, 1999, pp. 89-105.

 

 

 

 

De l’analyse de l’expérience
au travail par situations-problèmes
en formation des enseignants

Philippe Perrenoud

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation
Université de Genève
1999

Sommaire

1. La démarche clinique et les limites de l’analyse des situations et des pratiques

II. Travailler à partir de situations-problèmes construites

III. L’articulation entre recherche et formation

Références


En formation initiale des enseignants, est-il opportun, en complément des démarches cliniques centrées sur l’analyse de cas et de pratiques, de travailler par situations-problèmes ? Est-ce une façon de développer plus efficacement des compétences et des savoirs professionnels ?

Cette problématique peut sembler surréaliste en un temps où, dans maintes institutions de formation initiale des enseignants, il faut encore se battre pour faire une place à la démarche clinique. Je crois pourtant qu’il importe dès maintenant de chercher à discerner les limites que rencontreront les analyses de pratiques et les études de cas, pour éviter les désillusions et prévenir les régressions qu’elles pourraient entraîner. S’il n’est pas défendable de former des praticiens réflexifs de façon prescriptive, il n’est pas sûr qu’une " orgie d’analyse " leur permette de construire toutes les compétences professionnelles requises. On peut s’en remettre aux stages, mais ce serait assez léger.

Mon propos n’est aucunement de plaider pour un retour aux formations à dominante prescriptive ou qui se bornent à faire coexister des cours théoriques et des stages pratiques à peine articulés. Il s’adresse aux formateurs qui cherchent à prendre appui sur l’expérience des étudiants pour construire des connaissances et des compétences professionnelles. À l’intérieur de ce paradigme, il y a place pour un débat sur les dispositifs et les démarches didactiques (voir aussi Maulini, 1998).

Le présent article renouvelle un dilemme assez classique : faut-il partir de cas réels ou faut-il travailler sur des cas construits ? Les premiers, observés ou vécus sur le terrain par les étudiants, rapportés dans des séminaires d’analyse de pratiques ou d’autres démarches comparables, ont à la fois les avantages et les inconvénients de la complexité. Les cas construits permettent de styliser les situations et de focaliser l’apprentissage sur des aspects choisis, qu’on se situe en didactique d’une discipline ou dans le registre transversal.

Dans certains courants, on part plus volontiers du réel dans sa complexité, analysé à travers divers types de traces : vidéo, présence d’un observateur, récit oral et méthodes d’explicitation, notes de terrain, écriture clinique et protocoles sous diverses formes. Cette réflexion est alimentée, par exemple, par les travaux d’Altet (1994, 1996), Carbonneau et Hétu (1996), Cifali (1996), Faingold (1993, 1996), Imbert (1992, 1994), Mottet (1997), Paquay et Wagner (1996), Perrenoud (1996 a et b), Vermersch (1994).

Il existe en parallèle, surtout dans les pays anglo-saxons ou au Québec, une tradition du case work, qu’on peut traduire par études de cas (Richert, 1990 ; Valli, 1992 ; Wasserman, 1993 ; Legendre, 1997). Le formateur s’autorise alors à apporter des cas vécus par d’autres personnes, voire à en construire à partir d’éléments de réalité, par combinaison ou épuration, aux fins de concentrer l’attention sur certains traits plutôt que d’autres.

Ces deux courants gagneraient certainement à être clairement distingués, puis confrontés, éventuellement combinés. En pratique, les deux démarches peuvent certainement coexister et s’enrichir réciproquement. Ici, cependant, je vais plutôt les considérer comme des variantes d’une démarche clinique, qui ont en commun l’analyse de l’expérience. Je vais leur " opposer " - conceptuellement - un travail par situations-problèmes. Non pour qu’il s’y substitue, mais pour envisager une complémentarité.

La coupure n’est pas absolument nette : entre les moments de pure analyse et un travail orthodoxe par situations-problèmes, il existe des démarches qui marient ou alternent les deux logiques. Les études de cas construits sont peut-être une étape de transition entre l’analyse de pratiques et le travail par situations-problèmes. En première approximation, on pourrait dire que les analyses de pratiques et les études de cas s’apparentent au travail sur des problèmes ouverts. (Arsac, Germain et Mante, 1988). L’analyse d’un cas appelle des questionnements, des interprétations, des hypothèses, des suggestions de solutions dont on peut attendre à la fois :

Tout cela n’est pas négligeable. J’avancerai cependant l’idée que cela ne suffit pas, qu’il faut trouver des démarches non discursives et non prescriptives pour construire des savoirs et des compétences définis.

C’est ce qu’on peut attendre d’un travail par situations-problèmes. Comme son nom l’indique, une situation-problème confronte à un problème, une énigme, un défi, une impasse (Bassis, 1996). Mais il faut en outre qu’elle soit " organisée autour du franchissement d’un obstacle " (Astolfi, 1993 ; Astolfi et al., 1997). Un tel obstacle n’est pas réductible au simple fait qu’il faut réfléchir, s’informer et débattre pour résoudre un problème. L’obstacle auquel on se réfère est d’ordre épistémique, de l’ordre du manque de concepts et de connaissances théoriques ou procédurales, voire de compétences : dans une situation-problème, on ne peut réussir sans conceptualiser, sans comprendre, sans apprendre quelque chose de neuf.

Toute réflexion sur ces thèmes pose inévitablement la question de la connexion entre recherche et formation, puisque la pédagogie des situations-problèmes s’ancre dans la recherche en didactique (Martinand, 1986, 1994 ; Astolfi, 1992, 1996 ; Bassis, 1998 ; Arsac, Germain et Mante, 1988) et en pédagogie (Meirieu, 1990) plutôt que dans les pratiques actuelles des enseignants. On touche également à la question du transfert, à des formations professionnelles de haut niveau, de concepts didactiques développés dans le cadre scolaire et centrés sur la construction de savoirs mathématiques et scientifiques.

Il n’est pas question de faire du travail par situations-problèmes l’alpha et l’oméga de la formation des enseignants. Aucune formation professionnelle ne peut se limiter à une seule démarche ou un seul type de dispositif. Mon propos est plutôt de préciser en quoi il serait pertinent et fécond de travailler aussi par situations-problèmes et quelle place donner à cette démarche. Je réfléchis ici sur le métier d’enseignant, mais la problématique est sans doute partiellement transposable à d’autres métiers de l’humain : médecine, soins infirmiers, psychologie clinique, travail social.

La question me paraît assez neuve pour mériter qu’on l’élabore tranquillement avant de stabiliser une réponse. Cet article n’a d’autre ambition que de commencer à la poser explicitement, en invitant d’autres formateurs à y réfléchir et à en débattre. Dans le contexte des rapports entre recherche et formation, elle interpelle la recherche en éducation, dans le champ des didactiques, de l’ingénierie et des théories de la formation professionnelle de praticiens réflexifs.

Puisque l’idée de travailler par situations-problèmes s’ancre dans la perception, encore diffuse, des limites que rencontrent l’analyse des pratiques et les études de cas dans la construction des savoirs professionnels, je vais, dans un premier temps, tenter de mieux repérer ces limites. Dans un second temps, j’esquisserai quelques pistes quant au travail par situations-problèmes en formation professionnelle.

 1. La démarche clinique et les limites
de l’analyse des situations et des pratiques

Les formations professionnelles doivent relever un défi ambitieux : dispenser des connaissances utilisables dans une pratique, donc développer des compétences, au-delà de la maîtrise livresque de savoirs, méthodes et techniques, qui permet de réussir des examens, non de faire face à des situations complexes. De telles formations sont nécessairement sensibles à la problématique de la mobilisation, de la coordination, du transfert, de l’activation pertinente des connaissances théoriques et méthodologiques dans des situations de travail. Elles sont, pour cette raison, conduites à placer les étudiants dans des situations proches des situations réelles de travail.

À cela s’ajoute l’entraînement " purement pratique ", l’exercice du jugement, du regard, de l’intuition, du know-how, de la prise de risque, de la décision et des gestes professionnels en situation d’urgence et d’incertitude (Perrenoud, 1996 a). Pour cela, il faut être confronté à des vrais problèmes, ou du moins à des problèmes " vraisemblables ", proches de ceux qui se présentent dans la réalité.

Les ingénieurs et les architectes sont formés depuis longtemps à travers des travaux de laboratoire ou des projets. Les futurs médecins suivent plusieurs années de formation clinique. Dans une business school, les étudiants travaillent sur des cas et des simulations. On peut discerner dans ces formations une tendance à avancer le moment de l’entrée dans la complexité des situations de travail. C’est très clair dans les facultés de médecine qui adoptent une " formation par problèmes " dès le début des études et renoncent du même coup à deux ou trois ans d’enseignement purement théorique, les fameuses années " propédeutiques ".

En formation des enseignants, ce sont les stages et les démarches de micro-enseignement qui jouent le même rôle. Or, la maîtrise didactique de ce qui se joue dans les stages est assez faible et le micro-enseignement n’est plus guère d’actualité dans une démarche clinique.

1.1 Le statut du réel en formation professionnelle

Dans les métiers techniques, on peut s’exercer grâce à des dispositifs de simulation, dans les conditions proches du travail réel, sans que l’erreur porte à conséquence : les futurs pilotes apprennent à faire face à divers incidents critiques en simulateur, les futurs businessmen peuvent apprendre à gérer des crises boursières, conduire des OPA et prendre des décisions sans risques, en dialoguant avec un logiciel. On peut aussi, dans de nombreux métiers, créer les conditions d’une pratique " en double commande ", comme dans les auto-écoles ou en formation de navigateurs : un professionnel aguerri se tient prêt à soutenir l’action, voire à en reprendre le contrôle des opérations. Dans de nombreux métiers, sauf dans les cas d’urgence, les conditions de travail permettent délibération et conseil durant l’action, dans certaines limites fixées par les contraintes de la production.

Dans les métiers de l’humain, à commencer par les soins corporels - de la coiffure à la médecine -, les choses sont plus délicates. Il arrive un moment où on ne progresse pas en continuant à coiffer des perruques ou à disséquer des cadavres. Il faut opérer sur des corps d’êtres vivants, qui ne tiennent pas à servir de cobayes à des débutants maladroits. Du moins peut-on flanquer chaque apprenti d’un mentor qui est consulté avant les décisions importantes et qui " prend la main " si les choses tournent mal.

Dans les métiers qui opèrent davantage sur l’esprit que sur le corps, l’apprentissage " en double commande " est encore plus difficile. Même dans un stage en responsabilité, le titulaire et le stagiaire ne peuvent, sans compromettre la dynamique de la classe, se concerter constamment et ouvertement, comme le chef de clinique et le médecin stagiaire le font sans embarras au chevet d’un patient. À un certain moment, en classe, le stagiaire est seul, même en pratique accompagnée. Nul mentor ne peut le guider à chaque instant, en temps réel, parce que les élèves sont moins coopératifs que les malades et n’attendent pas sagement, figés comme des statues de sel, pendant qu’on discute de leur sort…

La démarche clinique est donc, en formation des enseignants, une démarche largement différée, qui ne parvient pas, comme la clinique médicale, à intégrer le temps de la formation au temps de l’action, en introduisant une phase de concertation et d’explication durant la consultation elle-même ou immédiatement après. Autre différence de taille : en médecine, les stagiaires sont affectés à un service spécialisé, ce qui limite l’éventail des pathologies rencontrées. On peut aussi, dans la mesure où chaque patient est pris en charge individuellement, aiguiller les étudiants sur les cas les plus formateurs, jouer sur la variété et la redondance, insister sur la maîtrise rapide de problèmes de routine ou sur l’analyse approfondie de cas complexes.

En formation d’enseignants, on peut tenter de reconstituer des conditions analogues avec des stages ciblés ou du micro-enseignement. Ce dernier, après des heures glorieuses (Altet et Britten, 1983), semble en perte de vitesse, probablement parce que les institutions de formation n’ont plus de " classes d’application " dans leurs murs, avec des enseignants constamment prêts à mettre leurs élèves à la disposition des étudiants et de leurs formateurs. Sans doute aussi parce que ces dispositifs sont historiquement associés à des visions plus prescriptives que réflexives de la formation. Peut-être devrait-on aujourd’hui " revisiter " le micro-enseignement à la lumière des paradigmes contemporains. Il offrait au moins une réponse possible à la faible maîtrise qu’on exerce sur les situations dans lesquelles on plonge les étudiants durant les stages. Les usages de la vidéo vont désormais plutôt dans le sens d’une analyse de pratiques appuyées sur des images qui permettent des observations fines des dimensions verbales et non verbales des interactions (Carbonneau et Hétu, 1996 ; Faingold, 1993 ; Mottet, 1997 ; Paquay et Wagner, 1996).

Quant aux stages, ils posent des problèmes difficiles d’organisation au long du cursus et on ne peut guère cibler que des âges, des disciplines, des filières, des types de publics ou d’établissements. À l’intérieur d’une salle de classe, c’est la vie qui crée les problèmes à gérer. La plupart des phénomènes sont présents et interfèrent constamment. Pour observer ou expérimenter un aspect didactique précis - par exemple la dévolution d’un problème aux élèves - il faudrait cibler non une classe, mais un moment spécifique, en général imprévisible. On peut tourner l’obstacle en demandant au formateur de terrain ou au stagiaire de créer les événements spécifiques sur lesquels on veut recueillir des observations et réfléchir. Même alors, il y des limites : on peut amorcer des séquences didactiques de façon volontariste, mais une fois lancées, elles suivent leur cours et ne produisent pas nécessairement les phénomènes attendus, par exemple un conflit sociocognitif, une erreur de raisonnement ou un détournement de la tâche. Quant aux événements " transversaux ", ils ne procèdent pas en général de décisions. Ils surgissent plutôt à l’improviste, comme des problèmes dont l’enseignant ferait volontiers l’économie, voire comme des crises ou des urgences qui l’obligent à abandonner les projets en cours On ne peut ni susciter, ni prévoir un conflit interculturel, un moment d’agitation du groupe-classe ou une indiscipline.

On pourrait évidemment éluder ce problème en considérant qu’il relève de la formation pratique, du dialogue entre l’étudiant stagiaire et son conseiller pédagogique. Sans renoncer à la démarche clinique, on la déléguerait entièrement aux stages et au dialogue entre le stagiaire et les formateurs de terrain qui l’accueillent. Ce n’est pas, en soi, une hypothèse absurde. Toutefois, pour que ce ne soit pas une façon élégante de se débarrasser du problème, il faudrait évidemment que les formateurs de terrain aient un statut, un pouvoir et une formation sans commune mesure avec la réalité actuelle. Ce modèle conduirait, en fait, à une formation des futurs professionnels par les enseignants en place, ce qui rendrait inutile, à la limite, l’existence même d’une institution de formation. Dans certains États américains, la School of Education a été supplantée par une formation entièrement intégrée aux établissements scolaires. De tels mouvements tiennent à l’évolution des rapports de force entre les institutions de formation et la profession, davantage qu’à une analyse fine de ce que chacune peut effectivement prendre en charge.

Si l’on conserve l’idée d’un partenariat entre un centre de formation et le terrain, pour une formation en alternance (Perrenoud, 1996 d, 1998 b), il faut considérer que la démarche clinique est au cœur de l’articulation théorie-pratique. Elle ne peut être entièrement déléguée, soit au terrain, soit au centre. La question se pose donc de savoir comment les formateurs du centre peuvent travailler, avec leurs étudiants, sur une réalité qu’ils n’ont ni vécue, ni observée en direct .

Tout en souscrivant pleinement aux démarches cliniques d’analyse de pratiques et d’études de cas, je vais tenter de montrer qu’elles font émerger des besoins de formation et appellent des phases de construction de savoirs ou de compétences qu’elles ne sont pas en mesure de prendre entièrement en charge par elles-mêmes.

Je prendrai pour exemple et point d’appui un dispositif en développement en formation initiale des professeurs d’école, à Genève. Sans reprendre ici la description de l’ensemble du dispositif (on en trouvera une vue d’ensemble dans Perrenoud 1996 d ; 1998 a), disons simplement qu’il s’agit d’une formation professionnelle de quatre ans qui aboutit à une maîtrise spécifique en sciences de l’éducation. Pour permettre une alternance soutenue, le plan d’études prévoit l’enchaînement d’unités de formation dites compactes, d’une durée de trois à quatorze semaines, chacune ayant sa thématique et ses objectifs propres, chacune travaillant avec son propre réseau de formateurs de terrain. Durant une unité compacte, les étudiants passant en alternance des semaines à l’université (12-16 heures de travail dans divers dispositifs) et d’autres en classe et en établissement scolaire (même horaire que les formateurs de terrain et les élèves). Parallèlement, dans une autre partie de la grille horaire, courent sur l’année ou un semestre des unités de formation filées, qui prennent diverses formes : cours, séminaires de recherche, séminaires de préparation au mémoire de fin d’études, séminaires cliniques d’éthique, de développement personnel ou d’analyse de pratiques.

Mon exemple est pris dans un séminaire filé d’analyse de pratiques, c’est-à-dire au pôle extrême où l’analyse n’a pas d’autres finalités que d’entraîner à l’analyse et d’intégrer des acquis. On verra que même alors se pose la question de l’opportunité de construire des savoirs théoriques nouveaux.

1.2 Le savoir en construction
dans un séminaire d’analyse de pratiques

Ce séminaire est une unité filée dite d’intégration. Il a lieu une fois par semaine, durant une heure et demie, en fin de journée, après les heures d’école, si bien que les étudiants peuvent y venir qu’ils soient ou non sur le terrain durant la journée. Le propos n’est pas d’amener des contenus didactiques, transversaux ou technologiques nouveaux, à partir d’un curriculum défini. Le but est plutôt de favoriser la mobilisation et la mise en relation des savoirs acquis, autour d’études de cas. Le second objectif est de favoriser un entraînement à l’analyse de situations éducatives et de pratiques, donc de développer la posture réflexive et le savoir-analyser (Altet, 1994, 1996). L’évaluation ne porte que sur la démarche et le savoir-analyser.

Le dispositif du GEASE (Groupe d’Entraînement à l’Analyse de Situations Éducatives) a été adopté. C’est un dispositif développé à l’université de Montpellier III en préprofessionnalisation (Fumat, 1996 ; Vincens, 1996). Il a le mérite de la simplicité, car il été conçu de sorte à pouvoir confier l’animation à des moniteurs n’ayant pas une immense expérience de l’analyse de pratiques. Comme son nom l’indique, le dispositif concerne un groupe qui se centre sur des situations éducatives plutôt que sur la pratique d’un acteur, avec le souci de mobiliser des cadres conceptuels multiréférentiels, à plusieurs niveaux systémiques.

Le dispositif de base distingue cinq phases principales :

  1. L’exposé d’une situation éducative par un membre du groupe (le groupe écoute l’exposant sans l’interrompre).
  2. Le questionnement par le groupe, uniquement sur les faits (l’exposant écoute les questions et y répond, sans interprétation, ni débat).
  3. La formulation par le groupe d’hypothèses interprétatives sur ce qui s’est joué (l’exposant écoute et prend note, sans réagir immédiatement).
  4. Les réactions de l’exposant aux hypothèses interprétatives (le reste du groupe l’écoute).
  5. La méta-analyse du fonctionnement (tout le monde).

Le tout peut prendre une heure et demie. Si cela va beaucoup plus vite, on peut explorer deux situations en une séance. Durant les premières semaines, ce sont les étudiants qui - volontairement - exposent une situation éducative qu’ils ont vécue en personne. Une fois la méthode un peu exercée, on invite des praticiens expérimentés à se livrer au même exercice, interrogés par les étudiants.

Dans la mesure où un tel séminaire n’a aucun curriculum à " faire passer " (sinon l’analyse elle-même), les situations éducatives retenues peuvent être très diverses, par leur cadre - scolaire ou non - et surtout par les enjeux et les processus à l’œuvre. Le but principal n’est pas d’accompagner ce qui arrive en parallèle dans les classes. Toutefois, ce n’est pas interdit. Certains étudiants exposent donc des situations très récentes.

Comme aucune des situations exposées n’est connue à l’avance - ni des participants, ni de l’animateur - c’est à chaque fois une découverte. Il est donc impossible d’anticiper et de préparer des fragments de théorie ou des indications bibliographiques pertinentes. De plus, la règle est passer à une nouvelle situation d’une semaine à la suivante. Il y a donc perpétuel zapping, chaque semaine amène une problématique nouvelle, sans le moindre souci de progression, de cohérence, d’accumulation. Il n’est pas interdit de faire référence aux situations analysées auparavant, mais ce n’est pas le sens principal de l’exercice.

Le séminaire ne vise pas la généralisation : ceux qui exposent une situation sont invités à ne pas choisir des cas exemplaires ou emblématiques d’une problématique définie. On insiste au contraire sur l’importance de rapporter une situation singulière, qui n’est pas retenue pour illustrer un phénomène général, mais parce que sa complexité défie l’analyse ou parce qu’elle a laissé un arrière-goût d’inachevé, de non maîtrise, d’étonnement, de déception, de culpabilité. En fait, ces critères ne sont pas formulés. On s’applique même à ne pas définir explicitement les situations acceptables, sinon dans leur cadrage : situations singulières, assez récentes pour que des détails soient encore disponibles en mémoire, dans lesquelles le narrateur a été personnellement impliqué, au moins comme observateur. D’un groupe à l’autre, au fil des semaines, les narrateurs potentiels se font une idée de ce qu’est une situation " intéressante ", sans que cela soit jamais codifié. Ils mesurent, au gré de l’expérience, qu’une situation suscite une analyse plus riche si :

La notion de " situation éducative " est l’objet théorique le plus constant, dans une telle démarche. La complexité est souvent sous-entendue. Elle est un des mots clés du programme de formation des enseignants et elle est en outre induite par la tâche : quel serait l’intérêt d’une situation ne présentant aucune opacité, aucun mystère, ne suggérant qu’une lecture possible ?

La notion même de situation n’est simple qu’aussi longtemps qu’on ne tente pas de la définir. Dès qu’on conceptualise, on se heurte :

On peut donc passer des heures à clarifier le concept même de situation éducative.

Un second objet constant émerge : l’analyse elle-même, dans le cadre du groupe, mais aussi en amont, dans la mesure où toute situation complexe rapportée a déjà été pensée, d’abord sur le vif, pour la gérer, ensuite dans l’après-coup, en général avant qu’on songe à la raconter, enfin, en vue de sa narration dans un groupe d’analyse des pratiques. Les narrateurs sont fermement invités à ne pas livrer leur interprétation des faits en même temps que leur récit, mais on ne peut évidemment les empêcher d’en suggérer une, à travers leur façon de décrire la scène et leurs propres actions et réactions. L’analyse de pratiques confirme toutes les thèses constructivistes : les faits sont constitués par le regard de l’observateur, dans une visée pragmatique définie. La visée théorique ou herméneutique n’est pas moins pragmatique que les autres, si l’on entend par là qu’elle doit permettre un fonctionnement à la fois intellectuel et social.

Une démarche d’analyse devient assez spontanément son propre objet dès qu’elle est réflexive et suscite une forme de métacognition, voire de métacommunication. On pourrait donc en rester là. Ou se borner à exploiter l’analyse des situations comme illustration d’une théorie de la pratique pédagogique et des interactions didactiques en contexte. Le contenu spécifique des situations ne serait alors que prétexte à exercer la posture réflexive et l’analyse ou à se convaincre de la complexité, de la fragilité et du caractère systémique de l’action professionnelle.

Un tel détachement ne va nullement de soi pour les étudiants, qui ne sont pas prêts à passer immédiatement " de l’autre côté du miroir ". Ils ont envie de comprendre pourquoi telle situation s’est présentée et a évolué. Ils veulent surtout avoir une réponse à la question de savoir " ce qu’il aurait fallu faire pour maîtriser les événements et les processus en jeu ". Indépendamment de cette demande, parfois insistante, l’animateur est lui aussi ambivalent. D’abord parce qu’il s’agit d’un séminaire d’intégration, légitimement fondé à jeter des ponts entre approches transversales, didactiques et technologiques de l’action pédagogique. Ensuite parce que, même si ce n’était pas le propos, l’animateur estime légitime, à certains moments, d’apporter des fragments d’un savoir général à propos d’un cas singulier.

Prenons quelques exemples, sous forme d’un tableau. Dans la colonne de gauche, la situation est rapportée, de manière volontairement stylisée. Dans la colonne de droite, on trouve, lapidairement indiqués, une ou deux problématiques qui mériteraient d’être théorisées plus largement, parce qu’elles se retrouvent, sous d’autres apparences, dans de nombreuses autres situations.

Chacune des situations rapportées était plus riche que ce qui en est retenu et aurait pu ouvrir sur d’autres interprétations. J’ai volontairement choisi de mettre en évidence des processus transversaux ou didactiques assez classiques. Une situation est singulière par la configuration des paramètres et des processus en jeu, mais on y trouve toujours des composantes banales. Ce qui ne veut pas dire qu’elles n’ont pas d’importance : elles sont au contraire au cœur de la construction de compétences professionnelles. Alors que les situations rapportées ne se reproduiront jamais à l’identique, les mécanismes à l’œuvre se manifestent très souvent.

La situation réduite à l’essentiel
Quelques mécanismes en jeu

A. Dans une crèche, les puéricultrices ont fait des photos des enfants et ont proposé aux parents de commander des copies. On a chargé une stagiaire de prendre les inscriptions, de faire exécuter les copies et de les remettre aux parents. Or, bien au-delà des délais impartis, une mère se présente et insiste pour obtenir des photos, alors que tout le travail de copie a déjà été fait. La stagiaire refuse. La mère se fâche, la conversation s’envenime. La mère finit par s’adresser à la directrice de la crèche, qui lui donne raison, tout en s’en excusant auprès de la stagiaire d’avoir à annuler sa décision.

  • Les usagers qui ignorent les règles instaurées par les professionnels pour rationaliser leur métier manifestent, parfois sans le savoir, un mépris de ce travail et du temps qu’il prend. Ils ravivent alors le conflit endémique entre la singularité de l’usager et l’universalité des règles bureaucratiques.
  • Une délégation d’autorité est réversible lorsque les intérêts de l’organisation sont menacés par le mécontentement d’un usager. L’exécutant critiqué par l’usager se trouve désavoué par son chef, alors même qu’il appliquait ses directives. D’où une crise de confiance.

B. Dans une école de quartier populaire, un enseignant invite ses élèves de 12 ans à faire un " dessin libre ".

Toutes les filles dessinent un dauphin (en s’inspirant d’une série télévisée), tous les garçons reproduisent une carte à jouer, figurant dans un jeu qui fait fureur à ce moment dans le préaux d’écoles.

L’enseignant réagit très vivement à ces conduites peu créatives. Leur conformisme le choque, il ne le comprend pas ou le refuse.

  • La liberté impose l’originalité. Lorsque l’école la concède, il est interdit de faire comme tout le monde. Double contrainte, injonction paradoxale.
  • L’esthétique et la vision de la créativité d’un enseignant cultivé créent une forte distance normative avec ses élèves.
  • Les normes esthétiques sont diffuses et diverses, donc très difficiles à mettre en œuvre au nom de l’institution, qui pourtant y invite.

C. Un enseignant expérimenté, mais habitué aux jeunes élèves, tient la classe d’un collègue deux après-midi par semaine. Les élèves ont 11-13 ans. Il se trouve alors démuni, son autorité ne fonctionne plus.

Il rapporte en particulier un affrontement avec un élève qui soutient son regard, ne s’incline pas et ne souscrit pas à la règle du respect de la parole d’autrui, alors que c’est une valeur forte dans cette équipe pédagogique, tout au long du cursus.

  • L’autorité se construit dans la durée, à la faveur d’une transaction entre un enseignant et un groupe d’élèves ; le " contrat " qui en résulte, largement implicite, n’est pas transmissible, les élèves n’accordent pas à un étranger le privilège de les " commander ".
  • Le regard et les signes non verbaux qui l’accompagnent sont des instruments décisifs de contrôle social, qui relèvent de l’éthologie animale autant que de la psychosociologie des groupes humains.

D. Une enseignante primaire met en place, durant une partie d’une matinée, trois activités parallèles, une de lecture, une de science, une de mathématique. Ces deux dernières tournent court : dans l’un des groupes, l’instrument de mesure se casse, des figurines à classer se dispersent dans un autre groupe.

L’enseignante, ne parvenant pas à rétablir les conditions prévues, revient à une activité collective.

  • Les pédagogies actives et différenciées sont fragiles. Même une enseignante expérimentée n’arrive pas à estimer chaque jour avec réalisme la complexité des situations d’enseignement-apprentissage qu’elle met en place et l’autonomie qu’elles exigent des élèves.
  • Le repli sur un enseignement collectif est un moyen permanent de reprendre le contrôle de la situation. C’est en quelque sorte la ligne de base.

L’analyse de pratiques touche ici à ses limites. Elle ne se prête pas, en effet, à une exploration méthodique des processus en jeu. Ils ne sont qu’entrevus, repérés, au mieux explicités et dégagés du contexte, mais le séminaire n’est pas le lieu d’une théorisation plus poussée, encore moins d’un réinvestissement dans des situations similaires. Le contrat didactique qui régit un séminaire d’analyse de pratiques favorise en effet la dynamique de l’échange, la diversité des situations (avec sa part de zapping), la rupture avec une logique d’enseignement. Approfondir un mécanisme exigerait, en quelque sorte, un " arrêt sur image ", qui casserait le dispositif et redonnerait au discours magistral un poids qui n’est pas de mise dans un tel séminaire. Les étudiants, individuellement et collectivement, ont des moyens non négligeables d’interprétation des situations. Ils peuvent mobiliser des connaissances en sciences humaines, un sens commun affûté par divers stages et un début de culture professionnelle. Ils ne peuvent développer par eux-mêmes, sur le vif, le temps d’une analyse de cas, des savoirs dont ils ignorent parfois presque tout, parce qu’ils relèvent de composantes des didactiques des disciplines, de la psychologie ou de la sociologie qu’ils n’ont pas (encore) travaillées.

Si le formateur qui anime un séminaire d’analyse de pratiques s’autorisait à amener des apports théoriques substantiels à propos de situations singulières, il devrait en outre faire preuve de qualités assez rares :

À supposer que cela corresponde à l’identité, au projet et aux compétences des formateurs, serait-ce une bonne idée d’aller systématiquement dans ce sens ? J’en doute. Non seulement parce que cela constituerait une forme de perversion de l’analyse de situations et de pratiques, mais aussi parce que rien ne garantirait des effets de formation à partir d’un " commentaire théorique improvisé ".

Certes, en modifiant le dispositif, en se donnant davantage de temps, en s’autorisant à revenir une semaine plus tard sur la situation, à partir de lectures ou de mises en forme écrite, on pourrait impliquer activement les étudiants dans la théorisation, ne pas en donner le monopole au formateur. Mais est-ce à travers une discours interprétatif, à partir d’une situation non choisie et non anticipée, qu’on construit le plus sûrement des concepts et des connaissances ?

En partant du réel, on travaille sur des situations qui n’ont pas été construites à des fins précises, qui sont nombreuses, riches, diverses, engluées dans un contexte qui les surdétermine, rapportées par des étudiants dont les regards sont divers et qui sont souvent plus préoccupés de savoir que faire que d’analyser. De plus, en formation initiale, certaines situations évoquées ne suscitent guère l’intérêt des autres étudiants, parce qu’elle n’éveillent aucun écho dans leur propre expérience, trop courte. Alors qu’en formation continue, tout le monde imagine que les incidents rapportés auraient pu lui arriver et évoque facilement des cas semblables, en formation initiale, il arrive qu’une situation réelle soit aussi abstraite qu’un exercice scolaire.

Pour connecter à la situation tous les savoirs pertinents accumulés par les sciences sociales et humaines, il faudrait ici aussi du temps et des compétences d’improvisation hors du commun. Même si cela n’entrait pas en contradiction avec le dispositif prévu, la division du travail, les autres démarches à poursuivre en parallèle, on peut douter de l’efficacité d’un discours théorique qui amènerait les étudiants à perdre de vue la situation de départ. Rien ne garantirait alors que cet ancrage initial dans une situation assure davantage d’efficacité et de transfert de connaissances qu’un enseignement théorique ouvertement décontextualisé.

Mieux vaudrait se demander comment articuler les moments et les lieux où l’on pointe des problèmes et les moments et les lieux où l’on s’approprie les savoirs correspondants.

1.3Vers une alliance

L’identification des limites de la démarche clinique n’amène pas à lui tourner le dos. Elle reste irremplaçable pour enraciner le savoir dans l’expérience et la pratique, dans un réel non seulement théorisé, mais éprouvé. En formation, on ne saurait se priver de la diversité, du désordre, de la complexité de l’altérité, qui sont autant de chocs salutaires.

Je m’interroge plutôt sur l’opportunité de compléter la démarche clinique par des approches moins ancrées dans l’expérience vécue, mais en contrepartie plus ciblées sur des objectifs d’apprentissage. Avec Mireille Snoeckx, je pense que s’il y des objets, des mécanismes, des phénomènes incontournables, ils finiront tôt ou tard par surgir si l’on prend le temps d’observer de nombreuses situations et d’analyser sans cesse pratiques et problèmes professionnels. À cet optimisme, que je partage, on peut cependant apporter deux nuances :

Le plus sûr, dans ce cas, serait d’établir un programme serré, avec des passages obligés et d’enseigner ouvertement des savoirs et des façons de faire que le formateur estime incontournables. L’ennui, c’est qu’il romprait alors avec la démarche constructiviste, pour revenir à une formation théorique ou méthodologique clairement prescriptive.

Sans exclure totalement cette éventualité, j’aimerais explorer ici une voie plus incertaine, mais plus cohérente : passer de l’analyse des situations de classe et des pratiques à un travail par situations-problèmes. Allier les deux approches plutôt que les jouer l’une contre l’autre. Tirer de chacune ce qu’elle peut apporter de mieux. Bref, savoir ce qu’on fait, en conjuguant la démarche constructiviste - qui n’est pas une fin en soi - et un souci d’efficacité et de pertinence de la formation professionnelle.

Cette alliance est peut-être, à terme, la seule façon de ne pas revenir à des formations prescriptives, au gré du classique " retour de balancier ", qui menace tous les paradigmes…

 II. Travailler à partir de situations-problèmes construites

Peut-on construire des situations pour pousser les étudiants à affronter des obstacles spécifiques et à construire des compétences et des savoirs professionnels définis ?

On peut évidemment s’inspirer du travail par situations-problèmes chaque fois que l’on veut faire construire des savoirs de façon organisée, au gré d’un curriculum planifié, d’un " texte du savoir " à parcourir avec les étudiants. Cela convient à un enseignement théorique, mais aussi méthodologique, dans la mesure où l’appropriation de savoirs procéduraux rencontre aussi des obstacles conceptuels et exige une compréhension des processus en jeu. Dans tous les cas, on s’attaque à des mécanismes opaques, qui résistent à une intelligibilité immédiate. L’engagement des apprenants dans une situation-problème peut aider à les élucider.

Une formation théorique en sciences humaines et sociales pourrait - si elle s’en donnait les moyens, parmi lesquels une pédagogie plus différenciée - repérer des obstacles cognitifs à travailler par situations-problèmes, par exemple :

La compréhension de ces concepts et théories exige un certain niveau d’abstraction, même si le sens commun est d’une plus grande aide qu’en sciences physiques. L’appropriation active de tels " savoirs savants " relevant des sciences humaines et sociales pourrait s’inspirer de ce qui se fait au niveau de la scolarité de base, les enseignants proposant des situations-problèmes susceptibles d’amener les étudiants à heurter et à surmonter les obstacles cognitifs que rencontre l’appropriation de ces concepts et théories. L’autonomie des apprenants faciliterait considérablement l’organisation concrète du travail. L’obstacle tient surtout aux traditions pédagogiques magistrales, aux taux d’encadrement (cours à grand nombre) et aux emplois du temps universitaires, qui ne donnent pas en général la possibilité de construire des savoirs de façon active, sauf peut-être dans le cadre de séminaires ou de travaux pratiques qui prennent hélas, eux aussi, des formes convenues.

Une telle démarche serait pertinente en formation purement théorique, dans n’importe quel domaine, hors de toute visée professionnelle, mais elle se justifierait plus encore lorsque l’appropriation active et durable des concepts et des savoirs théoriques participe de la construction de compétences à agir efficacement en situation de travail. On peut tout à fait légitimement travailler par situations-problèmes dans le cadre d’un programme notionnel construit.

Sans ignorer cette piste, je me situe ici dans la continuité de la démarche clinique, autrement dit dans un cadre où les savoirs et les compétences se construisent à partir de cas, et non du déroulement planifié d’un texte du savoir déjà écrit. Si ces cas ne sont pas aussi imprévisibles qu’en analyse de pratiques, s’ils sont aménagés, voire amenés par le formateur, il y a certes une forme de planification, mais pas à la manière d’un cours, plutôt en se centrant sur des mécanismes à travailler de façon spécifique.

On entre alors dans une logique de transfert de connaissances et de formation de compétences plus que de transmission pure et simple de savoirs théoriques ou méthodologiques décontextualisés. Ce qui suppose, implicitement, une prise de distance à l’égard d’un modèle de formation dans lequel tous les savoirs seraient acquis en amont, de façon méthodique, leur mobilisation et leur transfert étant travaillés en aval, en situation complexe. Sans tourner le dos à des enseignements théoriques décontextualisés, il paraît en effet plus prometteur de construire une partie des savoirs nécessaires à partir des situations. En médecine, la " formation par problèmes " a suivi ce chemin.

2.1 Savoirs, transfert, formation de compétences

Une compétence est une capacité de mobiliser diverses ressources cognitives pour agir efficacement en situation complexe (Le Boterf, 1994, 1994 ; Perrenoud, 1996 a, 1997 b). Cette mobilisation n’est pas " magique ". Les opérations de transfert, de transposition analogique, d’extrapolation, d’adaptation, d’approximation doivent également se construire, même et surtout si l’on ne parvient pas à les codifier comme des procédures, si elles restent sous-tendues par des schèmes dont le sujet n’a que faiblement conscience. Cette construction se heurte, elle aussi, à des obstacles épistémiques.

Les compétences mobilisent des savoirs dont l’assimilation rencontre des obstacles, tant au niveau de leur appréhension que de leur mise en œuvre. On sait qu’un étudiant en médecine qui aurait compris et retenu toutes les théories ne ferait pas pour autant un bon clinicien. Il y a des obstacles cognitifs à la compréhension des savoirs et d’autres à sa mobilisation. S’il faut, comme le proposent Develay (1998), Frenay (1996), Mendelsohn (1996), Raynal et Rieunier (1998), Rey (1996), Tardif (1996), Tardif et Meirieu (1996), travailler et apprendre le transfert de connaissances, c’est bien parce qu’il se heurte à des obstacles cognitifs, qui tiennent notamment à l’identification de la structure des problèmes et des analogies entre situations et aux opérations de décontextualisation et recontextualisation des savoirs acquis.

Le défaut de mobilisation met aussi en évidence, assez souvent, des manques, des incohérences ou une maîtrise approximative des ressources mobilisées, notamment les savoirs constitués, qu’ils soient issus de la recherche, de la culture professionnelle ou de l’expérience personnelle. Dans une démarche clinique, on travaillera donc simultanément l’appropriation des savoirs et leur mise en œuvre dans l’action. Le travail par situations-problèmes appartient alors au registre de la formation de compétences aussi bien que de l’assimilation active de savoirs théoriques ou professionnels. La construction de compétences n’est pas alors un simple exercice d’intégration, elle développe également la maîtrise des savoirs à mobiliser.

2.2 Les limites de l’analyse des situations vécues

Lorsque l’étudiant-stagiaire agit, dans une classe, le formateur qui l’observe (formateur de terrain ou autre visiteur) peut identifier, au moins intuitivement, ce qui fait obstacle à la réussite de l’action et le transformer en objectif de formation, dans une relation duale, parfois avec la possibilité de faire un nouvel essai. La vidéo rend possible un retour sur l’action (Carbonneau et Hétu, 1996 : Faingold, 1993, 1996 ; Mottet, 1997 ; Paquay et Wagner, 1996), comme l’écriture (Cifali, 1996, Imbert, 1992, 1994). On peut alors identifier des obstacles à l’action, les verbaliser, les analyser, les anticiper pour une prochaine fois. On peut, dans le meilleur des cas, repérer des obstacles à la compréhension et les travailler.

On ne construit pas encore, de ce fait, une situation-problème. Pour le faire, il faut mettre les étudiants au travail face à une énigme, une impasse, un défi à leur mesure dans des conditions en quelque sorte " protégées " de la complexité, des urgences et des enjeux de l’action réelle. Peut-on, hors du contexte de la classe, créer des situations-problèmes qui s’en inspirent, mais permettant d’identifier et de travailler des objectifs-obstacles spécifiques ?

Il ne s’agirait plus, alors, de parler de situations qui se sont produites ou pourraient se produire en classe, mais de faire vivre une situation qui confronte les étudiants à des obstacles cognitifs dans la construction de savoirs. Est-ce possible ?

On peut entrevoir deux types de situations :

2.3 Situations de simulation et jeux de rôles

En formation, il est parfaitement possible de simuler le fonctionnement d’une équipe pédagogique, d’un entretien avec des parents ou un supérieur hiérarchique, d’un conseil de classe ou d’une " leçon interactive ". Une partie des étudiants sont alors des comparses, des complices du formateur, qui les invite à jouer le rôle des partenaires de l’enseignant (parents. élèves, inspecteur ou collègues). Comme dans une expérience de psychologie sociale bien conduite, les complices sont guidés pour faire surgir à coup sûr les problèmes sur lesquels on souhaite travailler. On sort donc du jeu de rôles classique, où chacun improvise, pour aller vers une forme de mise en scène. Notons en passant que ce travail de préparation pourrait, en lui-même, être extrêmement formateur. On pourrait imaginer des dispositifs où l’on répartirait les étudiants en deux groupes, l’un réunissant ceux qui vont jouer le rôle de l’enseignant, l’autre réunissant - avec un formateur - ceux qui vont jouer le rôle de ses partenaires. Ces derniers, pour jouer leur rôle, devraient partager une représentation de l’obstacle sur lequel on veut travailler. Ainsi, on pourrait préparer les étudiants jouant le rôle des élèves à :

Si l’on simule une rencontre avec un couple de parents d’élèves, ces derniers pourraient :

Ce ne sont que des exemples, amenés sans véritable analyse des compétences en jeu, ni repérage fin des obstacles. En s’arrêtant sur chacune, on verrait que toutes ces situations exigent certaines compétences générales (d’observation, d’analyse, de communication), mais qu’elles offrent aussi des singularités, qui présentent autant d’obstacles spécifiques, aussi bien dans l’assimilation de savoirs (sociologiques, psychologiques) que dans leur mobilisation à bon escient, en situation. Ainsi, gérer l’angoisse de l’autre ne mobilise ni les mêmes savoirs, ni les mêmes émotions que gérer son manque de confiance ou ses tentatives de séduction.

On pourrait reconstituer de la sorte, in vitro, sans enjeux véritables, une partie de ce qui se passe in vivo, dans une école, avec de vrais partenaires. Le groupe pourrait alors observer celui qui joue le rôle de l’enseignant aux prises avec des problèmes assez proches de ceux qu’il rencontrera dans une pratique professionnelle.

On voit que de telles démarches posent des problèmes complexes de temps, d’organisation, de dynamique de groupe, de gestion des différences, d’éthique. Les dispositifs de formation à mettre en place ne sont pas simples. Avant de tenter l’expérience, un travail approfondi d’analyse et d’exploration s’imposerait, à partir d’un certain nombre d’exemples et d’essais, pour vérifier qu’on peut :

Il reste à savoir, ici comme dans le cas des simulations réalistes, si on peut mobiliser un groupe sur un obstacle rencontré par une personne dans la construction de ses savoirs et compétences. Il faut qu’elle accepte de le " collectiviser ". C’est ainsi qu’Astolfi et al. (1997) proposent que le travail de la situation-problème fonctionne " sur le mode du débat scientifique à l’intérieur de la classe, stimulant les conflits socio-cognitifs potentiels ". Chacun comprend ce que cela veut dire dans le champ des savoirs savants. Dans celui des savoirs professionnels, la pratique sociale de référence n’est pas le débat scientifique, entendu comme celui de chercheurs qui discutent d’une hypothèse. C’est plutôt le débat qu’engagent des experts (ingénieurs, thérapeutes, gestionnaires, informaticiens, etc.) qui cherchent ensemble à résoudre un problème, sans disposer de toutes les informations, de toutes les certitudes théoriques, de toutes les procédures qui garantiraient un résultat optimal. Ils doivent donc prendre des risques. Chacun y va de son analyse de la situation et de sa stratégie. Comme dans le débat scientifique, chacun argumente, mais c’est autour d’une décision à prendre, qui n’est pas entièrement dictée par la raison et l’état des savoirs.

Le paradigme dont on peut s’inspirer pour construire des savoirs professionnels sur le mode des situations-problèmes est plutôt celui du débat entre praticiens réflexifs (Schön, 1994, 1996) qui confrontent leurs lectures d’une situation et les perspectives d’action qu’ils entrevoient. De ce point de vue, il y a continuité avec l’analyse de situations éducatives complexes ou de problèmes professionnels.

L’interaction au sein d’un groupe n’est pas une fin en soi. On dispose par exemple de logiciels de simulation qui développent, chez de futurs décideurs, la résistance au stress, la maîtrise des émotions ou le tri parmi des informations fragmentaires, changeantes et contradictoires. Pourquoi ne pas réfléchir à des outils analogues dans le champ des situations d’enseignement ? Il n’est pas impossible que les outils informatiques, notamment dans le domaine de la " réalité virtuelle ", se développent plus vite que la capacité des formateurs d’enseignants à les utiliser…

2.4 Structures d’interaction plus générales

Une pratique professionnelle confronte à des dilemmes, des situations d’incertitude, des ambivalences, des résistances qui prennent des allures très concrètes, mais qu’un travail de conceptualisation pourrait réduire à des structures assez universelles de l’action et des interactions.

Les problèmes de justice, de planification, d’improvisation, de décision, de coopération, d’exercice du pouvoir, de conflit, de négociation, de ségrégation, de conflits culturels sont en effet étrangement semblables, si on les dépouille de leurs enjeux spécifiques, pour s’intéresser aux contradictions du réel et des personnes et à la façon dont un acteur compétent les gère.

On peut imaginer, par exemple, de travailler sur la décentration comme alliance d’une connaissance anthropologique et psychologique des différences de cultures et de visions du réel et d’une capacité pratique d’imaginer le point de vue de l’autre, de voir la réalité par ses yeux, en fonction de ses valeurs et de ses projets, pour mieux la comprendre, mieux en tenir compte, parfois mieux l’accepter.

Autre exemple : on peut travailler sur les pressions au conformisme, sur le rapport à l’autorité et aux normes, en adaptant les expériences de psychologie sociale qui mettent à nu les fonctionnements spontanés des êtres humains.

On ne recherche pas, dans ce cas, un réalisme par rapport à la classe, mais par rapport à des situations d’action et d’interaction plus générales. Ce qui nécessite un débat préalable sur les mécanismes psychosociaux qui fonctionnent dans la classe et la relation pédagogique sans en être spécifiques, simplement parce que c’est un théâtre comme un autre, offert aux actions, aux relations et aux émotions humaines.

Dans le champ des didactiques des disciplines, il paraît également possible et fécond d’impliquer les étudiants dans des situations d’enseignement-apprentissage qui obligent à travailler sur la dévolution, le contrat, la transposition ou d’autres mécanismes fondamentaux.

2.5 Clarifier les objectifs de formation

On ne peut travailler par situations-problèmes sans consentir un important investissement théorique préalable pour identifier les nœuds de la pratique, les obstacles récurrents dans la construction des compétences et des savoirs professionnels visés.

Il est nécessaire d’établir un référentiel de compétences pour une formation professionnelle. Aussi bien fait soit-il, il ne dicte pas à chaque unité de formation sa contribution spécifique. Cette dernière est souvent définie de façon thématique, voire disciplinaire, en fonction de l’identité et des appartenances des formateurs.

On se heurte ici à un problème de fond dans la construction d’un plan de formation : toutes les compétences visées ne peuvent être travaillées de la même façon et avec la même force dans chaque composante du programme, mais on ne peut les " répartir " clairement entre les unités de formation. Dès lors, la division du travail et l’identification de chaque unité se font plutôt sur la base des savoirs de référence, avec le risque, sur lequel insiste Tardif (1996) d’une centration sur les ressources à mobiliser, notamment des savoirs et des méthodes, plutôt que sur leur intégration, leur mise en synergie, leur mobilisation en situation.

Travailler par situations-problèmes devrait inciter les formateurs à identifier ce que j’appelle les " nœuds de la pratique ", ce qu’on peut aussi nommer " objectifs-noyaux ". Cela suppose une clôture thématique, qu’elle soit autour d’une discipline d’enseignement (en didactique) ou de processus extérieurs aux disciplines ou présents dans toutes (pour les approches plus transversales de la pratique enseignante). Cette clôture aurait plusieurs fonctions :

En formation initiale des enseignants, le travail par situations-problèmes n’exige pas, dans mon esprit, l’ouverture de nouvelles unités de formation, qui lui seraient exclusivement dédiées. Il s’agit plutôt d’une diversification interne des unités existantes. L’identification pointue des nœuds ou des noyaux ne guiderait pas seulement le travail par situations-problèmes, qui l’exige, mais pourrait aider à mieux cadrer les analyses de pratiques et études de cas, affaiblissant du même coup le contraste entre les diverses démarches de formation.

 III. L’articulation entre recherche et formation

Dans le champ de la construction de savoirs professionnels, l’idée de travailler par situations-problèmes paraît à la fois prometteuse et difficile à mettre en œuvre. Elle est prometteuse parce qu’elle vise le développement des savoirs dans des situations ouvertes et complexes, qui se rapprochent des situations de travail. Mais elle est difficile à mettre en œuvre, parce qu’elle suppose une analyse pointue des savoirs et des compétences à développer et une grande " inventivité didactique  dans le travail par situations-problèmes.

Si ce travail incertain mérite d’être entrepris, c’est en raison de la difficulté de conjuguer le réalisme d’une situation, la possibilité d’en débattre de façon contradictoire, durant l’action ou juste après et la construction de savoirs et de compétences au-delà de l’analyse. Comment former par une pratique réflexive sans lui faire perdre son ancrage dans l’action ? Comment analyser des situations sans s’y enfermer, en prenant appui sur elles pour construire des savoirs et des compétences ? Telles sont les limites de la démarche clinique qu’on peut pressentir. À terme, on peut donc envisager, en formation des enseignants, d’allier l’analyse de l’expérience et le travail par situations-problèmes. Il n’y a entre ces démarches aucune contradiction, ni aucune hiérarchie, seulement des différences dans les dispositifs et les effets de formation.

Sur ce problème, la recherche, qu’elle touche à la didactique des disciplines, aux approches plus transversales ou à l’éducation des adultes, ne dispose d’aucune réponse consolidée, qu’il suffirait de faire connaître aux formateurs. En revanche, le problème posé ici pourrait stimuler des recherches en didactique des formations professionnelles, à la faveur de partenariats entre chercheurs et formateurs.

Le propre d’une démarche clinique aussi bien que d’un travail par situations-problèmes est d’encourager à la métacommunication et à la métacognition. En effet, ces démarches ne peuvent fonctionner que si leurs finalités et leurs modalités sont comprises des étudiants, à la fois pour qu’ils y adhèrent, en saisissent l’esprit, jouent leur rôle, perçoivent les enjeux éthiques et en tirent le meilleur parti pour leur formation.

On peut faire de cette nécessité vertu puisque de telles démarches obligent à expliciter, mettre en discussion, justifier, négocier ce que l’on fait, pourquoi ne pas aller dans le sens d’une recherche-action, impliquant les étudiants dans l’analyse des dispositifs et interactions didactiques, des processus d’apprentissage, des rapports au savoir et des identités en jeu ? Ce serait une source de régulation immédiate, mais aussi une contribution à la recherche, par l’apport de données, de questions et d’hypothèses.

 

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