Effondrement de la lecture: symbole d’une fracture attentionnelle au sein d’une société qui ne sait plus se concentrer ?

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Le précédent article de notre série sur l’apprentissage à l’heure de l’intelligence artificielle proposait quelques pistes concrètes – des « pratiques attentionnelles » validées scientifiquement – pour aider chacun-e à préserver et à développer sa capacité de concentration. Dans un échange avec Le Temps autour de cette thématique, j’ai évoqué les risques d’une délégation accrue de nos tâches cognitives à l’intelligence artificielle pour nos compétences. Effectivement, si l’on exerce une compétence de moins en moins souvent, ne risque-t-elle pas de disparaître ?

Cette réflexion est au cœur de mon argumentaire sur le fait que la capacité de concentration en profondeur est amenée à devenir — si elle ne l’est déjà — la super- ou méta-compétence du 21e siècle. Le présent article se focalise sur l’effondrement de la lecture comme symptôme et symbole de la fracture attentionnelle qui s’installe dans nos sociétés.  

Se reconnecter avec la lecture fait partie des solutions pour entrainer notre capacité de concentration et préserver notre attention. 


1. Effondrement de la lecture: mythe ou réalité ? 

Nous sommes nombreux/ses à admettre ne plus « prendre le temps de lire » ou « de terminer un livre », alors même que nous « avons toujours adoré lire ». Mais l’hypothèse d’un déclin de la lecture profonde et critique ne peut reposer uniquement sur des impressions. Surtout, cette inquiétude n’a rien de nouveau. Lors de mes recherches dans le cadre du présent article, un article du Los Angeles Times Magazine m’a interpellé. Titré « The Death of Reading: Will a Nation that Stops Reading Eventually Stop Thinking ? » il semblait faire le lien entre présence croissante des écrans, recul de la lecture et affaiblissement de l’esprit critique. Or la date m’a surpris: 22 septembre 1991. Autrement dit, la crainte que la technologie bouleverse nos habitudes culturelles et menace une activité perçue comme noble — la lecture — est ancienne. 

Il est fascinant de se pencher sur le constat fait à cette époque concernant l'impact de l’arrivée de toutes sortes d’écrans dans la vie des individus, qui en dit long sur l’évolution de nos modes de vie et de notre approche à la lecture: 

« Nos foyers font difficilement de la place pour la lecture. (…) Nos anciens îlots de tranquillité — bibliothèques, bureaux, salons — ont été envahis par les écrans plats et les Nintendos. (…) On les appelle “salons familiaux” ou, plus exactement, “salons télé”. Et nos architectes semblent avoir renoncé à nous fournir des bibliothèques ; à la place, ils conçoivent des “centres de divertissement” » (Stephens, 1991).1 

Lorsque l’on s’interroge sur la disparition éventuelle de l’activité de lecture dans nos sociétés plusieurs questions se posent: D’abord, est-ce vraiment une question de volume/de quantité de lecture ? Si l’on compte le nombre de mots lus par jour, il est possible que nous lisions autant ou davantage qu’il y a 15 ans mais ailleurs et autrement: papier et écrans, romans et essais, mais aussi SMS, courriels, posts et notifications. 

Quid de la qualité de la lecture ? Parle-t-on de lecture continue et linéaire, ou de lecture éclatée qui nous fait passer d’un courriel à WhatsApp, puis à un article d’actualité, avant un rapport au format PDF ? Ces pratiques n’engagent pas les mêmes processus cognitifs. La première favorise l’attention soutenue, l’inférence et la construction de schémas cognitifs stables ; la seconde mobilise plutôt l’orientation rapide, le tri des donnéeset le multitâche, au risque d’une compréhension plus superficielle et d’une rétention de l’information moins efficace.  

Enfin, quels sont les enjeux ? Au-delà de l’école et de l’aptitude à lire (sujet majeur à traiter à part), le recul de la lecture implique des enjeux culturels et politiques: esprit critique, contrat social et pédagogique, vivre-ensemble. C’est sur ces dimensions sociétales que je me concentre ici. 


S’asseoir avec un livre aujourd’hui: pas assez stimulant ? 

On entend souvent: « Je lis toute la journée au travail, alors le soir je n’ai plus d’énergie pour lire. » Dire que « les gens ne lisent plus » est inexact: la plupart des professions tertiaires impliquent la lecture de milliers de mots par semaine. Mais cette lecture-là, plutôt instrumentale, vise l’efficacité, la sélection d’informations utiles, la synthèse rapide. Elle est fragmentée, interrompue, pilotée par des objectifs immédiats. 

Ceci n’est pas seulement lié à une incapacité individuelle à se concentrer: c’est un effet du rythme du travail, du flux d’informations, des interfaces. Le virage numérique favorise la lecture par zapping — mots-clés, paragraphes courts, visuels — au détriment d’une lecture linéaire et soutenue. Même à l’école, les supports se rapprochent souvent d’un format « diapo ». 

Cette adaptation n’est pas mauvaise en soi: savoir trier rapidement l’information est essentiel pour ne pas être submergé par l’abondance d’informations auxquelles nous avons accès aujourd’hui. Le problème survient quand ce mode devient hégémonique, contaminant nos lectures sans finalité utilitaire (un roman en vacances, par exemple). Dix pages descriptives deviennent alors « trop longues » et des classiques aimés plus jeunes paraissent soudain lents, « inefficaces », moins stimulants. 

Ce glissement n’est pas qu’une question de goût. Comme l’a montré Nicholas Carr dans The Shallows (2010), Internet réoriente notre traitement de l’information vers une lecture superficielle et fragmentée, souvent accompagnés d’images et de vidéos, au détriment de la lecture profonde et contemplative. 


La lecture pour le plaisir: une pratique en déclin ? 

Un bon indicateur est le temps consacré à la lecture pour le plaisir. Les tendances internationales suggèrent un recul de la lecture prolongée, surtout chez les jeunes, au profit d’activités en ligne (Buchholz, 2024). Au Royaume-Uni, en 2025, 32,7 % des 8–18 ans déclarent aimer lire pendant leur temps libre — plus bas niveau depuis 2005. La baisse du plaisir de lire a été particulièrement marquée chez les enfants du primaire et chez les garçons, en particulier ceux âgés de 11 à 16 ans (National Literacy Trust, 2025). Maryanne Wolf (2018, pp. 203-204) alerte: la disparition de la lecture soutenue menace des capacités que cette pratique cultive de façon unique: empathie et prise de perspective, pensée analytique, réflexion critique, métacognition et discernement éthique.  

Dans la dernière enquête du Centre national du livre en France, un nouveau motif est apparu en réponse à la question « Pourquoi ne lisez-vous pas davantage de livres aujourd’hui ? »: « Je n’arrive pas à me concentrer suffisamment pour lire des livres » (Mercier, Tétaz & Leray, 2025, p. 42). La capacité de concentration est identifiée comme frein explicite et signale que l’obstacle n’est plus seulement le temps disponible, mais la qualité attentionnelle nécessaire à la lecture longue. 

Des variations existent selon les pays et les âges, mais la convergence des sources est notable: la lecture pour le plaisir décline, et les loisirs en ligne montent. Les comparaisons restent toutefois délicates en raison des méthodes (définitions hétérogènes de « lire », biais d’échantillonnage, désirabilité sociale) et parce que beaucoup de lectures numériques informelles échappent aux radars. 


Le cas suisse: stabilité apparente, pratiques en mutation 

En Suisse, la photographie est plus stable: en 2019, 83% des 15+ ont lu au moins un livre (e-books compris) sur l’année, près de 30% plus d’un livre par mois ; 78% ont lu pour les loisirs (OFS, 2020, p. 23). Les femmes lisent davantage pour le loisir (85%) que les hommes (71%), alors que la lecture croît avec l’âge et le niveau de formation (OFS, 2020, p. 24). Les e-books ont fortement progressé entre 2014 et 2019 et diffusent à travers sexes et classes d’âge (OFS, 2020, p. 25). Cette stabilité apparente en Suisse doit être modérée par le fait que les dernières données publiées datent de 2020. L’OFS indique sur sa page dédiée à l’état et l'évolution des pratiques culturelles et de loisirs en Suisse que « la prochaine enquête aura lieu en 2024 », suggérant une publication prochaine de données plus récentes. Celles-ci permettront de vérifier si les pratiques de lecture sont restées stables ces 5 dernières années.  


Le médium fait quelque chose à la lecture 

Par ailleurs, la stabilité apparente quant à la lecture en Suisse masque une évolution qualitative des supports et des contextes de lecture. Or, le support n’est pas neutre. Les études de Maryanne Wolf (2018) et de Naomi S. Baron (2015) suggèrent que la lecture sur écran favorise un traitement plus superficiel et une mémorisation plus faible que sur papier. Les caractéristiques physiques comptent: la stabilité spatiale du texte imprimé facilite l’orientation et l’encodage en mémoire, quand l’écran et ses éléments associés: scroll infini, hyperliens, notifications potentielles, incitent à la fragmentation (Baccino, 2011). McLuhan (1964) l’avait formulé ainsi: « le médium est le message ». 


La quête de la connexion permanente 

Dans Stolen Focus (2022), Johann Hari relate sa rencontre avec un critique littéraire aguerri, et leur échange où celui-ci avoue ne plus parvenir à se plonger dans un livre, tant l’emprise du « monde connecté » est forte. Yves Citton (2014) parle d’« écologie de l’attention »: notre attention devient une ressource disputée et monétisée. Katherine Hayles (2007) distingue « deep attention » et « hyper attention » — cette dernière, favorisée par les environnements numériques, s’accommode mal des textes longs.  

D’où des propositions, parfois radicales, pour réguler l’exposition aux écrans, signes d’une prise de conscience politique de l’enjeu attentionnel. Le plaidoyer de Najat Vallaud-Belkacem en faveur du « rationnement d'internet » (2024) s'inscrit dans cette perspective, alors que la campagne pour la lecture « Éteignez votre portable. Allumez votre cerveau » durant l’été 2025 en France, en collaboration avec le dessinateur genevois Philippe Chappuis (dit Zep), symbolise une certaine prise de conscience de la part du politique.2 


Place du livre à l’école et à la maison: point de départ ou point de non-retour ? 

L’environnement familial pèse lourd: plus la lecture a occupé une place importante dans l’enfance, plus on lit à l’âge adulte (écart marqué entre « grands lecteurs » et « non-lecteurs ») (Mercier, Tétaz, & Leray, 2025, p. 40). Bourdieu (1979) l’a théorisé: l’habitus culturel se transmet, structure les goûts et façonne précocement les dispositions à lire, en valorisant certains genres, formats et usages de la lecture au détriment d’autres. Ainsi, les inégalités d’accès aux ressources symboliques et matérielles (capital scolaire, médiations familiales, bibliothèques) se convertissent en inégalités de pratiques et de réussite scolaires liées à la lecture.  

L’école joue un rôle clé, mais l’approche scolaire peut, si elle est trop contrainte, décourager le plaisir (Pennac, 1992). Dans la perspective du « double seuil » (Maulini et al, 2025), un excès de décomposition, de simulation ou de secondarisation fait basculer l’enseignement dans la contre-productivité: le formalisme étouffe alors l’entrée dans les usages réels de la lecture. La transmission du savoir doit donc rester en tension féconde entre formalisation et mobilisation, pour que les élèves accèdent effectivement aux capabilités de lire, comprendre et discuter en contexte. L’enjeu est de renforcer simultanément compétences et désir de lire, alors que les écrans rivalisent d’attractivité. Au-delà des salles de classe, des rendez-vous symboliques structurent un imaginaire commun de la lecture: la Journée mondiale du livre (UNESCO, 23 avril) en est un exemple, utile pour mobiliser écoles, bibliothèques et familles autour d’actions concrètes. 


2. Lecture, contrat social et démocratie 

Des problèmes complexes qui ne tiennent pas en 280 caractères 

Si la lecture profonde recule, c’est notre capacité collective à appréhender les problèmes complexes qui vacille. Les défis contemporains — climat, inégalités, santé publique, conflits armés, intelligence artificielle — exigent nuance, contexte, et temps dédié. Dans un monde où l'information circule principalement sous forme de messages courts et fragmentés, comme les tweets limités à 280 caractères, notre capacité collective à appréhender des problèmes complexes se trouve compromise. La culture du fragment et de l’immédiat pousse en effet vers la réaction et la gratification instantanée plutôt que la réflexion. 

Robert Putnam avait fait le lien entre « lecteurs réguliers »

3 et participation active à la vie civique (Putnam, 2000, p. 94 et p. 218). La démocratie suppose des citoyens et citoyennes capables de s’informer de manière autonome et critique. La lecture de textes longs, argumentés, entraîne à cela (Snyder, 2017). Historiquement, l’essor de l’imprimé et de la littératie a façonné l’espace public critique tel que l’a analysé Jürgen Habermas dans sa généalogie de l’espace public bourgeois, où la circulation des imprimés et la discussion rationnelle ont rendu possible une opinion publique délibérative.  

Martha Nussbaum (2010) voit dans la littérature un entraînement à l’imagination narrative: la capacité de se représenter la vie intérieure d’autrui, ses circonstances et ses vulnérabilités. Elle indique que cette faculté est cruciale pour la délibération démocratique et le jugement éthique, car elle aide à comprendre des points de vue divergents, à reconnaître la dignité égale des personnes et à raisonner de manière plus nuancée sur des conflits de valeurs. Les données convergent: la fiction littéraire améliore la capacité humaine à comprendre que d’autres personnes ont des croyances et des désirs, et que ceux-ci peuvent différer des siens (« Theory of Mind » de Kidd & Castano, 2013), favorisant ainsi le dépassement des clivages.  

Neil Postman (1985) avait anticipé le risque d’une culture du divertissement court-circuitant l’argumentation.4 Le fonctionnement algorithmique des plateformes reconfigure à présent nos habitudes: elle privilégie les formats courts et émotionnels (Wu, 2016), encourage le flux et la dispersion (Carr, 2010/2020), et rend difficile l’attention soutenue nécessaire à la lecture et à la compréhension d’arguments complexes. Dans son livre « De la tyrannie: Vingt leçons du XXe siècle » (2017) Snyder conseille: « faites l’effort de vous écarter d’internet. Lisez des livres. »5  


3. La lecture comme symbole et comme remède 

La lecture est victime de la crise attentionnelle, mais est aussi un antidote. L’écrivain Joël Dicker le souligne:  

« Notre cerveau se construit comme un muscle… par ce travail de lecture profonde… il faut se concentrer… c’est comme cela que l’on développe du sens critique, c’est comme cela que l’on développe de l’empathie, c’est comme cela que les générations qui lisent sont capables de faire face à des fake news plus que les autres… on construit la démocratie parce qu’on lit, parce qu’on est tourné vers l’autre et donc lisons, c’est un des actes les plus importants qu’on puisse faire aujourd’hui, et faisons lire les plus jeunes aussi » (C à vous, 27 février 2024). 

Cette capacité d’immersion que procure la lecture littéraire constitue un antidote puissant à la dispersion attentionnelle. Dans un monde saturé de stimulations, l’expérience de concentration soutenue qu’offre un livre devient paradoxalement une forme de liberté et de résistance aux injonctions de l’économie de l’attention.  


Conclusion: Vers une écologie de la lecture 

Le recul de la lecture profonde signale une transformation de notre rapport au savoir. Dans un monde où l’information circule surtout sous forme de messages instantanés, courts et fragmentés, notre capacité collective à appréhender les problèmes complexes se trouve fragilisée. Or la compréhension des grands défis contemporains exige une pensée nuancée et contextualisée que seule la lecture attentive, avec la lenteur et la densité des textes longs, peut nourrir.  

Par « écologie de la lecture », on désigne une approche systémique qui ne considère plus la lecture comme un geste isolé (un-e lecteur/trice face à un texte), mais comme un écosystème. Ce dernier est le produit de milieux, d’acteurs et de conditions matérielles et attentionnelles: supports (papier, écrans), espaces (maison, école ou autre lieu d’études, lieux de travail, transports), temporalités (fragmentées ou continues), infrastructures éditoriales et numériques (bibliothèques, plateformes, algorithmes) et leurs effets sociaux-politiques et environnementaux. La notion d’écosystème fait sens pour analyser le recul de la lecture profonde parce qu’elle met en lumière les interdépendances qui façonnent nos capacités de concentration et de compréhension: l’économie de l’attention et ses notifications, le choix de design des interfaces, la raréfaction des temps longs, les processus algorithmiques, mais aussi les politiques d’accès et leurs défaillances.  

Penser en termes d’écologie de la lecture permet également d’identifier des leviers à tous les niveaux: personnels (rituels, hygiène attentionnelle), institutionnels (espaces, horaires, médiation culturelle), et politiques (éducation, inclusion, législation), afin de restaurer les conditions propices à la préservation et au développement de la capacité de lire en profondeur, dans la durée et avec plaisir. D’où trois axes d’action: 

Au niveau individuel: instaurer des rituels de lecture pour le plaisir.  

Au niveau éducatif: repenser l’apprentissage de la lecture à l’ère numérique, sans sacrifier l’attention soutenue. 

Au niveau sociétal et politique: affirmer la lecture comme acte politique, fondement de la délibération et de la vie démocratique, plutôt que comme un loisir culturel parmi d’autres. 

À partir des constats posés et des données apportées par la recherche, cette « écologie de la lecture » peut être déclinée sur plusieurs terrains complémentaires. Il s’agit de retisser des liens entre pratiques individuelles, pédagogies et conception des environnements d’information. Les pistes suivantes combinent leviers culturels, éducatifs et techniques, et peuvent être modulées selon les contextes: 

  1. Mettre la protection de l’attention et de la lecture au cœur des politiques publiques: renforcer la place de la lecture profonde à l’école, créer des espaces propices à la lecture (salles ou lieux silencieux, confortables et bien éclairés) et soutenir durablement bibliothèques et médiathèques. 
  2. Cultiver la bi-alphabétisation: suivant Wolf (2018, pp. 168-171), assumer et cultiver un « cerveau de lecture » capable d’alterner entre lecture rapide (numérique) et lecture profonde (papier ou numérique sans distractions). 
  3. Former à la littératie des algorithmes: enseigner comment circulent les textes en ligne ; encourager des alternatives techniques qui favorisent la diversité des sources plutôt que l’engagement maximal. 
  4. Créer des espaces non algorithmiques: clubs et festivals de lecture, jeux de société, d’échecs, interfaces conçues pour la concentration (modes lecture, notifications coupées, téléphones rangés, etc.). 
  5. Déployer des pédagogies du désir de lire: articuler exigence et plaisir, choix guidés, temps longs, pratiques de lecture partagée et à haute voix (ex: lectures publiques, lectures théâtralisées, pratique du Spoken Word, etc.) 

La crise de l’attention érode notre capacité à nous concentrer – véritable méta-compétence du XXIème siècle. Dans un monde de plus en plus complexe, fragmenté et médiatisé par les algorithmes et l’intelligence artificielle où l’information abonde mais où l’attention se raréfie, savoir lire en profondeur devient un bien commun à protéger. Page après page, nous regagnons du temps long. Aborder la lecture profonde comme une compétence à exercer et à entrainer – dix pages par jour, des périodes sans notifications, des clubs de lecture au travail ou à l’école – c’est investir à la fois dans notre lucidité individuelle et dans la qualité de notre vie démocratique.  

 

Bibliographie 

Baccino, T. (2011). La lecture sur écran. PUF. 
Baron, N. S. (2015). Words onscreen: The fate of reading in a digital world. Oxford University Press. 
Bourdieu, P. (1979). La distinction : Critique sociale du jugement. Les Éditions de Minuit. 
Buchholz, K. (2024, April 23). Reading For Pleasure Declines in Popularity. Statista.
Carr, N. (2010). The shallows: What the Internet is doing to our brains. W. W. Norton. 
Citton, Y. (2014). Pour une écologie de l’attention. Seuil. 
C à vous. (2024, 27 février). Joël Dicker — entretien [Émission de télévision]. France 5. Voir « Le hold-up littéraire de Joël Dicker » (9:44-10:15). 
Habermas, J. (1993). L’espace public : Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise (M. B. de Launay, Trad.). Payot. (Ouvrage original publié en 1962) 
Hari, J. (2022). Stolen focus: Why you can’t pay attention—and how to think deeply again. Crown. 
Hayles, N. K. (2007). Hyper and deep attention: The generational divide in cognitive modes. Profession, 187–199. 
Hayles, N. K. (2012). How we think: Digital media and contemporary technogenesis. University of Chicago Press. 
Kidd, D. C., & Castano, E. (2013). Reading literary fiction improves theory of mind. Science, 342(6156), 377–380.
McLuhan, M. (1964). Understanding media: The extensions of man. McGraw-Hill. 
Mercier, M., Tétaz, A., & Leray, A. (2025). Les Français et la lecture : Résultats 2025. Centre national du livre (CNL).   
Maulini, O., Perrenoud, M. & Vincent, V. (mise à jour 03.09.2025). Métier d'enseignant.e et évolutions de l'école. Glossaire évolutif. “Double Seuil”. Université de Genève, Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation.  
National Literacy Trust. (2025). Children and young people’s reading in 2025.   
Nussbaum, M. C. (2010). Not for profit: Why democracy needs the humanities. Princeton University Press. 
Office fédéral de la statistique (OFS). (2020). Pratiques culturelles et de loisirs en Suisse.   
Pennac, D. (1992). Comme un roman. Gallimard. 
Postman, N. (1985). Amusing ourselves to death: Public discourse in the age of show business. Viking. 
Putnam, R. D. (2000). Bowling alone: The collapse and revival of American community. Simon & Schuster. 
Stephens, M. (1991, September 22). The death of reading: Will a nation that stops reading eventually stop thinking? Los Angeles Times Magazine. 
Snyder, T. (2017). On tyranny: Twenty lessons from the twentieth century. Tim Duggan Books. 
UNESCO. (s.d.). Journée mondiale du livre et du droit d’auteur (23 avril).  
Wu, T. (2016). The attention merchants: The epic scramble to get inside our heads. Knopf. 
Wolf, M. (2018). Reader, come home: The reading brain in a digital world. Harper.

 

1 Traduction de l’anglais au français par l’auteur du présent article.

2 Voir Centre national du livre

3 Putnam a notamment en tête les personnes qui lisent le journal régulièrement (« newpaper readers »)  

4 Cet extrait du livre de Postman est quelque peu prophétique : « When a population becomes distracted by trivia, when cultural life is redefined as a perpetual round of entertainments, when serious public conversation becomes a form of baby-talk, when, in short, a people become an audience and their public business a vaudeville act, then a nation finds itself at risk; culture-death is a clear possibility (p. 155). 

5 Traduction de l’auteur du présent article de l’anglais original. Snyder insiste plus loin : « …alors enlevez les écrans de votre chambre et entourez-vous de livres ». (“So get the screens out of your room and surround yourself with books”), p. 51. 

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