Journal n°113

Uni Carl Vogt expose le «premier calculateur de l’humanité»

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Un riche Romain acquiert une machine astronomique sur un marché d’Asie mineure. Expédié en Europe par bateau, le mécanisme passe deux mille ans dans la Méditerranée avant d’être redécouvert

Un jour de printemps 1900, des pêcheurs d’éponges découvrent une épave antique tout près des côtes de la petite île grecque d’Anticythère. Quelques mois plus tard, l’Etat grec organise la première grande expédition archéologique sous- marine des temps modernes.

L’épave est datée d’environ 60 av. J.-C. tandis qu’une grande partie de sa cargaison est antérieure au IIe siècle av. J.-C. Parmi les trouvailles remontées à la surface, un petit objet en bronze, comprenant des rouages et des inscriptions, est daté de 250 à 200 av. J.-C. Appelé «la machine d’Anticythère», il est classé dans la grande famille des instruments astronomiques.

Les spécialistes ont depuis déterminé qu’il s’agit d’une machine à calculer astronomique et calendaire, considérée comme le premier calculateur de l’humanité.

Une manivelle sur le côté de la machine permet de faire tourner simultanément toutes les aiguilles à l’aide des engrenages et des axes qui les relient. Ainsi, en choisissant une date dans le calendrier de 365 jours du cadran de l‘appareil, les autres aiguilles donnent des informations astronomiques.

Mécanisme ingénieux

Par exemple, l’usager peut immédiatement se rendre compte de la correspondance entre les calendriers lunaire et solaire, de la position et la phase de la Lune ainsi que des éclipses susceptibles d’avoir lieu à une date précise. Inversement, en plaçant une aiguille sur un phénomène astronomique, il est possible de voir la date à laquelle ce phénomène a eu ou aura lieu.

La machine d’Anticythère est faite de parties mécaniques mais comporte aussi des inscriptions gravées sur certaines de ses surfaces. «C’est une sorte de manuel d’accompagnement pour un objet de luxe, un gadget, destiné à souligner la richesse et l’importance de son propriétaire», explique le professeur Lorenz Baumer, directeur de l’Unité d’archéologie classique. Ce spécialiste du transport d’œuvres d’art dans l’Antiquité organise ainsi une exposition autour de cet objet peu commun, présenté à Uni Carl Vogt.

Sauvé des eaux

Platon comme Cicéron ont témoigné des connaissances astronomiques des Grecs de l’Antiquité. Le traité scientifique le plus ancien qui nous soit parvenu date de 330 av. J.-C. et porte sur la sphère céleste. Le sujet sera à nouveau traité trente ans plus tard par Euclide. La machine d’Anticythère constitue la preuve que les civilisations antiques ont fabriqué des modèles réduits de leur cosmos. Plusieurs textes anciens mentionnent des mécanismes similaires. Cependant, aucun n’a survécu jusqu’à notre époque, le bronze étant un matériel souvent recyclé. Paradoxalement, c’est donc grâce à un naufrage que la machine d’Anticythère a été sauvée.

| jusqu’au 2 mars |

L’énigme d’Anticythère

lundi ‒ vendredi: 7h30 à 19h

Salle d’exposition de l’UNIGE

66 bd Carl-Vogt