2019

La savante organisation des plumes des oiseaux

Des chercheurs de l’UNIGE et d’Édimbourg ont découvert comment des signaux génétiques et mécaniques se combinent pour permettre la formation d’un réseau organisé de plumes chez les oiseaux, leur permettant de voler.

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Image d’un embryon de poulet avec les placodes en formation. © Athanasia Tzika

 

Comment se forment les plumes et qu’est-ce qui détermine leur nombre et leur disposition? Jusqu’à présent, les moyens technologiques ne permettaient pas d’étudier la formation du plumage des volatiles. Aujourd’hui, des chercheurs de l’Université de Genève (UNIGE) et de l’Université d’Édimbourg (Ecosse) ont pu démontrer que la signalisation génétique entre les cellules et des processus mécaniques se combinent pour former dans la peau des volatiles une ligne de propagation, le long de laquelle les ébauches de plumes se développent. Il en résulte un réseau hexagonal très ordonné de plumes. Les chercheurs relèvent également que cette vague de développement n’existe pas chez d’autres oiseaux, tels les émeus et les autruches, ayant perdu leur capacité de voler. Des résultats à lire dans la revue PLOS Biology.

Les plumes sont une caractéristique propre aux oiseaux, héritées de leurs lointains ancêtres dinosaures. Elles sont disposées selon un motif hexagonal précis, mais on ignorait comment celui-ci se mettait en place. «La formation des plumes a été étudiée pendant plus de 50 ans comme un modèle pour comprendre comment des tissus simples interagissent pour produire des organes, explique Denis Headon, chercheur à l’Institut Roslin de l’Université d’Édimbourg et directeur de l’étude. Avec les nouvelles technologies, nous pouvons à présent observer le processus de développement des plumes, ce qui nous permet de mieux comprendre comment le corps embryonnaire de l’oiseau produit une anatomie complexe par le mouvement et la signalisation des cellules entre elles.»


Des vagues régulières de plumes

Grâce à des méthodes innovantes d’imagerie, les scientifiques ont analysé les premiers stades du développement des plumes chez diverses espèces d’oiseaux avant leur éclosion. Ils se sont d’abord focalisés sur des embryons de poules et de canards pour suivre des cellules individuelles pendant le processus de développement du plumage. «Nous avons observé que durant la formation de l’embryon de l’oiseau, les plumes se forment d’abord en ligne le long du milieu du dos, détaille Michel Milinkovitch, professeur au Département de génétique et évolution de la Faculté des sciences de l’UNIGE. Puis, des lignes de nouveaux bourgeons de plumes sont ajoutées séquentiellement suivant un motif hexagonal régulier, grâce au déplacement de la ligne dorsale sur les flancs.»

Deux voies de signalisation moléculaires sont responsables de cette disposition: le facteur de croissance des fibroblastes (FGF) et les protéines morphogénétiques osseuses (BMP). Une troisième voie de signalisation, nommée EDA, dirige le déplacement de l’onde de structuration des plumes.


Et l’autruche ?

Curieusement, les biologistes ont découvert que contrairement à ceux des canards et des poules, les embryons d’émeu et d’autruche ne présentent pas une onde mobile de développement des plumes. «Nous avons observé que l’absence de cette vague de développement génère une disposition désordonnée des plumes, s’étonne Athanasia Tzika, chercheuse au Département de génétique et évolution de la Faculté des sciences de l’UNIGE et co-auteur de la publication. Ceci est probablement dû à l’inexistence du vol chez ces espèces depuis des millions d’années, créant petit à petit l’absence d’une disposition hautement ordonnée des plumes.»


Un poulet au plumage allégé

«Une des raisons qui nous pousse à nous intéresser à la formation des plumes, c’est que la densité du plumage affecte la tolérance des oiseaux à la chaleur,» précise Michel Milinkovitch. En effet, la plupart des races commerciales de poulets ont trop de plumes pour supporter des températures très élevées, ce qui a un impact important pour l’élevage dans les pays à faibles revenus, dont beaucoup ont un climat tropical et une demande croissante de volaille. «Comprendre les signaux impliqués dans la formation des plumes permettra de développer des races plus résistantes à la chaleur, en adaptant la densité des plumes aux climats tropicaux chez les oiseaux d’élevage», conclut Denis Headon.

21 févr. 2019

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