Campus n°140

La dignité retrouvée

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Que faire des restes humains conservés dans les collections anthropologiques et les musées ? La restitution n’est pas toujours la meilleure solution, comme le montrent les récents cas de figure auxquels l’Université de Genève a été confrontée

Mardi 3 décembre 2019, vers midi : le cimetière de Saint-Georges est le théâtre d’une modeste mais curieuse cérémonie. Un petit comité, comprenant le recteur, le secrétaire général, un doyen et quelques professeures et professeurs de l’Université de Genève, se recueille dans le carré dit des inconnus autour d’un cercueil aux dimensions très réduites. Pas de larmes mais une ambiance empreinte de gravité.
Le recteur prononce un discours. Sur une plaque disposée à la tête du trou destiné à recevoir la dépouille, on peut lire :
« À la personne inconnue originaire d’Afrique australe, décédée sur le continent africain, probablement au XIXe siècle, et autrefois conservée à l’Université de Genève. » L’employé des pompes funèbres empoigne les cordes et la petite bière est portée en terre. Entre les quatre planches, c’est une tête sans corps qui intègre enfin sa dernière demeure, probablement près de 150 ans après avoir été tranchée.
De ce vestige humain, découvert dans les collections de l’Unité d’anthropologie (Faculté des sciences), on ignore presque tout. Hormis son origine africaine, l’identité de la victime, son ethnie, le lieu et la date de sa naissance et de sa décapitation sont tout aussi inconnus que les circonstances qui ont mené cette tête jusque dans les archives genevoises. Ce qui est sûr en revanche, c’est qu’elle a atterri dans les archives de l’UNIGE, vraisemblablement il y a un siècle, à une époque où l’éthique scientifique n’était pas celle d’aujourd’hui.
Les ennuis arrivant généralement en escadrille, il se trouve que ce reste humain n’est pas le seul à poser des problèmes du même ordre à l’alma mater. Après un examen minutieux des collections anthropologiques, l’Université de Genève a en effet découvert deux autres cas sensibles : un ensemble de sept squelettes pygmées dont les identités sont connues et dont les conditions d’exhumation ne permettent pas de garantir que le consentement du clan a été obtenu et un crâne de soldat chinois, tombé au combat en 1885. Chaque cas pose des questions éthiques sur son acquisition – légale ou non –, sur le respect de la dignité des personnes concernées et sur une éventuelle restitution à sa population d’origine, si tant est que l’on puisse l’identifier et la contacter.
« Les restes humains qui ont été soustraits à leur culture d’origine l’ont souvent été à une période où les personnes issues de ces cultures n’étaient au fond pas reconnues comme pleinement humaines par leur colonisateurs, précise Samia Hurst, professeure et directrice de l’Institut Éthique Histoire Humanités (Faculté de médecine). Dès lors que l’égale humanité de chacun est reconnue, les attitudes changent forcément. Aujourd’hui, il s’agit de reconnaître la valeur égale des morts issus de cultures différentes, comme on reconnaît la valeur égale de chacun parmi les vivants. »


Solutions honorables

L’Université de Genève a trouvé des solutions honorables pour la tête et les squelettes africains. La première a été enterrée et accompagnée d’une plaque commémorative (lire l’enquête ci-dessous). Les seconds sont devenus la propriété de l’Université de Lubumbashi en République démocratique du Congo, tout en restant conservés en prêt dans les réserves de l’Unité d’anthropologie (lire Les sept squelettes pygmées de l’Ituri). Quant à la boîte crânienne du soldat chinois, elle repose toujours à l’Université de Genève en attente d’une décision des autorités chinoises, approchées par le biais de l’Ambassade de la République populaire de Chine à Berne (lire encadré ci-dessous).
L’histoire rocambolesque de la découverte de la tête tranchée d’Afrique australe remonte au mois de mai 1995. C’est un jeune étudiant en archéologie préhistorique, Grégoire de Ceuninck, qui tombe dessus par hasard dans les réserves du Département (devenu depuis Unité) d’anthropologie (Faculté des sciences).
« Je faisais visiter à mon frère la collection de crânes du Département, se rappelle Grégoire de Ceuninck, aujourd’hui conservateur au Musée d’ethnographie de Genève (MEG). Juste à côté de pièces provenant de toutes les régions du globe et appartenant à la collection d’Eugène Pittard [anthropologue genevois (1867-1962), ancien directeur du Musée ethnographique de Genève, ndlr] se trouvaient quelques caisses non rangées, peut-être à usage didactique. Il s’en dégageait un relent de putréfaction. Intrigué, j’ai réussi à identifier la boîte en carton d’où provenait l’odeur. Je l’ai ouverte et j’en ai sorti une tête bien conservée par dessiccation. Elle ressemblait à la tête d’une momie. »
L’étudiant prend la relique entre ses mains et la pose sur une table pour l’observer. Les tissus sont secs, la chair est dure et la peau s’est tendue laissant entrevoir la denture. L’expression, selon les rares personnes qui l’ont dévisagée, est assez impressionnante. La décapitation a eu lieu au niveau des cervicales, il reste donc le début de la nuque. Sur l’avant du crâne, il demeure également des cheveux, noirs, crépus et fins. À cause de son mode de conservation et de son ancienneté, la tête est devenue très cassante.
« Il y avait une étiquette, précise Grégoire de Ceuninck. Il me semble que ce qui était écrit dessus – peut-être bien Kalahari mais je n’en suis pas sûr – m’a permis de l’identifier comme un Bochiman, du moins un homme originaire de l’Afrique australe. J’ai tout de suite suspecté qu’il s’agissait de la tête d’un condamné à mort, en tout cas d’un homme exécuté, qui s’est retrouvée d’une façon ou d’une autre dans la collection d’Eugène Pittard. »
La nouvelle se répand et, sur le moment, suscite quelques questions chez les responsables du Département d’anthropologie mais il n’en ressort aucune décision.

Une polémique d’experts

Un peu par hasard, à peine quelques mois plus tard, en novembre 1995, Éric Huysecom, alors jeune professeur de préhistoire, prend connaissance d’une polémique d’experts qui éclate sur un forum scientifique spécialisé dans les études africaines (https://networks.h-net.org/h-africa). La discussion a pour objet la présence au Musée d’histoire naturelle de Londres (Natural History Museum) d’une série de têtes prises au XIXe siècle sur des victimes appartenant à la culture khoïsane d’Afrique australe.
Le chercheur fait alors immédiatement le lien avec la tête détenue dans les archives du Département d’anthropologie. Guidé par Grégoire de Ceuninck, il constate à son tour la présence de la tête dans sa boîte en carton, encore accompagnée d’une étiquette en papier avec la mention de la provenance et d’une autre en aluminium fixée à l’oreille avec un numéro d’inventaire.
« Plusieurs institutions dans le monde, surtout au Royaume-Uni et en France, ont possédé et possèdent toujours dans leurs archives des vestiges humains datant de la colonisation, explique Éric Huysecom, aujourd’hui professeur à l’Unité d’anthropo­logie et directeur du Laboratoire archéologie et peuplement de l’Afrique. Ces reliques, d’origine africaine, aborigène ou encore maorie ont longtemps été considérées par les conservateurs comme des artefacts, c’est-à-dire comme des « objets » fabriqués et non comme des restes humains. Cependant, les peuples d’origine de ces vestiges, eux-mêmes soutenus par leur gouvernement, ont commencé à les réclamer avec de plus en plus d’insistance. Saartje Baartman, aussi connue comme la Vénus hottentote, dont le squelette était conservé jusqu’en 2002 au Musée de l’homme à Paris, est le cas le plus connu (lire ci-dessous). Bref, dans les années 1990, la polémique de la restitution des vestiges humains battait son plein et je pensais qu’il fallait profiter de ce mouvement pour résoudre le problème de cette tête tranchée trouvée à Genève. »
En présence d’Alain Gallay, directeur du Département d’anthropologie, Éric Huysecom engage alors une discussion très vive sur le sujet avec la personne chargée de la gestion des collections. Cette dernière, aujourd’hui décédée, oppose un refus catégorique à toute idée de restitution et considère le vestige humain comme la propriété inaliénable de l’Université.
Quelque temps après, cette même personne s’adresse au préparateur du Département d’anthropologie, Jacques Koerber, et lui demande de conditionner la tête dans une caisse hermétiquement clouée et de la remiser discrètement dans un dépôt du bâtiment de Science II. Oubliée, elle y restera cachée durant près de quinze ans.


Une étiquette perdue

Il faut en effet attendre février 2010 pour qu’Éric Huysecom et Alicia Sanchez-Mazas, professeure et directrice du Département d’anthropologie, se remettent en quête de la tête. Ils contactent Jacques Koerber, à la retraite depuis 2002, qui leur explique dans quel recoin est dissimulée la boîte contenant la relique. Les conditions de conservation dans la caisse hermétique ayant semble-t-il favorisé l’activité des bactéries, c’est une fois de plus grâce à l’odeur de putréfaction que les deux scientifiques la localisent. Ils sont toutefois consternés de constater que l’une des étiquettes d’accompagnement a disparu. Il ne reste que la plaquette d’aluminium comprenant un numéro de référence qui ne semble cependant se rapporter à aucun inventaire connu. Pour espérer connaître l’origine de la tête, il n’y a pas d’autre choix que de fouiller le dépôt à la recherche de l’étiquette en papier. En vain. Un travail d’inventaire complet de toutes les archives du Département d’anthropologie entrepris quelques années plus tard ne donnera, lui non plus, aucun résultat.
« Le problème, c’est qu’il est impossible de déterminer la provenance d’un individu en se basant sur son seul faciès, précise Alicia Sanchez-Mazas. Sa coiffure et son type physique évoquent une origine khoïsane. Mais, du point de vue scientifique, ces arguments sont insuffisants. Quant à une analyse ADN de la tête, elle n’apporterait aucune précision supplémentaire. Les populations locales ont en effet des profils génétiques très diversifiés. Il est donc impossible d’associer avec certitude un seul individu à tel ou tel groupe sur la seule base de son patrimoine génétique. »
Par ailleurs, la culture khoïsane est présente non seulement en Afrique du Sud mais aussi au Botswana, en Namibie, voire même en Angola. Le terme de khoïsan rassemble en réalité deux peuples distincts, les chasseurs-cueilleurs San (autrefois appelés Bochimans) et les pasteurs khoïkhoïs (Hottentots). Ils partagent certes des traits physiques et linguistiques qui les différencient de l’ethnie majoritaire de la région, les Bantous, mais ils ne doivent pas être confondus pour autant. Ce qui rend la quête de l’origine de la tête encore plus difficile.


Un traitement antibactérien

La relique est alors rapatriée au Département d’anthropologie. Averti par la direction du Département, le Rectorat prend le relais et crée la « Commission interne sur la détention et le devenir des restes humains du Département d’anthropologie de l’UNIGE » qui se réunit pour la première fois en octobre 2010. Cet organe prend alors la décision de photographier la tête et de la soumettre à un traitement en vue de stopper la progression bactérienne. À cette fin, la relique est confiée au Muséum d’histoire naturelle.
Après une nouvelle pause de près de quatre ans, la procédure reprend en septembre 2014 lorsque la tête est transférée dans les locaux du Département de médecine légale des Hôpitaux universitaires de Genève.
Éric Huysecom contacte alors des collègues sud-­africains afin de mettre sur pied une marche à suivre pour une éventuelle restitution. « Les réactions ont été très négatives, explique-t-il. Après avoir examiné les photos, et en particulier la partie de la nuque tranchée, les spécialistes se sont montrés formels : cette tête a été prélevée sur un corps fraîchement décédé et immédiatement placée dans des conditions de préservation. »
Concédant n’avoir jamais été confronté à un tel cas, le professeur Alan Morris, anthropologue à l’Université du Cap, estime ainsi que la décapitation s’est probablement déroulée dans un contexte « officiel » et contrôlé. À l’époque des faits, l’individu se trouvait peut-être dans une prison ou un hôpital. Il n’est pas exclu qu’il ait été victime d’un meurtre ou d’une exécution au cours de représailles militaires ou d’une guerre de conquête, pratiques courantes durant l’ère coloniale.
S’exprimant sur un plan plus juridique, l’archéologue sud-africaine Janette Deacon estime pour sa part que la tête ne remplit pas les critères nécessaires pour entrer dans la catégorie de « propriété d’État » (Heritage resource) mais dans celle de « propriété culturelle ». Dans ce cas de figure, il faudrait alors, dans l’hypothèse d’un rapatriement en Afrique du Sud, identifier un groupe d’intérêt qui reconnaisse le vestige humain comme appartenant à son ethnie et le réclame officiellement.
Les spécialistes sud-africains mettent toutefois en garde contre une telle démarche qui risquerait de susciter des réactions violentes dans les milieux nationalistes souvent prompts à exploiter ce genre d’événements. Et, de toute façon, personne ne sait à qui s’adresser, l’origine de la tête demeurant une énigme totale. En bref, la recommandation est claire : il vaut mieux pour tout le monde que ce cas soit réglé en Suisse et que l’on oublie toute idée de restitution.

Un enterrement en terre genevoise

Forte de ces nouveaux éléments, la commission de l’UNIGE se réunit une nouvelle fois en octobre 2015. Constatant qu’il est définitivement impossible de définir le pays d’origine et d’accueil pour une éventuelle restitution, elle se range à l’avis des experts africains. Renonçant à l’incinération, qui est un choix irréversible et pourrait être mal interprété, elle décide, à l’unanimité, qu’une inhumation « digne » en terre genevoise est la solution la plus souhaitable.
Au printemps 2016, Silke Grabherr, professeure à la Faculté de médecine et responsable du Département de médecine légale, suggère cependant d’effectuer une dernière série d’analyses avant cette échéance.
La tête est d’abord scannée de façon à obtenir une image très précise en trois dimensions de sa surface et de l’intérieur. Le cas échéant, ces données informatiques pourront servir à la production d’une réplique en silicone ou d’une représentation virtuelle et animée sur ordinateur.
Un échantillon est ensuite prélevé et envoyé à l’École polytechnique fédérale de Zurich pour une datation au carbone 14. Malheureusement, l’âge obtenu est imprécis à cause de la courbe de calibration qui est trop « large » pour la période en question. Il en ressort néanmoins que la personne a été tuée avec certitude entre 1666 et 1950. Plus précisément, la probabilité que le décès ait eu lieu entre 1725 et 1815 est de 54,4%. Les chances que la mort soit survenue avant 1877 grimpent même à 76%.
« Ces résultats nous permettent au moins d’écarter l’hypothèse d’une affaire criminelle récente, éventuellement liée au régime de l’Apartheid qui a sévi en Afrique du Sud à partir de la fin des années 1940, commente Éric Huysecom. Bien que l’on ne puisse pas totalement exclure une décapitation survenue entre 1916 et 1950 (probabilité de 19,5%), la datation obtenue est plutôt cohérente avec le scénario d’un acte commis lors de la période coloniale au XIXe siècle. »
L’examen anthropologique du crâne ne permet pas de définir de façon fiable le sexe de l’individu. Toutefois, la nature de la coiffure ne laisse que peu de doutes sur le genre masculin de la personne. L’analyse ADN, de son côté, ne donne rien de consistant. Trop de personnes ont touché et contaminé la tête au cours de son histoire récente, rendant impossible l’identification d’un profil génétique unique. Une étude plus approfondie est envisageable mais elle est abandonnée en raison de son caractère trop invasif.
L’autorisation d’inhumation est finalement délivrée le 7 octobre 2019 par le conseiller d’État genevois Mauro Poggia. Le 13 novembre 2019, le Rectorat prononce officiellement la sortie de la tête afin qu’elle puisse être extraite des collections anthropologiques de l’Université et enterrée.

 

Les Khoïsans : curiosité scientifique du XIXe siècle

140 - DO1.JPGDès le début de la colonisation de l’Afrique du Sud, les Khoïsans (une appellation qui rassemble deux groupes ethniques, les San et les Khoïkhoïs, aussi appelés Bochimans et Hottentots) ont été persécutés. « Au XVIIIe siècle, la violence exercée envers les Bochimans, généralement sous la forme d’expéditions punitives contre les voleurs de bétail, a créé une mentalité assimilant ce peuple à de la vermine devant être éradiquée », écrit Andrew Smith, professeur honoraire du Département d’archéologie de l’Université du Cap, dans un article paru en 2015 dans le volume 11 du Journal of African Archaeology Monograph Series.
À cette attitude s’ajoute la pratique de l’esclavage et des châtiments sévères (exécutions publiques, fouet, marquage au fer rouge…) infligés à la moindre infraction aux lois gouvernementales.
Le manque de considération envers les Khoïsans est alimenté par les théories racistes de l’époque plaçant l’Européen juste en dessous des anges et les Africains tout en bas, le plus près des singes. Le Darwinisme social – ou la survie du plus adapté, socialement parlant –, une théorie qui prend corps dans la seconde moitié du XIXe siècle, permet, quant à lui, de justifier l’oppression des peuples autochtones par la puissance coloniale.
Cependant, même s’ils sont dénigrés et pourchassés, les Bochimans deviennent une curiosité scientifique de plus en plus prisée. Les membres de ce peuple sont en effet considérés comme tellement différents de l’Occidental blanc que chaque musée en aimerait un « exemplaire naturalisé » dans ses collections. Se développe alors un trafic
de « trophées », en général des têtes récoltées par des officiers coloniaux et envoyées pour contenter des institutions européennes. Cette fièvre est entretenue par la croyance que
les Bochimans formeraient une « race en voie d’extinction ».
On prétend que certaines de ces têtes sont prélevées dans des hôpitaux du Cap sur des Khoïsans exhumés des cimetières et utilisés dans les facultés de médecine.
On en récupère aussi sur les Bochimans capturés lors d’expéditions punitives organisées après des vols de bétail ou des meurtres. Les coupables, en tout cas ceux jugés comme tels, sont alors tués et leurs têtes envoyées en Europe.
Il est possible que celle découverte dans les collections anthropologiques de l’Université de Genève provienne de l’une de ces filières. D’autres trophées similaires ont existé ou existent toujours dans des musées à Vienne, en Allemagne, à Oxford, à Cambridge, à Londres, à Édimbourg… La liste n’est pas exhaustive.

 

 

Le soldat chinois de Lang-Son

140 - DO1bis-2.JPGLa boîte crânienne d’un soldat chinois tombé au combat en mars 1885 est détenue à l’Unité d’anthropologie (Faculté des sciences) à la suite d’une donation, en 1951, par Henri Lagotala, alors chargé de cours à l’Université de Genève. Selon une inscription l’accompagnant, il s’agit du « crâne d’un jeune Chinois âgé de 25 ans, tué au combat de Lang-Son. Souvenir de l’expédition Lemaire-Sergent ».
La détention de ce crâne étant potentiellement contraire à son éthique, l’Université de Genève s’est rapprochée des autorités chinoises, par le biais de l’Ambassade de la République populaire de Chine à Berne. Sans indication contraire des autorités chinoises, ce vestige anthropologique reste pour l’heure conservé à l’Université de Genève qui est naturellement disposée à en étudier la possible restitution.
La campagne de Lang-Son oppose le Corps expéditionnaire du Tonkin à l’armée chinoise du Guangxi. Elle dure une dizaine de jours, du 3 au 13 février 1885, et s’achève par la conquête de la ville que les Français abandonneront toutefois quelques semaines plus tard, le 28 mars 1885, entraînant la chute du gouvernement de Jules Ferry, alors président du Conseil des ministres. Cet épisode s’inscrit dans le cadre plus large de la guerre franco-chinoise (septembre 1881-juin 1885) qui se soldera par la reconnaissance de facto du protectorat français sur le Tonkin.
Henri Lagotala, quant à lui, est né à Carouge et obtient un doctorat en sciences naturelles en 1920.
Il poursuit des études d’« anthro­pologie raciale » – selon la terminologie utilisée jusqu’au milieu du XXe siècle – auprès d’Eugène Pittard, ancien directeur du Musée d’ethnographie de Genève. Les recherches d’Henri Lagotala portent sur diverses populations de l’Asie mineure et de l’Europe orientale : Lazes, Kurdes et Arméniens. Ses centres d’intérêt se déplacent ensuite vers la géologie. En 1948, il est nommé professeur à la chaire de géographie physique et des gîtes métallifères de l’Université de Neuchâtel et chargé de cours pour enseigner la géologie du pétrole à l’Université de Genève en 1949.
Il meurt à Genève le 16 juillet 1954.