Post campagne 2025
Saison 2025
On donne tout pour Hou !
Maël et Jérémy (fraîchement diplômé, pour le premier, et en dernière année de Master en égyptologie, pour le second) au rapport : nous avons eu le privilège de participer à la troisième mission archéologique égypto-suisse de l’Université de Genève à Hou, et nous souhaitions vous présenter une journée type de fouille. Notre journée commence à l'Aluminium Hotel, à Aluminium City, où nous logeons. La ville tire son nom d’une immense usine d'aluminium située à proximité : il s’agit de la principale usine de production d'aluminium pour l’Afrique et le Moyen-Orient. La ville dispose même d’un club de foot, dont nous sommes devenus de fervents supporters (photo à l'appui !).
Nous nous réveillons vers 6h, prenons le petit-déjeuner, et partons ensuite pour Hou, plus précisément le souq, situé près du Nil. Ce lieu pittoresque correspond à la place du marché de la ville/terrain de jeux/sanctuaire pour chiens (baptisés par nos soins Tonton, Nounou, Poupou, Kémet, Bat et Baba), ânes (A, lu, mi, nium et SC), chèvres et oiseaux/cour de récréation/déchetterie/plaque tournante pour la vente de poissons-chats, poulets et autres animaux vivants. Nous sommes tout de suite accueillis par les enfants de la ville sur le chemin de l'école, dans une cacophonie de « Hello ! », « What's your name ? » et « I love you ! ».
Notre joyeuse équipe est dirigée par Audrey (Vie, Santé, Force), égyptologue brillante à la carrière fulgurante, puits de savoir infini sur l'Égypte ptolémaïque et romaine (c'est elle qui relit le texte...). Mohamed, notre super reïs, supervise le travail des ouvriers, et facilite le travail de tout le monde par sa perspicacité et son efficacité.
L'équipe se divise ensuite en deux, avec un premier groupe qui reste au souq : Matthieu, architecte et égyptologue, s'occupe de répertorier, d'enregistrer et de photographier les blocs de remploi du grand mur, probablement édifié au début de l'époque islamique (6e-7e siècles) en réutilisant les blocs de pierre des anciens temples de la ville. Lucia, notre céramologue, étudie, quantifie et dessine les tessons, et en profite pour initier les inspectrices à la céramologie. Ahmed, notre restaurateur, travaille à la conservation et à la stabilisation des différents blocs répartis dans la ville. Il est le restaurateur en chef du temple d'Esna, où il travaille en collaboration avec l'Université de Tübingen. Nous avons eu la chance de visiter le temple en sa compagnie durant l'un de nos week-ends.
Le deuxième groupe se rend au fort, situé à 1,7 km du souq, en bordure du désert. Ce site date de l'époque romaine, mais devait être à l'origine une enceinte abritant notamment un temple ptolémaïque. Louis, le topographe, a commencé dès les premiers jours à quadriller la zone et à installer de nombreux points de référence pour mettre en place le système topographique (mais tous les points n'ont pas survécu, maalesh). Ensuite, Giorgia, archéologue, s'est lancée dans la réalisation d'une immense représentation 3D de la zone ainsi que d'une orthophotographie et d'un modèle numérique de terrain. Munie d'une longue perche et d'un appareil photo 360°, elle a parcouru collines et vallons de la surface de près d'un hectare et demi. Son aide a aussi été précieuse dans l'initiation à la documentation des fouilles. De plus, durant deux jours, Mohamed, ingénieur en génie civil et son assistant Ahmed, sont venus avec un GPS pour mesurer des trucs (on n’a jamais vraiment compris ce qu’ils faisaient…).
Durant cette première campagne, nous avons ouvert une unité de fouilles dans la zone nord de l'enceinte où devait probablement se trouver la porte principale. La surface, mesurant 5 m sur 6, est une caverne d'Ali Baba ! Couche après couche, nous avons pu déterminer plusieurs niveaux d'occupation. Fragments de poterie et de blocs décorés, os d'animaux, éclats de verre et briques crues (que nous avons toujours hâte de sortir de terre !) sont notre quotidien. Chaque couche réserve son lot de surprises et d'émerveillement. Ces découvertes sont toutefois synonymes de destruction et un méticuleux travail de documentation est primordial, car il faut détruire les couches pour dévoiler les nouvelles. Ainsi, formulaires en main, nous avons enregistré la progression des fouilles, notamment les niveaux des différentes strates. Cependant, notre rôle ne se limite pas seulement à cela : régulièrement, nous saisissons notre truelle pour mettre la main à la pâte, et aider les ouvriers, Selman (ouvrier spécialisé, originaire de la ville de Coptos/Quft), Ahmed, Ali, Mahmoud et Mahmoud, qui travaillent au déblaiement de la zone. Durant la pause, vers 11h, nous mangeons des sandwichs égyptiens typiques aux taameya (falafels locaux), frites et autres légumes. Le travail en extérieur s'arrête à 14h, et nous rentrons ensuite à l'hôtel. La deuxième partie du travail commence : il faut répertorier les photos et les enregistrer dans des bases de données, lancer le programme de photogrammétrie, et collecter toutes les données du travail de la journée – un travail de l’ombre qui nous échappe pour l’instant.
Vers 18h, nous nous rendons au restaurant du club de foot, l'Aluminium Sports Club (précisément dans le VIP Lounge), pour le repas du soir, composé de spécialités égyptiennes à la demande. Le repas se termine par un yansoun, le thé à l'anis égyptien, et parfois même avec des basboussa, une pâtisserie traditionnelle à base de semoule et de sucre (beaucoup de sucre). Nous avons même testé le parc d'attractions local, et failli perdre Maël sur le manège tournant et Jérémy sur les autos tamponneuses.
Le vendredi est notre jour de congé, et donc l'occasion de faire des visites à Louqsor, située à 1h30 de route de Hou. Nous y avons visité de nombreux sites : le temple de Louqsor, les temples funéraires de Médinet Habou et de Deir el-Bahari, la Vallée des Rois, le village de Deir el-Médina et plusieurs tombes de la Vallée des Nobles. Nous avons aussi assisté à une conférence en lien avec Deir el-Médina à la Maison Allemande, présentée notamment par Dominique Lefèvre, chargé de cours à l'Université de Genève.
Nous sommes très reconnaissants d'avoir pu participer à cette mission, et remercions chaleureusement chaque membre de l'équipe pour tout ce qu'ils et elles nous ont transmis.
Shoukran !