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Texte d’une intervention au Symposium " La place des sciences humaines et sociales dans l'expertise et les savoirs professionnels des enseignants " dans le cadre des Rencontres du " Réseau Éducation et Formation " (REF), Montréal, UQAM, 10 au 12 avril 2001.
 

 

 

 

Les sciences de l’éducation proposent-elles
des savoirs mobilisables dans l’action ?

 

Philippe Perrenoud

Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation
Université de Genève
2001

Sommaire

La construction de l'expertise

L'organisation des savoirs issus de la recherche

Pour conclure

Références


Certains professeurs, surtout au secondaire et dans l'enseignement supérieur, font preuve d'un profond mépris à l'égard des sciences humaines en général et des sciences de l'éducation en particulier. Ce mépris se nourrit d'une aussi profonde ignorance et la pérennise. On peut regretter ces attitudes, mais observer aussi qu'elles seraient moins défendables si nombre d'enseignants en exercice donnaient le spectacle de praticiens fondant sur les sciences humaines et sociales une action éducative plus efficace ou plus juste. Or, rien n'est moins évident, quand bien même on ne s'attend pas à une " application " directe de savoirs théoriques issus de la recherche.

D'où la question : les sciences de l'éducation offrent-elles des savoirs mobilisables dans l'action ? La réponse ne se trouve pas chez ceux qui ignorent les sciences humaines, puisqu'ils n'ont rien à mobiliser. Dans certains pays, les sciences humaines et sociales sont quasiment absentes du curriculum de formation des enseignants, en particulier au second degré. Que les professeurs ne mobilisent pas ce qu'ils n'ont jamais eu l'occasion de s'approprier n'est pas un mystère ! Il est plus intéressant de se demander pourquoi les enseignants qui ont en principe acquis une culture en sciences de l'éducation la mobilisent aussi faiblement.

 

Les limites de l'état des savoirs

Quels sont donc les obstacles à cette mobilisation ? Ils tiennent pour une part à l'état des savoirs. Il y a, dans la connaissance scientifique des processus de formation, trop de zones d'ombre pour que les sciences de l'éducation puissent prétendre guider fermement l'action pédagogique, ni même expliquer ce qui se passe ou permettre de l'anticiper. Face à un élève qui n'apprend pas à lire, ne comprend rien à la soustraction ou refuse de travailler, il n'existe pas de réponses toutes faites, basées sur des connaissances " scientifiquement établies ".

La faiblesse et le caractère partiel des savoirs disponibles permettent-ils à eux seuls de rendre compte de la faible mobilisation dans les classes des savoirs issus des sciences sociales et humaines ? Ce serait faire comme si, dans les métiers qui font appel aux sciences dures, ces dernières avaient réponse à tout, ce qui expliquerait qu'elles soient très souvent mobilisées par les praticiens. En fait, dès qu'on quitte le laboratoire pour entrer dans la complexité d'une action de terrain, il est rare que la théorie dicte constamment, en raison, l'action optimale à mener. C'est loin d'être le cas en médecine. Et même les ingénieurs ne trouvent pas toujours dans les savoirs scientifiques et techniques des outils infaillibles pour prendre des décisions en toute certitude. Il serait donc plus raisonnable d'assumer l'idée que, dans tous les métiers, il subsiste un écart entre la théorie et l'action. C'est d'ailleurs ce qui a inspiré les travaux de Schön (1994, 1996) sur la pratique réflexive : si, de la théorie, on pouvait déduire la décision, il suffirait de praticiens logiques !

Il est évident toutefois que l'ampleur, la rigueur et la validité des savoirs théoriques et méthodologiques disponibles sont au principe de grandes différences entre les métiers. L'ingénieur est moins démuni que le médecin et ce dernier l'est moins que l'enseignant. Mais nul n'y peut rien, hic et nunc : l'état des savoirs est un produit de l'histoire, nul ne peut le modifier de façon volontariste, en tout cas à court terme. Sans doute des programmes de recherche ambitieux, largement dotés de moyens, bien conçus et bien pilotés peuvent-ils stimuler le développement des savoirs. De ce point de vue, la misère des sciences humaines et sociales ne favorise pas leur développement rapide. Toutefois, des avancées théoriques majeures ne peuvent être accélérées au-delà d'une certaine limite. Chevallard illustrait bien cette frontière en disant que si Louis XIV avait voulu envoyer une fusée dans la lune, investissant tout l'or du royaume dans cette entreprise et mettant au travail tous les savants de l'époque, aucun miracle ne se serait produit. L'état des savoirs rendait alors utopique une entreprise qui deviendrait un défi réaliste quelques siècles plus tard.

Si tout dépendait exclusivement de l'état des savoirs, qui se modifie lentement, le plus sage serait d'attendre que les sciences humaines et sociales aient fait suffisamment de progrès théoriques pour mieux fonder la pratique enseignante. À moins d'un grand " bond en avant ", la question de leur mobilisation ne se poserait alors que dans une cinquantaine ou une centaine d'années. Les professeurs, dans l'intervalle, feraient comme aujourd'hui avec " les moyens du bord ".

Si l'on estime au contraire que dans leur état actuel les savoirs disponibles, aussi fragiles, controversés et lacunaires soient-ils, sont déjà des ressources potentiellement mobilisables et le seront de plus en plus, il n'est pas absurde d'engager une réflexion immédiate sur ce qui empêche la pleine réalisation de ce potentiel.

Quels sont les obstacles qui empêchent des savoirs existants, relativement fiables et potentiellement pertinents d'être mobilisés ? Cette question peut en suggérer deux autres :

1. Les enseignants ont-ils l'habitus intellectuel, le rapport au savoir, les compétences nécessaires pour repérer les théories pertinentes et s'en servir ?

2. La forme, la texture, l'écriture des savoirs disponibles favorisent-elles leur repérage et leur mobilisation en vue de l'action ?

Les deux questions sont complémentaires : le savoir-faire " identificateur " et " mobilisateur " sera d'autant plus efficace que les savoirs sont " apprêtés " en vue de leur repérage et de leur usage.

Cette façon de poser le problème n'entend pas suggérer qu'en dehors des savoirs issus des sciences de l'éducation il n'y aurait pour les enseignants " point de salut ". Chacun dispose d'une " base de connaissances " (Gauthier, Mellouki et Tardif, 1993 ; Gauthier, 1997) qui, sans ignorer la recherche scientifique, est ancrée avant tout dans l'expérience individuelle et collective et constitue une " raison pratique " (Gauthier, 1993), qui oriente le jugement professionnel (Tardif et Gauthier, 1996) et permet au minimum de " faire la classe " (Rey, 1998), voire de " faire de l'effet en enseignant " (Gauthier et Martineau, 1998).

S'il importe de discerner la part des sciences de l'éducation et son mode d'existence dans la base de connaissances des enseignants, c'est pour des raisons théoriques, didactiques et politiques.

 

Savoirs théoriques et transposition pragmatique

Les travaux de Verret (1975) et des didacticiens, et tout d'abord ceux de Chevallard (1991) ont contribué à construire et à faire connaître la notion de transposition didactique. Appliquée aux savoirs, l'idée de base est simple : sous leur forme native, celle qui prévaut dans les ouvrages et les communications scientifiques, les savoirs savants ne sont enseignables " tels quels " qu'à des étudiants très avancés, qui partagent déjà une bonne partie des acquis de la discipline considérée et disposent des moyens intellectuels requis pour assimiler directement de la théorie.

De la même façon, on peut dire que les savoirs ne deviennent utilisables dans une action professionnelle, quelle qu'elle soit, qu'au prix d'une transposition pragmatique. Les deux concepts sont cousins, mais distincts. On peut considérer la transposition didactique comme une forme de transposition pragmatique, avec une différence cependant : l'apprêt didactique vise en priorité des apprenants et répond aux contraintes du système didactique : le temps des études et son découpage en années, semestres et périodes, le contrat tacite qui se noue entre le maître et l'élève, le rapport scolaire au savoir, l'évaluation. La transposition didactique porte sur les savoirs à enseigner.

La transposition pragmatique telle qu'elle est envisagée ici opère sur les savoirs pour enseigner, ceux qui fondent les décisions et les actions pédagogiques et didactiques. Nous nous intéressons plus spécifiquement aux savoirs plus ou moins directement issus des sciences de l'éducation et plus globalement des sciences humaines et sociales.

Pour éviter toute confusion, peut-être serait-il plus heureux de choisir un autre vocable pour nommer les transformations que le savoir théorique subit pour devenir une ressource pour l'action. Je conserverai néanmoins la notion de transposition, car elle me semble la métaphore la plus adéquate, liant traduction et transfert, invariance et transformation. En musique, transposer, c'est " Faire passer une structure musicale dans un autre ton sans l'altérer ".

Je parlerai donc de transposition pragmatique en invitant le lecteur à retenir la parenté aussi bien que la différence avec une transposition didactique qui porte, elle, sur les savoirs à enseigner. On pourrait esquisser un modèle liant ces deux processus :

 Il conviendrait de s'interroger sur la confluence et l'interaction de ces deux transpositions. Je m'en tiendrai ici à la transposition pragmatique de savoirs théoriques et procéduraux issus des sciences humaines, y compris - pour lever une éventuelle ambiguïté - : les savoirs issus de la recherche en didactique.

Plutôt que de transposition pragmatique, ne suffirait-il pas de parler de transfert de connaissances, concept plus classique (Tardif, 1999) ? Il me semble que non, pour deux raisons :

1. Ce concept désigne de façon trop limitative le réinvestissement d'une connaissance identifiée d'un contexte de formation à un contexte d'action. Avec Le Boterf (1994, 1997), il semble plus juste de parler de mobilisation. Cette dernière métaphore est plus féconde, parce qu'elle est moins " spatiale " et surtout parce qu'elle part d'une situation d'action pour tenter de saisir à quelles ressources le praticien fait appel, sans exclure, au contraire, que ces ressources soient hétérogènes et aient été constituées à des périodes et dans des contextes différents, parfois d'apprentissage formel, parfois d'action (Perrenoud, 2000).

2. Même si elle est plus large, la notion de mobilisation sous-estime encore la part de transformation que les savoirs doivent subir pour devenir des ressources. L'idée de mobilisation laisse encore supposer que les ressources sont disponibles, " en attente d'un usage ", qu'il s'agit donc simplement de les connecter à une situation et de les combiner. En tant que tels, les savoirs resteraient donc invariants. C'est toute l'ambiguïté de la notion de contextualisation : désigne-t-elle une simple " mise en situation " ou une véritable transformation des représentations ?

L'approche socio-constructiviste de la pensée et de l'action incline à envisager, au moins dans les situations complexes, des remaniements, des reformulations, des altérations, des appauvrissements et des enrichissements des savoirs disponibles. La notion de transposition pragmatique autorise à penser des reformulations et des développements des savoirs en vue de l'action.

Certaines de ces transformations ne s'opèrent pas nécessairement dans la tête du praticien juste avant son action. Elles peuvent être incorporées à la culture professionnelle, qui véhicule un ensemble de savoirs procéduraux, de méthodes, voire de " recettes " dont certains résultent d'une première transposition de savoirs théoriques. La mobilisation de telles procédures dans l'action exige donc, hic et nunc, un moindre travail de transposition, puisqu'une part a été accomplie en amont et se trouve en quelque sorte cristallisé en une règle d'action qui fonctionne, en temps ordinaire, sans qu'il soit nécessaire de revenir à ses fondements théoriques, ni même de les connaître (Guillevic, 1991).

Aucun professionnel, aussi peu qualifié soit-il, ne se borne cependant à appliquer des règles. Chacun fait preuve d'une intelligence au travail (Jobert, 1999) qui va au-delà des règles. Dans un métier complexe, on peut encore moins espérer que des procédures permettront de faire face à toutes les situations. Cela n'invalide pas a priori tout recours à un savoir procédural, qu'il soit issu de la recherche ou de la culture professionnelle. Je reviendrai donc sur la part des savoirs procéduraux qui font partie des sciences de l'éducation ou en dérivent.

Auparavant, tentons de saisir ce qui se passe lorsque les savoirs à mobiliser ne se présentent pas, avant l'action, sous la forme d'une procédure dont il suffit de reconnaître la pertinence et de fixer quelques paramètres. Les savoirs ne sont pas alors des règles à suivre, mais des outils d'intelligibilité d'une situation professionnelle, et de construction d'une stratégie d'intervention. Il est dans ce cas impossible de les " plaquer " immédiatement sur la situation. De plus, même s'ils la rendent intelligible, ils ne dictent aucune conduite précise.

La transposition pragmatique passe alors, encore plus que lors de la mise en œuvre de procédures, par un raisonnement professionnel, qu'on peut se représenter :

Selon les situations, on s'approche davantage de l'un ou de l'autre de ces deux pôles. Lorsque le praticien a affaire à une " situation d'école " (décrite dans les livres ou la tradition orale avec la réponse appropriée) ou à une situation moins stéréotypée mais à laquelle on peut faire correspondre aisément quelques idées et quelques règles, on peut imaginer que la décision découle en droite ligne des savoirs constitués.

Lorsqu'au contraire il faut, pour conceptualiser la situation, construire des savoirs ad hoc, une étape intermédiaire surgit, certes incorporée au processus de décision, mais qui fait en quelque sorte un détour par la formulation de savoirs nouveaux. C'est exactement le statut d'une hypothèse dans une conduite de recherche. L'hypothèse n'est pas contenue dans l'état présent de la théorie, même si elle y figure " en germe ". Elle doit être élaborée, explicitée pour devenir une proposition autonome, dont on peut dès lors tenter de vérifier la validité. La différence est évidemment que le chercheur s'engage sur cette base dans une phase de recueil de données, alors que le praticien " passe à l'acte " d'une manière plus risquée.

On peut hésiter à nommer " savoir " la représentation spécifique qu'un praticien construit d'une situation singulière avant d'agir ou au fil d'une action de longue durée qui exige une mise à jour constante de la stratégie, donc de l'analyse. Si le savoir est conçu comme général, il est ipso facto trans-situationnel et il faut donc nommer et conceptualiser autrement la connaissance à l'œuvre dans une situation particulière. On pourrait parler d'interprétation, dans la tradition herméneutique, de savoir " situé ", ou encore " local " ou simplement d'une représentation ou d'une " définition de la situation ".

D'un point de vue épistémologique, il faut évidemment faire la différence entre le savoir portant sur une situation singulière et une théorie qui rend compte d'un nombre illimité de processus appartenant à la même catégorie. En revanche, du point de vue du fonctionnement cognitif du sujet, il n'est pas sûr que la différence soit sensible. Selon Gauthier (1997, pp. 245-246), un savoir est à la fois une certitude subjective rationnelle, un jugement de vérité et un raisonnement argumentatif prétendant légitimer une proposition plutôt que son contraire. Un praticien qui décide de son action sur la base de ce qu'il croit savoir a une certitude subjective rationnelle et " raisonnable ", car s'il doutait ou pensait le contraire, il n'agirait pas de la même façon. Il estime que sa représentation du réel et des mécanismes en cause est une vérité et il peut apporter des arguments à l'appui de son jugement. Subjectivement, le praticien pensant une réalité singulière n'est pas très différent du savant reformulant une théorie de portée générale.

L'action ne demande pas toujours la création de savoirs nouveaux. Dans l'urgence (Perrenoud, 1996 a, 1998 a), le praticien peut agir " sans savoirs ", sauf à considérer comme tels les schèmes constitutifs de l'habitus, en les traitant à l'égal des représentations conscientes et organisées auxquelles on associe ordinairement ce concept. Cet élargissement sémantique accroîtrait la confusion.

Dans les situations de routine, même s'il a le temps de penser, le professionnel peut se borner à mobiliser et combiner des savoirs disponibles. Ils suffisent à guider une réaction honorable. C'est lorsque la situation n'impose pas une action immédiate, tout en mettant les réponses de routine en échec, que le praticien doit construire un savoir nouveau. À partir de sa base de connaissances et de ses observations, il échafaude un modèle qui rend intelligible et dans une certaine mesure maîtrisable le fonctionnement de la classe, d'un élève et éventuellement de sa famille, ou de sa propre équipe pédagogique. On ne peut alors réduire son travail mental à un transfert, à une mobilisation ou à une simple " mise en œuvre " de savoirs prééexistants. Il crée des représentations nouvelles, qui peuvent d'ailleurs, une fois l'action accomplie, venir enrichir ses savoirs d'expérience, donc devenir de nouvelles ressources cognitives, à mobiliser dans des situations ultérieures.

On se trouve alors, plus encore, dans le cadre d'une pratique réflexive, à condition de préciser d'emblée que la réflexion ne se borne pas à faire fonctionner un savoir-analyser (Altet, 1994, 1996) en " circuit fermé ", mais puise dans des savoirs acquis en amont, les affine, les enrichit, les différencie, les contextualise et construit parfois des savoirs nouveaux.

Les travaux sur les compétences aussi bien que sur l'apprentissage en contexte permettent progressivement de décortiquer les opérations mentales en jeu et d'associer à des expressions qui restent métaphoriques - transfert ou mobilisation - des modèles plus pointus du fonctionnement cognitif situé et des processus d'apprentissage et de décision qu'il sous-tend.

Dans l'immédiat, limitons-nous à tirer deux conséquences provisoires de cette analyse :

1. Utiliser des savoirs est une forme d'expertise très exigeante, qui n'est pas développée par la simple appropriation de ces savoirs selon une forme classique d'enseignement-apprentissage, qu'elle soit scolaire ou universitaire.

2. La façon sont ces savoirs sont organisés et formulés les rend disponibles ou au contraire fonctionne comme un obstacle.

On traitera donc séparément dans ce qui suit :

L'organisation des champs de savoirs précède logiquement la mise en place des cursus de formation. J'en traiterai cependant dans un second temps, car la réflexion sur les parcours et les démarches posera plus clairement la question de la structuration des savoirs.

 


La construction de l'expertise en formation

Les travaux récents sur le transfert et la mobilisation de connaissances (Frenay, 1996 ; Meirieu et al., 1996 ; Meirieu et Tardif, 1996 ; Meirieu, 1998 ; Mendelsohn, 1996 ; Perrenoud, 2000 ; Rey, 1996 , 1998 ; Tardif, 1996, 1999 ; 1999) convergent sur au moins un point : le transfert n'est pas automatique, il n'est pas donné " par dessus le marché ", il s'apprend.

S'enseigne-t-il ? Tout dépend de ce qu'on appelle enseigner. Si cela consiste à organiser et piloter un processus de formation, alors le transfert s'enseigne. Si enseigner se limite à la transmission discursive de savoirs déclaratifs ou procéduraux, le transfert ne s'enseigne pas, car les processus de transfert et de mobilisation ne sont pas assurés par la simple mise en œuvre de procédures. On se trouve dans la sphère du raisonnement mêlé d'intuition, qui peut s'appuyer sur des règles mais ne s'y réduit pas : " Toute tentative pour fonder une pratique sur l'obéissance à une règle explicitement formulée (…) se heurte à la question des règles définissant la manière et le moment opportun d'appliquer les règles ou, comme on dit si bien, de mettre en pratique un répertoire de recettes ou de techniques, bref de l'art de l'exécution par où se réintroduit inévitablement l'habitus " (Bourdieu, 1972, p. 199-200).

Pour développer des capacités de transfert et de mobilisation des connaissances, il faut donc mettre en place des dispositifs de formation qui relèvent plus de l'entraînement intensif et réflexif et de la formation de l'habitus professionnel que d'une transmission discursive. Ce qui amène à parler de formation en alternance et de démarche clinique.

 

Formation en alternance

Je ne m'attarderai pas ici aux dispositifs. Insistons plutôt sur leur fonction commune : permettre, dans des conditions compatibles avec un cursus de formation initiale, à la fois une expérience sur le terrain et un retour réflexif sur cette expérience, à la lumière des sciences sociales et humaines. Il importe que le dispositif n'impose pas le recours permanent à des stratégies de survie, mais n'autorise pas, en contrepartie, le retrait dans l'analyse, sans action. On n'apprend à bien nager ni en étant jeté dans la piscine, ni en regardant la démonstration éblouissante du maître nageur ! Compte tenu de la vision traditionnelle des stages, des conceptions souvent rudimentaires de l'alternance, des contraintes gestionnaires, des difficultés du partenariat entre les instituts de formation initiale et le milieu scolaire, ces conditions sont loin d'être partout réunies.

Si les étudiants n'ont pas, à maintes reprises et dès le début de leur formation, l'occasion d'expérimenter et d'exercer sur le terrain la mobilisation des savoirs acquis en sciences humaines et sociales, on ne s'étonnera pas que ces savoirs restent pour eux des " matières d'examens " et n'aient sur la pratique professionnelle autonome qu'une influence très limitée.

Il ne suffit pas, faut-il le rappeler, de prévoir dès le début de la formation initiale une alternance de cours (théoriques et méthodologiques) et de stages. S'il n'y a pas une forte articulation entre les divers temps et lieux de formation, on se retrouvera avec l'habituelle schizophrénie : d'un côté, une formation théorique validée par des examens de connaissances, de l'autre une " formation pratique " validée par un rapport de stage. L'alternance n'est qu'une condition nécessaire d'une véritable articulation théorie-pratique. Il faut encore inventer des dispositifs favorisant un va-et-vient répété entre l'assimilation de connaissances théoriques et méthodologiques, leur mobilisation sur le terrain, le retour réflexif sur cette expérience et l'appel à de nouveaux savoirs comme outils d'interprétation ou d'anticipation.

Pour rompre avec la juxtaposition entre cours et stages, il ne suffit pas de proposer quelques séminaires d'analyse de pratiques, quelques exploitations de stages, quelques discussions centrées sur les problèmes ou les dilemmes professionnels. Comme le mémoire professionnel, ces dispositifs sont précieux, mais ils restent dérisoires si l'articulation théorie-pratique n'est pas portée au cœur des contenus théoriques et méthodologiques, qu'ils soient didactiques ou transversaux. On trouvera développées ailleurs (Altet, 1994 ; Paquay et al., 1996 ; Perrenoud, 1994, 1996 b, 1998 b, 2001 a, b et c) les implications de cette position.

 

Une démarche clinique
pour construire des savoirs nouveaux

On limite parfois la démarche clinique à un " simple " entraînement à la mobilisation des acquis devant des " cas concrets ". Certes, c'est bien au chevet du malade qu'on apprend à identifier et mobiliser les connaissances théoriques et méthodologiques pertinentes. Ce n'est pas la seule " vertu " d'une démarche clinique, ni même la principale. Sa vocation est d'aider à construire des savoirs nouveaux autrement qu'au gré d'un enseignement structuré par le déroulement du " texte du savoir " (Chevallard, 1991).

On le percevra mieux si l'on se garde de radicaliser l'opposition entre savoirs anciens et savoirs nouveaux. La plupart des problèmes rencontrés dans un service hospitalier par des médecins assistants qui " font leur clinique " évoquent " quelque chose " dans leur esprit. Le travail clinique fait rarement surgir un pan entier de réalité qui serait resté jusqu'alors insoupçonné. " Normalement ", tout médecin assistant est censé avoir certaines bases théoriques avant d'être confronté à des cas cliniques.

Est-ce à dire qu'elles suffisent, qu'il ne reste qu'à les mobiliser à bon escient ? Bien sûr que non, les médecins assistants - et sans doute les médecins confirmés - ne cessent de comprendre et d'apprendre du neuf " sur le vif ", à travers les cas qu'ils doivent traiter. Ils assimilent ou construisent de nouvelles notions, de nouveaux savoirs, de nouvelles méthodes, de nouvelles technologies. Cet enrichissement se produit à l'occasion de la mobilisation de leurs acquis antérieurs, qui appelle et permet leur développement. C'est l'obstacle qui exige, pour être surmonté, des connaissances plus étendues ou pointues.

Il est difficile de démêler en pratique l'entraînement à la mobilisation des acquis et leur dépassement, car ce dernier est souvent de l'ordre d'une extension plutôt que de l'ajout d'éléments extérieurs. Il reste cependant essentiel de penser la clinique comme une occasion de construire de nouveaux savoirs.

Pourquoi ce qui vaut pour la médecine ne vaudrait-il pas pour la formation des enseignants ? On rejoint ici, par un autre chemin, la conception des situations-problèmes et des objectifs-obstacles qui s'est développée en didactique des sciences (Astolfi, 1997, 1996 ; Astolfi et al., 1997 ; Astolfi et Peterfalvi, 1997 ; Martinand, 1983, 1986, 1989, 1995). La différence est que dans une telle didactique, les situations-problèmes sont construites par l'enseignant plutôt qu'apportées par le flux des situations " naturelles " de travail.

De l'herméneutique à la didactique des sciences, la démarche clinique est en quête de références théoriques, sans doute parce qu'elle a été d'abord et reste, dans une large mesure, une pratique de formation des médecins et des psychologues cliniciens. L'intérêt des philosophes et des historiens pour la clinique (Foucault), celui des psychanalystes (Cifali, 1991, 1994, 1996 ; Imbert, 1992, 2000), l'évolution des facultés de médecine vers l'apprentissage par problèmes, l'émergence d'une didactique professionnelle (Pastré, 1999, 2000), les travaux sur les compétences, le développement du socio-constructivisme et la didactiques des sciences permettent peu à peu de mettre des mots sur des processus de formation théorique jusqu'alors faiblement formalisés.

Tous les travaux montrent qu'il n'y a aucune solution de continuité entre la mobilisation de savoirs acquis et la construction de savoirs nouveaux. Tout bonnement parce que la plupart des situations complexes ne peuvent être comprises et maîtrisées avec l'aide des seuls savoirs acquis. La clinique favorise une alliance entre un savoir qui préexiste à la confrontation à un cas concret et un autre savoir qui naît de cette confrontation.

Dans l'apprentissage par problèmes ou le travail par situations-problèmes, le problème est conçu et amené par le formateur pour confronter l'apprenant à des obstacles définis et l'obliger à construire les savoirs permettant de le surmonter. Peut-on piloter l'apprentissage clinique lorsque la situation est une " vraie " situation professionnelle, qui n'a pas été imaginée et calibrée pour produire des apprentissages choisis d'avance ? Et lorsqu'on se trouve dans des lieux de stage et de travail qui exigent une action adéquate et n'autorisent pas l'arrêt sur image et l'analyse sans contraintes ?

La tension entre réussir et comprendre peut empêcher les apprentissages, mais la confrontation à la complexité en vraie grandeur peut en déclencher d'autres. L'un des défis d'une didactique professionnelle est donc d'articuler divers rapports à l'action et divers moments où alternent la mobilisation des acquis, leur dépassement et leur intégration (Perrenoud, 1999 b).

D'un point de vue curriculaire, cela pose un problème épineux : quelle est la part de savoirs théoriques à acquérir hors du contexte d'action, en amont ? celle des savoirs à acquérir à la faveur d'une démarche clinique, dans l'action ou ses environs immédiats ? celle, enfin, des savoirs à acquérir à distance de l'action, dans d'autres temps et d'autres lieux, mais sur la base d'observations, de manques et de besoins qui ont surgi sur le terrain ?

La médecine avait une réponse traditionnelle à cette question : plusieurs années de propédeutique sans aucune clinique puis plusieurs années de clinique avec au mieux des colloques et quelques apports théoriques structurés. L'approche par problèmes bouleverse ce schéma. En sciences sociales et humaines, y a-t-il l'ombre d'un consensus sur cette question, pourtant cruciale ?

Nul ne découvrira la pensée de Piaget, Bruner, Vygotski, Bourdieu et quelques autres au détour d'un stage ou d'un séminaire d'analyse de pratiques. À l'inverse, est-il pertinent de couvrir très largement les fondements par des enseignements classiques avant d'être confronté aux premières situations éducatives complexes ?

La question se complique en raison d'une autre incertitude : sur quels objets de savoirs et selon quels découpages faut-il organiser la formation des futurs enseignants en sciences humaines et sociales ?

 


L'organisation des savoirs issus de la recherche

Dans les formations universitaires qui ne prétendent pas préparer à une profession, l'ordre et le découpage des savoirs sont dictés par la tradition, la cohérence des contenus et un souci de progression dans la complexité des savoirs. On ne se préoccupe guère de la mobilisation de ces savoirs hors de l'enceinte académique, puisqu'aucune référence n'est faite à une pratique sociale identifiée.

On ne saurait raisonner de la même façon sur la formation initiale des enseignants. D'abord parce qu'elle ne dépasse pas en général le deuxième cycle universitaire, lorsqu'on ne la limite pas au premier cycle ou à un cursus équivalent dans une haute école. Le nombre d'années et d'heures disponibles pour assurer la formation proprement professionnelle des enseignants varie fortement selon les pays et les systèmes éducatifs. Mais, si la réponse diffère selon les ressources et contraintes, la question peut être posée à tous : la façon d'organiser et d'enseigner les savoirs issus des sciences humaines et sociales favorise-t-elle leur mobilisation en situation de travail ? Est-elle délibérément optimisée dans cette perspective ?

Il faut interroger les contenus de la formation sous l'angle du mode et du degré de préparation à la mobilisation des connaissances acquises. À contenus globalement égaux, le mode de structuration du curriculum fait à mon avis une différence.

Toute formation en sciences sociales et humaines, comme le pluriel l'indique, conjugue plusieurs sciences. Comment coexistent-elles, voire coopèrent-elles dans le curriculum de formation des enseignants ? Ce sera l'objet d'un premier débat.

Une seconde question portera sur la nature et la place des savoirs procéduraux.

 

Objets complexes,
approches pluridisciplinaires et mobilisation

Dans une perspective systémique, les situations éducatives relèvent presque toutes de plusieurs sciences sociales et humaines : psychanalyse, psychologie cognitive, psychologie sociale, sociologie, anthropologie, auxquelles on peut ajouter l'économie, l'histoire, la démographie ou la politologie si l'on s'intéresse au contexte sociétal du système éducatif.

Confronté à de telles situations, un enseignant doit donc, s'il veut utiliser les sciences humaines et sociales, les articuler pour rendre les situations intelligibles et construire des stratégies tenant compte de leurs multiples dimensions.

Si la formation initiale est organisée comme une juxtaposition des diverses sciences humaines et sociales, chacune veillant jalousement à son autonomie, leur mise en relation repose entièrement sur l'étudiant stagiaire, puis sur le praticien. Cela ne la rend que plus difficile. Si bien que nombre d'étudiants finissent par chausser uniquement les lunettes de la discipline qui les séduit le plus ou leur semble la plus pertinente : didactique, psychanalyse, sociologie ou psychologie sociale… Autant de regards nécessaires mais partiels.

Si, au contraire, la formation initiale est organisée autour d'objets complexes, comme le rapport au savoir, qu'on ne peut théoriser sans articuler plusieurs sciences sociales et humaines, on peut espérer faciliter leur mobilisation conjointe, l'étudiant étant déjà familiarisé avec des champs théoriques et des problématiques pluri-, voir interdisciplinaires.

Comment découper de tels champs ? Les didactiques des disciplines offrent l'exemple le plus connu de carrefour où se rencontrent, au moins potentiellement plusieurs sciences humaines et sociales. Pour saisir les contours, la genèse, l'évolution et la spécificité d'une discipline scolaire, il faut en effet recourir à l'histoire, à la sociologie du curriculum, à la psychologie sociale des interactions didactiques, à la psychologie de l'apprentissage, aux regards psychanalytiques et anthropologiques sur le rapport au savoir et les pratiques de référence, enfin à la discipline d'enseignement elle-même, mathématique, géographie ou éducation physique.

Ce " programme fort " est loin d'être partout réalisé, pour plusieurs raisons :

En dépit de ces limites, dans les pays francophones, la formation des enseignants tend à offrir une didactique spécialisée pour chaque discipline d'enseignement scolaire. Ce sont autant de lieux d'intégration potentielle des sciences sociales et humaines.

La situation est plus confuse pour les autres apports des sciences humaines et sociales. En France, par exemple, on regroupe sous l'étiquette vague de " formation générale et commune " tout ce qui n'appartient pas aux disciplines à enseigner ou à leurs didactiques respectives. Cette formation recouvre une faible fraction du curriculum - environ 10 % - et un faible éventail de regards : philosophie et psychologie se taillent la part du lion, les sciences sociales sont faiblement implantées ou carrément absentes.

Dans diverses universités, on nomme " didactique générale " ou " pédagogie générale " ce qui ne relève d'aucune discipline, sans toujours faire explicitement référence à diverses sciences sociales et humaines et en différenciant faiblement les objets de savoir. D'autres cursus encore distinguent quelques domaines auxquels on reconnaît une certaine autonomie, par exemple : évaluation, technologie éducative, relation pédagogique.

À Genève, le cursus de formation des enseignants primaire ouverts en 1996 (Perrenoud, 1996 b) définit, outre les technologies éducatives, sept approches transversales :

Chacune de ces approches se centre sur un " objet " complexe, que l'on retrouve dans toutes les disciplines d'enseignement - comme l'évaluation - ou qui n'appartient à aucune, comme la gestion de classe.

Le plan de formation accorde une importance égale à ces sept approches transversales et aux approches didactiques. Les étudiants sont appelés à se familiariser successivement ou parallèlement avec ces approches. Toutes recourent, certes dans des proportions inégales, aux diverses sociales et humaines.

Si bien que la formation professionnelle, étalée sur trois ans de second cycle (après un premier cycle de base d'un an), s'organise autour d'une petite vingtaine de thématiques didactiques, transversales ou technologiques, qui sont toutes des points de rencontre des sciences sociales et humaines.

Comme chacune de ces thématiques articule apports théoriques, travail sur le terrain et analyse de pratiques ou de situations complexes, on peut espérer que toutes développent des synergies entre plusieurs sciences et plusieurs postures par rapport à l'action.

Alors que les approches didactiques sont balisées par le découpage des programmes scolaires en disciplines instituées, les approches transversales ne peuvent s'accrocher à des délimitations d'objets produites aussi massivement par le système éducatif lui-même. Elles sont donc construites par les enseignants-chercheurs et les autres formateurs, aucun découpage ne s'imposant comme le seul possible ou pertinent.

Il n'apparaît pas nécessaire de dresser une liste standard d'approches transversales qu'on s'attendrait à retrouver dans toute formation à l'enseignement. Rien n'empêche chaque université d'inventer des thématiques transversales dont la taille et le principe de découpage correspondent à la configuration locale des sciences de l'éducation. Dans la perspective adoptée ici - faciliter la mobilisation des acquis théoriques - l'important est plutôt que chaque thématique convoque effectivement plusieurs sciences humaines et sociales pour rendre intelligible et maîtrisable son objet. On peut espérer que, de la sorte, chaque thématique prépare les étudiants à la mobilisation conjointe de savoirs appartenant à des sciences différentes, toutes nécessaires pour penser les situations et les stratégies professionnelles.

 

Des savoirs déclaratifs aux savoirs procéduraux

Dans un cursus universitaire orienté vers la recherche, la théorie se présente comme un ensemble de savoirs déclaratifs. Seule l'activité de recherche fait l'objet de savoirs procéduraux plus ou moins prescriptifs, dont les méthodes de recueil et de traitement de données sont l'exemple le plus évident.

Dans une formation professionnelle, la pratique de référence n'est pas la recherche. Faut-il y préparer en dispensant des savoirs procéduraux propres à un métier, ici l'enseignement ? On s'avance là sur un terrain doublement miné, puisqu'il faut refuser à la fois l'héritage prescriptif des Écoles normales et l'illusion scientiste ou technicienne.

Former des enseignants selon une logique de " normalisation " des pratiques autorisait à enseigner et exiger la maîtrise et le respect de méthodes et de techniques précises, jugées orthodoxes. On ne saurait concevoir de la sorte la formation de praticiens réflexifs, appelés à construire leurs pratiques comme des réponses stratégiques à des problèmes, dans le respect des savoirs établis, mais non d'une doxa.

En même temps, nul ne peut défendre aujourd'hui l'idée qu'on pourrait déduire de la théorie une pratique infaillible. Les savoirs procéduraux qui ne seraient que la conséquence logique de savoirs déclaratifs ne sont pas légion dans les métiers de l'humain, alors que la plupart des lois établies par les sciences naturelles fondent déductivement des procédés assez sûrs.

Cela ne signifie pas qu'on ne puisse fonder aucune procédure sur des savoirs théoriques. Mais la fondation est partielle, approximative, discutable et provisoire. La théorie peut assez souvent aider à identifier " les choses à ne pas faire ", par exemple enseigner des notions dont la compréhension exige un niveau de développement opératoire que la plupart des élèves n'ont pas atteint. De là à dire exactement comment bien faire, il y a un " saut logique " qui relève du pari, ou au moins d'une forme d'extrapolation à partir des connaissances acquises.

Il n'est nullement absurde de prendre un tel risque, en tentant d'évaluer au plus juste les bénéfices et les éventuels effets pervers. Le bénéfice est à la fois affectif et cognitif. Les étudiants qui se destinent à l'enseignement éprouveraient une terrible angoisse si leur formation professionnelle ne leur proposait aucun savoir procédural, sous prétexte que nul ne peut être " scientifiquement garanti ". Cette peur précipiterait les novices vers les savoirs procéduraux issus de la tradition, de la culture professionnelle ou des affirmations de " gourous " s'embarrassant de moins de précautions. La PNL, la gestion mentale, l'analyse transactionnelle et d'autres " méthodes " livrées " clés en main " combleraient un vide et rassureraient ceux qui se sentent démunis. Par ailleurs, ce vide accroîtrait encore l'influence des manuels et de leurs auteurs et éditeurs sur les pratiques pédagogiques…

On rejoint le problème central de la mobilisation des sciences sociales et humaines dans l'exercice du métier d'enseignant. Mettre en forme procédurale les savoirs théoriques, en allant au-delà de ce qui est démontrable, en visant le cohérent et le plausible, est une façon de préparer et d'accompagner l'inévitable transposition pragmatique des savoirs déclaratifs, de ne pas " abandonner le terrain au terrain ".

Si les institutions de formation des enseignants s'avancent dans la voie de la " traduction " de savoirs théoriques en savoirs procéduraux compatibles avec l'état des savoirs, elles permettent aux futurs enseignants de ne pas avoir à faire ce travail dans la solitude de leur première classe. Elles accroissent donc sa faisabilité et la probabilité que les sciences sociales et humaines deviennent des ressources pour l'action éducative. De la sorte, elles ne laissent pas le champ libre aux recettes détachées de toute théorie qui forment le fond commun de la " base de connaissances " des enseignants, par exemple " Il faut instaurer une discipline de fer en début d'année scolaire " ou " On ne peut rien pour les élèves qui n'ont pas envie d'apprendre ".

Des effets pervers sont cependant probables : une fois qu'ils se sont emparés de procédures, les praticiens pressés ou paresseux ne s'appliquent guère à les actualiser ou à retrouver leurs racines théoriques. Du coup, ce qui dérivait approximativement d'un état donné des savoirs peut, au fil des années, devenir un dogme dont l'origine se perd et qui peut entrer en contradiction avec des savoirs plus récents. Une procédure ne meurt que si elle atteint les limites de sa " validité écologique ", ce qui ne l'empêche pas de faire des dégâts.

Ici encore, les didactiques des disciplines sont plus avancées, pour plusieurs raisons :

Pour les approches transversales, le bilan est plus contrasté :

Il n'y a aucune raison d'uniformiser l'effort de " traduction " des divers savoirs théoriques en savoirs procéduraux. Certaines thématiques se prêtent mieux que d'autres à l'énoncé de procédures, voire de prescriptions fermes, D'autres renvoient plutôt à des processus qui ne sont pas entièrement sous la maîtrise de l'enseignant, et relèvent de stratégies plus dépendantes de la finesse de l'analyse que du recours à des méthodes préétablies.

Par ailleurs, dans chaque domaine, on observe une grande diversité dans la sensibilité idéologique et épistémologique des formateurs d'enseignants. Les uns ne jurent que par des méthodes aussi codifiées que possible, d'autres les vomissent et dénoncent tout ce qui pourrait s'apparenter à une recette. Entre obsession utilitaire et dandysme, mille figures du formateur et de la formation professionnelle se côtoient.

Faut-il vivre durablement avec cet individualisme, né de la diversité des trajectoires, des rapports au savoir, à la norme, à l'action ? On pourrait souhaiter qu'émergent progressivement des " politiques de formation " plus concertées, des stratégies collectivement négociées puis assumées, entre le " tout théorique " et le " tout procédural ".

Mais le vrai problème, me semble-t-il, n'est pas de marier habilement des savoirs théoriques issus de la recherche et des recettes venues du fond des âges ou empruntées à la culture professionnelle ou aux mouvements pédagogiques. Le vrai défi est de " traduire " les savoirs théoriques en procédures ou au moins de resserrer l'éventail des procédures défendables.


Pour conclure

Cet article se fonde peut-être sur un pessimisme excessif quant à la mobilisation des sciences sociales et humaines dans les pratiques pédagogiques, même dans les pays où les sciences de l'éducation ont une large part dans le curriculum de formation initiale et dans les formations continues.

Nous ne disposons pas à ce jour d'une réponse empirique précise sur ce point. Certes, l'analyse de la base de connaissances des enseignants se prête à une relecture en termes de liaison aux sciences humaines et sociales. Le travail est difficile, car lorsque des savoirs experts appartenant à la culture professionnelle sont en accord avec les acquis de la recherche, ce peut être pour deux raisons :

Dans une culture baignée par la vulgate psychanalytique et la sociologie médiatique, il devient difficile de penser le réel en restant tout à fait en dehors de leur influence. Par ailleurs, tout praticien efficace est à son niveau un sociologue, un psychologue et un didacticien acceptable, car il y va de sa survie. Il ne suffirait donc pas mettre le contenu de la base de connaissances des enseignants en regard des acquis des sciences humaines. Sauf à penser que seul compte que l'on sait, que la façon dont on l'a appris et dont on peut le justifier n'importe pas. J'avancerai au contraire l'idée que, même si leur contenu est analogue,.le rapport aux savoirs diffère selon qu'ils sont ouvertement issus de la recherche ou qu'ils se présentent comme des savoirs de sens commun,

De plus, inventorier les savoirs disponibles est une chose, identifier leur degré et leur mode de mobilisation dans l'action en est une autre. On peut faire l'hypothèse qu'une culture universitaire en sciences humaines et sociales permet de faire état des diverses théories dans une conversation. Cela n'est pas négligeable, si la conversation est professionnelle, par exemple dans le cadre d'une équipe pédagogique ou du dialogue avec des collègues, des parents, des cadres scolaires, un conseiller pédagogique ou des spécialistes.

Il reste que les savoirs mobilisés le sont en partie dans la solitude de la classe, l'urgence de l'action quotidienne, le for intérieur de l'enseignant. On peut faire l'hypothèse que la part des sciences sociales et humaines mobilisées dans ce contexte d'action est moindre que celle qui nourrit le discours à distance de l'action.

Je me garderai donc de conclure : le chantier est à peine ouvert. Il reste à mon sens à articuler l'approche nord-américaine centrée sur les bases de connaissances des enseignants avec les approches plus cliniques du travail et des processus de mobilisation des savoirs en situation.

Ce n'est en revanche pas trop s'avancer que d'inviter les enseignants-chercheurs en sciences de l'éducation, en particulier s'ils forment des professionnels, à construire plus explicitement des stratégies de transposition didactique des résultats de la recherche aussi bien que des dispositifs et des curricula favorisant la transposition pragmatique, dans l'action, des savoirs issus des sciences humaines et sociales.

 


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