Formulations nouvelles de la structure des « groupements » et des conservations. Psychologie expĂ©rimentale et comparĂ©e : hommage Ă Paul Fraisse (1977) a đ
Pour dĂ©crire les premiĂšres structures opĂ©ratoires construites par lâenfant (classifications, sĂ©riations, etc.), nous avons utilisĂ© sous le nom de « groupements » un modĂšle qui nâa guĂšre plu aux logiciens et mathĂ©maticiens Ă cause de ses limitations forcĂ©es (compositions de proche en proche, classes disjointes, etc.), dâoĂč son « inĂ©lĂ©gance ». Notre excuse Ă©tait cependant que, si infantile que soit son utilisation entre 7 et 11 ans (donc avant la construction des treillis complets ou « ensembles des parties »), le « groupement » constitue nĂ©anmoins la structure qui, de LinnĂ© Ă nos jours, a suffi Ă toutes les classifications zoologiques et botaniques, qui, elles aussi, ne sont que des semi-rĂ©seaux.
Or ces derniers temps, deux logiciens mathĂ©maticiens se sont intĂ©ressĂ©s au problĂšme et sont parvenus Ă donner au « groupement » une forme respectable. Lâun, H. Wermus (1971), en a fourni une axiomatisation complĂšte, au moyen de quatre axiomes trĂšs simples : 1) lâasymĂ©trie du prĂ©dicat binaire reliant y Ă Â x en tant que « successeur immĂ©diat » ; 2) lâunicitĂ© de ce successeur ; 3) la « jonction contiguë » engendrant le successeur immĂ©diat z de deux Ă©lĂ©ments contigus x et y ; 4) lâexistence et lâunicitĂ© de la « soustraction » (dichotomique) dâun Ă©lĂ©ment de son successeur.
Lâautre mathĂ©maticien, E. Wittmann, se fondant sur lâaxiomatique de Wermus, en a tirĂ© la dĂ©monstration que le « groupement » constitue une « catĂ©gorie » spĂ©ciale, au sens de son maĂźtre, McLane (lâinventeur avec Eilenberg des « catĂ©gories »), qui a approuvĂ© son essai. Il est inutile de rĂ©sumer ici cet exposĂ© technique, mais comme une « catĂ©gorie » est un systĂšme de « morphismes » (correspondances conservant la structure), il peut ĂȘtre intĂ©ressant pour le psychologue de dĂ©gager certains de ces morphismes pour montrer que le groupement nâest pas seulement un systĂšme dâopĂ©rations (donc de transformations) mais quâil prĂ©sente aussi un ensemble de correspondances (donc de comparaisons).
I. Les classificationsđ
Elles comportent dâabord un systĂšme dâ« applications » surjectives et injectives. Rappelons que lâapplication dâun ensemble de dĂ©part E sur un ensemble dâarrivĂ©e Eâ doit ĂȘtre exhaustive Ă gauche (« tous » les x de E) et univoque Ă droite (sur les x de Eâ). Il y a surjection si chaque Ă©lĂ©ment de Eâ reçoit « au moins 1 x » de E, et injection si les x de Eâ ne reçoivent quâ« au plus 1 x » de E, donc 1 ou 0. Il y a enfin bijection (isomorphisme) si chaque x de E correspond Ă un seul x de Eâ et rĂ©ciproquement. Cela dit, soit, en une classification quelconque, une classe B1 formĂ©e de sous-classes A1, A2, etc., et un certain nombre dâindividus x Ă classer possĂ©dant tous le caractĂšre b1 propre Ă B1 mais en outre les caractĂšres diffĂ©rentiels a1, a2, etc., propres aux A1, A2, etc. : il y a alors surjection de ces individus dans les classes A. De mĂȘme, celles-ci sont surjectĂ©es en B1 (mais non pas en B2, B3, etc., qui avec B1 sont surjectĂ©es en C1, etc.). Quant Ă lâinclusion A1 â B1, elle est une injection des individus possĂ©dant les caractĂšres a1 b1 dans lâensemble des termes de B1 de caractĂšres b1, ne retrouvant alors que ceux qui possĂšdent en outre les caractĂšres a1 sans correspondance avec les autres B1 : il sâagit donc des mĂȘmes individus a1 b1, mais dâune part en tant que formant la classe A1 et dâautre part en tant quâappartenant aussi Ă B1. Mais cette application injective est importante parce que sa rĂ©ciproque (« sous-jection » des B1 en A1 en tant que les B1 ne correspondent pas tous aux A1, et qui nâest donc plus une application) est nĂ©cessaire Ă la quantification de lâinclusion (|B1| > |A1| si A1 â B1). On sait, en effet, que pour une collection B de 10 fleurs dont 6 marguerites = A et 4 autres fleurs Aâ, les jeunes sujets comprennent bien que tous les A sont des B aussi bien que tous les Aâ ; mais, quand on leur demande sâil y a là « plus de fleurs B ou plus de marguerites A ? » ils rĂ©pondent « plus de A » en ne comparant alors les A quâaux autres fleurs Aâ, comme si, une fois les A dissociĂ©s en pensĂ©e de B, il y avait isomorphisme entre les B et les Aâ : en termes de correspondance, on voit ainsi que ce qui fait problĂšme est la rĂ©ciproque de lâinjection, que nous appelons « sous-jection » en tant que correspondance incomplĂšte (non-application).
Mais si ces diverses correspondances surjectives et injectives sont cotransformationnelles en tant que liĂ©es aux opĂ©rations de rĂ©unions et dâemboĂźtements, il reste quâelles sont dĂ©terminĂ©es par un contenu qualitatif extra-logique, dâoĂč lâobligation de fait (distincte de la nĂ©cessitĂ© normative) de procĂ©der par enchaĂźnements contigus : la rĂ©union de deux sortes quelconques dâindividus comme des vers de terre et des Ă©lĂ©phants ne donne lieu quâĂ des correspondances si gĂ©nĂ©rales que la classe en rĂ©sultant demeure ouverte Ă un nombre considĂ©rable dâautres termes et nâest donc pas « naturelle », tandis que la rĂ©union des Ă©lĂ©phants et des hippopotames donnera lieu Ă davantage de correspondances en comprĂ©hension et Ă une classe plus restreinte et donc naturelle. En outre, ces correspondances cotransformationnelles peuvent ĂȘtre subsĂ©quentes par rapport aux transformations (rĂ©unions dâabord) ou antĂ©cĂ©dentes, les rĂ©unions ne se constituant que sur la base de ressemblances Ă©tablies initialement, ce qui est gĂ©nĂ©ralement le cas.
Cependant, en une classification systĂ©matique en forme dâarbre plus ou moins touffu, si deux rameaux quelconques Ă©loignĂ©s lâun de lâautre ne donnent pas lieu Ă eux deux Ă la construction dâune classe Ă©lĂ©mentaire et ne se correspondent donc pas en ce sens, il y a par contre bijection prĂ©cise entre deux secteurs de la classification : quâil sâagisse de lombrics ou dâĂ©lĂ©phants, une « espĂšce » (classe de type 1) est incluse en un « genre » (type 2), celui-ci en une « famille » (type 3) faisant partie dâun « ordre » (type 4) inclus en une « classe » 1 (type 5) elle-mĂȘme situĂ©e en un « embranchement » (type 6). Il est donc clair quâen faisant abstraction du contenu, les formes en jeu dans le groupement sont reliĂ©es par des morphismes bien dĂ©finis, dont la reconnaissance est ici facilitĂ©e par le fait que les diffĂ©rents « types » de classes ont reçu des noms spĂ©ciaux. Mais, mĂȘme en lâabsence de ces dĂ©nominations, il est toujours possible (et dĂšs la psychogenĂšse) de faire correspondre une classification Ă une autre en respectant la hiĂ©rarchie des types.
Mais il y a plus. La classification zoologique ne porte que sur les classes, sans nomenclature spĂ©ciale quant aux relations. Mais on pourrait nommer et dĂ©finir les relations distinctes unissant ces classes : on comparerait par exemple Ă des « frĂšres » les taxons A (espĂšces) rĂ©unis en un mĂȘme genre B comparables Ă leur « pĂšre », tandis que le « frĂšre Bâ du pĂšre B » serait assimilable Ă un « oncle » et ses « fils » leurs « cousins », etc. Il est alors clair que de telles relations, quoique non dĂ©nommĂ©es, sont isomorphes Ă celles dâun arbre gĂ©nĂ©alogique familial (dont on Ă©liminerait les alliances par simplification) et donnent lieu Ă des combinaisons inĂ©puisables pour n gĂ©nĂ©rations et des cousinages au ne degrĂ©, avec composition des surjections, injections et bijections conforme Ă ce qui a Ă©tĂ© vu plus haut, mais en sâen tenant aux pures formes. Nous avons Ă©tudiĂ© rĂ©cemment chez les enfants de 4-5 Ă 12-15 ans ces relations de famille, en utilisant comme matĂ©riel de petites poupĂ©es toutes semblables mais avec un ensemble de flĂšches distinctes pour concrĂ©tiser les diverses sortes de correspondances. Or, si les sujets de 7-10 ans en restent Ă des relations limitĂ©es, on obtient dĂšs 11-12 ans des compositions remarquables mĂȘme sans avoir besoin dâune figuration en arbre.
II. Les vicariancesđ
Si B = A1 + Aâ1, nous disons quâil y a vicariance si B est subdivisĂ© par ailleurs en B = A2 + Aâ2, oĂč A2 â Aâ1, et A1 â Aâ2 2. En ce cas, il y a : 1) surjection des Ă©lĂ©ments de B en A1 et Aâ1 ; 2) surjection analogue de B en A2 et Aâ2 ; 3) correspondance entre les deux surjections en ce triple sens quâil sâagit dâune mĂȘme opĂ©ration, que les deux rĂ©unions A1 + Aâ1 et A2 + Aâ2 sont Ă©gales Ă B, et que, dans les deux cas, on a B â A = Aâ, que A soit A1 ou A2 et que sa complĂ©mentaire sous B soit Aâ1 ou Aâ2 ; 4) il y a surtout injection de A2 en Aâ1 et de A1 en Aâ2 et ces deux injections se correspondent en tant que rĂ©ciproques ou symĂ©triques ; 5) enfin la vicariance A1 + Aâ1 en A2 + Aâ2 est inversible.
Il semble donc lĂ©gitime de parler ici de morphismes conservant la structure, dâautant plus que lâon peut continuer en B = A3 + Aâ3, etc., de façon quelconque (par transformations libres). Il en rĂ©sulte que la vicariance reprĂ©sente un automorphisme, ce qui est normal puisque le systĂšme des classifications constitue une catĂ©gorie si on y englobe la classification complĂšte en arbre (et non pas seulement une suite linĂ©aire dâemboĂźtements A + Aâ = B ; B + Bâ = C ; etc.), et que lâon sâen tienne aux formes indĂ©pendamment des contenus. Mais il convient de prĂ©ciser que cette catĂ©gorie ne comporte que des compositions entre morphismes de mĂȘmes rangs (malgrĂ© lâemboĂźtement des classes de « types » croissants), et non pas des morphismes de puissances supĂ©rieures. Pour ce qui est, en particulier, des vicariances de vicariances, il est clair quâelles conduisent Ă lâ« ensemble des parties » comme nous lâa montrĂ© une rĂ©cente recherche 3 : elles ne consistent pas simplement Ă gĂ©nĂ©raliser la forme A + Aâ en A2 + Aâ2, A3 + Aâ3, etc., mais Ă changer de forme en procĂ©dant par paires (A1 + A2) = (Aâ1 + Aâ2), etc.
III. Les sĂ©riationsđ
a) Ă chaque Ă©lĂ©ment, sauf au dernier, correspond un successeur « plus » grand, « plus » foncĂ©, « plus » Ă©loignĂ© en â, etc. b) Chacun correspond Ă un prĂ©dĂ©cesseur sauf le premier. c) à toute relation < correspond une relation >, par bijection et symĂ©trie. d) Le premier terme et tous ses successeurs = le dernier et tous ses prĂ©dĂ©cesseurs (cf. A1 + Aâ1 = A2 + Aâ2) par vicariance des termes due Ă la rĂ©ciprocitĂ© des < et des >. e) Pour chaque terme X ou Y on a S (successeurs), X + P (prĂ©dĂ©cesseurs), X = SY + PY = â (< ou >) = nombre dâĂ©lĂ©ments â 1. Autrement dit, pour X ou Y on a :
n(> X) + nâ (< X) = n (> Y) + nâ (< Y) = â des relations.
f) Un exemple de cette vicariance, facilitĂ© par le fait que les diverses relations < ou > portent des noms distincts, est celui de la sĂ©riation linĂ©aire des ascendances et descendances familiales directes : « A est le pĂšre de B, qui est le grand-pĂšre de D » = A est le grand-pĂšre de C, qui est le pĂšre de D = A est (dans les deux cas) lâarriĂšre-grand-pĂšre de D. En ce cas, lâinjection rĂ©ciproque de A > B en A > C et de C > D en E > D est de mĂȘme nature que celle de A1 en Aâ2 et de A2 en Aâ1 dans une vicariance de classes. Quant Ă la correspondance n(> X) + nâ(< X) = n(> Y) + nâ(< Y), câest celle quâutilise le sujet opĂ©ratoire lorsque pour construire la sĂ©rie il cherche lâun aprĂšs lâautre un Ă©lĂ©ment E qui soit Ă la fois le plus petit de tous ceux qui restent (donc E < S) et plus grand que ceux dĂ©jĂ posĂ©s (E > P), par une double surjection en E de ses successeurs (S > E) et de ses prĂ©dĂ©cesseurs (P < E), avec vicariance continuelle puisque E est chaque fois le nouvel Ă©lĂ©ment Ă trouver, et quâil partage donc chaque fois dâune autre façon le mĂȘme total de relations < et >.
Il semble donc clair que la sériation, comme les systÚmes de classes, constitue une catégorie avec automorphismes lors des vicariances et compositions sous forme de récursivité, transitivité et réciprocité qui caractérisent les relations sériées.
IV. Les conservationsđ
En un article rĂ©cent (Inhelder et al., 1975), nous avons proposĂ© une nouvelle interprĂ©tation des conservations, en admettant que les sujets y parviennent lorsque sont remplies les deux conditions suivantes : 1) quâun changement de forme dâun objet (ou collection) soit compris comme le rĂ©sultat de simples dĂ©placements des parties ; et 2) quâen tout dĂ©placement ce qui est ajoutĂ© au point dâarrivĂ©e soit enlevĂ© ou soustrait au point de dĂ©part (« commutabilité »). Il en rĂ©sulte ainsi que les instruments catĂ©goriels des conservations sont fondĂ©s sur la commutabilitĂ© et la vicariance, puisque la premiĂšre exprime lâidentitĂ© dâune partie en cas de dĂ©placement et la seconde lâinvariance du tout indĂ©pendamment des partitions : il sâagit donc, pour obtenir les morphismes, de combiner les partitions avec les dĂ©placements.
Appelons A une partie dĂ©placĂ©e lors dâun changement de forme de lâobjet B (ou dâune collection) et Aâ les parties demeurant immobiles. DĂ©signons par aA un A Ă son point de dĂ©part et par bA le mĂȘme A Ă lâarrivĂ©e. DĂ©signons par u une rĂ©union avec un certain voisinage entre un A et un Aâ et par w une rĂ©union avec un autre voisinage en un point diffĂ©rent de Aâ. On a alors :
(1) (aA1 uAâ1 = Aâ1 wbA1) â (aA2 uAâ2 = Aâ2 wbA2) â (aA3 uAâ3 = Aâ3 wbA3) â etc. = B
Lâobjet total B se conserve donc au travers de toutes ces Ă©galitĂ©s (= ou â) puisque les parties Aâ demeurent en place et que les parties A changent simplement de position. Mais, comme on le voit, il y a lĂ une combinaison de deux morphismes rĂ©sultant tous deux des acquisitions du niveau opĂ©ratoire des groupements (vers 7-8 ans) :
1) On a dâabord la correspondance entre les aA et les bA, en tant quâil sâagit des mĂȘmes morceaux simplement dĂ©placĂ©s et non pas dâun accroissement de quantitĂ© dĂ» Ă la nouvelle position, comme le croient les sujets prĂ©opĂ©ratoires oubliant quâune addition en bA suppose une soustraction en aA (ce morphisme dâidentitĂ© exprime donc la commutabilitĂ©).
2) Vient ensuite lâisomorphisme entre cette commutabilitĂ© aA1 = bA1 et celles que lâon retrouve lors de partitions diffĂ©rentes (entre A2 et Aâ2 ; A3 et Aâ3, etc.), autrement dit lorsquâon les compose avec des vicariances. Les surjections des A et Aâ en B propres Ă la vicariance sont ainsi gĂ©nĂ©ralisĂ©es de façon quelconque. Quant aux injections rĂ©ciproques des A1 dans les Aâ2 et des A2 dans les Aâ1, elles signifient simplement ici que, si une partie mobile A est rattachĂ©e aux immobiles Aâ, une partie de ces derniĂšres est Ă son tour dĂ©placĂ©e, ce qui va de soi sitĂŽt comprise la commutabilitĂ©. Cela est bien clair pour le sujet dĂšs 5-6 ans lorsque la technique consiste Ă dĂ©placer les A sans se borner Ă les pousser, mais en les enlevant sur un point pour les remettre en un autre. Par contre, lorsquâon nâeffectue aucune partition et que lâon change sans plus les formes par simples Ă©tirements, etc., la dĂ©couverte plus tardive de lâinvariance du tout, motivĂ©e par les mots « on nâa rien enlevĂ© ici ni ajouté », semble ne faire appel quâĂ la commutabilitĂ©. En effet, bien que les morceaux dĂ©placĂ©s ne soient pas dĂ©limitables, le sujet dĂ©couvre que (aA uAâ = Aâ wbA) par un morphisme de compensation : ce que lâobjet perd selon une dimension (diamĂštre), il le gagne selon lâautre (longueur). Mais, si un dĂ©placement avec commutabilitĂ© ne constitue pas encore un changement de partition et ne consiste quâen une nouvelle « rĂ©partition » (puisque les A et les Aâ restent inchangĂ©s), par contre lâĂ©quivalence des rĂ©sultats de plusieurs changements de rĂ©partitions (donc les â situĂ©s en dehors des parenthĂšses dans la formule utilisĂ©e) est bien une vicariance puisque les A et les Aâ se modifient (en A1 ; A2 ; A3 ; etc.) et quâon a A1 + Aâ1 = A2 + Aâ2 ; etc.
Ces diverses transformations devenant ainsi quelconques ou libres, on peut conclure que le systĂšme total symbolisĂ© plus haut comporte bien un automorphisme et constitue ainsi une catĂ©gorie, comme les groupements de classification ou de sĂ©riation, dont il reprĂ©sente dâailleurs un corrĂ©lat nĂ©cessaire (Ă la fois condition et consĂ©quence). Par contre, il ne sâagit encore que dâune catĂ©gorie de rang Ă©lĂ©mentaire faute de morphismes Ă la ne puissance. En effet, relier des changements de rĂ©partitions (commutabilitĂ©) par des vicariances exprimant lâĂ©quivalence de leurs rĂ©sultats, câest composer des morphismes de mĂȘme rang, portant sur des relations « entre » eux sans engendrer une nouvelle structure construite « sur » eux comme le serait « un ensemble de parties » par dĂ©termination de toutes les parties possibles ou un groupe de permutations portant sur toutes les substitutions possibles.
Mais le problĂšme est alors naturellement de savoir comment caractĂ©riser les morphismes de mĂȘme rang lorsquâil sâagit de formes diffĂ©rentes comme les commutabilitĂ©s et les vicariances. Dans le cas des opĂ©rations de groupement, la rĂ©ponse est quâelles portent sur des objets concrets et non pas sur des formes (bien quâelles aient elles-mĂȘmes leurs formes), tandis quâune combinatoire, etc., porte sur toutes les formes pouvant structurer un mĂȘme contenu. Mais alors se pose la question de la rĂ©cursivitĂ© propre Ă la formule prĂ©cĂ©dente, car il va de soi que, dans le continu, un morceau dĂ©placĂ© A1 ou A2, etc., change lui-mĂȘme de forme au cours du dĂ©placement, de telle sorte que ses sous-morceaux α1 ou α2, etc., donnent eux-mĂȘmes lieu, lors de leurs changements de position, Ă des commutabilitĂ©s et des vicariances que lâon peut Ă©crire pour A1, etc. :
(2) (aα1 uαâ1 = αâ1 wbα1) = (aα2 uαâ2 = αâ2 wbα2) = etc. = A1
Mais ce qui change ici entre (1) et (2) câest lâĂ©chelle des contenus (morceaux A, sous-morceaux α, sous-sous-morceaux, etc.) et non pas des formes : alors que pour n élĂ©ments Ă permuter, on a n sĂ©riations possibles, ni plus ni moins, on ne sait pas par contre combien dâĂ©quations (2) correspondent Ă lâĂ©quation (1) et celle-ci nâest donc pas une opĂ©ration sur des opĂ©rations mais simplement une opĂ©ration rĂ©pĂ©table Ă diverses Ă©chelles de contenus, de telle sorte que lâon pourrait faire lâĂ©conomie des A, donc de lâĂ©quation (1) en divisant dâemblĂ©e le tout B en morceaux dâĂ©chelle infĂ©rieure α (cf. lâĂ©quation 2).
En conclusion de ces quelques remarques prĂ©sentĂ©es en lâhonneur de notre cher ami P. Fraisse, on peut donc dire que les « groupements » et les conservations qui en rĂ©sultent ne consistent pas seulement en systĂšmes dâopĂ©rations (transformations), mais aussi de correspondances. Or si celles-ci prĂ©parent celles-lĂ (comparer avant de rĂ©unir, etc.), elles en rĂ©sultent ensuite par dĂ©ductions nĂ©cessaires, une fois que ces opĂ©rations sont coordonnĂ©es en structures Ă compositions bien rĂ©glĂ©es.
Bibliographieđ
Inhelder (B.), Blanchet (A.), Sinclair (A.), Piaget (J.). â Relation entre les conservations dâensembles dâĂ©lĂ©ments discrets et celles de quantitĂ©s continues, LâAnnĂ©e psychologique, 1975, 75, 23-60.
Wermus (H.). â Formalisation de quelques structures initiales de la psychogenĂšse, Archives de psychologie, 1971, 41, 271-288.