Preuves (1951–1970)Lire

Chaque fois qu’un homme ou une femme en vient à constater que sa vie personnelle n’a pas de sens, la liberté perd un de ses points d’appui, et la dictature s’avance aussitôt pour l’occuper.

Notice

La revue Preuves, que dirige le journaliste François Bondy, est inséparable du Congrès pour la liberté de la culture créé en 1950 afin de lutter contre les régimes totalitaires et les censures qu’ils imposent à la pensée et aux arts. Conformément au but du Congrès, la revue veut ainsi apporter « des preuves de l’oppression totalitaire, partout où elle agit au détriment de la culture ». Marquée par le contexte de guerre froide, Preuves est mue à ses débuts par la volonté de contrer la propagande stalinienne qui, depuis le Congrès de Wroclaw en 1948, mène des actions de séduction des intellectuels, artistes et scientifiques occidentaux. À côté de ce positionnement politique, la revue publie des études remarquables sur les arts et la littérature européenne et internationale, et grâce à de grandes signatures (Arthur Koestler, Raymond Aron, Hannah Arendt, Bertrand Russell, Ignazio Silone, Karl Jaspers, Czeslaw Milosz, Manès Sperber) s’impose comme la revue libérale de référence dans le paysage intellectuel français, en face des Temps modernes de Jean-Paul Sartre.

Présent dès la réunion fondatrice du Congrès pour la liberté de la culture à Berlin en juin 1950, Rougemont en devient le président du comité exécutif dès le mois de novembre, et le restera jusqu’en 1966. De la création de la revue en 1951 à 1970, il rédige plus d’une cinquantaine d’articles pour Preuves, dont de longs essais repris dans des ouvrages comme L’Aventure occidentale de l’homme ou Comme toi-même. De 1956 à 1960, il tient une chronique régulière, intitulée « Le point de vue de Ferney » (en référence à Ferney-Voltaire, près de Genève, où il s’installe après la guerre).

Bibliographie indicative

  • Nicolas Stenger, « The Difficult Emergence of an ‘Anti-Totalitarian’ Journal in Post-War France. Preuves and the Congress for Cultural Freedom », in Giles Scott-Smith and Charlotte Lerg (eds), Campaigning Culture and the Global Cold War. The Journals of the Congress for Cultural Freedom, London, Palgrave Macmillan, 2017, p. 91-106.
  • Pierre Grémion, « Preuves dans le Paris de guerre froide », Vingtième siècle. Revue d’histoire, Paris, n° 13, janvier-mars 1987, p. 63-81.
  • François Bondy, « Une revue française pas comme les autres », in Pierre Grémion (éd.), Preuves, une revue européenne à Paris, Paris, Julliard, 1989, p. 555-574.
  • François Bordes, « Preuves, revue marxienne ? », Cahiers du GRM, 17 décembre 2017.