du léman à lyon - Gouvernance transfrontalière du Rhône

Bassin fluvial transfrontalier, le Rhône est utilisé tant pour la production énergétique que pour l’irrigation ou l’eau potable. De Genève à la Méditerranée, sa gestion opérationnelle dépend principalement de deux opérateurs hydroélectriques, suisse et français. Cependant, les rivalités pour l’usage de l’eau s’intensifient, en raison notamment des changements climatiques et de la libéralisation du marché de l’électricité. La structure de gestion existante est-elle capable de résister à de tels changements ? Le projet GOUVRHôNE a mené l’enquête et propose des pistes de réflexion aux acteurs du système de gouvernance suisses et français.

Le contexte

Les rivalités pour l’usage de l’eau s’intensifient

Le Rhône est un fleuve majeur à l’échelle européenne. Ses eaux s’écoulent des Alpes suisses à la Méditerranée desservant sur son passage un nombre important d’usagers de l’eau. Le fleuve connaît ainsi des problématiques fortement différentes à travers les formes successives que celui-ci prend, du torrent de montagne à l’irrigation des plaines camarguaises.
Si les usages du Rhône sont nombreux (on peut notamment citer l’irrigation, la production hydroélectrique, l’alimentation en eau potable, le refroidissement des centrales nucléaires ou la navigation), le nombre d'acteurs intervenant pour sa gestion opérationnelle est particulièrement restreint. Ainsi, de Genève au delta du Rhône, ce sont principalement deux opérateurs qui sont responsables de la gestion du fleuve. Du côté suisse, les Services Industriels de Genève (SIG) gèrent les débits du fleuve en fonction de la régulation du niveau du lac Léman et des besoins de leur production hydroélectrique. Côté français, la Compagnie Nationale du Rhône (CNR) a été chargée du contrat de concession de l’ensemble du fleuve. Ses missions sont de trois ordres : navigation, irrigation et production d’hydroélectricité.
Jusqu’à présent, ce bassin versant transfrontalier faisait l’objet de collaborations internationales dépendant essentiellement des acteurs privés. Toutefois, depuis quelques années, les problèmes de coordination tendent à évoluer, nécessitant l’intervention de nouveaux acteurs et l’instauration de nouvelles collaborations quant aux usages du fleuve.
Ainsi, la structure de gouvernance du Rhône fait face à l’intensification des rivalités pour l’usage de la ressource en eau. Plusieurs raisons peuvent étayer ce constat. Tout d’abord (1), la forte croissance des sources d’énergie renouvelable ainsi que l’avènement de politiques énergétiques cherchant d’autres sources d’approvisionnement que le nucléaire ont passablement renforcé la pression sur le secteur hydroélectrique. Deuxièmement (2), dans un contexte de libéralisation du marché de l’électricité à l’échelle européenne et à l’approche du terme du contrat de concession sur le Rhône français, les opérateurs potentiels pour la gestion du Rhône tendent aujourd’hui à apparaître dans un marché internationalisé. Cette période de transition du point de vue du marché de l’électricité suscite des ajustements et l’émergence de négociations entre acteurs publics et / ou privés. Troisièmement (3), les rivalités d’usage du Rhône tendent à être renforcées en conséquence des changements climatiques et de leurs effets sur les débits du fleuve avec notamment des périodes de crues ou d’étiage sévère de plus en plus fréquentes.

La problématique

Un contexte climatique et économique en pleine évolution

Dès lors, on peut se demander si la structure actuelle de gouvernance du fleuve est capable de résister à de tels changements. Qu’adviendrait-il de la gestion du fleuve et de sa structure de gouvernance dans le cas d’un changement d’opérateur ? D’une modification du prix de l’énergie ? Ou d’un changement du régime hydrologique ?
Afin d’analyser les modalités actuelles de gestion du fleuve et de mieux comprendre les enjeux et leur évolution, le projet GOUVRHÔNE a débuté en mai 2012 pour une période de trois ans. Financé par l’Office Fédéral de l’Environnement, par l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée Corse, par la Direction Régional de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement Rhône Alpes en France, par les cantons de Genève et de Vaud ainsi que par les Services Industriels de Genève et Electricité de France, le projet vise différents objectifs.

La méthode de recherche

Confronter la structure existante aux enjeux de gouvernance

Il s’agit dans un premier temps d’analyser les différents dispositifs ainsi que la configuration d’acteurs à l’œuvre pour la gestion du fleuve. Ensuite, il s’agit de confronter la robustesse de cette structure aux principaux enjeux de gouvernance du Rhône pour, enfin, proposer des scénarios de gouvernance du fleuve à l’échelle transfrontalière. Cette partie consistera notamment dans la définition de différents scénarios climatiques permettant d’évaluer l’évolution du fleuve et de ses effets en termes de rivalités d’usage de la ressource.
Le projet de recherche porte sur le tronçon allant du lac Léman jusqu’à Lyon et se concentre sur cinq focales d’analyse en particulier : hydroélectricité et coordination amont-aval / gestion des extrêmes et coordination amont-aval / prélèvements de la ressource (irrigation, refroidissement des centrales nucléaires, alimentation en eau potable) / gestion sédimentaire du fleuve et renaturation / niveau du Lac Léman.

les recommandations

Plusieurs scénarios de gouvernance possibles

GOUVRHÔNE propose différents scénarios de gouvernance, pour une gestion durable et coordonnée à la fois des usages et des qualités écosystémiques du fleuve dans une perspective transfrontalière. Un premier modèle « intégré » consisterait à créer une institution suprême du bassin fluvial regroupant les états riverains, à l’instar de ce qui est pratiqué pour le Rhin, le Pô et le Danube. Le deuxième modèle « monofonctionnel » invite à une gouvernance en fonction d’un groupe d’acteurs, ou de tronçons géographiques, ou de secteurs d’activité. Un troisième modèle « polycentrique » propose plusieurs centres de décisions, indépendants mais coordonnés. La balle est désormais dans le camp des politiques !


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