Un fondateur de la Ligue du Gothard part pour quatre mois aux États-Unis : M. Denis de Rougemont nous dit… (23 août 1940)a b
J’ai tenté de retarder mon départ de quelques mois, sinon de quelques semaines… ; mais c’était impossible. Pendant les quatre mois que durera mon voyage, je suivrai de loin l’évolution de la « Ligue du Gothard » qui est mon idée et celle de mon ami Spoerri, de Zurich, et à laquelle je tiens.
Elle suit d’ailleurs son chemin malgré les torrents d’injures dont elle a été abreuvée et vous pouvez être assuré qu’elle n’a enregistré jusqu’à ce jour aucune défection, en dépit de ce qu’on a dit. D’ailleurs, je viens de terminer deux brochures qui vont paraître prochainement et qui expliquent les desseins de notre groupement : réunir — non point dans un parti, car nous nous défendons de vouloir l’être jamais — ce qui doit logiquement représenter la Suisse d’aujourd’hui. Et travailler au bien de la Suisse. Le comité directeur de la Ligue est formé de dix hommes dont le plus jeune a 26 ans et le plus âgé 44. C’est vous dire que nous voulons mettre la jeunesse au service du pays. À côté de ce comité directeur existe une sorte de sénat composé de personnes d’expérience qui seront là pour nous conseiller.
Aujourd’hui, la « Ligue du Gothard » est entrée dans une phase active : nous sommes en pleine organisation des équipes cantonales formées de représentants de tous les groupements qui ne sont pas des partis.
Nous attachons, vous le voyez, une très grande importance au fait d’avoir la jeunesse avec nous.
C’est que nous nous sommes rendu compte que les hommes de 35 ans et moins ne sont pas dans les partis, parce que la politique leur a paru jusqu’à présent un jeu déplaisant… ; cela équivaut à dire que la moitié des citoyens suisses ne s’intéressaient pas aux affaires du pays. Il fallait se hâter de les grouper, sinon l’idéologie naziste ou l’idéologie communiste les eût certainement embrigadés tôt ou tard.c