Campus n°86

A lire

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Le nouveau visage du risque

La notion de risque est devenue centrale dans la société d’aujourd’hui. Elle est progressivement passée d’une probabilité objective – capable d’être mesurée ou calculée afin d’en gérer les effets négatifs – à une situation sociale mettant en jeu des intérêts contradictoires et générant des mécanismes complexes de décision. De plus en plus fréquemment, le risque (social, sanitaire, politique, économique…) est en effet associé à l’incertitude qui ne peut pas faire l’objet de calculs de probabilité. C’est entre autres pourquoi les sciences humaines ont fait leur entrée depuis quelques années dans ce champ de recherche auparavant monopolisé par les sciences naturelles. L’ouvrage intitulé «Face au risque» recueille les réflexions sur ce thème d’une dizaine de chercheurs (politologues, sociologues, historiens, juriste, géographe et économiste). Il est rédigé sous la direction de trois scientifiques de l’Université de Genève (Claudine Burton-Jeangros, Christian Grosse et Valérie November). Parmi les sujets passionnants, celui de la responsabilité individuelle et collective qui se télescopent constamment. Les Etats développent des efforts de prise en charge collective (par rapport aux OGM, par exemple), tout en appelant à la responsabilité individuelle (face au sida). Alors même que les individus cherchent à asseoir leur autonomie face aux institutions, les situations de crise leur rappellent à quel point ils sont insérés dans des ensembles sociaux plus larges, porteurs de contraintes et d’obstacles. A.Vs

«Face au risque», sous la direction de Claudine Burton-Jeangros, Christian Grosse et Valérie November. Ed. Georg, 2007, 253 p.

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L’UE à l’heure de la démocratie directe

L’avenir de l’Union européenne passe-t-il par le référendum? A lire le récent ouvrage de Frédéric Esposito, chargé d’enseignement à l’Institut européen, on est tenté de répondre par l’affirmative. Selon lui, la crise de légitimité dont souffre l’UE depuis l’échec du projet de Constitution pourrait en effet être résolue par une plus grande participation des citoyens aux décisions politiques communautaires. L’initiative n’étant pas adaptée au mode de fonctionnement d’une Europe à 27 ni à la culture politique des Etats membres, c’est donc vers le référendum que Frédéric Esposito suggère de se tourner. Dès lors, deux options se présentent. La première consiste à instaurer une consultation populaire sur le projet de Constitution européenne. Permettant de renforcer le lien entre l’Union et ses citoyens tout en constituant un retour aux sources de la souveraineté, cette solution implique toutefois soit de renoncer à la règle de l’unanimité, soit d’accepter le principe d’une intégration différenciée. La seconde vise à mettre en place le référendum pour des votations portant sur des choix politiques cruciaux (élection du président de la Commission, par exemple). Cette façon de faire permettrait de familiariser les citoyens de l’Union à la démocratie directe tout en rapprochant des cultures politiques encore très différentes. VM

«Vers un nouveau pouvoir citoyen? Des référendums nationaux au référendum européen», par Frédéric Esposito, Publications de l’Institut européen de l’Université de Genève 2, Academia Bruylant, 370 p.

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Le libéralisme en panacée

Chômage, problèmes environnementaux, criminalité: pour Victoria Curzon Price, professeure au Département d’économie politique, notre monde est incontestablement en crise. Et de façon tout aussi certaine, il n’y a qu’une manière d’en sortir: la voie d’un libéralisme bien compris. L’économiste en appelle donc à un changement de cap radical. Destiné à nous protéger des violences propres à l’«état de nature», l’Etat providence s’est, selon elle, transformé en un «super prédateur» inefficace sur le plan économique, «profondément immoral» et fondamentalement liberticide. Concrètement, «toute réforme qui introduit un peu de concurrence dans les monopoles souvent protégés par l’Etat serait bénéfique.» Rien ne devrait en effet s’opposer à l’ordre marchand, source première du développement de l’humanité, seul moyen de créer de la valeur et seule alternative au vol et au pillage. Le système, une fois débarrassé de ses entraves étatiques, marcherait tout seul, poussé par une sorte d’évolution naturelle à se perfectionner sans cesse. Indispensables, les inégalités constitueraient dans ce modèle une incitation nécessaire au dépassement et une source de créativité bienvenue. Quant à l’éducation ou aux infrastructures de santé, la charge en reviendrait à la société civile. «En tout état de cause, explique la chercheuse, un tel système ne pourrait guère faire moins bien, et risque de faire bien mieux, que le système monopolistique et ankylosé de l’Etat.» VM

«Le Libéralisme, pourquoi ça marche?», par Victoria Curzon Price, Ed. Favre, 219 p.