Comment les chromosomes se séparent sans erreur

Publié le

Des scientifiques de l’UNIGE dévoilent comment la séparase, enzyme clé de la division cellulaire, assure une séparation fidèle des chromosomes.

Représentation schématique de la manière dont la séparase (en rose et violet, au second plan) reconnaît l’anneau de cohésine (formé par des protéines en bleu et SSC1 en violet foncé, au premier plan) avant la ségrégation chromosomique. © Margot Riggi

La division cellulaire est un processus d’une précision extrême: à chaque cycle, le matériel génétique doit être réparti de manière parfaitement équitable entre les deux cellules filles. C’est dans ce but que les chromosomes dupliqués, appelés chromatides sœurs, sont temporairement liés par un anneau de cohésine avant d’être séparés. Des chercheurs et chercheuses de l’Université de Genève (UNIGE), en collaboration avec le National Cancer Institute (NCI) et l’Université de Californie à San Francisco (UCSF), ont élucidé le mécanisme par lequel la séparase, une sorte de «ciseaux moléculaires», reconnaît et sectionne la cohésine. Ces travaux, publiés dans la revue Science Advances, permettent de mieux comprendre les erreurs de séparation des chromosomes à l’origine de certaines formes de cancer.

Avant qu’une cellule ne se divise, elle duplique ses chromosomes. Ces copies identiques, appelées chromatides sœurs, restent temporairement liées par la cohésine - un anneau de plusieurs protéines qui maintient les deux chromatides ensemble jusqu’à leur séparation. Lorsque la cellule est prête à se diviser, la séparase, qui agit comme des ciseaux moléculaires, intervient pour couper l’une des protéines de l’anneau, la protéine SCC1. Elle permet ainsi la séparation des chromatides et la répartition équilibrée de l’ADN entre les deux cellules filles. Tout défaut dans ce processus peut compromettre la stabilité du génome et conduire à des pathologies graves, notamment le cancer.

Nos expériences ont montré que ces interactions phosphate–séparase stabilisent le complexe et accélèrent la coupure de SCC1, assurant ainsi une séparation rapide et précise des chromosomes.

L’équipe d’Andreas Boland, professeur au Département de biologie moléculaire et cellulaire de la Faculté des sciences de l’UNIGE, s’intéresse à la façon dont la séparase reconnaît et scinde ses cibles. En collaboration avec le National Cancer Institute (NCI) et l’Université de Californie à San Francisco (UCSF), elle révèle aujourd’hui la structure du complexe formé par la séparase humaine et la protéine SCC1.


Une cartographie inédite de la séparase humaine

À l’aide de techniques de cryo-microscopie électronique (cryo-EM) – une technique de pointe permettant d’observer les échantillons biologiques dans leur état natif avec une résolution proche de l’atome – l’équipe a visualisé l’interaction entre la séparase et SCC1 et identifié, au niveau atomique, les sites de coupure de cette protéine. «Alors que deux sites de coupure de SCC1 avaient déjà été identifiés, notre étude en détermine la localisation exacte», explique Jun Yu, maître-assistant au Département de biologie moléculaire et cellulaire de la Faculté des sciences de l’UNIGE et co-premier auteur de l’étude.


Les analyses biochimiques et structurales ont également révélé plusieurs sites d’«amarrage» à la surface de la séparase, sur lesquels SCC1 vient se fixer avant la coupure. Ces points de contact impliquent cinq zones de liaison aux phosphates qui reconnaissent les résidus phosphorylés de SCC1. «Nos expériences ont montré que ces interactions phosphate–séparase stabilisent le complexe et accélèrent la coupure de SCC1, assurant ainsi une séparation rapide et précise des chromosomes», précisent Sophia Schmidt et Margherita Botto, doctorante et post-doctorante dans le groupe d’Andreas Boland et co-autrices de l’étude.


Comprendre les maladies de la division cellulaire

«Notre travail fournit une base structurale solide pour comprendre comment la séparase est régulée et comment elle reconnaît ses cibles», conclut Andreas Boland qui a dirigé l’étude. Ces découvertes ouvrent la voie aux recherches pour de nouveaux médicaments visant à moduler l’activité de la séparase. Mieux comprendre ses sites d’amarrage pourrait, à terme, permettre de concevoir des inhibiteurs spécifiques, susceptibles de bloquer la division cellulaire incontrôlée – une caractéristique clé du développement du cancer.


Télécharger la version PDF


Contact

Andreas Boland 
Professeur associé
Département de biologie moléculaire et cellulaire
Faculté des sciences
UNIGE
+41 22 379 61 27
Andreas.Boland(at)unige.ch


Illustrations haute définition


Cette recherche est publiée dans
Science Advances

DOI: 10.1126/sciadv.ady9807


 

Nos expert-es

Parler aux spécialistes de toutes disciplines

La photothèque

Découvrir et télécharger les images de l’UNIGE

Les archives

Tous nos communiqués depuis 1996

S'abonner aux communiqués de presse
media(at)unige.ch

Université de Genève

24 rue Général-Dufour

CH-1211 Genève 4

T. +41 22 379 77 96

F. +41 22 379 77 29