2021

Sans leurs crampons, les cellules patinent

Des scientifiques de l’UNIGE ont identifié une nouvelle fonction pour une protéine qui, en permettant aux cellules de percevoir correctement leur environnement, facilite leur arrimage au bon endroit du corps.

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Sous l’action de la paxilline, une cellule forme des adhésions focales (en vert) pour se fixer à son environnement. © UNIGE

 

Chaque être humain est composé de milliards de cellules qui, pour assurer sa survie, doivent se coordonner et se fixer à l’emplacement adéquat pour accomplir leurs tâches. Des scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE), en collaboration avec l’Université de Tampere en Finlande, ont mis en évidence le rôle clé d’une protéine, la paxilline, qui permet aux cellules de percevoir leur environnement et de s’arrimer au bon endroit grâce à des sortes de «crampons» cellulaires. En effet, en l’absence de paxilline fonctionnelle, la cellule, incapable de se fixer, glisse sans réussir à se stabiliser. Ces résultats, à lire dans le journal Communications Biology, apportent un nouvel éclairage sur l’adhésion et la migration des cellules, des mécanismes essentiels au bon fonctionnement de nos organes, mais également impliqués dans le développement de tumeurs métastatiques.

Pour assurer notre survie, les cellules exercent chacune une fonction précise en coordination avec leurs voisines. Dans ce système dynamique, la migration des cellules et leur ancrage à l’emplacement adéquat sont essentiels. Mais comment parviennent-elles à se coordonner? Cette question donne encore et toujours du fil à retordre aux scientifiques, qui ont longtemps cru que les cellules communiquaient entre elles principalement au travers de signaux chimiques, comme les hormones. Cependant, de récentes découvertes suggèrent que des signaux mécaniques joueraient un rôle majeur dans la coordination cellulaire. «C’est ce qui nous a poussé à étudier la capacité des cellules à déchiffrer leur environnement physique et à y répondre», explique Bernhard Wehrle-Haller, professeur au Département de physiologie cellulaire et métabolisme de la Faculté de médecine de l’UNIGE. «D’autant que cela pourrait permettre de comprendre comment les cellules cancéreuses utilisent ces mécanismes pour envahir d’autres organes et former des métastases.»


Du mécanique au biologique

Lorsqu’une cellule doit se déplacer, elle «palpe» son environnement à l’aide de protéines situées à sa surface, les intégrines. Quand elle détecte un endroit favorable, un réseau complexe de protéines, nommé adhérence focale, se met alors en place pour former des crampons cellulaires qui arriment la cellule à son environnement. «Mais comment est régulé ce mécanisme d’ancrage? C’est ce que nous avons voulu comprendre», détaille Marta Ripamonti, chercheuse dans le laboratoire de Bernhard Wehrle-Haller et première auteure de l’étude.

En étudiant la paxilline, l’une des nombreuses protéines composant les crampons, l’équipe de recherche a pu lever le mystère. «Nous savions que cette protéine jouait un rôle dans l’assemblage des adhérences focales, mais nous ne nous attendions pas à ce qu’elle en soit le régulateur clé», s’enthousiasme Bernhard Wehrle-Haller. Sans paxilline fonctionnelle, les cellules sont en effet incapables de se fixer, que leur environnement soit favorable ou non. De plus, cette protéine a également pour fonction d’informer la cellule du bon déroulement de l’ancrage, transformant une réponse mécanique en un signal biologique compréhensible par la cellule.


Perturber les crampons pour empêcher les métastases?

Ces travaux in vitro ont permis de souligner le rôle majeur de la paxilline dans le déplacement et l’adhésion des cellules saines. Mais ils pourraient aussi constituer un point de départ pour mieux comprendre le développement des cancers. «Il est en effet probable que les cellules cancéreuses utilisent la paxilline pour trouver un endroit favorisant leur survie. Serait-il possible de bloquer ce mécanisme dans les cellules tumorales pour empêcher la formation de métastases? C’est ce que nous pensons!» conclut Bernhard Wehrle-Haller.


Une vidéo montrant comme les cellules patinent sans leurs crampons est disponible ici.

29 mars 2021

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