2002

La science appelle les jeunes - Interview de Patrick Linder

Des gymnasiens squattent les laboratoires du CMU

Initier des gymnasiens aux joies de la recherche scientifique, leur faire découvrir ce monde singulier au travers d'expériences et de manipulations, telle est la vocation de la fondation La science appelle les jeunes. Cette dernière organise, chaque année et dans toute la Suisse, des stages scientifiques d'une semaine pour des élèves motivés. L'Université de Genève participe à cette opération depuis plus de six ans et accueille, du 15 au 19 avril, 18 jeunes dans les laboratoires de génétique moléculaire. Une expérience de familiarisation fructueuse à laquelle le professeur Patrick Linder - responsable de "La science appelle les jeunes" pour l'Université de Genève - a apporté de nouveaux développements en mettant sur pied un système de prêt de matériel scientifique aux classes du secondaire. Il a également créé un site internet proposant des expériences types ainsi que leur protocole de manipulation. Rencontre.


Né à Bâle, Patrick Linder a fait ses études de biochimie médicale dans la cité rhénane, puis son doctorat à l'Université de Genève. Suite à un séjour de trois ans en France pour un stage post-doctoral, il est retourné à l'Université de Bâle, avant de rejoindre le Département de biochimie médicale de l'Université de Genève en 1997. Au cours de ses sept ans passés à Bâle, Patrick Linder s'est engagé dans la communication à l'adresse des écoliers et des gymnasiens, en organisant notamment des ateliers pour les jeunes à l'Université de Bâle.

Qu'est-ce qui vous pousse à vous adresser aux adolescents?
Au départ, c'est une proposition qu'on m'a faite, lorsque je suis arrivé à l'Université de Genève en 97. Une personne membre de la fondation "La science appelle les jeunes" avait eu connaissance du travail que j'avais fait à Bâle et m'a contacté. Pour ce qui est de mes motivations, je pense qu'il est nécessaire d'avoir une discussion sur la science au sein de la société et l'école est un lieu idéal pour établir un contact avec le public au sens large. Comme scientifique, j'ai toujours ressenti le besoin de communiquer. On en a besoin. La votation sur le génie génétique de juin 1998 l'a clairement indiqué. Or les universités ont un rôle à jouer dans cet effort de communication, nous devons enseigner non seulement dans les auditoires mais aussi à l'extérieur.

Comment se passe les contacts avec les participants?
Personnellement, j'adore. C'est génial de voir l'enthousiasme que les expériences peuvent susciter. Ils veulent voir comment ça marche, on voit naître de véritables vocations… Après une semaine de travail et souvent de loisirs communs, les jeunes ont aussi l'impression d'avoir vécu une expérience humaine. Et tout à coup, quand tout le monde est parti, je me retrouve un peu seul.

Un livre ou un film qui vous a marqué dernièrement?
Hum… pas vraiment. En fait, je ne suis pas très cinéphile. J'aime lire, mais je n'ai pas beaucoup le temps en ce moment. Non, mon loisir c'est plutôt la musique.

Vous jouez d'un instrument?
Non… enfin oui, je joue du piccolo au carnaval de Bâle!

Quel moyen de transport utilisez-vous pour vous rendre à l'Université?
Je viens à pied. J'habite juste à côté. Ce qui fait dire à certain que je vis au travail. C'est vrai que c'est pratique, on peut rentrer à la maison, chercher un document, puis retourner au bureau. Du coup, les frontières s'estompent. De toutes manières, je crois qu'au bout d'un moment, on se retrouve naturellement enclin à travailler à la maison et à ne plus faire vraiment de distinction.

100% d'expériences pendant cinq jours

Recommandés par leurs professeurs et sélectionnés parmi plus de trente candidatures, 18 gymnasiens participent cette année au programme d'initiation à la science mis en place par la Fondation "La science appelle les jeunes". Les heureux élus arrivent le dimanche soir à l'auberge de jeunesse de Genève où ils sont logés, y compris les stagiaires résidants à Genève. Ils sont ensuite affiliés à un laboratoire de l'Université de Genève dont ils suivent les travaux de recherche durant la semaine. Un projet personnel s'intégrant au travail de l'équipe leur est également confié. Au terme de cette période passée à côtoyer les chercheurs et leur "quotidien scientifique", les collégiens font une présentation finale sous forme de posters et rendent par la suite un rapport d'une à deux pages résumant le projet réalisé au cours du séjour.

Encouragé par les bons résultats de ce programme en laboratoire, le professeur Patrick Linder a apporté de nouveaux développements à cette démarche d'initiation. En effet, depuis 1999, il a mis en place un système indépendant de prêt, permettant aux établissements scolaires, sur demande d'un enseignant, de disposer d'un matériel de laboratoire souvent trop onéreux pour eux. Parmi les objets en question, le prof. Linder prête un kit contenant des pipettes, des petits agitateurs, des tubes de culture et autres instruments de manipulation. Parallèlement à cette activité, le professeur a également créé un site internet, destiné aux maîtres de classe, qui propose des expériences types ainsi que leur protocole de manipulation. Une manière originale de faire connaître, au stade gymnasial déjà, l'univers de la recherche scientifique et les innombrables possibilités qu'elle peut offrir aux futurs étudiants.

100% d'expériences pendant cinq jours: quelques commentaires de gymnasiens

  • "Je ne trouve pas de mots assez fort pour exprimer la joie avec laquelle j'ai participé au quotidien des chercheurs/euses du laboratoire de M. Paccaud. L'expérience était super et j'ai été étonné de constater que je comprenais assez bien certaines manipulations, alors qu'elles sont au programme de l'Université." (Nils)
  • "Cette semaine de stage au CMU de Genève a été très enrichissante. Elle m'a permis de me faire des idées beaucoup plus concrètes sur le génie génétique, celles-ci étaient auparavant plutôt préconçues." (Danny)
  • "J'ai pu parler avec des chercheurs, travailler avec eux, enfin toucher au plus près le monde scientifique. La biologie était pour moi une grande curiosité, par ce stage, elle est devenue passionnante." (Lionel)
  • "Lors de cette semaine, j'ai rencontré d'autres étudiants de mon âge, qui venaient de toute la Suisse, ces rencontres et ce mélange culturel furent très enrichissants. De plus, l'auberge de jeunesse où nous nous trouvions était très bien tenue et bien située géographiquement." (Géraldine)
  • "J'ai remarqué que le génie génétique est une technique très utilisée par les chercheurs, au niveau des bactéries comme au niveau des cellules de mammifères. Les expériences se font principalement sur les souris et les mouches, donc des animaux d'élevage qui ne sont pas disséminé sur la terre. En général, les animaux ne sont pas directement touchés puisque seulement quelques cellules sont prélevées puis cultivées (ainsi l'animal peut être déjà mort). Donc je pense qu'il serait dommage de faire des restrictions dans ce domaine, en tous les cas avec les cellules animales." (Céline)
  • "J'aime bien l'atmosphère qui règne entre les chercheurs qui s'aident mutuellement (pas de compétition)." (Vincent)
15 avril 2002
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