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Le hasard est une loi qui voyage incognito

– Groupe de probabilités et statistiques, Section de mathématiques; © Jacques Erard –

 

Peut-on prévoir le hasard? Existe-t-il des règles qu’il est tenu de respecter? et si oui, quelles sont-elles? Que de questions intéressantes à poser à un probabiliste!

 

Si la théorie des probabilités a été originellement motivée par l’analyse des jeux de hasard, elle occupe aujourd’hui une place centrale dans la plupart des sciences. Tout d’abord, de par ses applications pratiques : en tant que base des statistiques, elle permet l’analyse des données recueillies lors d’une expérience, lors d’un sondage, etc. ; elle a également conduit au développe- ment de puissants algorithmes stochastiques pour résoudre des problèmes inabordables par une approche déterministe ; elle possède en outre de nombreuses applications directes, par exemple en fiabilité, ou dans les assurances et la finance. D’un côté plus théorique, elle permet la modélisation de nombreux phénomènes, aussi bien en sciences naturelles (physique, chimie, biologie, etc.) qu’en sciences humaines (économie, sociologie, par exemple) et dans d’autres disciplines (médecine, climatologie, informatique, réseaux de communication, traitement du signal, etc.). Elle s’est même révélée utile dans de nombreux domaines de mathématiques pures (algèbre, théorie des nombres, combinatoire, etc.) et appliquées (EDP, par exemple). Finalement, elle a acquis une place importante en mathématiques de par son intérêt intrinsèque, et, de par sa versatilité, possède un des spectres les plus larges en mathématiques, allant des problèmes les plus appliqués aux questions les plus abstraites.

Le concept de probabilité est aujourd’hui familier à tout un chacun. Nous sommes constamment confrontés à des événements dépendant d’un grand nombre de facteurs hors de notre contrôle ; puisqu’il nous est impossible dans ces conditions de prédire exactement quel en sera le résultat, on parle de phénomènes aléatoires. Ceci ne signifie pas nécessairement qu’il y ait quelque chose d’intrinsèquement aléatoire à l’œuvre, mais simplement que l’information à notre disposition n’est que partielle. Quelques exemples : le résultat d’un jeu de hasard (pile ou face, jet de dé, roulette, loterie, etc.) ; la durée de vie d’un atome radioactif, d’un individu ou d’une ampoule électrique ; le nombre de gauchers dans un échantillon de personnes tirées au hasard ; le bruit dans un système de communication ; la fréquence d’accidents de la route ; le nombre de SMS envoyés la nuit du 31 décembre ; le nombre d’étoiles doubles dans une région du ciel ; la position d’un grain de pollen en suspension dans l’eau ; l’évolution du cours de la bourse ; etc.

Le développement d’une théorie mathématiques permettant de modéliser de tels phénomènes aléatoires a occupé les scientifiques depuis plusieurs siècles. Motivés initialement par l’étude des jeux de hasard, puis par des problèmes d’assurances, le domaine d’application de la théorie s’est ensuite immensément élargi. Les premières publications sur le sujet remontent à Cardano[1] avec son livre Liber De Ludo Aleæ (publié en 1663, mais probablement achevé en 1563), ainsi qu’à Kepler et Galilée. Toutefois, il est généralement admis que la théorie des probabilités débute réellement avec les travaux de Pascal et de Fermat. La théorie fut ensuite développée par de nombreuses personnes, dont Huygens, J. Bernoulli, de Moivre, D. Bernoulli, Euler, Gauss et Laplace. La théorie moderne des probabilités est fondée sur l’approche axiomatique de Kolmogorov, basée sur la théorie de la mesure de Borel et Lebesgue. Grâce à cette approche, la théorie a alors connu un développement très rapide tout au long du XXe siècle.

 

Introduction du polycopié du cours de Probabilité et statistiques, Yvan Velenik, UNIGE, 2017.

 

[1] Girolamo Cardano (1501, Pavie - 1576, Rome), parfois connu sous le nom de Jérôme Cardan, mathématicien, philosophe et médecin italien. Féru d’astrologie, on dit qu’il avait prévu le jour de sa mort, mais que celle-ci ne semblant pas vouloir se produire d’elle-même, il se suicida afin de rendre sa prédiction correcte

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2 nov. 2017

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