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Un défaut de communication lors de troubles psychotiques

Des scientifiques de l’UNIGE démontrent que des perturbations entre les aires cérébrales sont liées à la survenue de la schizophrénie.

 

La communication entre les aires cérébrales est cruciale pour permettre au cerveau de traiter les signaux sensoriels et d’adopter une réponse comportementale appropriée. Or, des dysfonctionnements de ces voies de communication pourraient être fortement corrélés à l’apparition de la schizophrénie. Pour la première fois, une équipe de l’Université de Genève (UNIGE), dans le cadre du Pôle de recherche national Synapsy, a démontré ce phénomène chez l’être humain. En analysant l’activité cérébrale d’enfants, d’adolescent-es et de jeunes adultes avec un risque génétique de la maladie, les chercheurs/euses ont démontré que la diminution de l’activation des ondes gamma, connues pour leur rôle dans la bonne transmission des informations dans le cerveau, était corrélée à l’émergence de symptômes psychotiques avant même l’apparition de troubles véritables. Ces travaux sont à lire dans la revue The American Journal of Psychiatry. Ils permettent d’envisager un diagnostic très précoce de ces maladies.

 

Légende: Des déficits de la maturation de la réponse gamma à la stimulation auditive au cours de l’enfance et de l’adolescence sont prédictifs des risques de développer des troubles psychotiques. ©Vincent Rochas / UNIGE

 

 

Dans le cerveau des mammifères, l’activité électrique des neurones répond à des rythmes oscillatoires détectables par électroencéphalogrammes (EEG). L’activation coordonnée de ces différentes ondes, qui régit par exemple le traitement des stimuli sensoriels ou la consolidation des souvenirs, permet au cerveau de fonctionner correctement. «Nous soupçonnions le rôle déterminant des ondes gamma, la fréquence la plus élevée des rythmes cérébraux, dans l’apparition des symptômes de la schizophrénie», indiquent Stephan Eliez, professeur au Département de psychiatrie, et Christoph Michel, professeur au Département de neuroscience fondamentale, qui ont codirigé ces travaux. «Nous devions cependant encore confirmer que cette anomalie de synchronisation des voies de communication neuronale observées chez la souris existait bien chez l’humain.»

Prédispositions génétiques

Les personnes porteuses d’une microdélétion chromosomique 22q11 ont entre 25% et 30 % de risques de développer une schizophrénie à l’âge adulte. «Elles constituent donc une population à risque particulièrement pertinente pour étudier le développement cérébral de cette maladie», indique Valentina Mancini, doctorante dans le laboratoire de Stephan Eliez et première auteure de cette étude. Les personnes schizophrènes souffrent souvent de capacités réduites de traitement des informations auditives; afin de détecter d’éventuelles perturbation de la communication cérébrale, les scientifiques ont donc mesuré l’activation des ondes gamma suite à un stimulus auditif chez des patient-es 22q11 de tous âges, et chez des personnes sans cette microdélétion.

«Les enfants et adolescent-es à risque génétique de troubles schizophrènes mais sans symptômes visibles présentaient les mêmes schémas de perturbation des ondes gamma que les patient- es souffrant effectivement de la maladie», détaille Vincent Rochas, collaborateur scientifique au laboratoire de Christoph Michel. En outre, une croissance linéaire des oscillations de la bande gamma était observable chez les personnes sans prédisposition génétique à la schizophrénie, montrant une maturation progressive de la communication entre les aires cérébrales lorsque l’on grandit. «Or, cette maturation est absente chez les patient-es 22q11, quel que soit leur âge, ce qui suggère un développement anormal des circuits sous- tendant les oscillations neuronales durant l’adolescence», souligne Valentina Mancini.

Intervenir le plus tôt possible

L’équipe de recherche a également identifié une forte corrélation entre le déficit de l’activation des ondes gamma et la sévérité des symptômes psychotiques, tels que les hallucinations auditives, confirmant ainsi l’existence d’une progression neurobiologique de la maladie. «Ces résultats confirment que ce dysfonctionnement apparaît très tôt», soulignent les auteur-es. «Reste maintenant à identifier le meilleur moment lors du développement de l’enfant pour intervenir en fonction de ce virage pathologique.» Les études sur des souris montrent par ailleurs que des traitements neuroleptiques ciblés parviennent à corriger les dysfonctions neuronales; de plus, les défauts des oscillations gamma identifiés ici pourraient être corrigés grâce à des techniques de neurostimulation non invasives ciblant les régions cérébrales concernées, ouvrant ainsi la voie à de toutes nouvelles perspectives thérapeutiques pour traiter cette maladie souvent dévastatrice.

 

 

Communiqué de presse réalisé par le service de presse de l’UniGE

 

4 mars 2022

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