Laurine

Née en 1949, Laurine est l’enfant d’une mère célibataire d’origine genevoise. Dès sa naissance, elle est placée à la pouponnière par sa mère : celle-ci, qui travaille dans l’hôtellerie, n’est pas en mesure de s’en occuper. Les services sociaux suivent la situation attentivement.

Une pouponnière genevoise, des années 1930 (image de gauche) aux années 1940, L’Écho Illustré (Source : Bibliothèque de Genève).

Les pouponnières ont été fondées au début du 20e siècle dans le but de recueillir des nourrissons dont les mères ne pouvaient pas s’occuper. La grande majorité de ces bébés sont des enfants issu·es de mères célibataires, en situation précaire. Obligées de travailler pour vivre, elles confient leur enfant à ces institutions qui leur assurent des soins continus jusqu’à l’âge d’environ deux ans. À partir des années 1920, ces pouponnières vont devenir des organes intermédiaires facilitant l’adoption : nombre de couples sans enfant s’adressent à ces établissements qui organisent le contact entre une mère désireuse de faire adopter son enfant et un couple en recherche d’enfant. Les enfants dit·es illégitimes représentent la grande majorité des enfants adoptables en Suisse jusqu’aux années 1970.

La mère de Laurine est décrite par les services sociaux comme peu maternelle mais travailleuse. Elle règle elle-même les frais de pension de sa fille.

L’image de la femme et de la mère idéale dans les publicités de l’époque, L’Écho Illustré, 1954 (Source : Bibliothèque de Genève).
 

Loin des images idéales, les joies de la maternité et de la famille ne sont pas forcément l’horizon de tous et toutes. C’est tout particulièrement le cas des enfants placé·es en pouponnières. Dès les années 1950, ces établissements n’ont d’ailleurs plus la cote. On les soupçonne de créer chez le nourrisson des troubles du comportement, du fait de la carence de relations affectives avec la mère.

Comme le prévoit le code civil pour toute naissance d’enfant dit·e illégitime, le Tuteur général est chargé de rechercher le père de Laurine afin d’obtenir la reconnaissance de l’enfant et d’obtenir sa participation aux frais d’éducation. C’est chose faite en 1950, date à laquelle Laurine est reconnue par son père… sauf que celui-ci ne contribue pas pour autant à son entretien. Comme il habite à l’étranger et qu’il n’existe aucun accord international en la matière, la justice ne peut pas le poursuivre pour le contraindre à payer.

En 1957, Laurine a 8 ans, et est placée dans un foyer d’enfants à Genève, le Home des Délices, où elle restera deux ans. Elle n’a encore jamais vécu chez sa mère qui, entre-temps, s’est mariée.

Scène de vie quotidienne dans un foyer de placement genevois, article paru dans l’Illustré, 1959 (Source : Bibliothèque de Genève).

Durant les années 1950, nombre de foyers tentent de développer une approche plus adaptée aux besoins affectifs des enfants placé·es. On réduit la taille des établissements, on crée des unités de prise en charge de plus petite taille, et parfois même on autorise la mixité, ce qui permet de placer ensemble des enfants d’une même fratrie. Des éducateurs et éducatrices diplômé·es sont engagé·es en plus grand nombre, et sont formé·es aux nouvelles connaissances que les sciences (médecine, psychologiques) développent autour du traitement des enfants placé·es, et de la prévention des carences affectives.

Scène de vie quotidienne dans un foyer de placement genevois, article paru dans l’Illustré, 1959 (Source : Bibliothèque de Genève).

Durant les années 1950, nombre de foyers tentent de développer une approche plus adaptée aux besoins affectifs des enfants placé·es. On réduit la taille des établissements, on crée des unités de prise en charge de plus petite taille, et parfois même on autorise la mixité, ce qui permet de placer ensemble des enfants d’une même fratrie. Des éducateurs et éducatrices diplômé·es sont engagé·es en plus grand nombre, et sont formé·es aux nouvelles connaissances que les sciences (médecine, psychologiques) développent autour du traitement des enfants placé·es, et de la prévention des carences affectives.

Laurine est âgée de 10 ans lorsque son beau-père demande qu’elle vienne habiter avec eux, au motif que ses frais de placement sont trop élevés. Un an plus tard, une voisine fait un signalement à la police : elle accuse le beau-père de s’adonner à la boisson et d’avoir abusé sexuellement de la petite fille. Laurine confirme les faits, mais le beau-père les conteste. Il n’est pas poursuivi, faute de preuves. La mère ne croit pas Laurine et demande aux autorités tutélaires que la garde de sa fille lui soit retirée.

Agressée (© Élisabeth Voyame)

Une parole annihilée (© Élisabeth Voyame)

Une parole annihilée (© Élisabeth Voyame)

Avant de prendre sa décision, la Chambre des tutelles sollicite une expertise du Service médico-pédagogique. L’enfant est aux prises avec des difficultés scolaires et serait voleuse. L’expertise conclut :

 « Il s’agit d’une enfant caractérielle ne présentant aucun retard intellectuel […]. Cet examen n’a mis en évidence aucun trouble. Ceux signalés par la maîtresse sont peut-être pour l’enfant une manière d’attirer l’attention. De toute façon, ses conditions de vie n’ont pas permis à la fillette de développer des relations affectives normales avec son entourage, particulièrement avec sa mère ».

Écouter la citation

Diagnostics (© Élisabeth Voyame)

La Chambre des tutelles retire la garde de Laurine à sa mère. Le Tuteur général est nommé gardien de Laurine et la place dans une famille d’accueil fribourgeoise.

Dessin et lettre de Laurine, 12 ans, à sa tutrice du Service duTuteur général peu après son placement au Home des Délices (Source : Archives d’État de Genève).

En 1961

Laurine est violée par le fils de la famille d’accueil dans laquelle elle est placée, âgé de 22 ans. Elle a alors 12 ans. Le Tuteur général considère qu’il ne s’agit « que » d’une simple relation sexuelle et n’estime pas nécessaire de poursuivre le jeune homme. D’autant plus que selon lui c’est Laurine qui aurait provoqué la situation. Son placement en institution lui apparaît dès lors comme la seule solution adaptée :

« Il n’était en effet plus possible de la laisser dans un cadre plus libre et la fillette elle-même se rendait compte qu’elle n’était pas capable de résister à ses impulsions ».

Rapport du Tuteur général à la Chambre des tutelles (Source : Archives d’État de Genève).

Laurine est alors placée au Home Chez Nous, une institution vaudoise, pendant un an. 

Le viol (© Élisabeth Voyame)

Le Home Chez Nous à la fin des années 1930, extrait d’un article paru dans l’Illustré (Source : Bibliothèque de Genève).

L’établissement du Home chez Nous a été fondé en 1922, et a été pionnier dans la mise en place d’une pédagogie nouvelle, centrée sur l’enfant, ses besoins, son individualité. Célébrée comme un parfait contrepoint aux grands orphelinats qui éteignent la personnalité de l’enfant sous une discipline arbitraire et déshumanisante, l’institution s’est transformée au fil des années pour se spécialiser dans l’accueil des enfants en difficulté.

En 1962

Laurine a 13 ans. Elle est renvoyée du Home Chez Nous au motif qu’elle est trop âgée pour cette institution mixte et qu’elle provoque les garçons.

L’avenir tout tracé des petites filles, article paru dans l’Écho Illustré, sur le salon des arts ménagers, 1954 (Source : Bibliothèque de Genève).

L’avenir tout tracé des petites filles, article paru dans l’Écho Illustré, sur le salon des arts ménagers, 1954 (Source : Bibliothèque de Genève).

Le diagnostic posé sur Laurine, décrite comme caractérielle, incite le Tuteur général à la placer à La Pommière, une institution genevoise gérée par l’initiative privée et destinée aux jeunes filles dites difficiles. En mars 1964, le séjour de Laurine à la Pommière ne débute pas sous les meilleurs auspices. Ses diagnostics lui collent à la peau : les observations la concernant, de la part de l’équipe éducative qui connaît pourtant son parcours et les difficultés de sa situation familiale, reflètent peu d’empathie à son égard.

Résumé des observations hebdomadaires de La Pommière concernant Laurine (Source : Archives d’État de Genève).

Le fait que Laurine ait subi une diversité de placements, sans avoir jamais connu un contexte familial normal, ne semble pas avoir affecté les jugements portés sur elle. Quant aux violences dont elle a été victime, elles s’inscrivent comme un facteur aggravant dans son parcours puisque sa sexualité est désormais estimée déviante. Autant de critères justifiant son placement dans l’institution. Mais quel traitement, quel soutien sera mis en place pour lui permettre de faire face à ses difficultés ?

Laurine a un peu plus de 14 ans. Elle fugue à plusieurs reprises de La Pommière et y commet de petits vols (des peluches, de la nourriture). Ces faits suscitent une intervention de la Chambre pénale de l’enfance, tribunal des mineur·es genevois, lequel ordonne un nouveau placement, cette fois hors de Genève, dans l’institut Bon Pasteur de Villars-les-Joncs (FR). Elle en est renvoyée trois mois plus tard : non seulement elle a fugué plusieurs fois, mais on la soupçonne de s’être prostituée. Le Tuteur général, qui a toujours la garde de l’adolescente, ne trouve aucune place en institution pour elle : il est vrai que les foyers de placement pour ce genre de cas restent rares, même hors du canton, et sont de ce fait chroniquement surchargés.

Recensement des placements de jeunes filles dites caractérielles et psychopathes au Service du Tuteur général, 1963 (Source : Archives d’État de Genève).

Outre La Pommière, trois autres foyers sont destinés à la clientèle des jeunes filles dont le caractère est estimé difficile, et que les autorités hésitent à placer en compagnie d’autres mineures, pour éviter de perturber le développement de celles-ci. Force est alors de recourir à des placements spécialisés à l’extérieur du canton, souvent en lien avec l’origine des jeunes filles. Ce rapatriement au canton d’origine permet de s’appuyer sur les fonds de l’assistance locale pour régler les frais de placement. Mais pour ces jeunes filles transplantées dans un canton qu’elles ne connaissent pas, de surcroît dans des institutions regroupant des personnes cumulant les difficultés, quel peut être l’impact de ces déracinements ?

Appuyé par la Chambre pénale, le Tuteur général sollicite l’internement de Laurine à la clinique psychiatrique de Bel-Air. Elle a tout juste 15 ans. C’est la seule alternative qui semble pensable aux autorités tutélaires et pénales pour une jeune fille qui apparaît comme rétive à toute prise en charge éducative et dont le dossier est émaillé de diagnostics tous plus sombres les uns que les autres.

Toujours plus de diagnostics (© Élisabeth Voyame)

Clinique psychiatrique de Bel-Air, 1961 (Source : Bibliothèque de Genève).

Anciennement asile d’aliéné·es, Bel-Air est la clinique psychiatrique cantonale de Genève. L’institution a été pensée pour recevoir des adultes, mais elle accueille également des enfants atteint·es de troubles développementaux et sensoriels graves (autisme, déficience intellectuelle sévère, psychotiques) dans un pavillon aménagé depuis 1943. Mais Laurine, vu son âge et son profil, n’y a pas séjourné.

Son internement à Bel-Air durera neuf mois, durant lesquels elle est examinée par un psychiatre qui sollicite à plusieurs reprises sa sortie : selon lui, l’intérêt de l’adolescente exige un placement plus adapté à sa situation :

« [Laurine] est saine d’esprit […], en pleine phase d’adolescence. Elle enfermée dans une chambre la plupart du temps ; aucune mesure pédagogique ou professionnelle ne lui est applicable dans le cadre de l’hôpital psychiatrique, et la prolongation de la situation actuelle lui est néfaste ».

Rapport du psychiatre de Bel-Air (Source : Archives d’État de Genève).

Laurine n’est pas la seule à subir les effets des difficultés de placement d’adolescentes. C’est encore un psychiatre de Bel-Air qui se plaint au Tuteur général qu’on utilise la clinique psychiatrique pour se décharger momentanément des mineur·es que personne d’autre ne veut accueillir, alors qu’aucun diagnostic ne l’exige et qu’aucune prise en charge médicale adaptée ne peut leur être proposée par l’établissement.

Lettre d’un psychiatre de Bel-Air au Tuteur général, 1964 (Source : Archives d’État de Genève).

Le psychiatre, qui dénonce les internements de mineur·es à Bel-Air, s’inscrit sans doute dans le tournant critique de l’enfermement et des institutions totalitaires qui frappe le secteur psychiatrique au cours des années 1960. Mais il révèle surtout qu’aux yeux d’un intervenant extérieur aux services de protection de l’enfance, on fait jouer à la psychiatrie un rôle inadapté à sa mission. Faute de trouver des placements pour des jeunes en difficulté, le placement en psychiatrie peut s’allonger tant qu’aucune autre solution ne se profile. Pour ces adolescent·es, ce sont de longs mois perdus, vides, sans aucune forme de prise en charge, d’éducation ni de formation.

Laurine témoigne de ses conditions de vie, dans ses lettres à sa tutrice :

« Je ne veux pas rester ici […], c’est pour me punir que vous m’avez mise ici. […]. Je ne peux m’évader car c’est fermé de partout […]. Venez me chercher […] autrement je fais tout pour me supprimer car j’en ai assez d’être enfermée dans ces boîtes […]. Et on dirait qu’on est dans une prison avec ses barreaux aux fenêtres et c’est fermé partout […]. Je vous dis franchement que j’aime mieux aller dans un pénitencier et supporter tant et tant ma peine et après que je sois libre, tandis qu’ici on sait votre arrivée mais on ne sait jamais notre départ !! ».

Écouter la citation

En 1965 et 1966, Laurine alterne deux placements dans des institutions fermées, à Bâle et à Fribourg, avec un second internement à Bel-Air, le tout ponctué de fugues. Elle a alors 17 ans. Les remarques des psychiatres ne varient pas, qui soulignent à nouveau à l’intention du Tuteur général :

« Les inconvénients d’une prolongation de séjour à Bel-Air. Une promiscuité inévitable avec des psychopathes adultes des deux sexes ne tarderait pas à porter ses fruits. L’absence de mesures éducatives (pour lesquelles nous ne sommes pas équipés) aggrave encore les effets d’un séjour en hôpital psychiatrique, séjour qu’aucune mesure médicale ne justifie ».

Courrier du psychiatre de Bel-Air au Tuteur général (Source : Archives d’État de Genève).

C’est d’ailleurs le psychiatre qui trouve finalement pour Laurine un placement dans une famille genevoise. Mais quelques mois plus tard, la mère de famille accuse l’adolescente d’être insolente et de faire des avances à son mari.  Laurine est donc encore une fois internée à Bel-Air, où elle restera 10 mois.

Septembre 1967

Laurine est à Bel-Air. Elle réitère ses fugues. Aucun établissement helvétique ne veut la prendre à charge. Mais elle a alors tout juste 18 ans, C’est l’âge minimal exigé par le Code pénal suisse pour qu’un établissement pénitentiaire puisse être prononcé pour un·e mineur·e. Le juge de la Chambre pénale de l’enfance ordonne son internement à la Colonie de Rolle, une prison vaudoise pour femmes.

La colonie pénitentiaire de Rolle, article paru dans L’Illustré, 1970 (Source : Bibliothèque de Genève).

Les autorités genevoises ne sont pas les seules aux prises avec de tels parcours de vie chaotiques. La presse des éducateurs et éducatrices fourmille d’expériences et de trajectoires similaires, et de constats désabusés sur l’inadaptation des formes existantes de prise en charge. Que faudrait-il faire pour les adolescentes difficiles ? Quelle réponse à leur mal-être ?

Un article d’Ensemble, revue romande des éducateurs et éducatrices, sur la question des « adolescentes difficiles », 1970
(Source: Infothèque de la Haute école de travail social de Genève).

Octobre 1968

Après 13 mois passés à la Colonie de Rolle, Laurine est encore une fois transférée à Bel-Air à la suite d’une tentative de suicide. En 1969, le suivi du Tuteur général et de la Chambre pénale de l’enfance s’interrompt en raison de la majorité de Laurine. Celle-ci est désormais placée sous la surveillance du Conseil de surveillance psychiatrique. Une expertise psychiatrique est prévue afin de déterminer si une mesure de tutelle adulte doit être prononcée. Le dossier de suivi du Tuteur général s’arrête à cette date. On perd la trace de Laurine…

Que nous révèle l’histoire de Laurine ?

Le parcours de Laurine révèle qu’en dépit des nouvelles connaissances accumulées depuis les années 1940 sur la problématique des carences affectives, le parcours d’un·e enfant placé·e est encore entravé par de nombreux obstacles. Notamment lorsque la mère et son entourage familial se désintéressent durablement de l’enfant, laissé·e sous la responsabilité de services tutélaires certes impliqués, mais par ailleurs surchargés de dossiers. Et tout devient encore plus complexe quand la question du genre vient s’imposer dans le dispositif de prise en charge, comme l’illustre le cas de Laurine.

Les abus qu’elle subit durant son enfance, couplés à ses difficultés, contribuent à la multiplication des diagnostics de déviance. Tout se passe comme si elle devait seule s’efforcer d’y mettre fin. Qu’en est-il de la responsabilité de son environnement familial ? Elle ne semble jamais prise en compte dans la façon dont elle est considérée.

La carence des institutions pour jeunes filles, notamment lorsque des troubles du comportement sont enregistrés, représente une difficulté supplémentaire. Faute d’alternatives, lorsque des institutions spécialisées ne peuvent ou ne veulent plus recevoir ces adolescentes à la dérive et que la famille n’offre aucun appui, le placement en psychiatrie ou en colonie pénitentiaire demeure seul envisageable, en tout cas envisagé.

Par ailleurs, les critères avancés pour justifier leur internement – fugues, rébellion, vie sexuelle active – sont interprétés comme autant de manifestations de troubles psychiques. Or, l’internement psychiatrique n’est nullement adapté à ces cas, qui n’y bénéficient d’aucune mesure pédagogique ou éducative et n’ont de fait pas d’accès à la scolarisation ou à la formation. Au grand dam des psychiatres, qui s’insurgent contre le rôle de voie de garage qui leur est ici dévolu.

Si la nécessité de former les jeunes placé·es pour leur donner une meilleure chance de réinsertion est fortement affirmée durant cette période, ils et elles demeurent malgré tout un public qui aura peu bénéficié de l’ouverture du champ des possibles, caractéristique de cette société dite des Trente glorieuses.  C’est particulièrement le cas pour les jeunes filles : les structures éducatives adaptées sont souvent encore réservées aux garçons. 

Les carences affectives de Laurine, placée dès sa petite enfance, sont bel et bien observées et diagnostiquées par les différent·es professionnel·les sollicité·es sur son cas. Mais l’effet sur la succession de ses prises en charge reste limité. Au contraire, ses réactions, notamment sa recherche de contacts et de liens affectifs, sont considérées comme symptômes de déviance car lues à travers une grille qui continue à stigmatiser toute forme de sexualité, notamment chez des filles de son âge.

Les multiples mesures d’enfermement et de contraintes qui pèsent sur Laurine, au nom de sa protection, ne peuvent qu’influer sur ses conditions de vie et ses chances d’insertion à court comme à long terme. Sans formation, comment évitera-t-elle de tomber dans le circuit de l’assistance, une fois atteinte sa majorité, moment de rupture au-delà duquel sa prise en charge par les autorités tutélaires cesse brutalement ?