Quand la vache révèle son code génétique, une nouvelle ère agricole se profile
Les Universités de Genève (UNIGE) et de Lausanne (UNIL), ainsi que l’Institut Suisse de Bioinformatique (SIB), ont pris part dans un consortium international au projet visant à déchiffrer le génome d’une vache Hereford, la dénommée L1 Dominette. Le séquençage du génome bovin s’achève aujourd’hui, ouvrant ainsi la voie à la recherche d’une production alimentaire plus durable, qui tienne compte des besoins d’une population mondiale en constante augmentation. Selon les chercheurs, qui publient ces résultats aujourd’hui dans la revue Science, ce génome constitue une source majeure d’informations, tant pour l’étude de l’évolution des mammifères que pour la biologie des bovins. En parallèle, une étude complémentaire est publiée sur les bases génétiques du lait des mammifères.
Vaste, l’entreprise a mobilisé plus de 300 scientifiques de 25 pays durant six ans. Les conclusions auxquelles les spécialistes sont parvenus permettront, par exemple, de sélectionner des animaux dont l’empreinte écologique est moindre, en particulier sur le plan des émissions de gaz à effet de serre.
«Bien plus que celui du rat ou de la souris, le génome bovin ressemble à tous les niveaux à celui de l’être humain, en termes de réarrangements génomiques, de gènes communs ou d’identité des séquences protéiques», explique Evgeny Zdobnov, chercheur à l’UNIGE et au SIB et l’un des principaux analystes de cette étude. «La découverte selon laquelle environ 75% des gènes humains sont bien conservés chez les autres mammifères est déterminante. Le génome bovin apportera ainsi un éclairage supplémentaire sur la biologie humaine, en permettant de mettre en évidence la perte ou le gain de certaines familles de gènes chez les hominoïdes. On observe, par exemple, que l’homme a perdu un grand nombre de gènes codant les récepteurs capables de reconnaître les molécules entourant une cellule et d’activer les réponses nécessaires.»
Les recherches menées par les équipes du professeur Alexandre Reymond à l’UNIL et des professeurs Stylianos E. Antonarakis et Evgeny Zdobnov à l’UNIGE leur ont permis de déterminer que le génome de la vache est composé d’au moins 22'000 gènes codant pour l’information nécessaire à la synthèse des protéines, ainsi que de 500 gènes de microARN, qui eux régulent la production de la plupart de ces protéines. La grande majorité des gènes de la première catégorie sont capables de coder pour plusieurs protéines différentes grâce à un mécanisme denommé épissage alternatif. «Le séquençage du génome de la vache a révélé que ce mécanisme de diversification a moins changé au cours de l’évolution qu’on ne le pensait précédemment», déclare Alexandre Reymond, responsable de cette étude.
Il apparaît que les réarrangements chromosomiques sont essentiels à l’acquisition des différences entre les mammifères. Dans la biologie bovine, ils ont une influence sur les gènes impliqués dans les processus d’immunité, de lactation, de digestion et de métabolisme. Ces changements pourraient expliquer notamment l’extraordinaire capacité des bovins à transformer l’herbe et le foin peu nourrissants en une viande et un lait de haute valeur nutritive, capacité exploitée depuis les premiers temps de l’agriculture
par les êtres humains.
Contacts:
prof. Alexandre Reymond, au +41 21 692 39 61
prof. Evgeny Zdobnov, au +41 22 379 59 73
prof. Stylianos Antonarakis, au +41 22 379 57 08
22 avr. 2009