Les discours

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Discours du président du Conseil de l'Université Roger Mayou >>>

Discours du Conseiller d'Etat en charge du DIP Charles Beer >>>

"Rapport circonstancié sur l'attribution d'un doctorat honoris causa à Madame Françoise Tulkens"
Par Robert Roth, doyen de la Faculté de droit >>>

"Laudatio pour le prof. Maurice Levy-Leboyer"
Par Pierre Allan, doyen de la Faculté des SES >>>

Discours prononcé par Gabrielle Rivier, étudiante de la Faculté de théologie >>>

Allocution de M. Roger Mayou, président du Conseil de l’Université

Mesdames, Messieurs,

A la question de savoir sil était difficile de présider les Etats-Unis pendant une guerre mondiale, Woodrow Wilson a répondu : « Non, j’avais été président d’Université, j’avais tout vu ». Impossible, en cette journée de traditionnelle célébration de notre Alma Mater, de ne pas évoquer l’actualité des affaires qui nous secouent, leur traitement et, surtout, les suites à leur donner.

Les affaires tout d’abord. Les auteurs avérés de malversations doivent être sanctionnés avec une sévérité dont l’exemplarité doit être proportionnelle à celle que l’on est en droit d’attendre des formateurs qu’ils sont. La sanction, outre sa valeur intrinsèque, doit permettre d’éviter les amalgames. L’immense majorité des collaboratrices et des collaborateurs, tous corps confondus, travaille non seulement avec le sérieux et le talent qui permettent le rayonnement de l’Université de Genève mais encore honnêtement. Il convient de les défendre face à un climat général de suspicion qui porte atteinte à l’image de toute l’institution. Ce climat détestable est particulièrement dommageable aux étudiantes et aux étudiants dont le droit le plus élémentaire est de pouvoir travailler et, prochainement, de passer des examens dans la sérénité nécessaire à cette période déterminante d’une vie.

 Le traitement des affaires. En confiant à M. Thierry Béguin la mission d’aller au fond des choses, le Conseil d’Etat a pris la mesure sage qui nous permettra de rebondir et d’avancer. La crise actuelle – dont je mesure toute la gravité — sera un véritable désastre uniquement si elle ne débouche pas sur l’établissement de structures nouvelles et, surtout, sur leur activation.

Le Conseil de l’Université, quant à lui, n’a pas attendu les récentes turbulences pour s’engager. Il participe depuis plus de six mois à la réflexion sur une autonomie accrue qui, outre qu’elle s’imposera à nous par une loi fédérale, augmentera de facto la responsabilisation de tous.

Pour l’avenir, je lance un appel au monde universitaire, au monde politique et à la société civile : il est temps d’agir ensemble. Ma stupéfaction devant le nombre de propositions émanant de personnes en situation de les mettre en pratique a fait place à la certitude que tant de bonne volonté n’avait qu’une seule motivation : le bien de l’institution et je m’en réjouis. La reconstruction aura besoin de tous les acteurs capables de dépasser les intérêts personnels, corporatistes et partisans pour penser l’efficience de l’institution dans sa globalité.

Soyons audacieux ! Soyons courageux ! Evitons la cosmétique ! Sachons transformer cette crise en chance d’un renouveau complet !

L’Université doit être gérée selon des méthodes de management moderne. Une direction forte composée d’une équipe soudée et complémentaire ayant toujours en tête l’intérêt commun à long terme, autrement dit, une vision stratégique. Cette équipe doit travailler avec des relais dans les facultés, dans un esprit de concertation et d’information : toutes les compétences sont utiles mais personne ne possède toutes les compétences. Enfin, elle doit être responsable de ses décisions et de leurs applications devant un organe indépendant de l’institution elle-même qui lui, doit rendre des comptes à l’Etat sur la base d'un texte contracturel.

Ces principes de base, pour élémentaires qu’ils paraissent, n’en sont pas moins autant d’objectifs à atteindre puisque nous en sommes encore éloignés. Ils permettront de définir les structures les plus adaptées à une organisation que ne paralysent pas des rapports de force stériles. La capacité d’action d’une direction ne se décrète pas, elle s’organise.

Une matrice de responsabilités précise et simple sera gage d’efficacité et de transparence. Elle permettra aux indispensables procédures de contrôle d’être rigoureuses et d’éviter les écueils de l’angélisme et de la stigmatisation.

 Soyons conscients qu’un danger nous guette : le propre d’une université réside davantage dans la réflexion que dans l’action. Pourtant, comme l’a dit Freud : "On a beau rêver de boissons : quand on a réellement soif, il faut se réveiller pour boire". Et j’ose ajouter : préparons la boisson sinon elle risque d’être amère. Agissons ! Le Conseil de l’Université, seul organe de l’institution dans lequel la société civile est représentée, est prêt à assumer son rôle de force de proposition mais aussi, j’en prends l’engagement devant vous, à veiller à ce que les actes suivent les paroles.

 Et rappelons-nous que la finalité d’une meilleure efficience est bien de consacrer de manière optimale les ressources humaines et financières aux activités de base de l’Université : l’enseignement et la recherche. Cette exigence s’impose à nous par l’obligation impérieuse d’utiliser avec rigueur l’argent public et par notre devoir de participer à l’effort commun en ces temps difficiles.

 L’agacement de l’opinion publique à notre égard est à la mesure de ce qu’elle attend d’une institution censée être exemplaire, à la pointe du savoir, productrice de sens et de valeurs. Nous devons d’autant plus l’entendre que nous avons la faculté d’y répondre.

Mesdames, Messieurs,
 La crise de notre institution ne saurait nous faire oublier que le monde est en crise, que l’inacceptable se produit encore, toujours et partout. Un seul chiffre : depuis le début de mon intervention, plus de 500 personnes sont mortes de faim, dont une centaine d’enfants.

Cela rend les égarements de certains d’autant plus vils mais je sais aussi que cela stimule l’immense majorité des membres de la communauté universitaire dans leur volonté de contribuer à la construction d’un monde meilleur, d’un monde plus juste : tous les enseignements y participent, chacun à sa manière.

Par conséquent, je ne doute pas de la volonté générale de s’améliorer. Il en va de la préservation et du développement de notre excellence académique.

Je vous remercie de votre attention.

Roger Mayou